
À la date du 1er juin 2022, le président de la République, kaïs Saïed, a annoncé la révocation par décret de 57 magistrats. La nouvelle avait suscité la colère et l'indignation de plusieurs personnes, notamment des juristes et professeurs universitaires de droit. Ils ont considéré la démarche comme étant une ingérence du pouvoir exécutif dans le pouvoir judiciaire.
49 Magistrats des 57 révoqués ont fait appel à la décision et ont obtenu gain de cause. Le Tribunal administratif avait prononcé un sursis d’exécution de la décision de révocation les visant. Néanmoins, le ministère de la Justice a décidé de s’opposer à l’application de cette décision non pas par des voies judiciaires, mais en refusant tout simplement de s’y conformer. Le pouvoir exécutif a, donc, décidé de ne pas appliquer les jugements prononcés par la justice au nom du peuple tunisien. Le ministère a, également, engagé des poursuites judiciaires à l’encontre des magistrats révoqués.
En plus de cette attitude, des magistrats tunisiens ont choisi de soutenir cette démarche et de se dresser contre leurs collègues ou tout simplement de se soumettre aux diktats du ministère de la Justice par peur d’être eux aussi sanctionnés.
Ainsi, Business News a appris qu’un juge a décidé de ne pas respecter la décision de sursis d’exécution et d’estimer que la décision de révocation par décret primait sur le jugement du tribunal administratif.
L'un des magistrats révoqué par décret présidentiel a été convoqué pour être auditionné par la justice. Il a répondu à la convocation d'une chambre d'accusation d'une cour d'appel, mais a indiqué qu'il ne se soumettra pas à l'instruction puisqu'il bénéficiait de l'immunité judiciaire. Son avocat, présent à ses côtés, a expliqué la chose par la décision de sursis d'exécution. Celle-ci rejette la décision du président et l'annule. L'avocat a présenté une copie à la chambre d'accusation, mais elle a décidé de ne pas prêter d'importance à ce jugement. Elle a estimé que le magistrat en question ne bénéficiait pas de l'immunité et a motivé cette décision par la révocation de la personne concernée. La chambre d'accusation a, donc, décidé qu'un décret présidentiel faisait foi et que la sentence prononcée par le Tribunal administratif n'avait pas de valeur face à ce dernier.
Pour cette juridiction, les décrets, qui se classent tout en bas de la pyramide de Hans Kelsen et appartiennent au bloc réglementaire, priment sur tout y compris sur les sentences prononcées par la justice !
Nous avons fait le choix de ne reproduire qu'une partie du PV
S.G

