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Tunisie - La presse électronique est-elle une menace pour la presse papier ?
15/02/2010 | 1
min
Tunisie - La presse électronique est-elle une menace pour la presse papier ?
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Est-ce la fin d’un modèle et l’émergence d’un autre ? La menace des médias en ligne est-elle réelle ? La presse papier est-elle en crise ? Ou est-ce tout simplement un faux problème alimenté par des surenchères sans aucun fondement ? Autant de questions, auxquelles la table ronde organisée, samedi 13 février 2010, par le journal "Les Annonces", a essayé d’apporter des éléments de réponses. Le thème touchait à une problématique centrale, au cœur de tous les débats sur le devenir de la presse en Tunisie, en l’occurrence l’état des lieux de la presse papier à l’heure du développement rapide et sans précédent des médias en lignes. Par delà la pertinence et l’actualité du sujet débattu, il y avait une certaine complicité entre les intervenants, fondateurs de médias en lignes, universitaires et journalistes, pour couper court à toute forme de supputation infondée et insensée.

En l’espace de quelques années seulement, la presse électronique en Tunisie s’est forgé une identité propre à elle dans le paysage médiatique tunisien. Les médias en ligne, en Tunisie, doivent leur émergence et leur développement à un environnement médiatico-technologique international et national propulseur à une presse électronique.
Forte de son expérience, la presse a été l’un des tout premiers secteurs à se développer sur le réseau. Déjà, il y a une anecdote sur la place qui disait que la toile est "un gigantesque kiosque à journaux, et nous devons partir à sa découverte". C'est tellement vrai que ce nouveau modèle a suscité la crainte de certains "orthodoxes" que l’émergence de la presse en ligne n’érode le capital symbolique de la presse papier.

Dans son intervention, Nizar Bahloul, directeur de "Business News" semble trancher sur cette question. "Comme la télé n’a pas remplacé la radio, la presse électronique (qu’elle soit sur ordinateur ou sur téléphone) ne remplacera jamais la presse papier. Même constat chez Taoufik Habaieb, directeur de l’agence de publicité TH Com et du journal en ligne Leaders. La presse électronique poussera, au contraire, la presse papier à améliorer son contenu et à faire de l’investigation et de l’analyse, plutôt que de donner de l’information brute et nue où elle est court-circuitée par l’électronique, mais aussi par la radio et les chaines satellitaires. Ainsi, la presse électronique n’est pas une menace pour la presse papier, d’autant plus qu’une coexistence "pacifique" entre les deux modèles ne peut être que bénéfique pour le développement du paysage médiatique en Tunisie.

M. Bahloul, a par ailleurs, présenté les points forts de la presse électronique en Tunisie. Du côté de la rédaction, les médias en ligne se distinguent par la publication instantanée de l’information, la visibilité internationale, le ciblage des lecteurs et les statistiques qui permettent de savoir en temps réel le nombre de ses lecteurs, les articles les plus lus, les articles les plus recherchés,…"Il y a quelques années, sur Internet, on ne lisait que des articles négatifs sur la Tunisie et quasiment rien du tout sur les entreprises et la vie sociale et sportive du pays. Aujourd’hui, tout a changé. Les articles négatifs et tendancieux existent encore, mais ils sont noyés dans l’océan des articles rédigés par les journaux électroniques tunisiens reflétant la véritable réalité de la Tunisie", a-t-il ajouté.

Mais, il n’y a pas que le rédactionnel. Pour assurer sa survie, la presse électronique a développé également ses propres modèles économiques basés sur la publicité et la gratuité de lecture. Le nerf de guerre demeure sans aucun doute le bon ciblage des opérateurs économiques et l’offre d’un service personnalisé et transparent qui ne nuit pas au contenu rédactionnel. Un autre atout, la presse électronique est une presse écologique du fait que dans sa confection, elle n'a pas recours à l’usage du papier ou de l’encre, des produits qui ont fait ravage à l’environnement.

La communication de Taoufik Habaieb a mis en valeur l’outil internet, qui constitue un support susceptible d’accueillir les médias traditionnels ainsi que de nouveaux acteurs sans qu’une distinction puisse être nettement établie sur la nature des différents services offerts. Les sites de presse en ligne sont susceptibles d’offrir un traitement de l’information en continu, actualisée et enrichie par des dossiers et des services en ligne, des outils de recherche, des documents et archives. Ils offrent également de nouveaux services aux opérateurs économiques, notamment le réseautage ce qui favorise la prolifération des partenariats entre eux. En outre, les médias en ligne proposent aux internautes les annonces interactives, les études, les "Sucess stories" du web télévision ou de la radio.

Mohamed Gontara, directeur du Centre africain de perfectionnement des journalistes et des communicateurs (CAPJC), a attiré l’attention sur un point essentiel. Il est d’une importance cruciale qu’on définisse le concept de la presse électronique. A l’heure actuelle, d’innombrables sites diffusent périodiquement de l’information, sur Internet, sous une forme qui s’apparente à la presse écrite ou audiovisuelle. « Faire la distinction entre les sites commerciaux, les sites institutionnels et les sites purement médiatique s’impose, alerte M. Gontara. Un média en ligne a pour vocation la production et la diffusion médiatique. En ce sens, sa principale activité c’est l’information. C’est à travers cette définition qu’on peut délimiter les contours de ce secteur qui bat son plein en Tunisie », a-t-il précisé.

Il est à tout fait vrai que des centaines de journaux à travers le monde sont mis en ligne, tandis que d’autres sont édités uniquement sur Internet. En Tunisie, les deux modèles coexistent ensemble depuis quelques années. Seulement, dans ces conditions, dans quelle mesure les textes légaux existants, susceptibles de régir les activités de presse, s’appliquent-ils dans le cyberespace, sachant qu’ils ont généralement été conçus avant l’émergence des autoroutes de l’information? La question est cruciale et a notamment trait aux droits d'auteur, aux notions de délit de presse et de responsabilité en cascade. Les intervenants ont accordé leurs violons sur la question du statut juridique de la presse électronique, une question qui mérite vraisemblablement de dépoussiérer un fait oublié : la reconnaissance juridique des journalistes professionnels exerçant dans les médias en ligne. En l’absence d’un cadre législatif, les journalistes, dits électroniques, sont encore privés de la carte de presse professionnelle et d’autres privilèges de la profession. Paradoxalement, certains de ces journalistes sont issus de l’Institut (public) des Sciences de l’Information, spécialisés dans la presse électronique. En clair, on les forme pour exercer dans un secteur qui, officiellement, n’existe pas.

En réponse à cette interrogation d’une intervenante, Nizar Bahloul a indiqué que le ministère de Communication tout comme l’Association des directeurs de journaux ont soutenu l’octroi de cette carte de presse aux journalistes de l’électronique, mais c’est l’ancien bureau du Syndicat des journalistes qui s’est opposé. Il a rappelé à l’assistance que la promotion régulière de la presse d’opinion et de partis, l’ancrage de la pluralité et le pluralisme des médias sont au cœur du programme électoral du Président Ben Ali pour le quinquennat 2009/2014, programme pour lequel il a choisi le slogan "Ensemble, relevons les défis". Dans le sixième point de la première rubrique "De nouveaux pas sur la voie de la démocratie et de l’enracinement du pluralisme", et en vue de consolider les fondements de la liberté d’opinion, d’expression et de publication, le chef de l’Etat a appelé " au développement du cadre législatif de l’information électronique, de manière à s’adapter aux mutations en cours dans ce domaine". Là, tout est dit ! Qu’on le veuille ou pas, la presse électronique connaîtra prochainement ses beaux jours, puisque cela est inscrit dans le programme électoral du Chef de l’Etat.
15/02/2010 | 1
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