Nourane...Nadhir et Sofiène
Le dénouement heureux dans l'affaire Nourane Houas nous ramène au triste et sombre sort des deux journalistes Sofiène Chourabi et Nadhir Ketari.
L'annonce de la libération de l'employée de la Croix Rouge internationale a été accueillie avec un grand soulagement en Tunisie. Nourane Houas, jeune Franco-Tunisienne kidnappée et détenue en otage au Yémen depuis près d'un an déjà, a été transférée hier soir au Sultanat d'Oman avant de revenir en France. A son arrivée, elle a été accueillie par l’ambassadeur tunisien au Sultanat, Farhat Khlif, qui s'est déplacé pour s'enquérir de sa situation. Le ministère des Affaires étrangères tunisien a, aussitôt, publié un communiqué pour se féliciter de la libération de Nourane profitant du moment pour souligner que "la Tunisie a conjugué les efforts pour sa libération à travers ses représentations à Paris, Genève et Mascate" et adressant des remerciements à "toutes les parties prenantes dans cette affaire, et, particulièrement, les autorités omanaises et le CICR".
Une bonne nouvelle qui en rappelle une autre, beaucoup plus triste. Celle de la disparition du journaliste Sofiène Chourabi et du caméraman Nadhir Ketari. Une disparition qui remonte à septembre 2014 et qui n'a pas, aujourd'hui encore, trouvé de dénouement. Heureux ou malheureux soit-il. Une disparition dont les circonstances demeurent encore sombres pour l'instant.
Mobilisations, dénonciations, articles de presse, plateaux tv, promesses des officiels, rien n'a été en mesure de trouver une issue à cette disparition. Deux années de rumeurs, deux années de flou, deux années de scepticisme ou de résignation pour certains, qui ont poussé les parents à se déplacer en Libye afin d'aller chercher, eux-mêmes, leurs enfants, et de trouver réponses à leurs questions en suspens.
Alors que le gouvernement provisoire libyen annonce, officiellement, l'assassinat des deux Tunisiens, les autorités locales continuent d'affirmer que des négociations sont en cours avec les responsables libyens. Les responsables tunisiens n'ont pas cessé, pourtant, d'affirmer que les deux hommes sont sains et saufs et qu'ils détiennent des informations quant au lieu où ils se trouvent. Leur libération ne saurait tarder, a-t-on dit, il y a à peine quelques mois. A ne plus rien comprendre ! S'agit-il d'une volonté d’étouffer l'affaire, de cacher une quelconque incompétence, ou est-ce une manœuvre de la part des Libyens? Difficile à dire lorsque l'on sait que, dans cette affaire, le dossier de Sofiène et Nadhir est pratiquement vide. Aucune revendication claire n'a été émise de la part des ravisseurs, aucune demande de rançon n'a été formulée, aucun contact n'a été pris avec les ravisseurs, et aucune dépouille n'a été rapatriée. Si dépouilles il y a. On ignore, encore aujourd'hui, deux ans après, le sort réservé aux deux jeunes Tunisiens et l'endroit exact dans lequel ils se trouvent. S'ils sont encore en vie...
« Soit ils sont vivants, et il doit y avoir une solution, soit ils sont morts, et il nous faut une preuve » avait déclaré Maaouia Chourabi, père de Sofiène. Cette attente est insoutenable pour les familles, les proches, mais aussi tous les Tunisiens qui suivent de près cette affaire, depuis des mois déjà. Insoutenable de plus que les circonstances de cette disparition, restent entourés d'un lourd silence qui ne fait qu'attiser davantage la colère et l’inquiétude.
Nourane Houas a été enfin libérée. Sa nationalité française a-t-elle été d'un quelconque secours dans cet heureux dénouement? Oui sans doute. Mais sans vouloir tomber dans les raccourcis faciles à faire, l'absence et le silence qui étouffent l'affaire Ketari-Chourabi n'auraient jamais été possibles, ou du moins n'auraient pas duré aussi longtemps, si les deux journalistes avaient, eux-aussi, la nationalité française...