
Théoriquement, l’élection présidentielle 2024 devrait se tenir dans moins de quatre mois, mais il n’y a aucune ambiance électorale dans le pays. L’Isie est encore muette sur la date exacte du scrutin, les candidats déclarés sont atones et il n’y a que le président de la République qui bouge sur le terrain et fait entendre sa voix. Comme si les concurrents font tout pour servir le probable candidat sortant.
Dans n’importe quel pays au monde, quand on est à quatre mois d’une élection présidentielle, les médias ne parlent que du scrutin, des candidats et de leurs programmes. Ils se délectent des déclarations des concurrents et de leurs partis, font monter la sauce pour confronter les uns avec les autres et décortiquent chaque ligne des programmes pour déceler les failles et les trous budgétaires. Bref, il y a une véritable fête médiatique et démocratique durant la période électorale. Exemple parmi des centaines d’autres, la présidentielle américaine est programmée pour novembre prochain et la polémique enfle depuis novembre dernier entre Biden et Trump.
En Tunisie, on a eu droit à cette ambiance festive en 2014 et 2019. Cinq ans après, le constat est là et il est des plus tristes, c’est le désenchantement total, l’ambiance est des plus mornes. Il n’y a rien, absolument rien, qui montre qu’il y a des candidats sérieux coursant pour le poste du président de la République. Comme s’ils s’étaient tous mis d’accord pour laisser l’actuel titulaire du poste loin devant eux.
Premiers responsables de cette ambiance maussade durant cette période électorale, les instituts de sondage. Depuis 2023, les instituts réputés pour leur sérieux se morfondent dans le silence. Aucun sondage sur la présidentielle n’a été publié depuis juin 2023. Au scrutin de 2019, Sigma et Emrhod se livraient une bataille acharnée avec une publication, mensuelle et très ponctuelle, de leurs chiffres. Au scrutin de 2014, il y avait, outre ces deux instituts réputés, 3C études qui publiait régulièrement les chiffres. Pour 2024, plus personne ne publie de chiffres, si ce n’est des échoppes inconnues dont on ne sait rien sur les dirigeants, les équipes, les méthodologies précises et les commanditaires des chiffres (souvent fantaisistes et incroyables) qu’ils publient sur les réseaux sociaux ou des médias, pas trop réputés pour leur crédibilité.
Pour justifier son mutisme assourdissant, un sondeur a écrit sur Facebook qu’il avait une famille à nourrir. Sous-entendu, il a peur de publier des chiffres qui pourraient fâcher le président. Il n’est pas le seul.
Tous les candidats semblent avoir peur depuis que le militantisme politique pour déloger Kaïs Saïed de son poste de Carthage est assimilé à un complot contre l’État.
Issam Chebbi
Il est accusé de complot contre l’État, il est détenu depuis février 2023 et les médias n’ont même pas le droit d’évoquer son affaire. Sa course pour la présidentielle est donc perdue.
Abir Moussi
Elle est en prison depuis octobre 2023 et est poursuivie dans plusieurs affaires, montées de toutes pièces par le régime. Malgré ses chances réelles et la détermination, jamais démentie, de son équipe, elle est obligée de quitter la course.
Lazhar Akremi
Il a annoncé avec théâtralité sa candidature devant le juge d’instruction, mais après un séjour de cinq mois en prison, il n’a plus parlé du sujet publiquement. D’ailleurs, le juge lui interdit toute apparition publique et c’était l’une des conditions pour sa libération provisoire, suite à une affaire, elle aussi montée de toutes pièces, déclenchée par la ministre de la Justice.
Olfa Hamdi
Elle crie sur tous les toits qu’elle candidate pour la présidentielle, fait beaucoup de mises en scène, mais elle est exclue d’office. Son âge de 36 ans ne lui permet pas de se présenter au regard de la nouvelle constitution qui fixe l’âge minimal à quarante ans. Elle continue à agir comme si elle méconnait la constitution et induit ainsi l’opinion publique en erreur.
Nizar Chaâri
Il fut le premier à annoncer sa candidature, dès 2022, et il fut par moments très actif sur le terrain. Jeune, grand communicant, séducteur, il était bien parti pour la course. Il a subi harcèlements judiciaires, contrôles fiscaux et interdictions de voyage sans rien dire, poursuivant « tranquillement » son objectif. Jusqu’au mois de janvier 2024 quand des pages proches des cercles du pouvoir font fuiter sur les réseaux sociaux un document confidentiel de l’instruction de l’une des multiples affaires impliquant des personnalités politico-médiatiques. Dans ce document est inscrit le nom de sa fille de quatorze ans. Nizar Châari dénonce la basse manœuvre du régime, et devient discret depuis. Il se suffit de quelques rares vidéos sur sa page Facebook et ne se montre quasiment plus sur le terrain.
Hamma Essebti (alias Safi Saïd)
Il a annoncé sa candidature le 17 avril 2024 au cours d’une conférence de presse. C’est sa troisième d’affilée, après deux cinglantes débâcles en 2014 (26.074 voix) et 2019 (239.951 voix).
Absent du terrain, absent des médias, absent des réseaux sociaux, M. Saïd fait sa campagne électorale tout seul dans sa maison, visiblement. Craint-il des poursuites judiciaires s’il monte au créneau ? Les observateurs politiques lui prêtent plusieurs casseroles et scandales durant sa jeunesse passée entre la Libye de Kadafi (dont il était proche) et des mouvements politiques du Proche-Orient (notamment le Liban), ainsi que quelques louches acquisitions immobilières dans des terrains classés.
Dhaker Lahidheb
Il a annoncé sa candidature le 7 avril et il s’est suffi, depuis, à cette déclaration. Depuis près de trois mois, il n’a fait que de rares apparitions médiatiques. On ne le voit pas sur le terrain, si ce n’est quelques publications sur Facebook. La dernière est relative à la coupe d’Europe de football 2024 qui se déroule actuellement en Allemagne.
Lotfi Mraihi
Il a annoncé sa candidature sur les réseaux sociaux le 2 avril 2024. Après une cinglante défaite en 2019 (221.190 voix), il retente sa chance pour le prochain scrutin et y croit. Mais il n’y a pas que lui qui croit à sa victoire, le régime de Kaïs Saïed semble y croire aussi et ce n’est nullement par hasard que M. Mraïhi s’est retrouvé poursuivi dans plusieurs affaires pour de simples déclarations médiatiques et a même été condamné à de la prison avec sursis. Intimidation ? Ça y ressemble. Contrairement aux autres candidats, Lotfi Mraihi bouge sur le terrain, apparait dans les médias et sur les réseaux sociaux. Il a même publié un manifeste électoral, sous forme d’un livre, ce qui est extrêmement rare dans le pays.
Fathi Krimi
Candidat fantaisiste en 2019, il a décidé de se représenter en 2024 en annonçant sa candidature dans une déclaration médiatique. Il a programmé une conférence de presse le 30 mai pour l’annonce officielle, mais la salle chez qui il a réservé lui a fait part d’une interdiction dont on ne connait pas l’origine. Depuis, il n’a pas donné signe de vie, comme s’il n’y avait que cette salle ou ce moyen pour annoncer une candidature à la présidentielle et un programme électoral.
Najwa Miled
Elle a annoncé sa candidature le 10 avril 2024 et, depuis, ne s’est plus montrée. De tous les candidats, elle est la moins sérieuse et la moins connue. Sa candidature ressemble plus à un faire-valoir qu’autre chose, puisqu’elle n’est accompagnée d’aucun programme ni de présence sur le terrain.
Mondher Zenaïdi
Malgré ses nombreuses vidéos suggérant fortement sa candidature à la présidentielle, il n’a toujours pas annoncé officiellement ses intentions. Il réside actuellement à Paris et, techniquement, il ne peut se présenter à la présidentielle, que depuis Tunis.
Craint-il un retour au pays ? Les pages Facebook proches du régime laissent entendre, voire menacent carrément, qu’il va être arrêté dès son atterrissage et ce à cause d’une affaire datant de plus de treize ans dans laquelle son nom a été parachuté.
Néji Jalloul
Il avait annoncé son intention de se présenter depuis le début de l’année. Sa candidature est officialisée début mai 2024 à l’issue du congrès de son parti "La Coalition national" qui avait décidé de l’investir.
Néji Jalloul ne manque pas, à chaque apparition médiatique, de se dire confiant en ses chances, déclarant que le programme économique et social de sa campagne a été élaboré sous le slogan « Pour une nouvelle voie de développement ». A-t-il réellement une chance ? Hormis quelques apparitions médiatiques, on ne le voit pas sur terrain.
Les islamistes
Contrairement aux scrutins de 2014 et 2019, les islamistes n’ont annoncé aucune candidature dans leurs rangs pour 2024. Leur président Rached Ghannouchi croupit en prison depuis avril 2023. Son successeur Mondher Ounissi l’y a rejoint cinq mois après. Idem pour les caciques du parti qui auraient pu candidater pour la prochaine présidentielle, tels Ali Larayedh et Noureddine Bhiri.
Le candidat malheureux de 2019, Abdelfattah Mourou (434.530 voix) est totalement absent de la scène politique, comme si la crise majeure que vit le pays ne concerne nullement le citoyen et politicien qu’il est. Bon à rappeler, le monsieur était vice-président de l’assemblée constituante entre 2011 et 2014.
L’autre candidat islamiste malheureux de 2019, Hamadi Jebali (7364 voix) a compris après son humiliante défaite qu’il ne pesait rien ni auprès de sa famille politique et encore moins auprès des Tunisiens.
Les deux n’entendent pas profiter du vide sidéral actuel du paysage et exploiter le vivier électoral islamiste qui pèse plus d’un million de voix.
Les autres
Les candidats malheureux de 2019 auraient pu concourir de nouveau pour 2024, mais ils ont préféré passer leur tour cette fois. Lâcheté, manque de courage, désespoir, peu importent les raisons, ils étaient très bruyants en 2019, ils sont totalement muets en 2024.
Seïf Eddine Makhlouf (147.351 voix) n’apparait plus ni dans les médias, ni sur les réseaux sociaux et encore moins sur le terrain et ce depuis sa sortie de prison. Avant sa détention, il était le plus bruyant et le plus polémique des politiciens tunisiens. Il se présentait pourtant comme un lion qui n’a peur de personne. L’épreuve du temps a montré que son courage n’était que propagande. Ajoutons à cela qu’il a encore des affaires judiciaires en cours.
Mohamed Abbou (122.287 voix) se suffit de quelques apparitions médiatiques. Il n’a pas annoncé son intention de se présenter à la présidentielle et il ne l’annoncera pas.
Mongi Rahoui (27.355 voix) sa défaite humiliante en 2019 lui a montré que son poids politique est des plus légers. Non seulement il ne se présentera pas en 2024, mais toutes ses récentes déclarations servent le régime de Kaïs Saïed.
Hamma Hammami (23.252 voix) a officiellement annoncé qu’il n’allait pas se présenter pour 2024. Malgré sa grande présence sur le terrain et dans les médias et malgré son courage et son opposition farouche au régime, il sait qu’il ne pourra pas faire le poids.
Les TRE
Outre les politiciens locaux qui ont préféré jeter l’éponge, il y a ceux qui sont partis résider à l’étranger. Pour une raison ou une autre, la Tunisie ne les intéresse plus ou le régime a fait de telle sorte qu’ils ne peuvent plus s’intéresser à leur pays.
Nabil Karoui, finaliste de 2019 (1.042.894 voix) est réfugié en France et fait l’objet de poursuites et de condamnations judiciaires en Tunisie. Il est totalement muet.
Youssef Chahed (249.049 voix) vit entre l’Europe et les Etats-Unis et fait l’objet de poursuites judiciaires dans des affaires qui semblent montées de toutes pièces. Il est totalement muet.
Moncef Marzouki (100.338) vit en Europe et fait l’objet de condamnations et de poursuites judiciaires dont certaines fallacieuses. Il est encore très actif politiquement, prolixe médiatiquement, mais il ne peut rien faire tant qu’il est éloigné du pays. Le régime a fait de telle sorte de l’éloigner à jamais.
Mehdi Jomâa (61.371 voix) a quitté le monde politique pour replonger dans son monde des affaires en Europe.
Hechmi Hamdi (25.284 voix), vit au Royaume-Uni et est exclu d’office des élections à cause de sa nationalité britannique.
Et il en reste un, Kaïs Saïed !
Avec tout l’appareil de l’État sous la main, face à des opposants réduits au silence, désespérés, faibles ou dont la lâcheté a été dévoilée au grand jour, Kaïs Saïed est comme sur une autoroute pour remporter la présidentielle.
Il ne la remportera pas grâce à son bilan, bien insignifiant, ou un programme viable, le titulaire de Carthage rempilera grâce à l’absence de toute candidature sérieuse face à lui.
Partant, Kaïs Saïed peut se permettre le luxe de jouer le suspense. À moins de quatre mois de la théorique échéance, il n’a toujours pas annoncé son intention de se représenter ou pas. Un faux suspense, bien entendu, car ce n’est ni son genre, ni d’aucun président arabe, d’accepter le jeu démocratique et d’accepter de prendre le risque de quitter le pouvoir par les urnes.
Kaïs Saïed a écarté tous ses concurrents, par différents moyens, pour obtenir cette autoroute et ce après avoir modifié la constitution pour accaparer les pleins pouvoirs. Et tant qu’il n’y a pas de véritable candidat sérieux et courageux pour l’affronter, tant que Kaïs Saïed restera à Carthage.
Raouf Ben Hédi


C'est effrayant!
Il y a un vrai manque de courage qui se comprends. Mais s'ils ne sont pas capable de faire fasse à un régime pareil, alors comment pourront ils être désignés comme presidents et gérer une nation!
En clair, ce que vous nous dites c'est qu'il n'y a pas d'espoir pour sortir de cette impasse....
Mon Dieu, on est vraiment mal barré et les tunisiens et Tunisiennes ne se rendent comptent de rien!
Ils sont sous sédatifs.
C'est triste à en pleurer.
nous sommes dans la meilleure démocratie au monde. çà va comme çà ?
- tous les concurrents de Said ont une unique et seule priorité: libérer ce qu'ils appellent les prisonniers politiques. Ce faisant, ils espèrent attirer les électeurs ayant un parent à la prison d'Al Mornaguia. Ceci est un faux calcul car le peuple tunisien, comme tous les peuples matures, a du respect envers les décisions de justice. Dans ce contexte, Nejib Chebbi a poussé le bouchon encore plus loin, en demandant la libération immédiate de Rached Ghannouchi. Chebbi devient fou, car Ghannouchi est en train de purger des peines d'emprisonnement, en appli de verdicts définitifs.
- les concurrents de Said sont tous cuits, le tunisien connaît bien leurs discours vides, primitifs, déjà vus et entendus dans de précédentes présidentielles
QUI N'A RIEN, NE PEUT RIEN DONNER.
Les concurrents de Said sont culturellement immatures, socialement détestables et politiquement ignorants.
PRESIDER LA TUNISIE N'EST PAS DONNE '? TOUT LE MONDE.
Il faut avoir un passé LIMPIDE, or, les concurrents de Said ont tous mangé du pain de Ghannouchi, c'est-à-dire le pain du MAL ABDOLU.
Bon courage anciens et futurs ZERO VIRGULE.
d une exclusion politique et juridique initier par Kaeies Saeid,
c est occulter le fait que tenant compte qu il sera quoique disent ses opposants, le gagnant des prochaines elections, ce dernier n a aucun interet a etre le seul candidat au presidentelles,afin entre autre de ne pas donner raison a toute la machine qui le qualifie de dictateur, de putchiste et autres charabias.