Il est temps que les imams parlent d’une seule voix.
Les attentats terroristes au Bardo et à Sousse sont loin d’être isolés. On ne parle aujourd’hui que de ces deux attaques en ayant, parfois, tendance à oublier que ce ne sont que la suite (et non la fin) d’une longue série d’attaques meurtrières qui ont ciblé la Tunisie depuis 2011. Les soldats et les sécuritaires ont été les premiers touchés et leurs vies n’ont pas moins de valeur que celles des civils. Si un grand dérapage sécuritaire a été le premier à blâmer, si le ministère de l’Intérieur a été le premier pointé du doigt pour ne pas avoir su réagir à temps et pour ne pas avoir prévu ces attaques, il n’est pas le seul à placer sur le banc des accusés. Celui des Affaires religieuses doit y être assis également.
Il est naïf et peut-être même stupide de dire que le terrorisme n’est pas de chez nous, qu’il est étranger à nos terres. Nous connaissons tous, ou presque, un jeune emporté par la folie du terrorisme. Un jeune bien de chez nous qui a décidé « du jour au lendemain » de porter les armes et de combattre les siens. En tant que citoyenne tunisienne, je peux vous en citer trois parmi les membres de ma famille ou de mes amis…
A regarder de près les portraits de ces jeunes porteurs d’armes qui servent de chair à canon et tirent à bout portant sur tout ce qui bouge, on se rend compte de la portée que l’embrigadement peut avoir. On se rend compte du pouvoir qu’ont certains illuminés sur une jeunesse pauvre, désemparée et en quête de valeurs. On se rend compte de la portée des discours de ces fous de Dieu et du rôle que peuvent jouer les imams dans les mosquées.
D’accord le ministère des Affaires religieuses a décidé depuis quelques semaines de faire la peau aux mosquées dites « clandestines » ou « hors-la-loi » ainsi qu’aux prières en plein air, démonstration de force annuelle organisée à l’occasion des fêtes religieuses, mais ceci est loin d’être suffisant. Allez écouter les prêches de certains imams parfaitement en règle dans des mosquées tout ce qu’il y a de plus réglementaires. On parle de la dégradation, de plus en plus galopante, des mœurs chez les Tunisiens ; des châtiments qui devront être infligés à ceux qui ne nous ressemblent pas ; de la désinvolture et du laxisme de nos politiques, accusés d’être sous la botte de puissances étrangères obscures ; des ravages que font ces diables de journalistes en déformant la réalité et en servant de sombres agendas… Certains sujets sont devenus monnaie courante dans les prêches et certaines hostilités n’y sont pas du tout étrangères. La violence et les appels au meurtre y sont également monnaie courante. Les imams, de plus en plus politisés, ne profitent plus de leur auditoire pour « éduquer » leurs fidèles en prêchant des valeurs universelles de générosité, de civisme, de respect de l’autre, de propreté, de piété, etc.
Les imams sont écoutés, suivis et pris en exemple par une partie non négligeable de la population qui se rend, chaque semaine, assister aux prêches de la prière du vendredi. Leurs paroles sont lourdes de sens et ont une portée à prendre très au sérieux. Une portée très dangereuse lorsque l’on sait que certains de ces imams manquent d’éducation, sont eux-mêmes endoctrinés et véhiculent aux masses des idées qui leur sont personnelles, le tout en ayant le grand pouvoir de parler au nom de Dieu.
Je rejoins dans cet ordre d’idées l’appel du député Mehdi Ben Gharbia à créer, d’urgence, « un plan d'action urgent pour instruire et protéger nos jeunes des dogmes takfisristes et de la haine qui briseraient leur vie et celle des autres » ainsi qu’une « charte républicaine et une ligne directrice citoyenne non partisane qui feraient participer nos prêcheurs dans notre effort de guerre, car on ne pourrait vaincre sans leur apport de conviction de bonne parole et de sagesse ». Il est temps de s’intéresser de plus près à ce qui se dit aux micros des mosquées, il est temps de priver de cette délicate mission ceux qui ne sont pas à sa hauteur, et il est temps que les imams parlent d’une seule voix, celle de l’intérêt du pays et non de leurs voix à eux ou de ceux qui sont derrière…



Commentaires (24)
Commenter@tout a un prix :partons par votre pseudonyme ,la logique de prix ...
@le vieux Magon :qui se permet de dire :bétise et religiosité
@faouzit ,qui a pitié des Imbéciles ,et qui ...
j'attend de voir TARE9 RAMADHAN ,avoir une chaîne de tv à lui
@faouzit,qui dit :avoir pitié des imbéciles ,
Et moi j'ai pitié ds imbéciles !
L'Histoire est impitoyable, à chaque fois qu'un peuple, ou un individu , suffisants, se voient le centre du monde, ils se fourrent le doigt dans... le centre de l''il. La vérité est universelle ou ne l'est pas. La vérité n'est dans aucun texte, car les texte se suivent et s'assemblent. Et l'Arabe, aussi belle soit elle comme langue, ne peut se prévaloir d'être meilleure que les autres. et le savoir des Grecs, et de tous ceux qui ont précédé a permis de construire les certitudes et le savoir moderne. Que certains essayent, pourtant par cet élan d'égocentrisme mortel, de renier.
li koulli ma9amin ma9al,les imams disent ce qui doit être dit,ils font
Agir fermement contre l'utilisation politique de la religion
Il est plus que temps que les politiques et les élites de Tunisie parlent d'une seule voix sans avoir peur d'être taxés à tort d'islamophobie et ontrent l'exemple au peulpe qui est dans un profond désaroi
Il doivent "prêcher" la séparation entre la sphère privée et le domaine public, entre la religion et les affaires laïques. Prouver qu'islam et modernisme ne sont pas incompatible.
Bravo pour votre article courageux et vrai.
La Liberté est un acquis
c'est une erreur grave de fermer les mosquées - au lieu de faire nommer un Imam ou laisser le choix au gens du quartier de choisir un Imam parmi les leurs - fermer une mosquée n'est pas la solution.
@tout a un prix - Les solutions existent, mais la communication qui fait defaut
Ces intellectuels qui proposent des solutions pour sortir de la crise de l'Islam restent isoles et ils n'ont pas réussi a toucher les masses populaires. Leurs ouvrages sont trop compliques et s'adressent a des intellectuels et des chercheurs et negligent le commun des mortels. Ils font des apparences épisodiques mais le volume de leur communications restent faible compares au fleuve de propagande des Wahhabites et leur derives.
Ce n'est pas les solutions qui manquent, mais c'est la volonté et l'execution qui font défaut. Ca rappelle les invasions des Banu Hillal ou les habitants de l'Ifriqiya de l' époque sont restes immobiles et s'échangeaient les insultes et accusations pendant que les Hillaliens saccageaient les villes et détruisent les fermes.