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Le phosphate, cette malédiction bien tunisienne !
24/03/2016 | 19:58
4 min
Le phosphate, cette malédiction bien tunisienne !

 

Le secteur du phosphate en Tunisie fait face depuis cinq ans à une instabilité de la production. Une instabilité qui a pour première cause les sit-in de protestation ayant bloqué les opérations de transformation et l’exportation des dérivés du phosphate. Le bassin minier de Gafsa, vivier des mouvements sociaux, réclame sans relâche une partie de la rente du phosphate. Les grèves à répétition ont mis à plat ce secteur stratégique pour l’économie nationale et cette situation de crise traîne, alors qu’aucun des gouvernements qui se sont succédé en Tunisie n’a réussi à en venir à bout…

 

« L’Etat ne restera plus les bras croisés en regardant les sites de production vitaux et stratégiques, à l’instar du phosphate, paralysés », a déclaré mercredi le porte-parole du gouvernement, Khaled Chouket à l’issue de la réunion du Conseil des ministres. Un Chouket qui qualifie cette situation de « terrorisme économique », exercé en cette conjoncture délicate que connaît le pays. « La Tunisie a plus que jamais besoin de travail et d’effort pour promouvoir la productivité », avait-il ajouté.

 

De par ces paroles, le gouvernement semble vouloir se ressaisir, en promettant de sévir contre cette situation de déliquescence notoire. D’aucuns diront que cette décision survient bien tardivement et que les gouvernements successifs ont été incapables de parvenir à sauver un secteur pourtant stratégique et vital pour une économie tunisienne déjà en berne. Nos autorités sont restées impuissantes devant la recrudescence des mouvements de protestation et la fermeté dans le traitement de ce dossier leur a manqué, indéniablement. Néanmoins, il n’est jamais trop tard pour se ressaisir et sauver ce qui pourrait l’être.

Khaled Chouket a affirmé, suite au Conseil des ministres, que le gouvernement, tout en exprimant sa détermination d’en finir, s’engage à respecter les dispositions de la Constitution en termes de protection des droits à la grève et de manifester, outre la garantie des libertés publiques. Et ce, sans que cela n’affecte la production. Il faudra donc trouver le juste milieu entre ces droits garantis par le texte de loi et l’intérêt économique de la Tunisie. Une équation qui représente un enjeu majeur.

 

La Tunisie a perdu sa place de choix parmi les premiers producteurs mondiaux de phosphate, au profit d’autre pays, notamment le Maroc qui, à cause l’instabilité de la production tunisienne, a gagné des parts de marché et connait une fulgurante ascension dans le secteur. A l’heure où la Tunisie se bat dans les marasmes d’une crise économique aigue, et que l’un de ses fleurons est en pleine difficulté, le cours du phosphate sur le marché mondial enregistre une hausse sensible. Cela aurait été une aubaine…

 

Les chiffres parlent d’eux-mêmes.  Le secteur du phosphate a, en effet, enregistré, depuis 2010, un manque à gagner de près de 5 mille millions de dinars (MD). C’est ce qu’a récemment révélé à la TAP Romdhane Souid, président directeur général de la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) et du Groupe chimique tunisien (CGT).

On apprend que la production de phosphate a régressé de près de 60%, atteignant en 2015 environ 3,2 millions de tonnes, alors que le niveau de la transformation a baissé également à 2,5 millions de tonnes ainsi que le transport des phosphates qui est passé de 7,3 millions de tonnes au cours de 2010 à 2,3 millions de tonnes en 2015.

Actuellement, la CPG œuvre à retrouver le rythme normal de la production pour atteindre 8 millions de tonnes de phosphate commercial et réaliser les équilibres financiers de la compagnie.

Cependant, il est plus que nécessaire de dresser un diagnostic de l’état des lieux du secteur afin de fixer les réformes devant aider à surmonter la situation difficile : la responsabilité sociétale et la question des recrutements sont la pierre angulaire pour y arriver.

 

Au cours de ce mois de mars, Mongi Marzouk participait à un atelier organisé par le Groupe chimique tunisien et la Compagnie de phosphate de Gafsa sur la réalité et les perspectives du secteur des phosphates et des engrais. Principale recommandation qui en ressort : la criminalisation du blocage du travail dans les sites de production, de transformation et du transport du phosphate. Seraient-ce de nouvelles paroles en l’air comme tant d’autres avant? On attendra les actions concrètes…

 

Il n’est pas question ici, de dénigrer le droit à la grève. Un moyen pour les travailleurs de faire entendre leur voix et réclamer plus de justice sociale. Mais au lieu d’évoluer vers une action civilisée, ce droit s’est mué, durant ces dernières années, en un moyen de chantage plombant directement l’économie nationale. Bien évidemment, les ouvriers du bassin minier ont le droit de demander à ce que leur situation soit améliorée. Il est aussi incontestable que les habitants de Gafsa réclament des projets de développement découlant de cette industrie. Toutefois, ces revendications ne devaient en aucun cas impacter une économie déjà fragilisée.

 

Tous les indicateurs sont au rouge et avec le fléau du terrorisme qui nous guette, la situation tend à se compliquer. Le secteur du phosphate, comme tant d’autres, est à la traine. Mais dans ce cas précis, les solutions  existent bel et bien. Il suffit d’une réelle volonté des toutes les parties concernées, en premier lieu les autorités et les syndicats, pour désamorcer la situation.

Pour l’heure, la production de phosphate a atteint près de 14.000 tonnes par jour, ce qui est «acceptable», selon les responsables. Plusieurs sites de production restent, tout de même, bloqués depuis janvier 2016. La Tunisie n’est pas un pays riche en ressources naturelles. Le phosphate constitue une aubaine pour le pays. Une aubaine qui s’est transformée, malencontreusement, en malédiction…

 

Ikhlas Latif

24/03/2016 | 19:58
4 min
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Commentaires (17)

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TMT
| 28-03-2016 13:02
Ce qu'avance notre ami(e) Meskina mérite bien d'être approfondie car apparemment les investissements de cette organisation ne font que s'élargir ce qui serait bien dites vous;mais le hic ,c'est qu'il s'agit de l'argent des travailleurs et la première chose qu'il faudrait éclaircir c'est àqui profite ces investissements grandioses entrepris par une organisation à but non lucratif,je suppose
Par ailleurs il ya encore au moins 3autres secteurs non signalés:le tourisme,l'assurance et la promotion immobilière
Ça ne vous rappelle pas la Défense Nle en Égypte?!
@casaoui:vous ne faites que confirmer mes dire cher Baidhaui,mais croyez moi que nos problèmes sociaux économiques sont les mêmes à70% totes proportions gardées mais les solutions ne peuvent en aucune façon être les mêmes,ce qu'une large partie de nos citoyens n'arrivent pas à comprendre!
Reste toutefois que les liens de sentiments et de respect mutuels restent immuables n'est ce pas?
comprendre!

Miskina
| 27-03-2016 19:30
Ce mastodonte de GCT et CPG est en train d'investir dans des projets grandioses comme la nouvelle laverie d'Oum Lakhcheb (120 millions de DT), le projet d'acide technique(220 millions de DT), usine de TSP (110 millions de DT), dé-fluoration d'acide (200 millions de DT) transport hydraulique de phosphate ..., sous prétexte de développer le secteur! une grosse mensonge pour cacher le vraie problème qui est le manque de sérieux et de rigueur, une productivité presque nulle. Par dessus tous,ces projets sont adjugés à des entreprises chinoises qui refusent de faire travailler les tunisiens juste des miettes,d'où ils vont payé le prix de ces projets? la réponse est simple ça sera comme le cas des banques publiques,c'est nous le contribuable, bien évident dans le cadre d'une opération de sauvetage et d'assainissement qui aura lieu dans 5 ans. Des centaines de hauts cadres très bien payés, sillonnent chaque jour le monde, des missions fictives à la recherche de frais de déplacement rien que ça, pour s'en convaincre poser la question au DGAT du GCT!
Enfin un chiffre très significatif: 23 000 employés pour à peine 4 millions de tonnes de phosphate par an faites vos calcul Mrs les ministres et Mr le PDG qui dort dans un Soubet profond

Hammami
| 27-03-2016 19:07
Qui ose confronter des hommes comme le lion de Redeyef: Adnane Hajji?
Si tu approches le lion te dévorera, le butin (phosphate) est à moi, c'est exactement l'histoire de Mille et une Nuit!
Des milliers de gens payés depuis 5 ans avec des fortes salaires et ne produisent rien, production zéro.

Casaoui
| 27-03-2016 01:51
C'est normal, au Maroc c'est tu ferme ta gueule et tu bosses et si t'es pas content tu pars, d'autres te remplaceront. Au moins tout le monde c'est qu'il faut travailler et c'est pas en bloquant les sites de production qu'on arrangera les problèmes, bien au contraire. Au Maroc, nous sommes avant tout pragmatique,et c'est dommage pour la Tunisie soeur que certains n'ont pas cette mentalité.

TMT
| 26-03-2016 21:07
L'OCP est pour le Maroc ce que organisme qui gère le pétrole est pour l'Algérie...c'est le Palais qui le suit qui a le dernier mot sans discussion .Ne pensez pas que les problèmes d'environnement ne se posent pas et il suffit juste de citer la ville de Safi qui a perdu son titre de port sardinier unique au monde et pourtant peu de protestations et la caravane marche. Et c'est valable pour presque tous les grands projets
Chez nous on est arrivé a construire des murets sur les voies de chemins de fer!
La majeure partie de nos problèmes ont pour origine notre entêtement qui frôle le sabotage.jusqu'à quand?

Dr. Jamel Tazarki
| 25-03-2016 21:14
Je suis tout à fait d'accord avec vous, en effet ce qui me préoccupe le plus est le sort que nous réservons aux prochaines générations tunisiennes. En Tunisie, nous endettons les prochaines générations tout en dilapidant les ressources naturelles qui devraient leur appartenir.

Puis, je rappelle que pour produire 3 tonnes de phosphate il faut sacrifier/ruiner 100 tonnes de terre et quelques dizaines de m^3 d'eau. Vous pouvez ainsi imaginer les conséquences fatales pour l'environnement!

Nous avons 300 milles chômeurs académiciens qui pourraient réaliser avec très peu d'investissement d'énormes richesses pour eux-mêmes, pour tous les Tunisiens et pour la Tunisie, si on savait leur donner un tout petit coup de pouce afin de pouvoir piloter des projets professionnels.

Cordialement

Jamel

Fehri
| 25-03-2016 20:50
Dr Jamel vous ne pouvez pas utiliser le titre Docteur si vous ne divulger pas l'impact de l'industrie du phosphate sur l'environnement.

Tounsi anti chlayeks
| 25-03-2016 20:25
Il y a eu un article duel Le monde la semaine derniere comment Le Maroc est en train de creaser l écart avec ses concurrents pour devenir en 2020 le 1 et producteur mondial d engrais!!! Le Maroc a aidé l Inde à améliorer son agriculture avec les engrais issus du phosphate! Maintenant le Maroc a commencé à faire la cartographie de toutes les terres agricoles en Afrique pour aller leur proposer l engrais nécessaire et spécifique!!! Ils démarrent cette année une autre chaîne de lavage dernier cri!!! Et nous??? Pffffff toujours le même discours : nous avons les meilleures compétences !!! Nous n avons pas d étrangers pour nous montrer!!! Pffff comme d hab y a pas plus minable que nous !!!

Fehri
| 25-03-2016 19:54
Dr Jamel: vos calculs sont justes, mais il faut etre franc quel edt l'impact de l'uranium sur les generations a venir. Pourriez vous nous donner le nembre des personnes deja affectees par le cancer et combien d'eau est contaminee et combien de mercure jete dans la mer. *** l'argent du phosphate!

Dr. Jamel Tazarki
| 25-03-2016 16:58
atteindre les 2 Millions d'euros