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La naissance du Pakistan : quand l’Histoire se déchire
07/05/2025 | 12:20
3 min
La naissance du Pakistan : quand l’Histoire se déchire
En 1947, des millions de réfugiés musulmans fuient l’Inde naissante tandis qu’une masse équivalente d’hindous quittent les régions qui forment le Pakistan. Comme ici, à Amritsar. © AFP

 

En 1947, le sous-continent indien connaît un tournant historique aussi attendu que dramatique : la fin de la domination coloniale britannique et la naissance de deux États indépendants, l’Inde et le Pakistan. Derrière cet acte fondateur, se cache une histoire complexe de revendications identitaires, de luttes politiques, de décisions précipitées et de souffrances humaines à grande échelle.

 

Sous la domination britannique depuis le milieu du XIXe siècle, l’Inde abritait une mosaïque de peuples, de cultures et de religions. Parmi les communautés les plus importantes, les hindous formaient la majorité, tandis que les musulmans représentaient environ un quart de la population. Dès les années 1920, un double nationalisme émerge : celui du Congrès national indien, mené notamment par Gandhi et Nehru, qui défend une Inde unie et laïque, et celui de la Ligue musulmane, dirigée par Mohammad Ali Jinnah, qui redoute que les musulmans deviennent marginalisés dans une Inde indépendante gouvernée par une majorité hindoue.

 

C’est dans ce contexte que naît l’idée d’un État séparé pour les musulmans. En 1940, la résolution de Lahore marque un tournant : la Ligue musulmane réclame officiellement la création d’un pays distinct. Le nom « Pakistan », qui signifie « terre des purs » en persan et en ourdou, s’impose progressivement, formé à partir des initiales de plusieurs régions musulmanes du nord de l’Inde (Pendjab, Afghanistan du Nord-Ouest, Cachemire, Sindh et Baloutchistan).

 

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le Royaume-Uni, affaibli, décide de mettre fin à sa domination sur l’Inde. Mais face à l’impossibilité de parvenir à un accord entre le Congrès et la Ligue musulmane, les autorités coloniales optent pour une séparation brutale. Le plan de partition est mis en œuvre en quelques semaines seulement, sous l’égide de Lord Mountbatten, dernier vice-roi des Indes. Le 15 août 1947, deux pays voient officiellement le jour : l’Inde et le Pakistan.

 

Cette naissance s’accompagne d’un des déplacements de population les plus massifs et les plus sanglants de l’histoire moderne. Plus de 15 millions de personnes traversent la nouvelle frontière dans les deux sens, fuyant les massacres intercommunautaires. Le bilan humain est effroyable : on estime à près d’un million le nombre de morts. Villages détruits, familles décimées, violences sexuelles et représailles en chaîne marquent à jamais les mémoires.

 

Le Pakistan, à sa création, est constitué de deux régions séparées de plus de 1 600 kilomètres : le Pakistan occidental (actuel Pakistan) et le Pakistan oriental (futur Bangladesh). Cette configuration géographique, combinée à des différences culturelles et linguistiques, mènera à une instabilité chronique. En 1971, après une guerre sanglante soutenue par l’Inde, le Pakistan oriental fait sécession et devient le Bangladesh.

 

Depuis 1947, les relations entre l’Inde et le Pakistan sont restées marquées par une méfiance persistante et plusieurs conflits armés, notamment autour de la région disputée du Cachemire. Le Pakistan, entre régimes militaires, poussées islamistes et défis économiques, poursuit son chemin dans un environnement régional tendu.

 

La création du Pakistan reste à ce jour un exemple saisissant des conséquences tragiques que peut avoir une partition fondée sur des critères religieux. Si elle a permis à une partie des musulmans du sous-continent d’avoir un État souverain, elle a aussi semé les graines d’un conflit qui perdure, avec son lot de douleurs, d’exils et de tensions.

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