alexametrics
samedi 20 avril 2024
Heure de Tunis : 04:30
Chroniques
Partis politiques et associations : quelle légitimité ?
Par Houcine Ben Achour
15/07/2022 | 08:43
4 min
Partis politiques et associations : quelle légitimité ?

 

Tous nos hommes politiques, le président de la République en tête, et même les représentants de la société civile ont-ils réellement connaissance du ressenti du citoyen sur les grands dossiers de la vie publique ? Ont-ils une véritable perception, fondée sur des données empiriques sur ce que « le peuple veut » ? Ceux qui parlent au nom du peuple ont-ils connaissance de ce que pensent d’eux les citoyens de ce pays ? A vrai dire, cela n’est pas si sûr.

L’Institut national de la statistique (INS) vient de publier les résultats d’une enquête sur « la perception des habitants envers la sécurité, la liberté et la gouvernance locale ». Les objectifs de l’enquête donnent une meilleure indication de son contenu que son intitulé. Ils sont au nombre de quatre. Le premier est de savoir quel est le degré de participation ou d’engagement du Tunisien dans la vie politique et associative et le regard qu’il porte sur les libertés et les droits de l’Homme dans toute leurs dimension ainsi que sur le phénomène de la discrimination entre les citoyens. Le second objectif est d’évaluer le niveau des prestations de service public dans certains secteurs comme celui de la santé et de la protection sociale, de l’éducation et de l’enseignement ou encore de la sécurité et la quiétude du citoyen. Le troisième vise à dégager le ressenti du Tunisien vis-à-vis des prestations administratives, de police, de justice et autres fiscales et douanières. Quant au quatrième objectif, il tend à mettre en exergue le regard du citoyen sur le phénomène de la corruption et de la fraude dans certains secteurs et jauger les efforts fournis par les pouvoirs publics pour en venir à bout.

L’espace dédié à cette chronique étant trop réduit pour pouvoir présenter la totalité des résultats de l’enquête, l’invitation est lancée à nos chers lecteurs de consulter le rapport publié par l’INS à travers le lien à consulter ici.

.

Cependant, pour susciter l’intérêt envers une telle enquête, on a fait le choix d’aborder le thème de la participation du citoyen tunisien à la vie politique et associative tant ses résultats sont surprenants, parfois même accablants dans la mesure où ils remettent en cause l’utilité des instances intermédiaires de représentation que sont nos partis politiques et autres représentants de la société civile.

L’enquête révèle en effet que 94,6% des habitants de ce pays ne militent ni dans un parti politique, ni au sein d’une quelconque association. Plus du tiers d’entre eux évoque le manque de temps. Néanmoins, une personne sur quatre parmi eux estime que « c’est une perte de temps » ou « ne leur fait pas confiance ». Quant au reste de l’effectif, il apparait que seul 0,5% des Tunisiens en âge de voter milite dans un parti politique. Cela représente environ 50 000 personnes. Une donnée à mettre en parallèle avec le nombre de partis recensés dans le pays : plus de 250 mouvements politiques. Cela accrédite forcément le propos anecdotique selon lequel les congrès d’un certain nombre de partis peuvent facilement se dérouler dans une cabine téléphonique, même si ce genre d’installation n’existe plus de nos jours. Dans le même temps, l’enquête indique que 1,3% de l’échantillon ont déclaré militer au sein d’un syndicat professionnel et 1,7% d’autres sont actifs dans des associations caritatives ou développement. La représentation des jeunes âgés de 18 à 29 ans au sein des partis et associations est diversement appréciable. En effet, cette catégorie ne représente qu’un peu plus de 5% de la population ayant déclaré militer au sein d’un syndicat professionnel et 10% de celle militant dans un parti politique. A cet égard, cela pose réellement la question du renouvellement des générations au sein de ces dernières organisations. Un bémol toutefois, 1,7% de l’échantillon indique qu’ils militent respectivement au sein d’une association caritative ou de développement et 1,9% au sein d’un club ou une association sportive.

 

En tout cas, face à un niveau aussi bas d’engagement politique et associatif des Tunisiens, une terrible question s’impose de fait : au nom de quoi et de qui peuvent-ils faire prévaloir leur légitimité et leur point de vue ?

De ce point de vue, il est probable que certains vont probablement estimer que la publication de cette enquête n’est pas le fruit du hasard dans la mesure où ses résultats suggèrent une sorte de disqualification des partis et des associations, une sorte de remise en cause de leur bien-fondé dans un contexte de référendum sur un projet de constitution qui nanise les partis politiques et leur pouvoir de représentation. Sauf que, cette enquête en est à sa troisième édition. En effet, deux autres l’ont précédé en 2014 et 2017 et dont les résultats sont, à quelques différences, similaires. Pourquoi n’ont-elles pas été publiées à l’époque ? Répondre à cette question fournirait peut être un début de réponse sur les tenants et aboutissants à la publication de cette 3e édition de l’ « Enquête nationale sur la perception des habitants envers la sécurité, liberté et la gouvernance locale en Tunisie 2021 ».

Par Houcine Ben Achour
15/07/2022 | 08:43
4 min
Suivez-nous
Commentaires
Gg
C'est général
a posté le 17-07-2022 à 11:16
Ce désintérêt pour les idées et le débat, pour la chose publique, est général.
On ne lit plus, on twite.
On ne s'informe plus, on va sur FB où on avale n'importe quoi.
On ne lit plus les philosophes, anciens et modernes, on se gave des niaiseries qui circulent sur les réseaux a-sociaux.
On ne débat plus, on s'injurie sous couvert d'anonymat sur instagram.
Ces technologies qui devaient créer un monde meilleur, appauvrissent la pensée, la réflexion et nous isolent les uns des autres.
Et le corollaire: on fuit l'effort, on ne travaille plus.
Ce phénomène est mondial, songez qu'en France les élections voient 50 à 60% d'abstention!
Je ne sais pas où on va comme ça, mais certainement pas vers un monde meilleur!
Hassine
Preuve accablante
a posté le 16-07-2022 à 09:03
Que les élites exploitent la subjectivité et non l'objectivité de ce peuple paresseux et naïve déconnecté de tous engagement réel et effective envers sa société