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SUR LE FIL
Demain s’ouvre le procès de la honte
Par Nizar Bahloul
03/03/2025 | 15:59
6 min
Demain s’ouvre le procès de la honte

 

La date du 4 mars 2025 est à inscrire dans les annales judiciaires comme étant l’une des pires dates de son histoire. En cette date, s’ouvrira le procès de ce que le régime de Kaïs Saïed a appelé « complot contre l’État ».

Les protagonistes sont une cinquantaine d’hommes politiques, d’hommes de médias (dont un actionnaire de référence de Business News), d’avocats et de lobbyistes qui sont accusés d’avoir fomenté un complot contre l’État. Contrairement à l’écrasante majorité des grandes affaires judiciaires, celle-ci n’est pas complexe. Elle est même d’une simplicité enfantine.

La justice nous interdit de l’évoquer médiatiquement et nous nous y astreignons par respect pour ce qui reste encore de cet appareil. L’interdiction sera de toute façon levée demain et nous ne manquerons pas de révéler tout ce qu’il y a - ou plutôt tout ce qu’il n’y a pas - dans cette affaire. Ne pas parler du fond de l’affaire ne doit toutefois pas empêcher de parler de sa forme et de toutes les absurdités que l’on observe à la veille de son démarrage, notamment la manipulation grotesque du pouvoir exécutif.

 

Une justice sous influence

Sur un plan général, quelle que soit la nature du procès, il est automatiquement entaché de suspicion dès lors qu’il implique des personnalités politiques. La raison est que l’appareil judiciaire est très malade à cause notamment des ingérences du pouvoir exécutif. Ce n’est pas moi qui le dis, ce sont les magistrats eux-mêmes. Si même les magistrats ne font plus confiance à l’appareil judiciaire, que dire alors des justiciables et des observateurs que nous sommes ? Et d’un !

Un mois avant le démarrage du procès, le 3 février, le régime a nommé un nouveau président de la chambre pénale chargée des affaires terroristes. Il s’agit de Lassaâd Chamakhi, juge connu du grand public pour son rôle dans l’affaire du yacht d’Imed Trabelsi, neveu de Leïla Ben Ali. En tant que juge, il avait innocenté Imed Trabelsi des accusations de vol concernant ce bateau français, disparu en Corse avant d’être retrouvé à Sidi Bou Saïd. C’est ce juge controversé qui présidera donc le procès du complot contre l’État. Et de deux !

 

Une opacité organisée

Conscient de la vacuité des dossiers, des avocats de la cinquantaine de protagonistes ont demandé à ce que le procès soit public et diffusé en direct, afin que les Tunisiens voient d’eux-mêmes ce qu’il en est. Le régime a balayé d’un trait cette revendication de transparence et a imposé un procès à distance pour les prisonniers en prétextant des motifs des plus fallacieux. En prison depuis plus de deux ans, les prévenus n’auront même pas le droit fondamental d’être face à leurs juges. Et de trois !

Le directeur de la brigade judiciaire à l’origine de l’affaire, qui a été le tout premier à parler d’un complot, est en prison. Et de quatre !

Le juge d’instruction qui a instruit toute l’affaire et a émis des mandats de dépôt sans même instruire quoi que ce soit s’est évadé à l’étranger et se trouve actuellement lui-même poursuivi pour complot. Et de cinq !

Le conseiller de la ministre de la Justice qui aurait téléguidé, depuis le cabinet, tout le dossier est lui-même en prison et les médias ont été interdits d’évoquer son sujet. Et de six !

 

Un procès bâclé

Toute l’affaire est basée sur un hypothétique complot des protagonistes avec des chancelleries étrangères. Or, en date du 1er avril 2023, le parquet a disculpé totalement les diplomates étrangers qui auraient comploté avec les Tunisiens. Et de sept !

Dans une interview donnée le 4 avril 2023 au journal italien La Repubblica, l’ancien ministre des Affaires étrangères Nabil Ammar a affirmé que les services de renseignement ont trouvé des preuves et qu’il y aura des condamnations. Il s’agit là d’une violation flagrante de la présomption d’innocence et d’une ingérence odieuse du pouvoir exécutif dans le travail judiciaire. Par ses propos, Nabil Ammar a inventé un nouveau concept, celui de la présomption de culpabilité. Et de huit !

Dans n’importe quelle affaire de cet acabit, les médias révèlent au public les détails, les incohérences, les preuves, les charges et les décharges. Les médias ont été tout simplement interdits de traiter le sujet, en violation totale des principes de transparence de n’importe quel État de droit. Paradoxalement, vendredi dernier, une chaîne proche du pouvoir a longuement abordé le sujet avec un nombre extraordinaire de contrevérités, d’accusations infamantes et odieuses et d’absurdités. C’était d’un surréalisme inouï, le pouvoir a dressé un procès parallèle ! Et de neuf !

Pour bien préparer leurs plaidoiries et leurs stratégies, la justice se doit de remettre aux avocats tout le dossier de l’affaire des semaines à l’avance avec l’ensemble des preuves trouvées par le juge. Jusqu’à la semaine dernière, les avocats n’avaient aucun document à l’exception du PV de fin de l’instruction qui circule sur les réseaux sociaux depuis près d’un an. Et de dix !

 

Un précédent inquiétant

J’ai réussi là à émettre dix griefs sans même avoir abordé le fond du sujet et ses multiples absurdités.

Dans ces dix griefs, il y a carrément l’empreinte du régime et ce n’est pas une première. On a déjà un précédent.

Retour à l’automne dernier avec l’élection présidentielle, entachée elle aussi de nombreuses absurdités.

Dans le complot contre l’État, le régime a jeté les « conspirationnistes » en prison. Pareil pour la présidentielle quand il a jeté en prison ou poussé à l’exil les adversaires de Kaïs Saïed. Et d’un !

Dans le complot contre l’État, le régime a nommé lui-même le juge. Dans la présidentielle, il a nommé lui-même le président de l’instance électorale. Et de deux !

Dans le complot contre l’État, le régime a refusé la transparence en interdisant aux médias d’évoquer l’affaire et en imposant le procès à distance. Dans la présidentielle, il a écarté les médias hostiles et les ONG indépendantes. Et de trois !

Dans le complot contre l’État, la présomption d’innocence a été totalement bafouée. Dans la présidentielle, on a refusé de réintégrer les candidats écartés malgré une injonction judiciaire. Et de quatre !

Dans le complot contre l’État, un petit propagandiste a manipulé l’opinion avec des mensonges. À la présidentielle, on a ramené Hassen Zargouni qui a donné, à la télé publique, des résultats « sorties des urnes » surréalistes en violation totale de la loi qui interdit ce genre de sondages. Et de cinq !

Avec autant de griefs et sans même évoquer le fond de l’affaire (ce que l’on fera à partir de demain), la suspicion sur le bon déroulement du procès du 4 mars devient lourde. Très lourde. Dès lors, et rien que pour cela, le procès de demain est un procès qui fera date pour la justice tunisienne, et pas avec honneur.

 

Par Nizar Bahloul
03/03/2025 | 15:59
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Commentaires
oscar.
Plaisanterie grotesque
a posté le 04-03-2025 à 12:38
Le procés de la paranoïa.
Sabah
Une différence de niveaux
a posté le 04-03-2025 à 01:06
Nous voyons très bien la différence de niveaux entre ceux critiquent le régime et ceux qui le soutiennent dans les commentaires. Ce régime s'appuie sur un mur de boue qui ne tiendra pas longtemps.
El ouaffy Y
Est ce que c est complot contre '?tat ou un individu ?
a posté le 03-03-2025 à 21:19
Comment voulez vous que le pays avance à cause des c'est affaires montés chacun cherche à ce protéger pour garantir son continuation dans le poste sans donner d'importance aux préoccupations du peuple les jeunes dont la majorité vivent dans le n état de d'espérance sans limite un président est élu par le peuple pour qu il sera au service de peuple on évitant toute fausses problèmes qui pourra freiner toutes défis .En ce demande si le procès ouvrira le quart quel est l'intérêt du peuple ?.
Larry
Oui c'est la honte !...
a posté le 03-03-2025 à 18:52
La HONTE du régime de KS....
riri
je suis un sous citoyen
a posté le 03-03-2025 à 18:34
En tant que Tunisien, je considère à titre personnel que ce régime m'a enlevé toute fierté et toute dignité que j'avais.
Fares
Excellent
a posté le 03-03-2025 à 18:33
Une très bonne chronique cette semaine. J'ai adoré le point neuf qui parle de cette chaîne qu'on nommera pas. Je ne connaissais pas personnellement toutes les arrestations des magistrats et des autres personnes qui ont initié cette affaire loufoque.

Le parallèle entre cette affaire de Komplot et les éleKtions de 2024 est frappant. On pourrait y ajouter le communiqué belliqueux du candidat numéro 3 à quelques jours du scrutin nous menaçant d'un bain de sang et le communiqué du "MAE" prônant l'indépendance de la justice. Je parie qu'il y aura des menaces de poursuite "judiciaires" contre toute personne qui contesterait les sentences prononcés à la suite de ce "procès".
Chelbi
Pas la peine de discuter du fonds
a posté le 03-03-2025 à 17:14
Si on discutera le fonds du sujet ca veut dire qu'on discutera d'absurdités et c'est ce que la merdocrature cherche exactement. Elle cherche à rabaisser le QI moyen pour qu'on prenne ses absurdités, mensonges, délires, et science fiction comme une verité absolue.

Non, le fond du sujet ce n'est pas l'ensemble des détails de cette affaire dite de complot contre l'Etat, mais cet Etat pris en otage par un charlatan pour répondre à ses complexes mentaux, ses extrapolations, mensonges, délires et derives.

Notre beau proverbe dit: Idha el metkallem mahboul, el metsannet ykoun 3aqel. Et nous avons vu tellement de folies les quatre dernières années qu'il vaut mieux ne pas commenter sur leur substance, mais se demander comment sommes-nous arrivés là?
Fares
Ode à la stupidité
a posté le à 18:16
Nous avons affaire à une ou à quelques personnes qui souffrent d'un énorme complexe d'infériorité. Ce qui a dérangé le putschiste dans cette affaire est que l'opposition s'unisse contre lui. Il l'a repeté à maintes reprises en employant des insultes à son accoutumé: ils se disputaient hier et ils se réunissent aujourd'hui.

Pareil pour les élections, à mon avis la bassesse historique dont nous avons témoigné est dûe au fait que le putschiste n'a pas digéré le fait que des tunisiens parainnent d'autres candidats que lui. Ce qui explique pourquoi il s'est présenté au siège de l'isie avec 240000 parainnages et nous a sorti cette histoire de vielle femme qui a fait 1500 km!!!!!!!!!! pour soumettre son parainnage, je salue la loyauté de cette femme lybienne.

J'apprécie d'habitude les hold ups bien planifiés et je respecte l'intelligence de certains criminels notaires de l'histoire. Mais là franchement nous assistions à un festival de bhama et de talbiz. Les actes sont abjects, les spectacles sont désolants et les gaffes ne nous pas rire du tout. Tbalbiz fi tbalbiz pour plaire à sa Sainteté.
Hannibal
Lollll
a posté le à 20:19
De quelle oppositions tu parles t'est un rigolo toi ....
SALIM
INDEPENDEMMENT DES VERDICTS DE L'AFFAIRE(condamnations a des peines tres lourdes) LE COMPLOT A ETE AVORTé.
a posté le 03-03-2025 à 17:10
Et surement il sont entrain de regretter leurs actions. Et la réalité n'est plus celle de 2021,ou de 2022,ou de 2023,ni de 2024.ON ne parle plus de 'PUTCH' ni de 'citoyens contre le 'putch', ni de front de salut, ni DES CINQ, ni du PDL, ni de TABBOUBI, ni d'opposants à KAIS SAIED. RENDEZ VOUS EN 2029.
Larry
@Salim
a posté le à 11:03
Tu fais partie à part entière de ce procès de la honte !...
Ce sont des gens comme toi qui font honte au pays...

Tu es devenu une honte à toi tout seul.... mais surtout tu n'auras même pas honte de retourner ta veste avant 2019 quand le vent va tourné....
Tounsi100%
Pourquoi 2029?
a posté le à 20:37
Pourquoi 2029? Rendez-vous la semaine prochaine.
riri
pathetique
a posté le à 18:36
quel complot?
Vous diffamez des gens, vous méritez une belle condamnation.
Le fait qu'on ne parle plus vos fat plaisir?

On est habitué, on avait déjà passé 23 ans sans pouvoir parlé.

Et vous êtes fier de ce que vous faites à votre pays et a ses habitants
TunisienAussi
KS ne restera pas au pouvoir jusqu'à 2029, par sa propre faute....
a posté le à 18:24
KS ne restera pas au pouvoir jusqu'à 2029, par sa propre faute....
Abir
Rabi ydhaher el7a9
a posté le 03-03-2025 à 16:54
Inchallah les juges ou le juge principale ne souffrirai pas de 7chichet Ramadan