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Rached Ghannouchi ou l’arnaque politique de la Tunisie
Par Marouen Achouri
05/10/2022 | 15:59
4 min
Rached Ghannouchi ou l’arnaque politique de la Tunisie

 

Le week-end dernier, Rached Ghannouchi a mangé des kilomètres. Le président du parti Ennahdha a parcouru plusieurs régions de Tunisie pour galvaniser les troupes et donner une image de solidité et de résilience à sa personne d’abord, et au parti ensuite au vu de la situation politique du pays et du fait qu’il ait été trainé devant les tribunaux. Il est vrai que les choses ont fait que Rached Ghannouchi s’est retrouvé dans une position qu’il affectionne particulièrement, celle de la victime.

 

Toutefois, le président du parti Ennahdha porte une responsabilité non négligeable dans le fait que la Tunisie en soit arrivée là. Par ses manigances, par son narcissisme, par le fait de vouloir devenir président de quelque chose, il aura pavé la route vers le vote sanction qui a porté Kaïs Saïed au pouvoir en 2019. Il faut se rendre compte que Rached Ghannouchi est loin d’être le renard politique tellement vanté par ses fans et par les partisans du parti islamiste. A y regarder de près, il a fait de mauvais choix et s’est emmuré dans son poste de président, pour lequel il était prêt à tout sacrifier.

 

Le coup de force du 25-juillet a été une vraie planche de salut pour Rached Ghannouchi et pour son parti. Des dizaines de démissions avaient été enregistrées et Ennahdha n’avait jamais été aussi divisé. Les mêmes Samir Dilou et Abdellatif Mekki, qui aujourd’hui sont sur la même ligne que leur ancien parti, n’étaient pas avares en déclarations incendiaires sur le fonctionnement du mouvement et la mauvaise gestion de Rached Ghannouchi. Ennahdha était empêtré dans un jeu de pouvoir interne opposant les dissidents qui souhaitent que Ghannouchi rende des comptes à l’occasion d’un congrès maintes fois reporté et les fidèles du président que sont le gendre Rafik Abdessalem, Noureddine Bhiri et Abdelkarim Harouni.

Le président du parti islamiste, Rached Ghannouchi, multipliait les manœuvres avec ses acolytes pour rester à la barre du parti tout en évitant d’être questionné par ses pairs. Il avait même tenté de faire amender le règlement intérieur d’Ennahdha pour s’autoriser plus de mandats. Devant le risque réel de dislocation du parti, Rached Ghannouchi n’a pas bronché et a préféré faire passer en premier ses propres intérêts et ceux de sa famille, comme le ferait n’importe quel dictateur. Lui et ses fidèles ont tout fait pour marginaliser leurs adversaires et pour les faire passer pour des traitres. On se rappellera de la fameuse initiative prise par Bhiri et Harouni pour étouffer la contestation et qui reprochaient à leurs compères de faire des déclarations médiatiques. Des plateaux médiatiques qui se sont révélés bien pratiques aujourd’hui pour les leaders islamistes.

 

Le président d’Ennahdha aura également fait preuve d’un aveuglement sans précédent en soutenant la candidature de Kaïs Saïed à la présidence de la République et en mobilisant ses troupes pour faire battre Nabil Karoui. Dans n’importe quel autre parti de la planète, devant une gestion aussi calamiteuse de l’échéance présidentielle, le président aurait eu la décence de démissionner, au pire ce sont les structures du parti qui s’occuperaient de le remercier. Mais pas à Ennahdha. A l’occasion de cette élection, Rached Ghannouchi avait fait semblant de pousser la candidature de Abdelfattah Mourou, membre historique du parti. Il s’est avéré par la suite qu’il l’a simplement poussé à l’abattoir politique et la carrière de Mourou a pris fin dès l’issue du premier tour. Ensuite, Ennahdha a mis tout son poids pour soutenir la candidature de Kaïs Saïed au deuxième tour de la présidentielle, accompagné en cela par les amateurs de la coalition Al Karama. Tout a été mis en œuvre pour barrer la route à Nabil Karoui, non pas pour une conviction quelconque, mais parce que le leader du parti pensait qu’il pourrait « dealer » plus facilement avec le novice en politique qu’est Kaïs Saïed. L’avenir montrera que les calculs du pseudo politicien de génie se sont tous avérés faux.

 

Par la suite, Ennahdha, sous l’égide de Rached Ghannouchi, a dû faire avaler d’autres pilules amères à ses membres et à ses partisans. Ainsi, il leur a fallu s’adapter à des pirouettes dont seul Rached Ghannouchi a le secret. Le parti Qalb Tounes, création de Nabil Karoui, est devenu le principal allié du parti islamiste au sein du parlement avec les radicaux de la coalition Al Karama. Ennahdha, après avoir vilipendé Qalb Tounes à longueur de campagne en parlant de corruption et d’argent sale, est devenu leur meilleur ami au parlement. Cette alliance était devenue indispensable pour deux principales raisons : la première est de constituer une majorité permettant d’avoir la main sur le gouvernement et la deuxième est d’empêcher à tout prix la réussite d’un vote de défiance qui démettrait Rached Ghannouchi du perchoir. Il est clair que l'intérêt du pays passe aux oubliettes dans cette équation.

Le problème est que Rached Ghannouchi, malgré toutes ces bourdes, est resté à la tête du parti islamiste Ennahdha. Aucune révision, aucune remise en question ni aucun bilan réel de la période passée ne semblent à l’ordre du jour du parti, pas tant que Rached Ghannouchi sera à sa tête. Le congrès est renvoyé aux calendes grecques sous prétexte de situation politique, le clan du président est plus fort que jamais au sein d’Ennahdha et Rached Ghannouchi, grâce à beaucoup d’incompétence en face, lave peu à peu son image et retrouve une certaine vigueur politique. Finalement, tout va pour le mieux pour le parti islamiste.

Par Marouen Achouri
05/10/2022 | 15:59
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Commentaires
BOUSS KHOUK
ON VERRA ET ON LIRA BIEN
a posté le 06-10-2022 à 08:43
vos dires , suite à la fin du ghanouchienisme , et si vous aurez toujours cette assurance !
Sami askri
'?claircissements
a posté le 06-10-2022 à 08:13
Vous avez omis de rappeler le prix GHANDI pour la paix que Cheikh GHANNOUCHI a reçu des. Autorités indiennes en 2016.
Vous avez de mauvaises intentions quand vous n'avez pas évoqué son élection par la majorité écrasante ( 900 congressistes parmi 1200 ) lors du dernier congrès du mouvement
Zend
Faux
a posté le 06-10-2022 à 04:33
MAROUAN
Ce que tu decris peut se resumer en 6 mots : Rached Ghannouchi représente dans sa mentalité une bonne frange du Tunisien .
Tout ceux de son parti qui ont critiqué le chef et n'ont pas démissionné sont comme lui
SAHLI
C'est ça la loi de la politique dans un régime parlementaire démocratique !
a posté le 05-10-2022 à 21:25
"la première est de constituer une majorité permettant d'avoir la main sur le gouvernement et la deuxième est d'empêcher à tout prix la réussite d'un vote de défiance qui démettrait Rached Ghannouchi du perchoir. Il est clair que l'intérêt du pays passe aux oubliettes dans cette équation." (sic)

Je ne défend ni Ennahdha ni QalbTounis , mais je sais comment des parties politiques antagonisten ("ennemis" lors des campagnes électorales) comme en Allémagne , en Italie ou en Autriche, une fois les résultats des élections sont déclarées, cherchent des partenaires pour faire une coalition..

En principe, dans une démocratie, tous les partis démocratiques sont capables de former une coalition entre eux. Les partis démocratiques se sondent mutuellement et s'efforcent de s'entendre sur la formation d'une coalition et d'un contrat de gouvernement commun.

A mon avis en Tunisie la formation de la coalition était absolument irréprochable et les partis politiques n'ont pas enfreint les lois du pays. Nous pouvons dire qu'ils ont fourni un très mauvais travail, mais c'est une autre discussion !
MH
Exactement
a posté le à 01:59
Visiblement en Tunisie on rejette la démocratie une fois que l'on a découvert et on préfère le retour de la dictature. Les gens ici manquent de culture politique, voire même de culture tout cours. La démocratie parlementaire selon moi est le système le plus juste qui fait participer le plus de monde dans l'exercice du pouvoir et prise de décisions. Ils étaient médiocres certes, mais aujourd'hui c'est bien pire on subit la médiocrité d'une seule personne et en plus il n'est pas prêt de partir de sitôt.
Ytom
Tunisie
a posté le 05-10-2022 à 21:14
C'est meskine!
Alors que la Tunisie vit ses jours les plus sombres, tribunaux militaires, emprisonnement pour un Twit ou avis sur Facebook.
Les produits alimentaires de bases sont en rupture.....
On trouve un mercenaire animé par une haine idéologique, qui nous parle d'un sujet qui ne fait pas partie du quotidien des tunisiens.
Abir de Gabès
Je partage entièrement cette analyse de Marouen Achouri
a posté le 05-10-2022 à 20:30
La bête n'est pas achevée, bien au contraire, elle est en train de se relever et essaye de se remettre sur les quatre pattes.
FETHI EL MEKKI
HORS SUJET
a posté le 05-10-2022 à 18:41
Ennahdha et Ghannouchi sont finis...Morts et enterrés...Politiquement et surtout MORALEMENT...
takilas
Tout est faux M.Achouri.
a posté le 05-10-2022 à 17:48
Voici le pourquoi.
C'est parce qu'il n'y aucune preuve tangible qui démontre que lavide du pouvoir ghanouchi, ni même sa secte nahdha, ont voté Kais Saied, d'abord on ne déclare jamais que l'élu à été plébiscité ou voté parce que c'est malsain, malhonnête et impoli, et ce par quiconque, et puis l'expérience dans ce contexte, à toujours prouver qu'il s'agissait d'un mensonge pour tenter, par faiblesse, de se rehabilter espérant un osselets à ronger, en dernier recours,bde la part voté ou l'élu.
Donc c'est tout simplement naïf de croire à de telles révélations
Ceci étant, il était clair pourtant, et vous l'avez dit, que c'est l'affamé et le double face Abdelfattah Mourou, connu depuis longtemps par de telles attitudes, à vouloir intégrer coûte que coûte la politique et s'enrichir par ce domaine avéré toutefois lucratif depuis 2011 et ce surtout avec les manigances accomplies par la secte nahdha laquelle secte à été formée pour la circonstance en 2006 à Londres.