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Chroniques
Les divorces d'Al Joumhouri
29/12/2013 | 1
min
Les divorces d'Al Joumhouri
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Par Sofiene Ben Hamida

Le comité central d'Al Joumhouri, réuni à Sousse, a annoncé qu’il quitte l’UPT, une alliance qui n’a jamais donné l’impression de bien se porter depuis sa création et qui battait franchement de l’aile depuis quelques mois.
Le vote du comité central d'Al Joumhouri vient donc de finaliser une rupture à peine voilée entre les deux composantes essentielles de l’UPT, en l’occurrence Al Joumhouri et Nidaa. Et même si le communiqué final du comité central insiste sur le renforcement de l’autre alliance, le Front du salut, on voit difficilement comment ce front pourrait être efficace avec des composantes qui ont démontré une incapacité à collaborer et à coexister ? Triste perspective non seulement pour l’opposition qui donne une nouvelle preuve de son effritement, mais aussi pour les Tunisiens et le pays à quelques mois des élections qu’on voulait salvatrices.

Pour comprendre cette rupture, il faudrait remonter à l’annonce du président de Nidaa qu’il pense présenter sa candidature aux prochaines élections présidentielles, une annonce très mal digérée par le chef d'Al Joumhouri. Ensuite il y a eu les rencontres répétées entre Béji Caïd Essebsi et Rached Ghannouchi à Paris ou à Alger provoquant moult critiques de la part d’Al Joumhouri qui a annoncé son refus de tout partage du pouvoir entre les deux principaux partis du pays. Enfin, il semblerait que ce soit la goutte qui a fait déborder le vase, il y a eu la proposition de BCE de créer un Conseil national supérieur où il siègera avec le leader islamiste et où Néjib Chebbi n’y sera pas.
De l’autre côté, les cadres de Nidaa reprochent à Al Joumhouri son rapprochement avec le parti islamiste sans informer ses alliés de l’UPT de ses intentions et de sa démarche. Le point culminant de cette crise de confiance a été le soutien acharné apporté par Al Joumhouri à la candidature d’Ahmed Mestiri pour le poste de chef de gouvernement avant d’annoncer carrément et, à la surprise de tous, son retrait du dialogue national.

En vérité, des raisons encore plus profondes, épistémiques presque, se trouvent à l’origine de cette rupture annoncée entre Al Joumhouri et Nidaa. Ces faiblesses ont marqué non seulement l’UPT mais toutes les alliances précédentes dans le pays et n’épargnent pas aujourd’hui le Front du salut, dernière alliance qui continue à colmater tant bien que mal ses contradictions internes et ses brèches.
La première difficulté réside dans le caractère contre-nature de ces alliances qui regroupent des formations politiques hétéroclites sur le plan idéologique et politique. Souvent, l’effet d’annonce semble être le seul effet recherché tant les disparités entre les composantes de ces alliances sont flagrantes. Souvent aussi, ces alliances sont formées par une composante centrale autour de laquelle gravitent les autres composantes de l’alliance qui perdent de fait leur statut de partenaire et deviennent très vite des partis satellites et une carte à faire-valoir chaque fois que la formation dominante de l’alliance juge cela nécessaire.

La seconde difficulté est en rapport avec le comportement des leaders politiques dans notre pays aussi bien au sein de leurs formations que dans leurs rapports avec leurs partenaires et alliés politiques. Ces leaders inamovibles ont fini par s’identifier à leurs formations. Ils sont devenus des despotes prenant des décisions unilatérales qui sont validées immanquablement a posteriori par les structures de leurs partis. Ce nombrilisme démesuré est l’une des faiblesses essentielles des partis politiques en Tunisie. Toutes les alliances politiques précédentes qui ont été tentées dans le pays depuis le début des années quatre-vingts ont échoué par la faute de l’égo exacerbé de grands militants pourtant qui n’ont pas su s’effacer devant leurs propres personnes qu’ils considèrent contre toute évidence, indispensables, centrales même, pour la réussite de tout projet, tout processus.

La rupture consommée entre Al Joumhouri et Nidaa n’est donc pas une surprise. Elle était prévisible et attendue mais laisse pourtant un peu d’amertume surtout chez ceux qui ont bien voulu croire, pour un bout de temps, que l’on était capables de faire du nouveau avec du vieux, et que la révolution a changé bien de choses et beaucoup de comportements, même ceux des politiques.
29/12/2013 | 1
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