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Habib Essid : Partira, partira pas ?
07/06/2016 | 16:59
6 min
Habib Essid : Partira, partira pas ?

 

Lors de son interview diffusée jeudi dernier sur la chaîne nationale, le président de la République avait évoqué l’idée d’un gouvernement d’union nationale, lançant ainsi le débat et suscitant des réactions mitigées des différents partis de la place. Depuis, les déclarations fusent de toutes parts. Entre approbation et refus, la scène politique est en ébullition. L’idée que Habib Essid serait sur la sellette, ne datait pourtant pas d’aujourd’hui. Depuis un bon moment déjà, les observateurs s’attendaient à un changement imminent à la tête du gouvernement. Alors, partira, ou partira pas ?

 

Comme attendu, l’initiative de former un gouvernement d’union nationale a fait grand fracas et a entrainé une déferlante de communiqués et de déclarations. Première réaction de Habib Essid : le chef du gouvernement choisit d’endosser le rôle de l’homme d’Etat responsable qui fait primer l’intérêt du pays sur le sien : « Si l’intérêt du pays nous dicte de partir, nous partirons », dira-t-il au micro de Wassim Ben Larbi, au lendemain de la diffusion de l’interview du président de la République. Dans le même ordre d’idée le chef du gouvernement explique que ce ne serait pas la fin du monde s’il présentait sa démission et que personne n’était indispensable. Et de renchérir que la proposition de Béji Caïd Essebsi était légitime et que ses prérogatives lui permettaient de présenter une semblable initiative.

Depuis cette déclaration, on a vu Habib Essid poursuivre ses activités sans jamais revenir sur cette proposition et sa démission fait l’objet de nombreuses spéculations.

 

Le mouvement Ennahdha a salué cette initiative. Son chef, Rached Ghannouchi, explique que celle-ci a permis de rétablir l’équilibre de la scène politique. Quant à une éventuelle démission de Habib Essid, Ghannouchi a précisé qu’Ennahdha l’a soutenu, compte tenu de sa persévérance et de son intégrité. Mais le plus intéressant c’est qu’il a affirmé que le mouvement « continuera à le soutenir tant qu’il bénéficie de la confiance du président de la République et de Nidaa Tounes ».  Rached Ghannouchi annonce par ailleurs la couleur en déclarant qu’Ennahdha assume une part de l’échec, mais proportionnellement à sa participation au gouvernement : « Si nous devons assumer une plus grande part, il faut que notre participation soit plus grande », avait-il relevé.

 

Lundi, Nidaa Tounes tient une série de réunions, le temps est aux négociations avec les partis de la coalition gouvernementale, notamment Afek et Ennahdha. A ces entrevues sont présents des ministres du gouvernement Essid. Ministres qui statueront sur l’éviction de leur chef actuel. Plus tôt dans la journée, Béji Caïd Essebsi et Habib Essid se sont entretenus et ont examiné « la proposition d'un gouvernement d'union nationale » et « la nécessité de garantir toutes les raisons de son succès », d’après un bref communiqué de la présidence. On s’attendait à ce que le chef du gouvernement présente sa démission. Il n’en avait visiblement pas l’intention.

 

Dans la foulée, Lotfi Zitoun conseiller politique de Rached Ghannouchi, demande à Habib Essid de démissionner. Et c’est au tour de Yassine Brahim, dirigeant d’Afek Tounes et ministre du Développement et de la Coopération internationale, d’annoncer que le nouveau gouvernement sera mis en place d’ici quelques semaines. Mais c’est tard dans la soirée qu’un communiqué du comité politique de Nidaa Tounes a tranché dans le vif : Nidaa lâche Habib Essid, invoquant la nécessité que le nouveau gouvernement ait à sa tête une nouvelle personnalité et bénéficie d’un large consensus. Exit Habib Essid ! Pratiquement tous les ministres Nidaa étaient présents à cette réunion…

 

Au sein des partis de l’opposition on hausse le ton. Hamma Hammami, porte-parole du Front populaire a indiqué que le président de la République a reconnu, de par son initiative, que le pays connait une crise et à demi-mot l’échec. « Le Front Populaire estime que les causes de la crise sont dues au mode de gouvernement fondé sur les calculs partisans qui ont conduit à des luttes au sein de la coalition et des partis au pouvoir eux-mêmes portant ainsi atteinte aux intérêts du pays ». Et de souligner que le plus important serait d’examiner les causes de l’échec au lieu de débattre des formes que doit prendre le nouveau gouvernement, « Le gouvernement actuel a échoué sur tous les niveaux. A travers son initiative, le président de la République voulait faire porter la responsabilité de cet échec à toutes les parties. Les vrais responsables sont, désormais, la présidence de la République, la coalition gouvernementale et le gouvernement ».

Mercredi, une réunion élargie entre les forces de l’opposition démocrate représentées par le FP, Al Joumhouri, le Mouvement du peuple, Al Massar et le parti Socialiste débattra de l’initiative du président et poursuivra les négociations afin d’aboutir à une position commune consensuelle, apprend-on.

 

Dans le camp de Marzouki, on tire à boulet rouge sur Béji Caïd Essebsi et son initiative. Al Irada estime que la proposition de la formation d’un gouvernement d’Union nationale ne relève pas des prérogatives constitutionnelles du président de la République. Un communiqué d’Al Irada insinue que M. Caïd Essebsi cherche à imposer un régime présidentiel en dehors des dispositions de la Constitution, tout en assurant que cette proposition vise à camoufler la crise au sein du gouvernement. Et on continue par accuser le chef de l’Etat de chercher à fuir ses responsabilités dans la mesure où ladite proposition risque de perturber le bon déroulement de l’action gouvernementale.

 

Dans les faits, que stipule la Constitution en cas de remplacement du chef du gouvernement ? Cinq cas sont prévus par le texte législatif : La vacance définitive du poste suite à un fait imprévu, en fait partie, mais ce n’est pas le propos ici. L’article 98 dispose que le chef du gouvernement demande à l’Assemblée un vote de confiance sur la poursuite de l’action du gouvernement. Si l’Assemblée ne renouvelle pas sa confiance, le gouvernement est réputé démissionnaire. Le même article dans son paragraphe premier dispose que le chef du gouvernement présente sa démission par écrit au président de la République qui en informe le président de l'Assemblée des représentants du peuple.

Dans les deux cas, le président de la République charge la personnalité la plus apte pour former un gouvernement. Il s’agit en l’occurrence, d’après l’article 89, du candidat du parti politique ou de la coalition électorale ayant obtenu le plus grand nombre de sièges au sein de l’Assemblée à l’issue des élections. Si le délai d’une semaine est expiré sans parvenir à la formation d’un gouvernement, ou si la confiance de l’Assemblée n’est pas accordée, le président de la République engage des consultations dans un délai de dix jours avec les partis politiques, les coalitions et les groupes parlementaires, en vue de charger la personnalité jugée la plus apte, en vue de former un gouvernement dans un délai maximum d’un mois.

 

L’autre cas consiste en une motion de censure provenant de l’Assemblée. Au moins un tiers des députés peuvent déposer un retrait de la confiance au gouvernement. Cette demande doit présenter un candidat en remplacement du chef du gouvernement. Un même vote doit approuver la motion de censure et la nouvelle candidature.

Dernier cas (article 99), le président de la République peut demander à l’Assemblée un vote de confiance sur la poursuite de l’action du gouvernement, deux fois au maximum durant tout le mandat présidentiel. Si l’Assemblée ne renouvelle pas sa confiance, le gouvernement est réputé démissionnaire.

 

Habib Essid est plus que jamais sur la sellette. Lâché par Nidaa Tounes, critiqué de toutes parts, il ne fera vraisemblablement pas long feu. Qui sera son successeur ? Négociations et concertations vont bon train et ne font que commencer. Béji Caïd Essebsi n’aurait pas présenté son initiative sans avoir plusieurs coups d’avance. Les contours du nouveau gouvernement d’union nationale se dessineront dans les jours, voire dans les semaines à venir. Entre temps, les jeux sont ouverts et chacun essayera de rebattre ses cartes…

 

Ikhlas Latif

07/06/2016 | 16:59
6 min
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Commentaires (12)

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kbwebkb
| 10-06-2016 02:45
Que fait HCE à carthage dans la réunion censee préparer le post Essid? Pourquoi les médias n'en parlent pas?

Nahor
| 08-06-2016 18:20
Cher Monsieur,

nous sommes bien d'accord et merci de me préciser vos vues. Je crois aussi que la grande majorité du peuple tunisien les partage.

Par amour de la Tunisie, et pour le rayonnement de ce Pays dans son essor de civilisation pluri-millénaire, menacée par une secte xénophobe, réactionnaire et profondément ignorante de l'histoire et de l'humanisme - je veux dire la secte islamiste soutenue par la CIA actuellement pour un projet très destructif- j'avance parfois mes objections et mes critiques aux articles en réaction à l'actualité.

Retourner à un Etat fort, cela signifie avoir la lucidité, la persévérance et la volonté inébranlable pour les vrais patriotes et la partie saine des acteurs politiques de réunir toutes les forces populaires dans une coalition des partis en fonction anti-islamiste (et non anti-islamique), progressiste et libertaire.

Tout en sachant que le protectionnisme d'Obama et de son appareil secret et de complot, la CIA, ne va plus durer longtemps, le cheikh-moukhabarat venu de Londres sous mandat assez spécial et avec un passeport soudanais (ces circonstances expliquent déjà toute la soi-disante "révolution des jasmins..."), veut couper court et cherche un raccourci pour accéder au pouvoir et en terminer avec le système de droit étatique actuel, dans le but d'instaurer sa "république islamique" sortie des schémas de Khomeiny, qu'il n'a jamais abandonnés...

Il a, entre autres, un soutien secret de la part de l'Iran des mollahs et trompe continuellement l'opinion publique par ces déclarations médiatiques bien calées mais toujours à double-fond.

Il faut simplement lui faire barrage et protéger le système sécuritaire actuel, en attendant la réunion des forces progressistes.

cordialement à Vous,

"Nahor" -activiste de Droits Humains

Albatros
| 08-06-2016 14:44
un nouveau gouvernement qui téléphone tous les jours à la France qui lui dicte ce qu'il faut faire, quel "terroristes" arrèter ... haha.

une nouvelle révolution nécessaire pour se débarrasser complètement de la colonistion mentale qui dure depuis 1881, perpètrée par le père de la dépendance, le franamlphabète Bourguiba.

le système français n'est pas bon pour vous. y a d'autres systèmes dans le monde.

WAKE UP !!!

DHEJ
| 08-06-2016 13:58
La constitution comprend aussi comment défaire le pouvoir exécutif et celui législatif. ..


BCE par sa bourde politique détruira l'État...


Le GOUROU et sa secte jubile par ignorance

Tounsi Beldi
| 08-06-2016 12:19
Aux nombreux éminents critiques politiques que j'éviterais de nommer, je leurs dis:gargarisez vous avec des avis explicites, tantôt partisan, tantôt professionnel , souvent inutiles car ils n'ont pas de portée politique.
Nos avis ne servent qu'à extérioriser un sentiment de grande déception du à un coup d'état fomenté par des forces endogènes appuyées par des forces exogènes et que les services de renseignements de Ben Ali n'ont pas vu venir ou alors sous estimées.
Je ne pense que ce gueux de Kasserine qui est devenu martyr national et auquel on a donné le nom à une grande avenue, une place , soit à lui seul le déclencheur de cette pseudo révolution.
Nos avis sont, et resteront,un exutoire sans aucune incidence politique.
Mr Essid partira comme ceux qui l'ont précédé,et le prochain aura les mêmes problèmes.
Pendant ce temps, notre pays coule, coule.

Nephentes
| 08-06-2016 09:58
Perte de temps, d'énergie et de cohésion.

Pourquoi remplacer Habib Essid ?

Pourquoi se focaliser sur les défauts de communication et l'absence de gesticulations ou fanfaronnades d'un travailleur acharné , cohérent avec lui-même et qui fait des réformes de fonds ?

Pourquoi les politicards et les citoyens ne s'attachent t-ils pas à examiner ses projets en cours ? Car un programme quinquennal d'action gouvernementale existe bel et bien !!

Et par qui va t-on remplacer ce grand commis de l'État qui connaît très bien les rouages de l'ogre administratif, cause principale des blocages des réformes pertinentes entreprises ?


Bourguibiste nationaliste
| 08-06-2016 08:54
Cher Monsieur,
Je vous remercie pour votre commentaire et même si probablement ma réponse vous aura échappée, je me permets cependant de répondre à votre commentaire. En vous disant ceci : je ne suis pas pour retourner à Ben Ali car ceci est illusoire et ce n'est pas souhaitable. Je reconnais que l'ancien président a permis aux Tunisiens de maintenir un niveau de vie correcte ; il nous a assuré la sécurité des biens et des personnes ainsi que la souveraineté du pays. Mais je reconnais également l'incapacité de Ben Ali à faire évoluer politiquement la Tunisie vers plus de liberté, de démocratie tout en maintenant la sécurité et le bien être. C'était certainement un pari difficile qu'il n'a pas su gagner. Il aurait pu agir dans ce domaine mais il n'a pas su le faire car il n'avais par les compétences et n'a pas su s'entourer de personnes compétentes.
Ayant dit cela, je considère cependant que la voie dans laquelle nous nous sommes engagées depuis 2011 est une voie dangereuse, une voie d'impasse car elle nous conduisait à l'insécurité, à une détérioration de nos conditions de vie, au développement du terrorisme et à la perte de notre souveraineté. Même si effectivement, on a un plus de liberté mais avec un immobilisme et une régression sociale et économique. Et en prime, nous avons les islamistes qui sont au c'ur du pouvoir et de l'Etat.
Lorsque je dis qu'il faut revenir en arrière, je veux simplement dire qu'il faut reconnaître que nous avons fait fausse route depuis 2011 et il nous faut rebrousser chemin pour retrouver des terres fermes. Cela ne veut pas dire qu'il faut revenir à Ben Ali. Cela signifie qu'il faut réinstaurer un pouvoir fort qui stabilise le pays sur le pays économique et sécuritaire. Il nous faut une pause afin de savoir où nous voulons aller et avec qui. Il nous faut une réforme du régime pour restaurer un régime présidentiel ; une nouvelle loi sur les associations qui interdit l'utilisation de l'islam à des fins politiques et qui régularise et contrôle le financement des partis ; une nouvelle loi électorale majoritaire qui mettra fin à la loi proportionnelle catastrophique qui avait été défendue par Y. Ben Achour. Et si, pour se faire, il faut passer par le référendum, on ne doit pas hésiter à le faire. Vous voyez donc que ces propositions vont au-delà de la question de savoir s'il faut ou non garder l'actuel premier ministre.
Telles sont les quelques idées générales qui, espérons le, éclaireront ma position de « retour au point de départ ». Revenir au point de départ, pour moi, signifie, revenir à la situation où le pays était plus fort et plus solide, et ceci pour un nouveau départ vers une progression lente et maîtrisée.

Nahor
| 08-06-2016 04:26
Evidemment la Constitution a prévu 5 figures, mais pas le complot actuel, car il s'agit bel et bien d'un complot conçu par et pour le parti Ennahdha, venant de son gourou exactement, qui fait mine d'abord de défendre Habib Essid, mais avec le seul intérêt d'avancer dans la prise de pouvoir et l'écartement du Chef du Gouvernement.

Il s'agit bel et bien d'une DÉSTABILISATION ÉTATIQUE, au profit direct des organisations terroristes qui guettent la République, et qu'Ikhlas Latif feigne de ne pas comprendre...

Il apparaît aussi que Rached Kheridji ait concerté cette manoeuvre avec Béji Caïd-Essebsi, lequel en réalité n'est pas à l'origine du projet du "gouvernement d'unité nationale", mais son colporteur médiatique, pour un évident intérêt personnel de lobby, après avoir trahi l'électorat de Nidaa et fait imploser le parti à cause de son fils Hafedh...

Donc, cher Monsieur, vous avez mal compris, jamais la Constitution aplanie la route à la destruction d'un gouvernement, mais à sa FORMATION et son maintient, ce qui est logique, mais pas pour les Caïd-Essebsi dont nous parlons:

1.ère figure, maladie ou accident mortel, ce n'est pas le cas...

2.ème figure (art.98), une action gouvernementale proposé par M. Essid à l'ARP. Il n'en a pas une en discussion pour le moment...

3.ème figure, (art.98) la démission, que M. Essid n' jamais présentée ni l'on se souhaite (personnellement dit) qu'il le fasse pour ouvrir la route à la catastrophe nationale sous la pression islamiste...

4ème figure: la motion de censure à l'Assemblée. Elle doit être motivée, basée sur la critique d'une action gouvernementale. Qu'inventeront-ils puisque là il n'a pas aucune terrain pour le faire? Cela ouvrira la vase de Pandore et le retour probable à la rue et aux manifestations. Au seul profit du plan subversif islamiste en filigrane...

5ème figure, l'art. 99 se base sur la demande du Président sur une action gouvernementale. Or ce que Béji Caïd-Essebsi propose n'est pas une action, mais une DÉMOLITION, que M. Essid peut -et normalement doit- pour l'intérêt supérieure de la Tunisie et pour éviter le chaos et le désordre sécuritaire, REFUSER NET.

M. Essid peut encore demander la réunion en conférence de l'Etat major des forces armées et détailler à l'opinion publique tunisienne les GRAVES MENACES qui incombent sur la Tunisie et les complications sur le plan international de ce projet-complot d'un gouvernement d'"unité nationale" (unité ou dés-unité? ce n'est pas clair du tout), qui est mené en vérité par les islamistes. Et surtout M. Essid devrait présenter véridiquement aux Tunisiens le spectre d'une RÉPUBLIQUE ISLAMIQUE telle qu'elle se profile dans un futur très proche...

Avec mes meilleurs voeux pour M. Essid de persévérance dans son poste très envié par ses adversaires et les ennemis de l'Etat de droit!

Alya
| 08-06-2016 02:16
C'est simplement l'application de la loi! au lieu de chercher un nouveau gvt. chaque année, il faut simplement respecter la loi, et arretter la corruption!

Ameur k
| 07-06-2016 22:07
Parfaitement d accord avec l ami hatem...en plus le plus important c est d arreter le progrmme precis a realiser sinon ca sert a quoi ce changement