L’UGTT reste obstinée à tenir les rênes d’un navire qui coule. Aucun compromis ne sera fait concernant les augmentations salariales pour l’exercice 2017. La grande et puissante centrale syndicale a dit son mot et c’est un non retentissant : « non et non on ne cédera pas ! ». De l’autre côté, un Youssef Chahed empêtré dans ses objectifs et ses engagements avec des organisations internationales et avec ceux qui ont fait qu’il est là où il est aujourd’hui. La patate chaude devient brûlante. Comment prouver que l’on est à la hauteur des grands slogans longtemps brandis ? Comment faire face à l’obstination sans faille de l’UGTT ?
Youssef Chahed n’a pas encore réussi à ramener les dirigeants syndicalistes à la raison. Mais il ne désespère pas. Cette mission périlleuse constituera un test fatidique pour celui dont la nomination à la Kasbah suscite à la fois espoirs et vives réticences. Le report des négociations salariales de 2017 à l’année 2019 a été balayé d’un revers de main par l’UGTT, jugeant sans doute la proposition indécente au vu de la précarité de la situation des fonctionnaires. Pourquoi serait-il aux fonctionnaires de payer les pots cassés ? S’interroge-t-on à chaque fois que le débat est remis sur la table. Une autre question se pose dans ce cas-là : qui devra payer les pots cassés de cette gestion agressive de l’UGTT ? N’est-ce pas ces mêmes fonctionnaires ? Et bien plus tôt qu’on le croit…
Force est de constater que tous ceux qui se sont aventurés à défier la (grande) centrale syndicale se sont cassés les dents et en ont pris pour leur grade. Hier encore, Sami Tahri, porte-parole de la centrale, a écrit un message virulent à l’adresse de Yassine Brahim, ancien ministre et actuel président d’Afek Tounes. Yassine Brahim s’est risqué à critiquer les revendications, répétitives, de l’UGTT, les rendant responsables de l’aggravation de l’endettement du pays. Selon lui, les gouvernements successifs n’auraient jamais dû abdiquer, pèle mêle, aux requêtes de l’UGTT, dans l’unique but de sauvegarder la paix sociale. Une accusation qui lui a automatiquement valu les pires diatribes débitées par un Sami Tahri en colère. Un Sami Tahri qui le somme d’arrêter de se frotter à l’UGTT, sous peine de voir son linge sale lavé en public !
Au-delà du fait que ces mêmes politiques qui appellent les syndicats à la raison aujourd’hui, sont ceux qui ont signé l’accord de Carthage conférant à ces derniers les pleins pouvoirs. Au-delà du fait que ces mêmes dirigeants ont, à travers les gouvernements passés, bénéficié de ces recrutements revendiqués par l’UGTT. Au-delà du fait que ces mêmes anciens ministres attendent de quitter le gouvernement pour pouvoir, enfin, exprimer leurs critiques et n’apportent, en revanche, aucune solution socio-économique concrète ni digne d’être réellement envisagée. N’est-il pas temps d’arrêter ces basses guerres de pouvoir et de se concentrer sur l’essentiel ? S’il faut administrer des coups à l’adversaire, n’est-il pas temps de le faire, enfin, intelligemment ?
L’UGTT, centrale historique et au vaste pouvoir, n’est pas sans ignorer que la conjoncture du pays ne supporterait pas davantage de recrutements et que le budget, déjà fragile de l’Etat, est incapable de subvenir à d’autres augmentations salariales. Elle est pleinement consciente que ce sont ces mêmes fonctionnaires dont elle prétend défendre les intérêts aujourd’hui qui devront, tôt ou tard, payer les pots cassés. Mais ce ne sont pas les fonctionnaires, dommages collatéraux, qui importent aujourd’hui. La centrale syndicale a choisi de rester extérieure au gouvernement afin de « privilégier l’intérêt national » dit-on. Mais c’est surtout pour mieux lui administrer des coups et ne pas avoir à se mouiller dans une crise qui implique du concret et non des slogans. A la veille de son congrès, prévu au début de l’année 2017, l’UGTT se doit de se faire une image de dure à cuire, de renforcer son leadership et de prouver que c’est elle la plus forte. Partir sur une défaite serait une mauvaise manière de commencer l’année et d’évaluer ses accomplissements en vue de préparer ses plans d’action. L’intérêt du pays attendra, le pouvoir a ses raisons que la raison ignore…



Commentaires (14)
CommenterLes meilleures solutions ne sont pas les plus faciles
Quelques certitudes
2/ Le gouvernement ne veut pas lutter contre la corruption , certains de ces cadres sont impliqués ou proches des milieux mafieux.
3/ Sachant cela L'Ugtt fait monter la pression et c'est normal et meme louable
@ N.Burma
Cher Nestor !
Notre Président "moufadda" n'a que faire de mes propositions pour en faire des référendums ! Le voilà sur sa lancée et dans ses résolutions fermement "consensuelles" avec, par-ci par-là, quelques discrets petits messages de remontrance en direction du peuple, via Mufti et 'Al Quds Al Arabi' interposés !
Par ailleurs, si vous souscrivez ("avec enthousiasme", dites-vous) à mon dernier OUI, vous êtes obligé de souscrire (même si avec plus ou moins d'enthousiasme) à tout ce qui le précède !
Pour qu'il y ait répartition équitable de la richesse, il faut d'abord que cette richesse soit créée;
Pour qu'elle soit créée, il faut qu'il y ait un minimum de patriotisme économique, donc des agents et acteurs économiques responsables et sincèrement engagés dans la création de richesse nationale (par l'investissement, le travail, le paiement d'impôts...);
La création de richesse passe (entre autres choses mais nécessairement) par la production et la productivité;
Lorsque les entreprises et l'économie deviendront compétitives, il y aura de la valeur socioéconomique créée qui justifiera les salaires et même les augmentations de salaires; la compétitivité de nos entreprises et de nos produits/ services pourra mettre un frein à l'économie parallèle; l'Etat pourra se permettre d'assurer (fermement) une meilleure équité fiscale (et de ne plus pomper les fonctionnaires via les retenues à la source); l'Etat pourra aussi rembourser avec beaucoup plus d'aisance ses dettes et emprunter dorénavant, non plus pour payer les salaires de l'improductivité ou de la productivité minimaliste, mais pour stimuler l'investissement créateur de valeur.
Tout cela nécessite bien évidemment des politiques publiques explicites, transparentes, fermes et effectives visant à :
- Affirmer l'autorité de l'Etat et instaurer l'Etat de Droit;
- Combattre farouchement le terrorisme, la corruption, la contrebande, le commerce parallèle, l'anarchie et la saleté;
- Ancrer la société et l'économie dans des perspectives de durabilité;
- Encourager l'innovation et le développement technologique;
- Redistribuer équitablement la richesse entre les différentes catégories sociales et entre les régions...
Vaste programme !
A très bientôt cher Nestor !
Libéralisme à sens unique...
l'avenir radieux de l'économie tunisienne
A votre premier NON, je vous rassure, s'il est possible de vous rassurer, que l'hypothèque est certes réelle mais la vente du pays et qui plus est au rabais n'est pas pour demain, mais pour bien plus tard en unité de temps qui se compte en décennies et en unités de comptes en milliards de dollars ;
Votre second NON à courber l'échine pour la beauté de l'économie, il faut quand même, chère Tunisienne, tenir compte de ceux et celles qui font courber l'échine de l'économie nationale, que sont les trafiquants en tous genres qui caractérisent ce que l'on nomme pudiquement le marché parallèle qui s'octroie au bas mot, 50 % de la richesse du pays.
J'en viens à votre premier oui (devant le maire pour une heureuse circonstance !) et vous affirmer que la sincérité et la responsabilité ne comptent pas trop dans l'action économique. Cependant le respect des échéances sous peine de couper les vivres, là vous aurez les prétendants et prétendantes du oui.
Votre dernier oui, pour une à ma réponse j'ai répondu à votre référendum avec un certain enthousiasme que le tempérament ne peut masquer !
@satan
Et en application de LAVOISIER
Moi je propose une autre pétition !
NON à la mentalité du «Je revendique mais je ne veux pas y mettre du mien» !
NON aux coups qui vont courber encore et encore l'échine de notre économie et de notre pays jusqu'à l'achèvement !
NON à une «économie» qui tourne dans le vide et qui s'épuise de jour en jour !
OUI à une économie portée par des agents et des acteurs (entrepreneurs, travailleurs, organisations nationales, État...) responsables et sincèrement engagés !
OUI à une vraie économie ambitieuse et créatrice de richesse ! Et dans ce cas, OUUUUII à une répartition ÉQUITABLE de la richesse entre tous ceux qui ont contribué à sa création !
L'UGTT, gardienne du temple contre l'arbitraire ? voire !
Mais d'emblée, je voudrais rassurer mes amis fonctionnaires pour qu'ils ne se méprennent pas sur le sens de mes propos. Il ne s'agit nullement d'une tirade contre eux et encore moins d'une méconnaissance crasse du patriotisme dont ils firent preuve aux lendemains des incidents de la "Barouita". Ils ont été là et MERCI ENCORE.
Non, je ne les accuse pas et je ne les excommunie pas du débat. Je ne tomberai jamais dans le piège qui consiste à opposer les salariés du public aux salariés du privé.
Ça, c'est un écran de fumée que les malintentionnés dressent pour monter les uns contre les autres. Un grossier guet-apens qui ne fait jamais long feu et pour cause.
La vraie question réside ailleurs.
Elle est dans la bouleversante ambiguïté que la centrale syndicale entretient à dessein. Elle est dans l'incompréhensible ambivalence d'attitude que ce syndicat adopta aux lendemains de la signature de la charte de Carthage qui l'engageait pourtant, mais dont il s'était défait à la manière d'un Ponce Pilate sitôt les feux de la rampe éteints. Quelle hypocrisie !
L'UGTT, dont les barons ont des privilèges que ne renieraient pas certains capitaines d'industrie, a cessé de faire du syndicalisme. Elle fait de la politique mais sans les inconvénients de celle-ci.
Elle s'estime incontournable. Juste pour le beau rôle. Ainsi elle apparaît aux yeux de Tous comme la gardienne du temple contre l'arbitraire du pouvoir en place. Une sorte de Thémis, symbole de la loi, de la justice et de l'équité en même temps. En un mot divinisée et intouchable. Ne se bat-elle pas contre la légendaire propension des hommes à exploiter les plus faibles et les plus démunis ?
Noble combat, s'il en est.
Or, l'UGTT sait mieux que quiconque l'impécuniosité de l'État et son incapacité endémique à faire face aux demandes catégorielles qui fusent de partout. Un État contraint, depuis l'ouragan frériste de 2011, de quémander sa pitance pour pouvoir survivre.
De cela, l'UGTT n'en a cure.
Faut-il faire l'injure de rappeler à cette centrale syndicale que le syndicalisme poussé à l'extrême comme la démocratie mal comprise aboutissent volens nolens à une impasse ?
Doit-on préciser à l'UGTT qu'en fin de compte ce sont les salariés, qu'ils relèvent du secteur public ou privé, qui paient malheureusement la facture ? Parce qu'un pays qui ne produit plus ou peu et auquel aucun organisme ne fait PLUS désormais confiance est obligé de recourir à la planche à billets pour satisfaire les demandes sans cesse croissantes. Bonjour l'inflation !
Cela servirait-il à quelque chose d'empocher cinquante à cent dinars d'augmentation s'il fallait ensuite dépenser deux ou trois plus pour s'offrir les mêmes produits ?
Et de grâce que l'on cesse de nous rebattre les oreilles avec le désormais, ci-devant, rôle historique de l'UGTT ou de son patriotisme débridé dans le roman national.
Le vrai patriotisme c'est de sauver le pays d'une banqueroute qui frappe à sa porte en donnant du temps au temps.
L'UGTT nobélisée en 2015 est-elle encore l'UGTT ?