Des jours sombres attendent les journalistes tunisiens
Comme du temps de la troïka et de l’arrivée des islamistes au pouvoir en 2012, des jours sombres attendent les journalistes et les médias tunisiens.
Au pouvoir, le parti islamiste Ennahdha qui aura probablement la présidence du gouvernement et celle du parlement. A la présidence de la République, Kaïs Saïed, plébiscité dimanche par 2,7 millions d’électeurs. Officiellement, le discours est à l’apaisement et on assure que la liberté d’expression est protégée, tout comme les journalistes tunisiens. Concrètement, il en est déjà autrement.

Depuis deux jours, nos confrères Myriam Belkadhi, Maya Ksouri, Lotfi Laamari et Mohamed Boughalleb font l’objet d’une campagne de lynchage sur les réseaux sociaux. Dernière trouvaille en date des partisans des islamistes et de ceux de Kaïs Saïed, cet âne enveloppé d'un drap blanc (synonyme de linceul dans la tradition islamique) sur lequel on a écrit en rouge (sang) le nom de Boughalleb.
Ce trio vedette de la chaîne El Hiwar Ettounsi n’est pas le seul à subir ce type de violentes attaques. Tous les médias et journalistes vedettes qui se sont opposés à Kaïs Saïed et/ou aux islamistes en pointant leur populisme ou leur utopie font les frais de menaces et de lynchages. Les médias tunisiens progressistes ou anti-islamistes sont appelés depuis 2011, « médias de la honte », surnom donné par les dirigeants islamistes. Les mêmes encore qui ne ratent aucune occasion pour dénigrer nommément ces journalistes, et aussi les instituts de sondage.
Si les journalistes sont déjà habitués aux islamistes et leurs menaces à peine voilées, il en sera différemment avec M. Saïed qui n’a pas encore de rapports spéciaux avec eux. Le jour du débat opposant les deux candidats, il s’est manifesté par une certaine colère quand on l’a questionné sur une affaire de spéculation et de fraude fiscale liée à une plus-value de vente d’un terrain familial et il s’est opposé catégoriquement à ce que les médias s’intéressent aux affaires liées à la sécurité nationale. Chose impensable en démocratie.
Les tensions entre le pouvoir et les médias commencent donc avant même la prise de fonction des nouveaux élus.
R.B.H
