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Chroniques
Loi sur l’investissement, l’échec latent d’une législation
Par Houcine Ben Achour
28/03/2019 | 19:59
4 min
Loi sur l’investissement, l’échec latent d’une législation

Par Houcine Ben Achour

 

Deux ans. Voila seulement deux ans que le nouveau code d’encouragement à l’investissement a vu le jour. Il n’a fallu que ce délai pour qu’il soit d’ores et déjà marqué du sceau de l’échec. On ne peut comprendre que dans ce sens la portée du projet de loi du gouvernement relatif à « la mobilisation de l’investissement et l’amélioration du climat d’affaires ». Et du coup, on ne peut pas comprendre le sens du propos du ministre du développement et de l’investissement, Zied Laâdhari, qualifiant ce projet de loi de « révolutionnaire ».

 

En quoi le serait-il alors qu’il ne fait que corriger les tares d’une législation de l’investissement qui ne reflète aucune vision stratégique, sectorielle ou de filière, en cohérence avec un écosystème adapté d’éducation, d’enseignement supérieur et de formation professionnelle ? M. Laâdhari n’avait-il pas conscience des tares de notre cadre institutionnel, législatif et réglementaire  régissant l’investissement, lors de la promulgation de la loi de l’investissement alors qu’il était à la tête d’un ministère directement concerné, le ministère de l’Industrie et des PME, en l’occurrence ? Plus encore, n’est-ce pas sous la tutelle du ministère qu’il dirige que les fameux décrets d’application de cette loi furent publiés, dont le décret relatif aux activités soumises à autorisation et ses 240 pages dans le Journal officiel de république tunisienne (Jort) ; le plus long décret de l’histoire de la législation de la Tunisie ? L’humilité dans le propos est une vertu qu’il faut savoir entretenir. A ce stade, il serait de bon temps de solliciter l’avis de Yassine Brahim, l’architecte de loi sur l’investissement, sur ce projet révolutionnaire.

 

Il ne s’agit nullement, ici, de critiquer le projet de loi en question. Bien au contraire, dans la mesure où il tente de corriger le tir. Il s’agit surtout de pointer du doigt la perte de temps et de circonscrire les responsabilités de cet état de fait. Car, en termes d’investissement, la situation est devenue plus que délicate ou sérieuse, véritablement préoccupante. Les intentions d’investissement déclarées auprès de l’Agence de promotion de l’investissement et de l’innovation (API) au cours des deux premiers mois de l’année 2019 sont en net recul par rapport à la même période 2018 : -21,2% en nombre de projets, -14,3% en enveloppe d’investissement et -14,5% au niveau des créations d’emploi.

 

Ces résultats semblent confirmer les résultats de l’enquête semestrielle de l’Institut national de la statistique (INS) auprès des chefs d’entreprises du secteur des industries manufacturière sur la situation de l’investissement et de ses perspectives. L’enquête relative au 2e semestre 2018 est, à cet égard, édifiante. En effet, si les patrons des industries manufacturières considèrent que l’évolution de l’investissement dans leur activité a relativement bien évolué, les avis qu’ils fournissent l’évolution de l’investissement durant le 1er semestre 2019 sont en recul. En clair, ils ne pensent pas que l’investissement va aller crescendo durant les prochains mois. Du moins jusqu’à l’été. Cela est particulièrement le cas pour les patrons des industries mécaniques et électriques (IME) et chez les industriels des matériaux de construction, de la céramique et du verre (IMCCV), accessoirement chez les patrons de l’industrie textile (ITH). Ce sentiment transparait dans les statistiques d’investissements déclarés dans l’industrie au cours des deux premiers mois 2019. Les intentions d’investissement dans les IMCCV affichent une baisse de 49% en nombre de projets, un recul de 13,5% en enveloppe financière et 48,5% en termes de création d’emploi. Les intentions d’investissement dans les ITH ont décru de 36,6% par rapport à la même période 2018, au niveau du nombre de projet et de 14,4% en termes de création d’emploi.

 

Cette attitude attentisme qui se profile concernant le climat de l’investissement dans le secteur industriel manufacturier ne pourrait d’ailleurs que se renforcer compte tenu des résultats qu’affiche l’indice de production industriel pour le mois de janvier 2019.  En glissement annuel, il est en recul de 4,9%. S’agissant des industries manufacturières, il accuse une baisse de 5%.

 

Est-ce que le projet de loi « révolutionnaire » infléchira cette angoissante tendance ? Il faut bien l’espérer même si les craintes demeurent grandes que ce projet de loi ne serve qu’à satisfaire un aspect technique visant à améliorer notre classement dans le prochain rapport du Forum économique mondial de Davos sur la compétitivité ou celui de Doing business sur le l’environnement des affaires. Et rien de plus. 

Par Houcine Ben Achour
28/03/2019 | 19:59
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Commentaires (2)

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Rationnel
| 29-03-2019 13:46
Ziad Laadhari a déclaré que: "Ce projet de loi permettra également de mieux positionner la Tunisie au niveau international dans le classement de Doing Business» .

Doing Business mesure les réglementations concernant 11 domaines du cycle de vie d'une entreprise. Dix de ces domaines sont inclus dans le classement sur la facilité de faire des affaires : création d'entreprise, l'obtention d'un permis de construire, raccordement à l'électricité, transfert de propriété, obtention de prêts, protection des investisseurs minoritaires, paiement des taxes et impôts, commerce transfrontalier, exécution des contrats et règlement de l'insolvabilité. Doing Business mesure également la réglementation du marché du travail. Ce domaine n'est pas inclus dans le classement de 2019.

Pour 2019, la Tunisie est classe 80 avec un score de 66,11, le Maroc occupe la 60eme position avec un score de 71,02, la France vient a la 32eme position avec un score de 77,29.

Sur les dix critères évalués, paiement des taxes et impôts est le pire, la Tunisie occupe la 133eme position. Une nouvelle loi d'investissements ne pourra pas améliorer le score sur ce critère. Des reformes et une modernisation des procédures dans le ministère des finances est plus judicieuse dans ce cas.

Le deuxième critère qui nuit a la Tunisie est le commerce transfrontalier ou le pays occupe la 101eme position. Les douanes, les procédures douanières d'un autre age et la corruption dans cette administration sont un grand obstacle qui fait fuir les investisseurs.

Le troisième critère est l'obtention de prêts: le manque de liquidité, un taux d'épargnes très faible de 7%, et un déficit public très important font que les banques préfèrent prêter au gouvernement en Euros qu'aux investisseurs en dinars. Si les banques prêtent au gouvernement en Euros c'est qu'elles ont perdu confiance dans le dinar. Si le gouvernement est oblige a emprunter en euros auprès des banques "tunisiennes" pour payer des dépenses en dinars et aggraver le déficit, c'est que les investisseurs auront beaucoup de difficultés a convaincre les banques de leur octroyer des prêts en dinars.

Si Laadhari veut améliorer les climat d'investissements en Tunisie il doit travailler avec ses collègues dans le ministère des finance et la banque centrale pour améliorer le score dans les domaines ou le pays accuse un grand retard.

DHEJ
| 28-03-2019 20:51
Ingénieur Juridique créateur de la LEGIDYNAMIQUE!


Alors entre Yacine BRAHIM l'ingénieur et Ziad LAADHARI le juriste, c'est l'intégrité territoriale du pays qui est en danger


L'armée doit ouvrir ses yeux muette oui mais pas "amya"!