
Tous les jours, sur les routes de Tunis et d’autres villes du pays, des jeunes s’adonnent à des rodéos à moto, souvent sans casque et en défiant les lois de la circulation. Ce phénomène, qui prend une ampleur particulière pendant le mois de ramadan, notamment avant et après la rupture du jeûne, pose un véritable problème de sécurité routière. Pourtant, les autorités restent passives face à cette menace, alors même que les accidents se multiplient, parfois avec des issues tragiques. Dans le même temps, ces mêmes autorités ont montré une réactivité implacable pour réprimer les influenceurs sur les réseaux sociaux, soulevant ainsi une question fondamentale : la protection des bonnes mœurs est-elle devenue plus importante que la préservation de la vie humaine ?
Chaque soir, sur des axes tels que la route X, la route X2, la route X4 à Tunis, mais aussi sur la RN8, la RN9 et plusieurs autoroutes du pays, des groupes de jeunes motards exclusivement composés de garçons se livrent à de véritables courses clandestines. Le phénomène est simple : rouler à grande vitesse, exécuter des figures spectaculaires, souvent sur une seule roue, et se filmer pour ensuite diffuser ces exploits sur les réseaux sociaux.
Un accident cette semaine a mis en lumière la dangerosité de ces pratiques. Sur la route menant à Kélibia, quatre motards se livraient à un rodéo insensé : l’un circulait à grande vitesse, un autre roulait à contre-sens avec un passager, un troisième effectuait une roue arrière et un quatrième filmait la scène. La collision avec une voiture venant en sens inverse fut inévitable. L’impact fut d’une violence inouïe : un jeune homme de 26 ans est mort sur le coup, son passager est gravement blessé. Pourtant, ce drame n’a pas suffi à arrêter les rodéos. Le lendemain, d’autres motards continuaient de poster leurs exploits sur Facebook, Instagram et TikTok.
Quant au conducteur de la voiture impliquée dans l’accident, il a été incarcéré, bien qu’il roulât normalement et respectait le Code de la route. Un scandale de plus dans un pays où l’impunité semble régner en maître lorsqu’il s’agit de sécurité routière.
L’inaction des autorités face à un danger mortel
Alors que ces rodéos font de plus en plus de victimes, les autorités ne prennent aucune mesure concrète pour enrayer le fléau. Pourtant, les vidéos de ces courses circulent massivement sur les réseaux sociaux, permettant facilement d’identifier les motards impliqués. Mais aucune instruction judiciaire n’a été ouverte, aucun dispositif spécifique de répression n’a été mis en place.
Ce silence contraste avec l’empressement des autorités à réprimer les influenceurs. Récemment, plusieurs créateurs de contenu sur TikTok et Instagram ont été arrêtés et condamnés à des peines de prison allant de 18 mois à plus de quatre ans, pour des propos jugés offensants ou contraires aux bonnes mœurs. Cette répression a suscité une large indignation, notamment au sein des ONG de défense des droits de l’Homme, qui ont dénoncé un retour à la censure et une justice à géométrie variable.
Ainsi, pendant que l’appareil judiciaire s’acharne à épingler des influenceurs pour des contenus discutables mais non dangereux, il reste totalement passif face à un phénomène qui coûte des vies humaines. Une disproportion qui interroge.
Un journaliste plus responsable que l’État
Face à cette inertie, des initiatives individuelles tentent de combler le vide laissé par les autorités. Le journaliste Elyes Gharbi a récemment lancé une campagne de sensibilisation sur les réseaux sociaux pour encourager le port du casque chez les motards. « Les motards responsables et prudents rentrent chez eux sains et saufs », a-t-il rappelé, insistant sur la nécessité de respecter les règles de sécurité routière.
Son initiative intervient après le drame de Kélibia, qui a mis en lumière les conséquences tragiques de ces rodéos. Malgré l’ampleur du problème, l’absence de réaction des pouvoirs publics envoie un signal des plus troublants : dans la Tunisie de 2024, la priorité ne semble pas être de protéger les vies humaines.
Un fléau mondial amplifié par les réseaux sociaux
Le problème des rodéos urbains n’est pas propre à la Tunisie. Partout dans le monde, des jeunes se livrent à ces pratiques, souvent encouragées par la recherche de sensations fortes et la quête de visibilité sur les réseaux sociaux. En France, la situation est devenue tellement grave que le gouvernement a renforcé les sanctions contre les rodéos motorisés : en 2022, une loi a été adoptée pour alourdir les peines, allant jusqu'à cinq ans de prison en cas de mise en danger de la vie d’autrui. Les chiffres sont alarmants : en 2023, la police française a enregistré plus de 26.000 interventions pour rodéos urbains, avec plusieurs dizaines de morts et des centaines de blessés graves.
Aux États-Unis, où le port du casque n'est pas obligatoire dans certains États comme l'Illinois, l'Iowa ou le New Hampshire, les accidents liés aux rodéos à moto sont un véritable fléau. Selon la National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA), plus de 5000 motards ont perdu la vie en 2023 dans des accidents, et une proportion significative de ces décès est liée à l'absence de casque et aux comportements risqués, comme les courses sauvages. Dans certains cas, ces accidents laissent des survivants avec des blessures gravissimes, causant des handicaps à vie.
Ce phénomène est ainsi amplifié par les réseaux sociaux, qui offrent une visibilité immense à ces "performances" dangereuses. Un simple live sur TikTok ou Instagram permet à des milliers de spectateurs de regarder ces exploits en temps réel, encourageant d’autres jeunes à tenter l’expérience.
Mais la différence entre la Tunisie et ces pays réside dans la réaction des autorités : alors qu’en France et aux États-Unis, les forces de l’ordre traquent activement ces comportements et saisissent les véhicules des contrevenants, en Tunisie, le silence des autorités reste assourdissant.
Quand la priorité n’est pas où elle devrait être
En résumé, la Tunisie fait face à un paradoxe flagrant : alors que les rodéos à moto se multiplient et causent des morts, les autorités restent muettes. Pourtant, elles se montrent extrêmement réactives lorsqu'il s'agit de condamner des influenceurs pour atteinte aux bonnes mœurs. Cette justice à deux vitesses soulève des interrogations légitimes et renforce le sentiment d’injustice dans le pays.
Le contraste est frappant et inquiétant. L'inaction des autorités face à un problème aussi grave met en danger la vie de milliers de citoyens chaque jour. Pendant ce temps, le cadre légal est détourné pour punir des infractions qui, aussi contestables soient-elles, n'ont jamais tué personne. Si rien n'est fait, la Tunisie continuera de compter ses morts sur les routes, tout en maintenant son appareil judiciaire mobilisé sur des sujets secondaires. Une prise de conscience collective est nécessaire, non seulement chez les autorités, mais aussi au sein de la société civile. La sécurité routière ne devrait pas être un sujet secondaire ; elle doit devenir une priorité nationale avant qu’un autre drame ne vienne rappeler cette réalité trop souvent ignorée.
Maya Bouallégui
Cité Monplaisir à 2 pas du ministère et personne pour les empêcher.
On ne dort plus.
Je pensais qu'en Tunisie, les autorités auraient le courage de s'occuper de ce fléau. Il semblerait qu'il n'en ai rien.
Face à ces fous de la route, il faut mettre en place une politique de répression avec des moyens musclés. Arrestations pour trouble à l'ordre publique, travaux intérêts généraux, camps disciplinaires.
Les délinquants doivent pas prendre le contrôle du pays.
Un certain nombre de ces motards , par exemple ceux qui sèment la terreur sur l'autoroute Tunis Sousse ou au niveau de la route Mornag - Bouficha, sont les rejetons de la nomenklatura sécuritaire ( fait vérifié ).
D'où leur impunité. Je vous rappelle par exemple qu'au niveau des environs de Sidi Salem el Garci il y a eu trois morts en deux années et demie : deux enfants et un vieillard; Silence radio.
Et ne vous posez pas non plus des questions embarrassantes concernant le trafic de stupéfiant ou la prostitution de mineur.es a Gammarth Hammamet ou a Sousse
.
(Et soit disant la saisie du velomoteur)
Et donc, je doute fort, très fort même, qu'un jour on arrivera à s'intéresser à ce phénomène à moins que... Le fils de..., la fille de...., ou une personne hautement placée dans la hiérarchie des monarques du bled soit une victime de ce fléau !
Cette aliénation tente d'être compensée par des dérives pathologiques à la mesure du massacre commis : drogue, addictions diverses, socialisation dans des groupes de supporters ultra, prostitution, rodéos sauvages etc...
Je ne les blâme pas : quand je croise les hordes de motards sur les routes verdoyantes et paisibles de Sidi Salem el Garçi il m'arrive de percevoir sous les casques les traits déformés d' une rage nihiliste qui préfigure la barbarie à venir.
Cette barbarie latente, comme celle des virages de supporters ultra sous le régime benaliste, sera l'orange mécanique qui annonce le printemps.
Il faudra alors reconnaitre et s'excuser des crimes commis contre cette jeunesse défigurée; contre nos propres enfants que nous avons défiguré.
Pays de dingues.. régit par des dingues !...
eventuelles vengences de la famille des victime . c est une procedue lorsqu il ya deces
J'en avais entendu parler plusieurs fois.... mais n'ayant aucune connaissance directe à qui cela est arrivé, je vous remercie pour votre confirmation.
Toutefois à quoi bon incarcéré une personne innocente (pour combien de temps ?) Alors que la famille des victimes pourra le retrouver dès qu'il sera à l'air libre....
Les bons payent pour les cons...