L'avocat et membre du comité de défense des opposants politiques arrêtés dans le cadre de l'affaire de complot contre l'État, Abdelaziz Essid, a indiqué que les conditions de détention de Khayam Turki et Issam Chebbi étaient inhumaines.
Invité le 14 mars 2023 de Zina Zidi à « Studio Shems » sur Shems Fm, Abdelaziz Essid a expliqué que ses clients Khayam Turki, Issam Chebbi, Lazhar Akermi, Ghazi Chaouachi, Ridha Belhadj et Jaouhar Ben Mbarek étaient interdits de se croiser ou de se retrouver au même endroit. Il a indiqué qu’ils étaient dispersés dans un pavillon disposant du minimum de commodités.
« Nous avons été surpris d’apprendre, vendredi après les visites, le transfert de nos clients… Jaouhar Ben Mbarek, Ghazi Chaouachi et Khayam Turki étaient, en premier lieu, les personnes concernées par cela… Nous avons découvert, le lundi, que Jaouhar Ben Mbarek a été, après des menaces de grève de la faim, replacé dans une cellule normale… Khayam Turki et Issam Chebbi se trouvent, en ce moment, dans un endroit sans eau et sans toilettes. Il n’y a pas de toilettes, mais un trou dans le sol et sans chasse ou flexible ! Khayam Turki ne peut pas plier son genou. Il n’a pas pu prendre de douche. Vous ne pourriez même pas vous approcher de lui ! Issam Chebbi et Khayam Turki se trouvent dans une cellule infestée de tiques. En ouvrant le levier, on est attaqué par des insectes et des cafards. Il s’agit d’un véritable film d’horreur… Ils étaient dans une cellule dotée du minimum… Nous ne voulons pas de cellule cinq étoiles… Ils font face à une menace sanitaire », s’est-il exclamé.
Abdelaziz Essid a conclu que Issam Chebbi et Khayam Turki ont été pris pour cible. Il a expliqué que les deux prévenus se trouvaient, au début, dans une chambre normale. Jaouhar Ben Mbarek a contesté son transfert et a provoqué une crise au niveau de la prison. Ceci lui a permis d’être placé dans une cellule presque normale. Ghazi Chaouachi a été logé dans une cellule normale suite à une intervention du président de l’Ordre national des avocats de Tunisie. Maître Essid a indiqué que l’Instance nationale de lutte contre la torture a pu visiter et constater les conditions de détention des accusés. La LTDH leur a, également, rendu visite.
« J’ai visité Khayam Turki aujourd’hui. Il m’a informé qu’on avait mis une douche, mais qu’on ne pouvait pas l’utiliser… Je considère que mes clients étaient ciblés et faisaient l’objet d’abus… Je ne sais pas qui est la personne ciblant mes clients ou qui est derrière ces instructions… Je ne sais pas qui a monté ce dossier… Je ne peux pas dire si tel homme ou telle femme sont impliqués… Nous avons cherché le caractère terroriste dans ce dossier, mais nous ne l’avons pas trouvé », a-t-il dit.
Abdelaziz Essid a affirmé qu’aucun des accusés, selon les éléments de l’enquête, n’était coupable de crime terroriste. Le recours à cette loi vise, seulement, à dissimuler l’identité des témoins, de procéder à des raids nocturnes et de placer les individus concernés en détention durant quinze jours. Le juge d’instruction près le pôle de lutte contre le terrorisme lui a affirmé, le jour de l’audition des accusés, que l’enquête ne portait ni sur des assassinats ni sur des attentats ni sur des armes. Les questions ont porté sur des réunions et des rencontres entre ces individus. Il a estimé que le chef de l’Etat, Kaïs Saïed, n’avait pas le droit d'affirmer publiquement la culpabilité de ces derniers. M. Essid a expliqué qu’il n’était pas capable de faire son travail.
« L’article 76 de la loi de 2015 me permet de demander de connaître l’identité du témoin anonyme. J’ai déposé une demande à ce sujet… On m’a refusé cela… Comment puis-je travailler ? Je suis face à un indicateur qui délire et qui ment ! Son récit est incohérent… Juridiquement parlant, je ne peux remettre en cause la version du témoin que si la justice révèle officiellement l’identité de ce dernier… Je ne peux pas le faire même si le nom de l’indicateur circule publiquement… On m’interdit de faire mon devoir… Le juge sait qu’il s’agit de la procédure standard… Ceci a eu lieu dans le passé… Il n’y a pas d’autres éléments dissimulés par le ministère public. On nous a remis l’intégralité du dossier… J’ai connaissance de l’ensemble du dossier… Il n’y a pas d’enregistrement ou de témoignage d’une personnalité connue… Il n’y a que des réunions politiques dans la maison de khayam Turki et dans d’autres endroits… Le ministère de l’Intérieur n’a pas mis en garde Khayam Turki au sujet de ces réunions… Le ministre de l’Intérieur peut dire ce qu’il veut… Il n’y a pas d’interdiction de réunion… Le fameux dîner ne figure pas dans le dossier d’enquête », a-t-il déclaré.
Abdelaziz Essid a considéré que le magistrat soumis à des instructions et à des pressions extérieures ne pouvait pas rendre justice. Le juge d’instruction chargé du dossier de complot contre la sûreté de l’État est, selon lui, menacé. Il est revenu sur la déclaration du président de la République à ce sujet. Ce dernier a affirmé que toute personne innocentant ces accusés était leur complice. L’avocat a, également, rappelé que le juge d’instruction ayant décidé de la libération de Hattab Ben Othman avait été limogé.
L’avocat a, aussi, précisé qu’il n’y avait aucun lien entre l’affaire du complot contre la sûreté de l’État et l’affaire concernant le propriétaire d'une entreprise de café. Il a indiqué qu’aucun de ces clients n’a été interrogé au sujet de spéculation et de produits alimentaires. Il a affirmé qu’il était tout à fait logique de regrouper des politiciens dans le but de s’opposer au pouvoir en place. Il a expliqué que les diplomates avaient le droit de s’entretenir avec des citoyens des pays dans lesquels ils étaient installés. Les Tunisiens n’ont pas à informer les autorités de cela. M. Essid a conclu que ses clients étaient poursuivis en justice en raison de leurs activités politiques. Il s’agit, pour lui, de prisonniers politiques. Il a assuré que les échanges avec les diplomates n’avaient pas pour but de porter atteinte à la Tunisie. On ne peut donc pas parler d’espionnage.
Abdelaziz Essid a assuré que Khayam Turki avait été proposé par cinq partis politiques pour présider le gouvernement en 2019. Le fait que l’un de ces partis soit le mouvement Ennahdha n’est pas contraire à la loi. Il a, aussi, indiqué que le nom de Bernard Henri Lévy avait été parachuté dans le dossier de l'affaire. Aucun de ces clients n’a été interrogé au sujet de sa relation avec ce dernier. Il a insisté sur l'absence de preuves dans cette enquête.
S.G
Sauf les bourgeois ne s'en préoccupent que quand les leurs y sont confrontés... pas de traitement de faveur, on doit améliorer les conditions de détention pour tout le monde, pas que pour les bourgeois méprisants.
Faut-il, au motif que les prévenus ne sont pas à notre goût, tourner le dos à tous nos principes et nos lois, les plus élémentaires compris ?
Traitements inexplicablement cruels, inhumains, dégradants, humiliants interdits par la loi.
Le rejet de la secte, ses nervis et affidés, tous les détenus ne le sont pas, ne saurait tout justifier
Voici ce que dispose ( ou disposait ) l'art. 30 de la Constitution de 2014
"Tout détenu à droit à un traitement humain qui préserve sa dignité."
Voici ce qu'on peut lire en préambule de la loi n° 2001-52 du
14 mai 2001 : " La présente loi régit les conditions de détention dans les prisons en vue d'assurer l'intégrité physique et morale du détenu, de le préparer à la vie libre et d'aider à sa réinsertion. Le détenu bénéficie à cet effet de l'assistance médicale et psychologique [...]."
Voici ce qu'on peut lire dans dans
"Le manuel du droit pénitentiaire tunisien"* : "outre la Déclaration des droits de l'homme, les Nations Unies
ont élaboré notamment la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (1984), l'Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement
(1988), les Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus,
le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (2002)
[...] .
A ce jour, partie prenante (Etat partie), la Tunisie a ratifié l'essentiel des textes en lien direct ou indirect avec la question pénitentiaire [dont] celle de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants , texte adopté en 1984, entré en vigueur en 1987 et ratifié le 23 septembre 1988 . et celle de son protocole facultatif du 29 juin 2011."
Il y a loin de la coupe aux lèvres. Doux euphémisme.
Dire qu'en ce pays existe une Inspection Générale des Prisons.
"La Tunisie pays de lois pas de droit" dirait quelqu'un.
* Manuel du droit pénitentiaire tunisien. Maître d'ouvrage Ministère de la Justice, Instance Nationale de Prévention de la Torture.