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Chroniques
L’Empereur frappé par la réalité
Par Marouen Achouri
29/12/2021 | 15:59
5 min
L’Empereur frappé par la réalité

 

Cette fois, Kaïs Saïed a vraiment été un précurseur. Quand le président de la République a parlé de la théorie du bonheur national brut, il savait très bien ce qu’il faisait. Il savait déjà que ce n’est certainement pas du classique PIB ou du pouvoir d’achat que le moindre bonheur viendrait. Cela s’est confirmé par le décret de Loi de finances que vient de pondre le gouvernement de Najla Bouden, sous la haute supervision de son altesse, Kaïs Saïed.

 

Le décret des finances est une série d’écritures comptables dénué de toute inspiration, de tout projet et de toute vision. L’objectif était de présenter une feuille à peu près correcte où les colonnes seraient équilibrées et jolies à regarder. Les effets sur l’économie et la possibilité d’appliquer les mesures décidées n’ont pas été prises en compte. Deux chiffres montrent clairement cela : L’Etat tunisien, dans une année qui sera probablement marquée par au moins une autre vague de Covid, dans une économie qui peine à se remettre de l’hécatombe de 2021, une année devenue électorale depuis le 13 décembre dernier, se propose, sans sourciller, de réaliser 2,6% de croissance. Le deuxième chiffre est celui de l’endettement extérieur prévu. Avec toute la confiance du monde, avec la notation désastreuse de « Ommek Sanafa », un pays qui n’arrive pas à assurer ses livraisons de blé, un Etat qui ne paye même pas ses fournisseurs et qui prend du retard pour payer ses propres fonctionnaires, estime pouvoir emprunter la bagatelle de 12 milliards de dinars sur le marché extérieur et 7 milliards de dinars sur le marché intérieur.

 

Il faudra plus que la théorie du bonheur ou celle de l’innovation de l’esprit humain de Kaïs Saïed pour réaliser de tels chiffres. Ils ne viendront certainement pas de « sociétés citoyennes » ou de la récupération de biens mal acquis. Pour avoir ces ressources, nous pouvons seulement espérer que le Fonds monétaire international voudra bien nous aider.

Mais là aussi le bât blesse. Le FMI, en tant que bailleur de fonds, n’en a rien à faire des envolées lyriques du chef de l’Etat. Le FMI ne se dit pas : « Il est intègre et c’est toujours mieux que les islamistes au pouvoir ». Le FMI posera une seule question : que va faire la Tunisie de la somme que lui prêtera le fonds ?  Là encore, deux chiffres peuvent répondre : la masse salariale va augmenter de 6% dans un pays qui souffre de ce ratio et le coût de la compensation va augmenter de 20%. Ceci suffit à montrer que ce gouvernement post 25-juillet est en fait une copie du précédent, et de celui d’avant. Le chef de l’Etat, détenteur suprême de tous les pouvoirs, est démuni et n’a rien à proposer outre les vieilles recettes pourries de ses prédécesseurs et de ses chefs de gouvernement. On retrouve même, dans cette Loi de finances, des mesures proposées par le gouvernement de Hichem Mechichi, censé faire partie du « danger imminent » qui a justifié la prise de pouvoir par Kaïs Saïed.

 

Un vieux dicton arabe dit : « On ne peut donner ce dont on est dépourvu ». Kaïs Saïed n’a aucune vision, n’y connait absolument rien en économie et n’a pas lu Keynes, Friedmann et encore moins Piketty ou Stieglitz. L’actuel président de la République n’a rien à offrir au peuple pour améliorer sa situation, son pouvoir d’achat et son quotidien. En recevant la cheffe du gouvernement le 28 décembre, Kaïs Saïed a tenté de reprendre ses billes en disant qu’il avait signé le décret sans conviction, et qu’il avait des réserves sur certains aspects concernant la justice fiscale et l’évasion. Une preuve supplémentaire de son incapacité, fournie à ceux qui le soutiennent encore. Le chef de l’Etat découvre l’Etat et apprend, à ses dépens, que la parlotte ne sert à rien. D’ailleurs, c’est un apprentissage qui va prendre du temps. Lors de la même rencontre, Kaïs Saïed a vite ignoré les finances pour se mettre, encore une fois, à insulter et vilipender ses opposants en s’en prenant aux grévistes de la faim. Un flot de paroles qui ne portent aucun sens et qui ne construisent rien. Comme d’habitude en somme.

 

Le pouvoir tunisien vient d’échouer dans son premier examen réel. Ce pouvoir piloté par le président de la République, Kaïs Saïed a montré son incapacité et son incompétence dans l’élaboration d’une Loi de finances. Ce pouvoir a pondu un texte sans âme et sans projet qui va fragiliser encore plus l’économie tunisienne et qui va durcir encore le quotidien des plus faibles. En disant que ce décret des finances sera fait avec le souci de préserver les couches les plus faibles de la société et en protégeant les petits revenus, ce pouvoir a menti. En prétendant que les fuites à propos de ce projet étaient fausses, ce pouvoir a menti. En prétendant apporter un sang neuf au pouvoir et une nouvelle approche de fonctionnement, ce pouvoir a menti.

Nous pourrions détailler les mesures fiscales ridicules imposées par le pouvoir en place. Il serait également aisé de montrer comment ce décret permettra aux corrompus et aux voleurs de devenir des citoyens modèles grâce à des dispositions méprisantes pour tous ceux qui ont payé régulièrement leurs impôts. Mais outre démontrer que ce pouvoir est une parenthèse dramatique dans l’histoire de la Tunisie, ce débat ne servirait pas à grand-chose puisqu’aucune juridiction ne peut admettre de recours contre ce décret. Ce qui est sûr, c’est que le pouvoir actuel a raté le coche. Le président, de son côté, a fait preuve d’un courage politique inouï et d’une solidarité sans faille avec sa cheffe du gouvernement : il a dit qu’il n’était pas convaincu et que c’est la faute aux autres. Pour l’originalité, il faudra repasser…

 

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Par Marouen Achouri
29/12/2021 | 15:59
5 min
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Commentaires
Zarbout
"Kaïs Saïed n'a aucune vision, n'y connait absolument rien en économie et n'a pas lu Keynes, Friedmann et encore moins Piketty ou Stieglitz."
a posté le 05-01-2022 à 12:21
Vous pensez que Messieurs Macron, Biden, Bojo ou Scholz avaient lu « la Théorie générale » de Keynes ou « la demande de la monnaie » de Milton Friedmann. Il faut arrêter un peu de nous raconter des boutades insensées !

Je doute fort que vous soyez vous-même capable de calculer le multiplicateur keynésien, de manier les comptes de la comptabilité nationale et leurs soldes de besoins ou capacités de financement ou encore moins de connaitre la controverse de Cambridge menée pas J.Robinson contre les néoclassiques.

Une recette à la FMI n´est pas adéquate avec la réalité tunisienne actuelle. Il nous faut une NEP à la Roosevelt pour redresser l´économie du pays. Je veux dire une politique économique au sens de John Maynard Keynes : il faut une relance par la demande. La solution du marché ne fera qu´aggraver la situation.
Rationnel
Personne n'est parfait
a posté le 31-12-2021 à 14:22
Ceux qui ont vote pour Kais Saied savait qu'il était professeur de droit constitutionnel et non un économiste. Les citoyens pouvaient choisir des économistes, amateurs ou professionnels mais ils ont préféré qu'un qui paraissait intègre.
Personne même les économistes ne sait comme l'économie marche vraiment, il y au moins douze théories économiques (socialiste, marxiste, keynésienne, neo-keynésienne, classique, néo-classique, néo-traditionnelle, école autrichienne...) qui essayent d'expliquer comment une économie marche mais elles échouent.
L'économie tunisienne ne marche pas puisque c'est le désir des tunisiens, c'est un système conçu pour que la majorité échoue.
Pour qu'un groupe réussisse il faut un minimum de coopération entre les membres du groupe. En Tunisie tout le monde est contre tout le monde.
Si un entrepreneur veut réussir un projet, il doit lutter pour obtenir un prêt, ensuite c'est la bureaucratie qui lui dressent des centaines d'obstacles, s'il arrive a obtenir toutes les autorisations, il va découvrir que les travailleurs qu'il a recrute ne veulent pas vraiment travailler et veulent créer un syndicat des le premier jour pour ensuite faire la gréve. Il court le risque de voir son idée volée par les agences auxquelles il a envoyé son projet pour l'obtention de l'une des centaines autorisation. S'il veut importer équipement ou matière première c'est un autre combat.
Quand le problème est systémique changer un responsable par un autre ne produira aucun résultat tant que le système reste inchangé. Kais Saied ne peut pas changer le système puisque ceux qui profitent de ce système (UGTT, Bureaucratie, Monopolistes) contrôlent tous les leviers du pouvoir économique. Le changement viendra probablement après la faillite.
Mouaten ll
Remarque
a posté le 31-12-2021 à 07:47
Bonjour
Quand l'empereur à devant lui des journalistes
qui n'ont rien à voir avec l'économie
qui n'ont jamais voyagé ni côtoyé des hommes du domaine
qui n'ont jamais lu un magazine spécialisé que leur culture s'arrête 20 ou 30 ans
Résultat ça fait d'eux des ignares
Bonjour l'anarchie pour ne pas dire autre chose
Hassine
" avait signé le décret sans conviction"il a dit qu'il n'était pas convaincu et que c'est la faute aux autres "
a posté le 30-12-2021 à 13:01
Non d'un chien qui a taper sur la main du RAIIS pour promulguer cette loi
Mais c'est qui ce délire
Est comme qu'on gouverne un pays
'?tant non convaincu et malgré ça il signe c a y est je au sommet de mon bonheur j en distribue même
Welles
Derrière un clavier c'est facile
a posté le 29-12-2021 à 23:33
Comment peut-on critiquer une loi de finances qui Vient juste de voir le jour, laissez à ce gouvernement le temps de la mise en pratique et on verra dans cent jours le résultat, je ne défends pas Robocop mais ayons l'humilité nécessaire pour voir si le gouvernement échoue ou gagné la bataille de redressement.Enfin , le fait que le président n'a pas lu les textes de Piketty ce n'est vraiment pas une perte, les textes de ce pseudo économiste est d'un vide sidéral .
BEN HASSINE MHAMMED
" Comment peut-on critiquer une loi de finances qui Vient juste de voir le jour,"
a posté le à 18:37
AVEC MES RESPECTS
QUAND ONT EST PAS DU DOMAINE OUI
SANS CONNAISANCE FISCALES ET BUDGETAIRE OUI
JE SUIS CERTAIN QUE LES CHRONIQUERS & JOURNALISTES NE DISENT RIEN DE LEURS TETES ET C'EST LEUR DEVOIR DE NOUS EXPLIQUER PAR LEUR CRITIQUE SI NON......
Zarbout
@BEN HASSINE MHAMMED: "QUAND ONT EST PAS DU DOMAINE"
a posté le à 13:37
Aussi, avec mes respects

Quand le « ont » du verbe avoir conjugué avec la 3ème personne du pluriel devient un sujet pour le verbe « être »: cela reflète que vous venez d´un autre monde sans DOMAINE GRAMMAIRIEN

Il faut apprendre à écrire pour bien maîtriser son expression.

Remarque la bêtise est humaine.
Warrior
abus des majuscules ...................
a posté le à 18:05
ne torture pas ton clavier.
zedache
De la modestie SVP
a posté le à 15:08
Une loi de finances se critique dès sa promulgation et même avant, en tant que projet, lors des débats à la Commission des finances puis en plénière devant l'Assemblée, hélas !, l'Assemblée est suspendue et ne peut plus débattre. Autre handicap : le texte présidentiel n'est susceptible d'aucun recours. C'est la première fois que dans le monde du droit, qu'une décision ne peut pas subir de recours devant une juridiction supérieure. Même Mussolini, Staline, Hitler, Franco et Salazar avaient chacun une instance de recours. C'est vrai que Bokassa n'en avait pas, ni Amine Dada, ni le sergent-chef Samuel K Do, qui a sévi au Libéria pendant des années, et d'autres encore de nos jours en Afrique et en Asie. Mais à force de regarder nos pieds pour nous comparer au plus bas, nous finirons par rejoindre les abysses et nous n'aurons plus qu'à creuser pour aller plus loin dans les profondeurs. Si Piketty est un "vide sidéral", comme vous le dites à partir de je ne sais quel socle de mépris fondant vos connaissances, on comprend mal les raisons pour lesquelles son analyse magistrale de l'histoire du Capital a eu un tel succès dans toutes les universités du monde, américaines en particulier, avec lesquelles il n'a pas d'atomes crochus, mais qui acceptent le point de vue adverse pour s'en enrichir. Un peu de modestie ne vous ferait pas de mal.
adel
Laissez le gouvernement.
a posté le à 13:36
Les citoyens ont laissés les gouvernements consécutifs faire ce qu'ils veulent sous prétexte qu'il fut du temps pour commencer à constater les résultats.
Maintenant qu'on constate les résultats, il faut se rendre à l'évidence que les gouvernements consécutifs ne font que juste gagner du temps pour servir des intérêts personnels et tribaux.
Conclusion: on a des tonnes de temps à perdre en Tunisie.
nazou de la chameliere
Mechichi voulait
a posté le 29-12-2021 à 20:22
"Incorporer " les contrebandiers.
Ce qui aurait permis à l'état de prélever l'impôt.
Mais faut croire que le facho, s'arrange mieux ,avec les défaillances de l'état !!!

Normal, le facho a besoin d'agiter la carotte à ses dégénérés de partisans !!!
DHEJ
L'empereur, le dernier s'appelait Pu Yi!
a posté le 29-12-2021 à 19:21
Notre BHIMCOP est sous le charme de l'intelligence de sa ministre Nemsia avec sa découverte du timbre de 100 millimes!
Mon.
Comment
a posté le 29-12-2021 à 19:20
Aucun gouvernement aussi compétent soit-t'il dans ce monde n'a de baguette magique pour sortir le pays de la ruine causée par les Islamistes, au lieu de vous lamenter comme les politiciens opposés au Président, essayez SVP de proposer des idées pour enrichir le débat, même si K.S fait semblant de n'écouter personne ( par son égo démesuré) , en fait, il suit les recommandations sans reconnaître les protagonistes, exemple : Moussi lui a permis de se débarrasser des Islamistes, mais a t'il dit ne serait-ce qu'un seul mot gentil pour cette patriote acharnée, que nenni ! Il est introverti et il en est incapable malheureusement, mais les Tunisiens ne sont pas dupes, ils savent que K.S. apprécient le travail de la lionne Abir.
Warrior
franalphabétistes ruineurs du pays depuis 56......
a posté le à 18:09
les laquais de la France zammourisée , sa langue et son système ont ruiné le pays, en perpétrant la colonisation.
Soussi
Vrais du faut
a posté le 29-12-2021 à 19:06
Ya Si Marouen
Pourquoi cacher la realite
L Etat etait en faillite ou presque avant le 25 juillet
Alors pourquoi voulez vous mettre tout ca sur l equipe d apres 25 juillet et le President
Les journalistes Tunisiens doivent savoir faire leur travail et devoir envers leur pays
Dire le vrais du faut
Fares
Rana msamhin ya Kaisoun
a posté le 29-12-2021 à 18:46
Kaisoun, 62% de la populace msamha fil les salaires. Il n'y a pas le feu, que les salaires soient versés dans les prochains jours ou jamais, c'est du kif-kif. Nous vivront d'honnêteté et de promesses fraîches, enfin de promesses réchauffées au micro-onde.

En attendant les salaires, keep telling us lies, sweet little lies and oh no you cannot disguise:

https://tinyurl.com/2p85c34b

Mansour Lahyani
Saoued wejhek<;;;
a posté le 29-12-2021 à 17:37
"Le pouvoir vient d'échouer dans son premier examen réel. Ce pouvoir piloté par le président de la République a montré son incapacité et son incompétence dans l'élaboration d'une loi de finances" : pourquoi tant de méchanceté ? Le Kayssar ne comprend rien à l'économie ni à la finance, ce n'était un secret pour personne, pas plus qu'au droit constitutionnel, du reste ! Cette loi de finances passera pourtant comme une lettre à la poste, puisqu'elle ne risque pas d'être discutée ni encore moins censurée, pour les raisons que vous savez... Dès demain, ce sera donc un repos total pour Mme Boughdiri, après les efforts surhumains qu'elle a dû déployer, avec son équipe, durant la période écoulée ! Un repos total que doivent lui envier tous ceux qui l'ont précédée dans ses fonctions, réputées hyper-harassantes ! Comme l'a écrit S. Loum, "en tout cas la ministre des Finances cachait bien ses appréhensions face à l'ampleur du chantier"'?' Il faut reconnaître que ceux-là étaient d'authentiques ministre des finances, eux...
zozo Zohra
L'obscurité
a posté le 29-12-2021 à 16:34
Je ne défends personne mais l'état était déjà en banqueroute. Au moins il y a eu arrêt de la fuite en avant.
Excuses moi mais depuis plus 10 ans personne n'était visionnaire. Jusqu'à aujourd'hui ils n'ont jamais su ou aller (je compare la Tunisie a ce restaurant parisien qui s'appelle "dans le noir" où les gens mangent dans l'obscurité totale, pour ce mette dans la peau d'un non voyant). La Tunisie ça ne faisait que mangeait , mangeait par gourmandise sans savoir où ils allaient non plus.
Aujourd'hui, on a une visibilité sur la réalité des dégâts causés, ils essayent de réparer ce qu'ils peuvent. Ce n'est pas une tâche facile surtout quand vous êtes boycotté par ces pourvoyeurs et ces donneurs de leçons.