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Chroniques
Les Cassandres à l’assaut du taux de change
Par Houcine Ben Achour
24/10/2019 | 18:00
4 min
Les Cassandres à l’assaut du taux de change

 

C’est vraiment curieux de constater que beaucoup de ceux qui défendent l’exigence de rétablissement de la confiance et de stabilité pour sortir le pays de l’ornière de la crise sont ceux-là mêmes qui jouent, systématiquement, le rôle des Cassandres pour décrire l’état d’évolution de la situation économique du pays et de ses perspectives. Pour eux, tout n’est ne grisaille. Et si quelques éclaircies se présentent à l’horizon, ils ne sont que mirages.

Ils plaident la confiance, mais ne se rendent pas compte que, par leur attitude, ils sèment la déprime et le doute.

Alors qu’il convenait de saluer la lucidité et le courage de la Banque centrale de Tunisie (BCT) d’avoir engagé les mesures nécessaires pour éviter une glissade sans fin du taux de change du dinar dont le préjudice sur le cadre macro-financier aurait été désastreux. Alors qu’il convenait de se rendre à l’évidence que l’approche d’une dépréciation compétitive du taux de change ne donnait aucun résultat probant en termes d’exportation, sans pour autant freiner les importations et que, par ailleurs, les tensions inflationnistes prenaient des proportions alarmantes. Qu’il fallait éviter le tourbillon dans lequel le pays risquait de sombrer en freinant les anticipations d’achat de devises qui, à mesure, prenait des allures spéculatives. Ne convenait-il pas de se réjouir, un tant soit peu, de ce redressement et cette stabilisation du taux de change et de cette détente constatée au niveau des prix ?

Il y a un peu plus d’un mois un article publié par notre confrère Leaders avait suscité un grand émoi au sein de la communauté des économistes et des experts en la matière. Son intitulé résumait parfaitement un point de vue : « Laissez s’apprécier le dinar est une politique irresponsable », dans lequel l’auteure affirme qu’une appréciation du dinar « est en fait un défi au bon sens le plus élémentaire. Une appréciation du dinar encouragerait l’importation, pénaliserait l’exportation et déprimerait à la fois la production nationale et l’emploi. Elle creuserait davantage le solde du compte courant et augmenterait la dette externe », précisant que, quand bien même cette appréciation du dinar est due à une augmentation de l’offre de devises, celle-ci n’est que conjoncturelle et « aurait dû être saisie comme une excellente opportunité pour reconstituer nos réserves internationales » et concédant néanmoins que « le dinar pourrait s’apprécier en même temps que s’améliorerait le solde du compte courant ».

Tout cela donnait matière à débat, cela va de soi. En revanche, ce qui n’allait pas de soi est que l’auteure concluait son article sur une malheureuse affirmation selon laquelle « Cette politique est due soit à une erreur de jugement de la part de la Banque Centrale, soit à des considérations politiciennes : il s’agirait de jeter du sable dans les yeux des électeurs pour qu’ils voient dans l’appréciation du dinar un signe évident du succès des politiques menées par l’administration actuelle ». Hasard du calendrier, le jour-même de la publication de l’article, la BCT publiait sa note trimestrielle sur l’évolution économique et monétaire du 1er semestre 2019 et ses perspectives de court terme dans laquelle elle consacrait un focus sur l’évolution du taux de change qui analysait par le menu les raisons de l’appréciation du dinar. L’institut d’émission y observait que pour la première fois depuis 2017, le solde net des dépenses en devises a dégagé un excédent ou plutôt une économie appréciable en devises durant les 8 premiers mois de 2019 alors qu’il affichait des pertes considérables en 2018 et 2017. On observe par ailleurs qu’en dépit d’un déficit de la balance commerciale toujours aussi lourd que persistant, le solde de la balance courante par rapport au PIB affiche un recul notable en 2019 par rapport aux années précédentes. Parallèlement, le stock de réserves en devises s’est renforcé. A la fin du mois d’août 2019, les réserves en devises équivalaient à 98 jours d’importations contre seulement 84 jours une année auparavant.  

Le dossier est-il clos pour autant ? Non. Certains persistent et signent, ne retenant en fait que les conclusions de l’article de Leaders sur des supposées considérations électoralistes que la BCT a décidé de redresser artificiellement le taux de change du dinar. Car, sous peu, incessamment, le dinar va reprendre sa chute. Le plus malheureux est que leur prédiction est possible si…, si… et si….. Avec tant de si, on mettrait la Tunisie en bouteille. En tout cas, cela ne peut accréditer leurs suppositions. Cela serait désespérant de la part d’économistes qui prônent par l’impérieuse exigence de confiance et de stabilité.

 

Nota Bene : A un moment où l’on n’arrête pas de célébrer l’œuvre de Bourguiba, la BCT vient de publier un communiqué rappelant que le mardi 31 décembre 2019 est le dernier délai d’échange des billets de banque de 10 dinars (type 1986, type 1994 et type 2005) aux guichets de la Banque Centrale de Tunisie. Parmi ces billets, celui de 10 dinars portant le profil du Président Habib Bourguiba, fondateur de la république et de l’Etat moderne. C’est le dernier billet à l’effigie du « Combattant suprême ». J’ose espérer qu’à l’occasion de la création d’un nouveau billet, la BCT se rappellera aux bons souvenirs de notre 1er Président et aussi au fondateur de l’institut d’émission et du fondateur du dinar : Hédi Nouira.

 

 

 

 

 

 

Par Houcine Ben Achour
24/10/2019 | 18:00
4 min
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Commentaires (13)

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Guide de tourisme
| 25-10-2019 16:58
Il y a quelques jours, et c'était la 5è fois durant ces derniers 3/4 mois, que des touristes français me disent - reçu en main - avoir changé leurs euros contre des dinars à l'aéroport...en France.
Le taux, tenez vous bien, 2.5.
Si les touristes français ou autres viennent avec des dinars...

J. Hannachi
| 25-10-2019 15:01
Cher Mr Saidane,

Vous avez raison, vos analyses sont très techniques et expriment un point de vue technochratique de la réalité. Convenez que ce n'est pas la seule vision du monde.
A mon avis, vous n'avez pas cerné le sens de l'article. Mr Houcine reproche justement un acharnement des techniciens sur les media avec un diagnostic mortifère (et quoique technique pas necessairement objectif ideologiquement) et déprimant.
Il ne s'agit pas de nier la réalité mais de l'approcher avec plus de richesse, moins d'acharnement et plus de propositions constructives.

Je crois bien que vous avez raison sur un certain plan technique mais votre positionnement est trop rigide, trop pointu voir trop en Tunnel. Le règne des techniciens sur le débat publique est insupportable et très désagréable pour le commun des mortels.

Que vous essayez de tirer l'auteur et les lecteurs vers votre domaine de compétence, est compréhensible mais que vous le faite pour contrer une critique qui est - par essence - en dehors de votre zone de confort l'est moins.

Ne soyez pas sur la défensive, essayez de voir un peu les autres visions et positions. Vous allez voir, ça va impacter votre propre analyse, qui ne le sera pas moins "technique".

Bien à vous,
J. Hannachi

Dali
| 25-10-2019 14:17
Est ce que les prédictions de Cassandre dues à son don de dire l'avenir, n'avaient pas été vouées par Apollon à ne jamais être crues, y compris de sa famille ?

Rationnel
| 25-10-2019 13:35
Si Ezzedine, vos sorties sur les plateaux de TV vous répétez des affirmations qui sont loin de la vérité:
Vous affirmez que les investisseurs étrangers vont fuir la Tunisie, ce qui est infondé.
Les investisseurs ne considèrent pas le Budget de l'état dans leurs décisions.
La Tunisie a reçu des projets et des offres d'investissements de 1200 million dinars pour l'énergie solaire et 400 millions TND pour l'éolien qui va se répéter et progresser chaque année. La Tunisie peut recevoir 10 fois plus d'investissements dans ce domaine. L'investissement dans les énergies renouvelables au monde va dépasser les 1000 milliards de dollars cette année (voir BNEF : Green bonds). L'énergie renouvelable va aider a réduire le déficit énergétique et le déficit de la balance des paiements.
Vos sorties critiques et erronées ont un effet négatif sur la confiance des investisseurs locaux. Je vous conseille de mieux vous informer.
La mise en place d'une liaison électrique sous marine entre la Tunisie de l'Europe va non seulement permettre l'exportation de électricité vers l'Europe mais aussi ouvrir le potentiel de l'installation d'éoliennes flottantes en méditerranée qui sont moins couteuses de point de vue LCOE (Levelized Cost of Energy).
La valeur du dinar n'a aucune importance, qu'il monte, qu'il descende son influence sur l'inflation est secondaire vu que les produits importés sont dans la plupart des produits de luxes ou secondaires ou on a des alternatives locales. Son influence sur les investissements énergétique est nulle (les coûts et revenus sont en dollars). Donc votre débat avec Si Houcine est sans conséquences.

Saidane Ezzedine
| 25-10-2019 11:44
Si Houcine, j'attends encore votre réponse à mon commentaire. Avez-vous essayé de regarder ce qui s'est passé pendant la même période du côté des dettes extérieures.

Moi
| 25-10-2019 08:36
@Si Houcine: L'article et les commentaires sont très intéressants, par contre vous ne pouvez pas et ça ne se fait pas que vous faites des citations d'un article publié sur le web et ceci sans donner le lien-http (sans référence, et sans le nom de l'auteur)

Dans le domaine scientifique et même littéraire un travail de recherche avec des citations sans référence est tabous'?'

Ezzeddine Saidane
| 24-10-2019 21:53
Si Houcine si le redressement du Dinar vous convient et vous rend heureux, tant mieux pour vous. A ce propos il ne s'agit pas d'exprimer des sentiments, il s'agit de faire un raisonnement objectif et technique. Pour compléter votre présentation je vous propose d'examiner l'évolution de la dette extérieure pendant la même période. Vous allez peut être vous rendre compte que ce redressement du Dinar et l'augmentation des réserves de change se sont fait s au moyen de crédits extérieurs !!!

Jilani
| 24-10-2019 20:15
Il fallait écrire cet article avant les élections pour que les Tunisiens sachent qu'il y a réellement un progrès et ne pas écouter tous les économistes bêtement comme ce ezzdine saidane qui n'arrête pas de crier que toute cette amélioration est temporaire à cause des élections et le dinars va chuter après. Nous avons eu enfin un très bon gouverneur de la bct Marouane abassi qui a sauvé le pays, j'espère qu'il gardera son poste, les nahdouis ont amené chedly ayari une catastrophe pour le pays.YC en a payé le prix de ces soi-disant économistes incompétents et haineux.

Aloulou
| 24-10-2019 19:48
Aux usa la photo du président est toujours présente sur les billets:
1 dollar Washington
5 dollar. Lincoln
10 dollar Hamilton
20 dollar. Jackson
50 dollar. Grant
100 dollar. Franklin
L'histoire d'un pays c'est ses presidents

Mohamed
| 24-10-2019 18:54
faute de frappe: dictée