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Loi de Finances 2023 ou une menace fantôme ?
30/11/2022 | 11:55
4 min
Loi de Finances 2023 ou une menace fantôme ?

 

La question de la situation financière du pays a réussi, en raison de la crise économique et sociale actuelle, à devenir le seul et unique sujet continuellement abordé par les médias, les plateaux télévisés. La dégradation de l'économie nationale, la situation de blocage et la nécessité de réformer sont devenues des expressions évoquées par les Tunisiens dans les bars, cafés, et même en famille. L'annonce de la conclusion d'un accord entre le gouvernement de Najla Bouden et le Fonds monétaire international (FMI) a apporté certains éléments au sujet des réformes envisagées par le pouvoir exécutif.

Le FMI a indiqué, dans un communiqué publié à la date du 15 octobre 2022, que le gouvernement œuvrera pour le renforcement de l’équité fiscale, la maîtrise des dépenses, la réforme des entreprises publiques, la stimulation de la concurrence et la création d'un environnement transparent et équitable pour les investisseurs, le renforcement de la gouvernance et de la transparence dans le secteur public, le renforcement de la résilience aux changements climatiques et la préservation du pouvoir d'achat des Tunisiens. On apprendra, par la suite, qu'une partie des réformes sera introduite à travers la loi de Finances 2023 (LF 2023). La ministre des Finances, Sihem Nemsia avait indiqué cela lors d'une interview diffusée le 3 novembre 2022 par la chaîne télévisée Attessia Tv. On notera que les experts et personnalités publiques ont affirmé que cette même loi sera validée par le FMI.

 

Ainsi, le gouvernement a décidé de se soumettre complètement et entièrement à la volonté du FMI et de veiller à appliquer l'ensemble des recommandations de cette organisation à n'importe quel prix et sans se soucier des conséquences d'un tel asservissement. L'équipe de Bouden est prête à promulguer la LF 2023 dans les prochains jours. Nous nous retrouvons, donc, dos au mur et devant le fait accompli. Nous découvrirons les dispositions de la loi de Finances de la même façon que nous avions découvert d'autres mesures critiques et surprenantes : suite à une publication dans le Journal officiel de la République tunisienne. Une publication qui aura peut-être lieu tard la nuit. 

Nous nous retrouverons face à des plateaux télévisés et des débats cherchant à analyser et à comprendre un texte touchant directement les Tunisiens, mais dont le contenu avait déjà été scellé. Les citoyens et citoyennes de notre démocratie modèle n'auront rien à dire à ce sujet. Ils devront se contenter d'appliquer la loi même si celle-ci apporte plus de mal que de bien à leur quotidien. Le gouvernement semble ne pas avoir pris en considération les conséquences de cette approche appliquée lors de la promulgation de la LF 2022. Plusieurs experts économiques et organisations syndicales et patronales avaient critiqué, à titre d'exemple, l'annulation du régime suspensif de la TVA pour les sociétés du commerce international. Le gouvernement, de son côté, avait insisté sur l'efficacité d'une telle mesure. Près d'un an après son application, 50% de ces sociétés se sont retrouvées dans l'obligation de procéder à l'arrêt des activités, selon le vice-président de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica), Hichem Elloumi.

 

En plus de l'absence d'un débat public autour des dispositions de la LF 2023, le gouvernement s'est contenté d'organiser quelques séances de travail restreintes et sélectives. La danse est principalement menée par le ministère des Finances et les débats portent essentiellement sur les questions d'ordres fiscaux. Une loi de Finances est, certes, un texte de loi évoquant les équilibres budgétaires et financiers d'un pays, mais dans le cas échéant, on nous parle de réformes et de changements importants. 

L'ensemble des hauts responsables du pays devrait s'appliquer dans la chose et l'entame des réformes devrait faire l'objet d'une série de conférences et d'ateliers qu'ils soient ouverts au public ou sectoriels. Malheureusement, le gouvernement de Bouden ne semble pas intéressé par la perspective de s'adresser directement au peuple tunisien et de lui expliquer ce qui semble être, selon nos ministres, des réformes indispensables. Nous n'avons toujours pas entendu la cheffe du gouvernement, Najla Bouden, évoquer la chose ! Aucun communiqué, rapport ou document explicatif n'a été émis à ce sujet ! L'acharnement du gouvernement à éviter tout échange portant sur la LF 2023 pourrait même nous faire oublier son existence. On aurait dit qu'il s'agissait d'une loi fantôme ou d'un simple accord entre le gouvernement et une entité étrangère.

 

Le gouvernement de Najla Bouden préfère la politique de la fuite en avant quitte à fuir ses responsabilités. Un gouvernement, rappelons-le, n'est qu'un outil servant à gouverner un pays afin de servir les intérêts du peuple et non-pas ceux d'une institution financière. Or, notre gouvernement semble plus préoccupé par la satisfaction de cette organisation que de jouer son véritable rôle. Un comportement résultant sûrement d'une volonté de réaliser un équilibre financier du pays au lieu de garantir un équilibre et une stabilité de la vie des Tunisiens.

 

S.G

30/11/2022 | 11:55
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