alexametrics
jeudi 01 mai 2025
Heure de Tunis : 21:44
A la Une
Hizb Ettahrir : Légitimité de l'Etat vs légitimité de l'Islam
05/06/2016 | 13:43
6 min
Hizb Ettahrir : Légitimité de l'Etat vs légitimité de l'Islam

 

Malgré son visa légal, obtenu en 2012, Hizb Ettahrir n’a cessé de multiplier les discours se dressant contre l’Etat civil et la Constitution, et appelant à l’instauration du califat et à l’application de la Chariaa. A la veille de la tenue de son 4ème congrès annuel, les autorités tunisiennes opèrent un rétropédalage en interdisant, puis autorisant, puis interdisant de nouveau la tenue de ses travaux. De quoi se poser des questions sur les positions réelles de ce parti face à l’Etat mais aussi de celles de l’Etat tunisien à son égard.

 

« La légitimité de notre action nous est conférée uniquement par l’Islam […] et non par un Etat qui s’est vendu au colonisateur […] même si la loi nous permet de tenir notre congrès », avait écrit Hizb Ettahrir sur sa page Facebook, le 31 mai. Cette phrase, à elle seule résume toute la contradiction que contient le discours de ce parti politique, fort controversé. En effet, dans ses discours, Hizb Ettahrir a toujours tenu les mêmes propos. Entre sauver la Tunisie et la libérer, un seul leitmotiv : instaurer le califat et, au passage, sauver le monde. L’idée étant d’accéder au pouvoir et de renverser les fondements de l’Etat inscrits dans sa Constitution pour en instaurer d’autres, basés sur la chariaa islamique.

 

Hizb Ettahrir, qui a commencé à travailler dans l’illégalité, a pourtant fait une demande d’obtention de visa auprès des autorités tunisiennes, après sa création. Visa qu’il obtiendra en 2012, sous le gouvernement de Hamadi Jebali, ancien secrétaire général du parti islamiste Ennahdha. Depuis, Hizb Ettahrir a tenu un congrès annuel dans lequel il a appelé à l’instauration d’un califat islamique, en tirant à boulets rouges sur l’Etat tunisien. Discours qui fera, aujourd’hui, encore le cheval de bataille de ce parti qui se dresse aujourd’hui contre la Constitution, les lois et qui défie, à multiples reprises, les autorités tunisiennes.

 

Pourtant, pour tenir son congrès annuel, prévu hier samedi 4 juin 2016, Hizb Ettahrir a fait une demande auprès du ministère de l’Intérieur, afin d’avoir accès au Palais des Congrès. Demande ayant été refusée « après les délais légaux », par le département de Hédi Majdoub, et ce selon un communiqué du parti.  « Je tiens à porter à la connaissance de l’instance Vérité et Dignité (IVD) et de l’Instance de lutte contre la corruption, que la corruption a atteint son summum. En effet, les gouverneurs de la Tunisie permettent aux sionistes d’effectuer leur pèlerinage à El Ghriba et assurent leur protection, tandis qu’on nous refuse la tenue de notre congrès annuel bien que l’on soit un parti légal qui a milité durant l’ère de Bourguiba et de Ben Ali », peut-on lire dans ce communiqué.

Dans les faits, même si Hizb Ettahrir prend sa « légitimité légale » comme un argument de premier ordre, il n’hésite pas à la reléguer aux oubliettes dès lors que cette légitimité se retrouve mise à mal.

En effet, le non respect des délais ayant permis au Tribunal administratif de débouter la décision du ministère de l’Intérieur, pour vice de forme, le parti a tout de suite décidé de changer de fusil d’épaule appelant au respect, immédiat, de cette nouvelle décision judiciaire en leur faveur.

 

 

Dans les faits, le congrès de Hizb Ettahrir est interdit par le ministère de l’Intérieur « compte tenu des slogans du congrès et de son lien direct avec la pensée takfiriste et extrémiste adoptée par toutes les organisations islamo-terroristes ». Le ministre chargé des Relations avec les instances constitutionnelles, la société civile et les droits de l’Homme, Kamel Jendoubi, a, en effet, souligne que la décision du ministère de l’Intérieur était « juste et sage » et qui « se base sur des raisons objectives ». Le ministre a souligné, dans ce sens, que « le fait d’autoriser la tenue de ce congrès reviendrait à cautionner l’établissement d’un califat et à outrepasser les principes de la Constitution ». Et d’ajouter que « la tenue de ce congrès pourrait aussi constituer une menace en termes de sécurité dans la mesure où il sera sans doute accompagné de protestations et de confrontations rappelant que chaque parti politique légal doit obligatoirement se soumettre au décret 87 et que la Tunisie n’a pas à composer avec les particularités de chaque parti ».

 

Et pourtant, dans cette affaire, le Tribunal administratif a fait un pied de nez au ministère de l’Intérieur en autorisant ledit congrès. Décision qui n’a pas été respectée par le département qui a, le jour J, usé de moyens pour le moins abusifs afin d’interdire la tenue des travaux de Hizb Ettahrir. Samedi 4 juin, le Palais des Congrès a été encerclé et les invités empêchés d’accéder aux lieux du meeting. Le leader du parti, Ridha Belhaj, a même été arrêté sur l’autoroute Sousse-Tunis alors qu’il se rendait à la capitale pour présider l’événement, le gouverneur de Tunis ayant évoqué, dans cette nouvelle interdiction, un problème de sûreté publique pour empêcher la tenue de cette réunion.

 

 

Légalement, tout parti politique, bien que légal, se doit de se plier à la Constitution tunisienne et au décret 87 de 2011 concernant l’organisation des partis politiques. Hizb Ettahrir a été averti par les autorités tunisiennes, à de multiples reprises, suite à des discours jugés menaçant l’ordre public.

 

Cependant, si les officiels sont d’accord pour dire que les discours de ce parti se rapprochent de celles tenues par les takfiristes, la décision d’en interdire les activités ne semble pas faire l’unanimité. Les autorités préférant, bafouer la loi eux-aussi, et user de pratiques répressives au lieu de mettre un terme à  l’activité d’un parti qui menace sérieusement l’Etat civil.

Se pose alors la question épineuse des libertés face à celle du respect des lois. De quoi offrir une brèche que certains politiques n’hésitent pas à s’y engouffrer pour critiquer le pouvoir actuel. Moncef Marzouki, ancien président de la République, avait fortement critiqué les autorités tunisiennes en écrivant sur sa page aujourd’hui : « lorsque les principes et les fondements sont manipulés, et les décisions judiciaires bafouées, on sait que la démocratie est, désormais, en danger ».

Face à un tel cafouillage, le pouvoir actuel gagnerait à clarifier sa position face à de tels partis qui, même en bénéficiant de la liberté de parole et d’activité politique, n’hésitent pas à menacer l’Etat tunisien et ses lois.  De toute évidence, Ettahrir semble peu se soucier des lois tunisiennes et l’affiche clairement accusant l’Etat « d’injustice » et scandant que ceci « ne [les] empêchera pas de tenir le congrès du califat, que ce soit dans le Palais des Congrès ou dans les places publiques ».

 

 

Synda TAJINE

05/06/2016 | 13:43
6 min
sur le fil
Tous les Articles
Suivez-nous

Commentaires (14)

Commenter

j.trad
| 09-06-2016 07:12
l'infiniment grand et l'infiniment petit :un penseur géant vous en parle à la perfection ...l'infiniment loin dans la grandeur ,et l'infiniment proche de chaque être :ALLAH nous l'annonce (...inni 9aribon oujibou da3wata'dda3i idha da3ani )ALLAH nous dit aussi (inni a9rabou min habl alwarid )sada9a ALLAHOU AL3ADHIM ,wa kadhaba koullou muftarin youdirou dhahrahou li doustour assama ,wahwa'l ka'l maa ,la hayata bidounihi ,FIR3AWN a fini par reconnaître l'évident ,mais trop tard ,par conséquent les responsables doivent tenir compte ,et stopper la honte ,de l'obscénité dite:3ilmaniyya.

Albatros
| 08-06-2016 14:54
parce que le pays n'était pas peuplé de 98% de moslims ??

le peuple est moslim et oriental de tradition et coutumes. l'islamophobe Bourguiba voulait l'occidentaliser de force, et gommer 14 siècles. Echec, car même son ex épouse chrétienne Mathilde s'est convertie à l'Islam malgré lui ( raghma anfihi ).

votre problème c'est Islam, pas islamisme. alors , ne tournez pas autour du pot, et dites le franchement: nous détestons cette religion, nous voulons la rempacer par le judéo christianisme.

Bonne chance.

rzouga
| 06-06-2016 16:02
Le sens de Votre démocratie n'est pas celle de la majorité des citoyens.La votre intègre même les casseurs,les ignorants et les déphasés de l'Histoire.Nous on veut construire et déconstruire.On a déjà perdu assez de temps avec vous.

hedi ben said
| 06-06-2016 12:29
dommage, j'ai renoncé à lire votre article, votre texte aurait dû être réécrit en bon français! merci

Bourguibiste nationaliste
| 06-06-2016 09:24
Monsieur, ne mélangez pas les problèmes: Hiz Tahrir n'est pas un parti mais un groupuscule qui veut détruire l'Etat pour instaurer le Califat: pourquoi voulez-vous que l'Etat protège un ennemi de l'Etat ?
Répondez à cette question.

riducule
| 05-06-2016 23:53
Pourquoi vous parlez de la démocratie quand ça vous arrange et vous pratiquer la dictature quand vous êtes pas d'accord avec une tranche de population! l'extrême droite en france ou ailleurs en europe existe et pratique ses droits! pourquoi vous héritez toujours l'amour à la dictature et les fessez pour avancer dans le cycle de votre vie!

kameleon78
| 05-06-2016 23:15
On ne peut s'étonner de rien puisqu'en 2012 Ali Laariadh a exfiltré Abou Yadh le chef de Ansar Chariaa et l'a reconnu, donc Hizb Ettahrir est bien soutenu par les forces obscures infiltrées au sein de l'état.

maya
| 05-06-2016 22:24
Comme nous sommes loin des véritables démocraties ! Ailleurs, les citoyens et les partis politiques se réunissent dans la discipline totale, ils tirent certes à boulets rouges contre leurs dirigeants, mais jamais au grand jamais sur leur nation. Voyez ce qui se passe à Hyde Park , par exemple, où l'on voit de toutes les couleurs, mais jamais un seul mot déplacé sur leur royaume. Il est grand temps de mettre de l'ordre dans la cabane, et d'arrêter le cirque macabre de hizb etthrir et les partis et associations qui prônent la violence, et tentent de somaliser notre chère patrie. Et à propos de hizb ettahrir (la libération), brabbi de quoi il va nous libérer, au juste?

CONQUERANT
| 05-06-2016 20:15
Ce ramassis de terroristes, féroce ennemi de l'humanisme, n'a pas sa place dans une société civilisée, il n'existe que par contraste. Et, surtout par le calcul à courte vue de ceux qui lui ont délivré son certificat de baptême.

Usant de préceptes éculés en faillite tel que le Califat, Attahrir passe son temps à cracher, gueuler, fulminer, juger et critiquer impitoyablement pour agréger autour de lui un public inculte.

Dès lors, je lui dénie le qualificatif de parti au sens où on l'entend généralement. Parce que dans une société organisée, les partis politiques concourent à l'expression démocratique à travers les élections et les débats au sein des institutions de la République.
Or, le groupuscule "Attahrir" est l'ennemi acharné de l'État et son exacte antithèse. Par conséquent, il n'a aucune raison d'exister.
Une décision courageuse eût été de l'interdire carrément. Car, il n'y a pas place, dans la Tunisie déconstruite et en chantier, pour une organisation nihiliste qui veut saper ses fondements.

La réunion organisée hier, même dans un enclos privé, par les ténors de cet attroupement hétéroclite sonne comme un défi aux lois de la République.
Car, même si le Tribunal Administratif a invalidé le décret du ministre de l'intérieur, rien ne s'opposait, au plan procédural, d'interjeter appel de la décision rendue en première instance par la voie d'un référé (Cela s'appelle un référé Premier Président).

Or, on a laissé faire.

Et, par ce biais on a offert sur un plateau à "Attahrir" le statut de la victime expiatoire qu'il chérissait tant.

C'est bien la preuve que l'improvisation est à son comble au sommet de l'État.

Nous devons nous rendre à une évidence amère: la Tunisie est dirigée par des amateurs qui n'excellent que dans un seul exercice: la starisation à la Télé.

Miskina Bledna Mchet.

Alouane
| 05-06-2016 20:02
Mr. le premier ministre, ce parti est totalement illégal car ne reconnaissant ni l'état, ni le drapeau national. Faisant fi de la constitution, il s'érige en groupe terroriste dont l'objectif est la destruction de l'état et l'établissement du qualifat; C'est donc un parti qui refuse de respecter la constitution et pour cette raison il est donc hors la loi. Sa dissolution s'impose.