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Chroniques
La gauche qui a failli
Par Marouen Achouri
02/10/2024 | 15:59
4 min
La gauche qui a failli

 

La réalité partisane et idéologique en Tunisie est digne de meubler les cercles de réflexion et les discussions de salon. Il se trouve qu’il s’agit là des deux terrains de prédilection de la gauche tunisienne. Il ne s’agit aucunement ici de mettre en doute la pensée de gauche et ce qu’elle a apporté à la Tunisie et au monde. Mais il faut bien avouer que le spectacle des composantes de la gauche tunisienne est tout simplement affligeant.

Le souvenir de Abid Briki, quand il a annoncé la création de son parti « La Tunisie en avant », disant vouloir unifier la gauche fait aujourd’hui sourire. Voir une formation de gauche se ranger sous le pavillon d’un régime comme celui de Kaïs Saïed a de quoi ulcérer les penseurs des droits de l’Homme et des libertés. Dans son argumentaire, Abid Briki accepte le fait accompli et cherche les moyens susceptibles d’améliorer les choses de l’intérieur. Cela s’est vu par le passé avec le régime de Ben Ali qui avait réussi à enrôler plusieurs figures estudiantines de gauche pour ensuite les broyer au sein de la machine du RCD. Mais au moins, à l’époque, ces figures pouvaient exprimer leurs orientations au sein des cercles du parti et il existait un niveau minimum de dialogue. Aujourd’hui, le régime de Kaïs Saïed ignore superbement ceux qui clament le soutenir et absolument aucune de leurs propositions dans les domaines économique, social ou politique n’a été prise en considération. Ils n’ont même pas de canal de communication avec ce pouvoir qu’ils disent comprendre et soutenir.

 

Nous avons également appris récemment qu’Al Watad n’est pas la gauche comme nous l’a dit Oussama Sahnoun, membre politique du Watad unifié, parti dirigé par Mongi Rahoui. Pour ceux qui ont du mal à suivre, il y a le Watad, le Watad unifié et même le Watad non partisan. Tout ce beau monde n’arriverait pas à remplir un bus, mais ce n’est pas la question. La même faction politique a donné naissance à une branche dans l’opposition, et une deuxième soutenant le régime de Kaïs Saïed. Mongi Rahoui a écumé les plateaux pour justifier les atteintes à l’indépendance de la justice, les arrestations abusives de personnalités politiques ou encore les orientations du président de la République. Même les choix économiques et budgétaires des gouvernements Bouden et Hachani ne peuvent en aucun cas correspondre aux idéaux de gauche. Il est difficile de leur trouver des prétextes et des justifications. Certains ont tenté de l’expliquer par la haine tenace de la période islamiste et d’autres ont invoqué de lointaines bases idéologiques selon lesquelles cette gauche n’a pas de problème fondamental avec le totalitarisme. Mais comme souvent, la bonne explication est la plus simple : l’opportunisme. De quoi faire retourner Chokri Belaïd dans sa tombe.

 

Il y a également Al Massar, parti démocratique de gauche, qui recommande ni plus ni moins que de boycotter les élections. Après avoir boycotté le référendum constitutionnel et les élections législatives, avec les conséquences que l’on connait, certains restent figés dans ce choix. Le régime actuel ne s’embarrasse pas de ce genre de considérations et tous ses porte-voix ont claironné leur fierté des 11% de participation aux législatives. Ce même parlement, mal élu et manquant de députés, a quand même eu l’audace de procéder à un amendement de la loi électorale une semaine avant l’élection. Donc, chercher à gêner le régime par ce genre de postures est totalement stérile. Mais même si on peut lui reprocher son positionnement, Al Massar a au moins le mérite de ne pas s’être inféodé au régime en place pour y chercher quelques avantages ou pour avoir des postes. Parmi les fidèles il y a également Hamma Hammami qui avait déclaré, dès les premiers jours suivant le 25 juillet 2021, qu’il s’agissait clairement d’un putsch. Depuis, il a multiplié les déclarations et les interventions pour expliquer son point de vue et nous prédire la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui le pays. Comme sous le régime Ennahdha, ou encore Nidaa Tounes et aujourd’hui sous Kaïs Saïed, il s’est fait insulter de toute part.

Dans cet arc de gauche ont peut également trouver le mouvement Echaâb de Zouhair Maghzaoui et le courant populaire de Zouhair Hamdi, parti fondé par le défunt Mohamed Brahim. Eux n’ont clairement pas de problème avec le totalitarisme ou la dictature. Ils seraient même prêts à y participer, si jamais on le leur demandait. Cela n’empêche qu’aujourd’hui, Zouhair Maghzaoui est candidat à l’élection présidentielle face à Kaïs Saïed, après l’avoir soutenu, contre vents et marées et même contre d’anciens camarades, depuis le 25-Juillet. Au vu de la proximité idéologique entre les deux entités, il aurait été logique que le courant populaire apporte son soutien à Zouhair Maghzaoui. Mais non ! Le parti de Zouhair Hamdi a choisi de soutenir le président Kaïs Saïed. Allez y comprendre quelque chose.

 

La gauche sociale et démocratique a encore une fois failli à présenter un visage uni et une alternative viable à l’opinion publique tunisienne. C’est le couronnement d’une série d’échecs et de défaites sur tous les fronts. La gauche tunisienne n’a pas réussi à se faire entendre dans une scène peuplée par les opportunistes et les populistes. Elle se trouve aujourd’hui en perdition à tous les niveaux, au moment où la Tunisie a le plus besoin d’elle.

Par Marouen Achouri
02/10/2024 | 15:59
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Commentaires
Momo
la gauche incapable
a posté le 04-10-2024 à 13:44
Nous n'avons pas besoin de cette gauche collectiviste et à tendance staliniste...nous avons besoin de politiciens capables d'instaurer un état laic (et non pas civil comme on le répète souvent) ainsi que d'une économie libérale. Assez de ces idées de cette veille gauche trotskiste
Jilani
Vous oubliez le kotb
a posté le 03-10-2024 à 20:29
Dont le SG ben fadhel a acquis 4 voitures de luxe du parc automobile confisqué de benali offertes bien sur avec l'accord de ghannouchi.
LotfiBC
C'est dans les moments difficiles....
a posté le 03-10-2024 à 11:41
Désolé, mais plus les temps deviennent dures, mieux on évalue la valeur des gens; désolé, on ne voit que des politicards, des opportunistes; le sentiment national est devenu très rare; et comme on dit, c'est dans les moments difficiles qu'on connait la valeur des gens; pourtant la Tunisie est au fond du gouffre; désole encore une fois, mais regardez dans quel état était la Grèce en 2015, et comment elle est devenue aujourd'hui;
naceur fah
Classification
a posté le 03-10-2024 à 10:59
Suivant ma propre manière de voir les choses et ma propre classification de nos politiciens et pseudo-politiciens, nous avons le PDL, les kwanjias et tous les autres dans le même sac et puis K.S qui est hors classification.

Houcine
Les mots ont leur sens.
a posté le 03-10-2024 à 08:30
Progressisme, socialisme, trotskysme, et bien d'autres panarabismes ne sont que des notions dont le contenu mérite justification.
Surtout le progressisme perverti par les usages les plus convenus dans le monde des nantis qui confondent les "progrès" de leur fortune ou les évolutions sociétales avec le concept de progrès.
Mais, nous sommes habitués depuis l'essor de la révolution conservatrice à ces tripatouillages et retournements capables d'accréditer, chez qui veut y croire, que même les fascistes sont des démocrates....que les USA incarnent la liberté et la France est la patrie de la révolution qui disposait que les hommes naissent libres et égaux en droits.
Regardez, ici et ailleurs, comment les meilleures proclamations sont trahies, les engagements renies, les gens maltraites et leurs opinions si peu respectées.
'?videmment, je parle de ceux qui ont une opinion, des arguments, et qui les justifient comme on demande aux élèves de soutenir leurs assertions.
Beaucoup de marchands de promesses sont disposés à tout pour gagner la place.
Comme le soutenaient les pères et enfants de la Révolution, il nous faut des hommes vertueux.
Combien sont capables de mettre au premier rang l'intérêt général bien compris, comme on disait jadis?
Gauche est un mot précieux ne oas confondre avec gaucher.
Zarzoumia
on ne confond pas la gauche avec le gauche
a posté le à 12:17
"Le mièvre et la vertu", voici ce qu'il reste comme arguments pour les fossoyeurs de toute la philosophie et l'histoire de la gauche. On prétend la vertu alors qu'on a piétiné toutes les valeurs de morale et de justice. drôle de personnage qui soutient le piètre et le têtu. mais rien ne sert de se languir il faut user des poings pour que cette mascarade cesse. La destruction de l'Etat se fait à vitesse de lièvre et la prise de conscience à vitesse de tortue, La Fontaine dira que les tunisiens finiront par prendre conscience du danger que représente ce président et ses suppôts.
Houcine
Qui piétine quoi?
a posté le à 16:49
Tu parles de quoi et de qui?
La confusion?
Il faut te relire, cela suffirait.
Et puis, je ne veux rien avoir à débattre avec toi.
Continue à jouer ton petit rôle.
'?a ne prend pas.
MH
Seul Hamma Hammami sort du lot
a posté le 03-10-2024 à 07:13
Hamma Hammam, pour moi, est le seul qui peut incarner une guauche digne de ce nom. Le problème c'est qu'il est seul sans soutien politique ni populaire.
IBN KHALDOUN
Pas de gauche dans le monde arabe
a posté le 02-10-2024 à 21:06
Il n'y a eu jamais de gauche dans le monde arabe. Le socialisme de Nasser, Saddam et Kaddafi était du vernis pour des juntes militaires. Le concept de gauche est exclusivement européen et ne peut être calquer ailleurs...? Nous n'avons pas une classe ouvrière politisée, une classe moyenne bien éduquée civiquement et consciente des enjeux socio-politiques
... l'histoire de la gauche européenne est très complexe et remonte au XVI ème Siècle et même au début du protestantisme
Ameur k
Mçiba...cata
a posté le 02-10-2024 à 18:26
C est affligeant, ça te laisse penser que la démocratie n est pas faites pour les ignares comme nos peuples avec ,soit disant, des leaders politiques et des partis qui ressemblent à des "nassba"
Bien fait pour nos gueules: la démocratie, la dic tature et la torture...point
A1
Fragmentations !
a posté le 02-10-2024 à 17:01
Très bonne analyse qui pointe le véritable problème de notre vie politique: on n'a pas de leader charismatique politicien qui sait fédérer autour de lui par sa hauteur intellectuelle, stratégique et en même temps sa popularité et sa proximité des citoyens.

Ces petits chefs de bande ont chacun son échoppe sur le souk elasr de Tunis: cet Abid, ce Jelloul, ce Mraihi, ce Zemmal, ce Rahoui, ce Maghzaoui, ce Z. Hamdi, ces Mekki (AB. et H.), ces Chebbi (1 et 2), ces Nahdhaouis, ces Karama, ce Massar, ce Tekattol, cet afek, ce Hamma et son parti, cette Abir, ce Daimi, etc. etc. etc.
Des centaine de partis sans aucun contact avec le peuple, sans vision, sans école de pensée, sans formation de cadres, sans impact sur la vie des citoyens... On est en train de vivre 12 ans de solitude et de désert politique comme l'a dit votre rédactrice, et ce n'est pas dû qu'à la surdité de qui vous savez. Nos grands mères disaient un peu du henné et un peu de la moiteur des mains...
Lamjed
NUPES
a posté le 02-10-2024 à 16:18
La France qui compte 67 millions d'âmes et qui a une histoire de presque 2 siècles avec la gauche, a réussi à s'unir en NUPES. Chez nous, un seul parti de gauche, le WATAD, est fragmenté en 3. ça résume tout.
Gg
NUPES
a posté le à 18:16
Cette alliance purement électorale regroupe le NPA, LFI, les Radicaux de gauche, ce qui reste du PC, les écolos, les socialistes de gauche et les socialistes "de gouvernement".
Et tout cela se bat à couteau tiré ! Aucun avenir, rien de constructif.
Ce n'rst pas mieux qu'en Tunisie...
airoud123
où est passer haykel el mekki?
a posté le 02-10-2024 à 16:14
ce "FARINEUR" (c'est un mot que j'ai inventé HHHHH) qui veut vivre sur la planète de K NERON?