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Tribunes
La force du droit ou le droit de la force
24/04/2011 | 1
min
La force du droit ou le droit de la force
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Par Riadh Azaiez*

Le professeur Yadh Ben Achour aurait déclaré, à des médias français le 20 avril 2011, que le Rassemblement constitutionnel démocratique a une responsabilité historique en Tunisie dans le délabrement du pays, l’asservissement de la Justice, de l’Université … et de tout le système de corruption. Il doit l’assumer. Maintenant, qu’il s’estime heureux. Il n’y a pas de généralisation, ni de chasse aux sorcières. Ce que dit la loi, c’est uniquement les responsables des instances dirigeantes qui sont concernés par l’exclusion aux prochaines élections.

Tout est dit. En quelques phrases, la question de la responsabilité est élucidée. Le diagnostic est établi. La sentence tombe sans appel. Les responsables sont identifiés, livrés à la vindicte populaire et condamnés sans appel. Comble de l’ironie, les accusés doivent s’estimer heureux.
Il n’est pas inutile de préciser que le Professeur Ben Achour enseigne le droit à l’Université de Tunis et préside actuellement la Haute Commission pour la réalisation des objectifs de la révolution, la réforme politique et la transition démocratique en Tunisie.

Or apparemment, le professeur Ben Achour semble ignorer ou sous-estimer au moins trois éléments fondamentaux de la réalité politique tunisienne :
-Depuis juin 1996, le RCD constitue tout au plus une simple courroie de transmission, si ce n’est pas une coquille vide.
-Depuis une dizaine d’année au moins, tous les ministres ou presque sont réduits au rôle de secrétaires généraux de ministères.
-Les services de la sécurité relevant de la présidence de la République prédominaient sensiblement les services du ministère de l’Intérieur même.
L’essentiel du pouvoir était concentré entre les mains du couple présidentiel et d’une poignée de leurs fidèles.
Le même jour soit le 20 avril 2011, le tribunal de Sidi Bouzid vient d’innocenter Mme Fédia Hamdi, agent municipal censée avoir agressé physiquement le martyr et icône de notre révolution Mohamed Bouazizi.
Elle peut désormais rentrer chez elle, certes affaiblie par une grève de la faim de plusieurs semaines mais vivante. Elle peut s’estimer aussi heureuse.
Ces deux situations consacrent le droit de la force.

Des personnalités prestigieuses à la base, des partis politiques, des organisations et associations succombent aux sirènes du populisme. Les slogans et les déclarations des va t’en en guerre se succèdent.
Les révolutionnaires éclosent à tous les coins de rues, progressistes et démocrates de la vingt cinquième heure se multiplient par mitose.
Et pourtant, excepté quelques rares authentiques militants (Bochra Belhaj Hmida parle ironiquement et à juste titre de quatre personnes) de nombreux champions auront difficile à apporter la preuve de leur engagement passé en faveur des droits de l’Homme et de la liberté. La majorité des Tunisiens, à l’instar des fascistes italiens ou des pétainistes en France, ont collaboré parfois activement et souvent en silence sous le joug de la peur ou par habitude.

Les partis politiques ont été tous pris de court par la vitesse de l’effondrement du système Ben Ali.
Ceux qui applaudissaient à tout rompre le défunt régime et qui se disputaient honneurs, décorations et avantages se sont, pour certains aujourd’hui, découverts une âme révolutionnaire.
Chacun tente de se disculper en excluant et en accusant son voisin.
Sous couvert de pseudonymes et parfois directement, de nouveaux experts en sciences politiques donnent sur la toile, libre cours à leurs frustrations.
Certains appellent à la conciliation, conciliation entre qui et qui ? Conciliation par rapport à quoi ? On monte les Tunisiens les uns contre les autres. A qui profite le crime ?
Certes, des problèmes de mauvaise gouvernance et de corruption posent problème. La justice doit faire son travail pleinement, rapidement mais dans la sérénité.
Malheureusement sous la dictature, comme sous la révolution, la duplicité, le mensonge et le double langage sont maîtres.

Les intellectuels nous servent des modèles, les experts de la révolution française, polonaise, portugaise et surtout du modèle turc fleurissent et nous servent un parfum souvent étranger à nos contrées.
Le mal dont souffre notre Tunisie a été identifié.
Il est d’ordre constitutionnel. Le remède est prescrit. Il ne nous reste qu’à avaler la potion préparée par d’obscurs médecins et ce jusqu’à la dernière goutte.
Pendant que nos « représentants » tergiversent, notre peuple souffre, notre économie s’essouffle et engendre un chômage jamais enregistré auparavant.
N’ayez crainte, la nouvelle constituante va tout régler dans quelques semaines.
Bonjour les illusions !
Ne sommes nous pas en train de tourner le dos aux solutions les plus simples ?
Reprenons la constitution du premier juin 1959, révisons là en cas de besoin et surtout soumettons là au référendum populaire.
Nous pouvons le faire le 24 juillet 2011.
Saisissons aussi cette date pour élire démocratiquement un président légitime qui formera un gouvernement qui serait lui aussi par conséquent légitime.

Les partis politiques auront ainsi le temps de préparer de manière consensuelle un nouveau projet de société et assoiront les bases d’une Tunisie moderne et démocratique.
La force du droit doit l’emporter sur le droit de la force


*Riadh Azaiez : Consultant en Marketing politique.
24/04/2011 | 1
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