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Chroniques
Emna, Mariem et les autres n'ont plus confiance
Par Marouen Achouri
15/07/2020 | 15:59
3 min
Emna, Mariem et les autres n'ont plus confiance
 
Que serait le monde sans confiance ? Certainement un endroit où il ne ferait pas bon vivre, un endroit insupportable où il faudrait faire attention à tout, prendre ses précautions et se méfier. Un monde sans confiance ferait de nous des bêtes sauvages, ce qui ne serait pas plus mal au vu de la situation.
 
Une professeure de philosophie punie à cause d’un simple rouge à lèvres va découvrir avec stupeur qu’elle ne peut avoir confiance dans son administration pour rétablir le tort dont elle a été victime. Elle a certainement déjà croisé des énergumènes qui jugent son apparence et qui essayent de briser ses élans de liberté. Mais le contrat social et civilisationnel de la Tunisie devrait lui garantir cette liberté en punissant ceux qui oseraient y porter atteinte. Cela n’est pas arrivé et la confiance de Mariem Bouzid en son pays, en son Etat et en son administration s’en trouve brisée à jamais. 
 
Emna Chargui aussi avait confiance en le climat de liberté et d’ouverture de son pays. Un climat qui lui aurait garanti le droit de poster ce qu’elle veut sur les réseaux sociaux sans risque. Emna est tout à fait prête à affronter les commentaires et les critiques de personnes dérangées par sa publication. Elle assumait parfaitement la publication d’une parodie du Coran. Mais les faits lui ont montré qu’elle n’aurait pas dû avoir confiance en un Etat qui s’est acharné à la poursuivre en justice et par un juge qui a fini par lui infliger une peine de 6 mois de prison assortie d’une amende. La confiance qu’elle aurait pu avoir en son pays, en l’avenir d’un pays tolérant et libre, s’est brisée en mille morceaux par les mots du juge qui l’a condamnée. Elle ne peut plus avoir confiance en son pays, elle ne peut plus avoir confiance en un avenir dans son pays. 
 
Cette histoire de confiance se retrouve aussi dans des endroits inattendus, comme les hôpitaux. Les médecins hospitalo-universitaires de Tunisie sont aujourd’hui en grève. Le ministère de la Santé refuse, à ce jour, de leur donner satisfaction pour qu’ils puissent travailler dans de meilleures conditions. Les droits de « l’armée blanche », tellement vantée pendant la crise sanitaire, sont encore bafoués et les médecins ont été obligés d’opter pour le plus douloureux des choix, celui de la grève. Ces médecins ne peuvent pas avoir confiance en un Etat qui les néglige et ne les écoute pas. Le danger de voir une Tunisie privée de son système de santé est bien plus proche que nous pourrions le penser, mais personne n’y prête attention. On ne peut avoir confiance en des gouvernants si inconscients. 
 
La confiance est aussi une monnaie d’échange et de pression en politique. Vu les derniers développements entre Ennahdha et Elyes Fakhfakh, la confiance se retire, se vote, se donne et se reprend. Plusieurs blocs parlementaires veulent retirer leur confiance à Rached Ghannouchi pour le virer de la présidence du Parlement. Ennahdha veut retirer la confiance à Elyes Fakhfakh pour le punir de tenter de mettre le parti islamiste sur la touche. Les partis et les politiciens monnayent leur confiance, soit pour la donner que pour la reprendre. Il ne reste que nous, pauvre peuple, dont la confiance ne vaut pas un kopeck dans ce marché indécent et dégueulasse. Car le peuple, du moins ceux qui ont voté, ont donné par cette voix leur confiance à un parti ou à une personne. Cette confiance, nous ne pouvons pas la reprendre, par contre eux, les politiciens, peuvent en faire ce qu’ils veulent. Chacun d’eux arrive sur la scène politique auréolé de la confiance d’une partie des votants et en fait allégrement commerce pour, finalement, servir ses propres intérêts.
 
La vraie question est : comment peut-on espérer progresser sans avoir confiance en nos institutions ? Il est impossible qu’un investisseur s’installe s’il n’a pas confiance en la police et en la justice. Il est impossible de travailler pour l’Etat quand on n’a pas confiance en ce même Etat. On ne peut être de bons contribuables quand on voit ce que l’Etat fait de tout cet argent. On ne peut être de bons citoyens quand on voit le niveau de la classe politique qui gouverne la Tunisie. Sans un minimum de confiance, la rupture est consommée. C’est ce qui est en train de se passer en Tunisie entre le peuple et ses gouvernants, politiciens et autres. Il ne faudra pas, plus tard, s’étonner des conséquences.  
Par Marouen Achouri
15/07/2020 | 15:59
3 min
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Commentaires
Justinia
@ Mina
a posté le 16-07-2020 à 17:31
Bonjour,
Vous respectez beaucoup M. Achouri mais beaucoup moins Emna Chargui.
Les mots ont un sens en français.Assurez du sens du mot "sacré" et posez-vous la question: a-t-elle vraiment "dépassé certaines limites?".
Vous voulez la punir? Emna Chargui implore votre indulgence...
Cordialement.
kol
@mina: la seule chose sacree est la vie d'un etre!
a posté le 16-07-2020 à 16:32
tout le reste est juste l'invention de l'homme, de Allah au coran, en passant par jesus, bouddha et des pyramides
franchement on est au 21eme siecle les gars, des gens vont sur la Lune, font des recherches sur l'immortalite, et nous en tunisie (et dans le monde moyen-ageux arabe) on en parle encore de la mo3jiza (ca me fait rire) d'un livre dont il s'est avere n'est que la 300eme version de l'original (cf la decouverte du cimetiere de coran au yemen qui a ete passee sous silence par l'arabie saoudite et qui prouve que le coran n'est pas un miracle mais bien l'oeuvre d'un genie certes qu'etait mahomet)
non variment, faut elever le debat un peu, peut-etre se faire une petite psychanalyse et arreter de projeter ces frustrations sur les autres
chacun est libre de dire, faire et penser ce qu'il veut tant que ca ne fait de mal a personne
lire ici que vous dites qu'il faut punir cette fille est au mieux absurde, au pire bigot et tres archaique
desole mais vous etes a cote de la plaque!
Alya
Mr achouri!!!
a posté le 16-07-2020 à 13:59
La jolie Meriem remettra son rouge à lèvres. Emna chargui n ira pas en prison mais Benificera d un exil politique. ET NOUS VOUS NE PENSEZ PAS A NOUS PAUVRES TUNISIENS TRAUMATISES PAR CE 15 JUILLET
Mina
réponse article marouene achouri
a posté le 16-07-2020 à 12:48
Mr. Marouen Achouri je vous respecte beaucoup mais pour Emna Chargui je trouve que cette fille a touché au sacré et quand on dépasse certaines limites il faut être punie
welles
Et vous monsieur Achouri
a posté le 15-07-2020 à 21:00
Faites confiance à madame Moussi et soyez juste avec elle
Riri
Regardez le soudan
a posté le 15-07-2020 à 19:50
Regardez ce que Ghannouchi a fait du Soudan et vous saurez ou va la Tunisie. Destruction méticuleuse des ses institutions et mise en place d une dictature dégoûtante. Merci à eux, leur place est bien en prison ou en exil chez nos ennemis.
DHEJ
Société de droit un principe cher à ROBOCOP...
a posté le 15-07-2020 à 18:40
Sans citoyen de droit!
Nephentes
La confiance est liee a l'integrite
a posté le 15-07-2020 à 18:33
Notre societe depuis le general truand s'est effondree :
clochardisation criminalisation et desagregation des integrites individuelles et collectives

Bref alienation durable

Ceci est le point de depart de l'implosion des fondements socioculturels de la Tunisie telle qu'elle existe depuis le 16 siecle

On ne detruit pas une societe multiseculaire aux influences et equilibres complexes sans degats importants

Tout ce qui se passe depuis 25 ans avec ses derives pathologiques est la resultante de cette implosion

A chaque fois on tente de recoller les morceaux de la carcasse eventree par l'explosion a chaque fois on decouvre hebete qu'il n'y a plus rien a faire
Gg
La confiance est un diamant!
a posté le 15-07-2020 à 17:53
La confiance entre deux personnes est sûrement le sentiment, le lien le plus fort, peut être plus que l'amitié ou l'amour, qui n'en sont que des conséquences.
Parce que la confiance en quelqu'un implique qu'on lui offre ce que nous ne donnons en principe à personne: notre fragilité, notre vulnérabilité. Devant toi en qui je place ma confiance, je suis fragile, faible ; et toi qui me donnes ta confiance, me nommes gardien de ta vie, au vrai sens du mot. Trahir la confiance est peut être la pire blessure que l'on puisse infliger à quelqu'un, car elle est fondée sur la sincérité la plus exigeante. C'est dire qu'elle est le pilier du couple ou de l'amitié.
C'est pourquoi, dans son sens étendu à la politique, l'élu qui trahit la confiance des électeurs se suicide civilement. Et le jeu, sale, de la confiance versatile ou vendue/achetée, lui ôte tout son sens, et montre en réalité un état de décomposition avancée du corps politique.
Bravo pour cet article, qui devrait amener une belle discussion...