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Le Parlement des slogans
19/06/2020 | 20:59
6 min
Le Parlement des slogans

Depuis sa prise de fonction en novembre 2019, l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a représenté le peuple d’une drôle de manière. Affiches, slogans, t-shirts portant des slogans politiques, sit-in à l’intérieur de l’enceinte du Parlement. Toutes les formes de protestation y sont passées dans un joyeux capharnaüm qui ferait presque oublier le pourquoi de l’élection de ces élus du peuple.

 

Un salut nazi brandi par un député dans l’enceinte du Bardo ? Dans les faits, il n’en est rien. Un photomontage grossier qui a été massivement partagé sur la toile suscitant l’indignation mais non la surprise. On y voit un député arborant la moustache emblématique d’Adolf Hitler et faisant le salut nazi en pleine plénière. Si l’image est évidemment une intox, elle n’en est pas moins symptomatique du mal qui ronge les sièges du Bardo où plus rien n’étonne…

 

Mercredi 17 mars, une plénière a été consacrée à l’examen du projet de loi sur l’économie sociale et solidaire. Un sujet très sérieux qui n’a pourtant pas empêché les députés de reporter l’attention ailleurs. Les députés du bloc Al Karama, à leur tête Seif Eddine Makhlouf, ont eu l’idée de brandir une photo de l’ancien président égyptien, Mohamed Morsi, avec la mention « Paix à l’âme du martyr ».



Un positionnement idéologique qui n’a pas manqué d’exaspérer les élus du PDL et de Qalb Tounes. S’en suivent des chamailleries dans l’enceinte du Parlement que la vice-présidente Samira Chaouachi a eu du mal à maitriser. Elle n’a d’ailleurs pas remarqué la présumée agression dont la députée du bloc de la Réforme nationale, Nesrine Laâmari dit avoir été victime par le député Al Karama, Mohamed Affes qui l’aurait agressée verbalement et voulu la frapper.

Derrière tout ce grabuge, la photo de Mohamed Morsi. Une photo contre laquelle les élus du PDL se sont insurgés, la qualifiant de « provocation évidente » et ont refusé la poursuite de la plénière tant que la photo du défunt président islamiste n'aura pas été retirée.

 

Comportement de mauvaise foi venant de députés qui ont fait du Parlement une scène de manifestation. Le PDL a en effet été le premier à ouvrir le bal des slogans avec son fameux sit-in observé alors que le Parlement venait tout juste d’être installé.

 

 

En décembre 2019, alors que le Parlement discutait la loi de finances complémentaire 2019, le PDL décide de camper littéralement dans l’enceinte du Bardo. Avec leurs couvertures, les députés protestaient contre « les insultes » d’une élue d’Ennahdha. La députée Jamila Ksiksi avait, en effet, traité les députés du PDL de clochards, tout en les accusant de banditisme. Les sit-inneurs disent lutter « pour restituer le prestige et la valeur de l’ARP, celui des Destouriens et de l’Etat tunisien ».

 

 

En mai dernier, le bloc du parti destourien libre de Abir Moussi a observé un autre sit-in d’une semaine dénonçant « l’agression verbale dont a été victime la présidente de son parti, Abir Moussi » à qui on a demandé de retirer une photo de Habib Bourguiba ainsi que la pancarte fustigeant Rached Ghannouchi.

 

 

 

Présidente de la commission de l’énergie, Abir Moussi avait placé devant elle une pancarte appelant au retrait de confiance du président de l’ARP, Rached Ghannouchi et la photo du leader Habib Bourguiba. Toute une plénière, aux retombées quasi-inutiles, a d'ailleurs été organisée pour questionner le président du Parlement Rached Ghannouchi sur sa diplomatie parlementaire.

 

 

Dans les tiroirs de l’ARP, des projets de loi patientent depuis 2014 pour passer en plénière. Certains concernent des partenariats avec des pays comme le Soudan, la Guinée, etc. D’autres ont trait à des réglementations dans le domaine du transport, des garderies et jardins d’enfants, du monde du cinéma, de l’agriculture et la pêche, etc.

L’élection des membres de la cour constitutionnelle patiente de report en report. Encore une fois, le bureau de l’ARP vient de reporter la date limite de dépôt des candidatures pour la cour constitutionnelle à aujourd’hui, 19 juin.

Pourtant, la mise en place de la cour constitutionnelle, et autres institutions constitutionnelles et instances indépendantes, figure parmi les priorités des élus du peuple. Prévue par la Constitution de 2014, elle n’a pourtant pas encore vu le jour en l’absence de consensus impossibles à établir.

Des projets de loi d’une importance capitale continuent à croupir dans les tiroirs du Parlement et sont réexaminés de commission en commission. Parmi eux, le projet de loi de la responsabilité médicale qui tarde à voir le jour malgré les indignations répétées des médecins et du personnel soignant.

 

Les députés sembleraient avoir d’autres chats à fouetter. Au milieu des chamailleries de tout genre, des plénières consacrées à des projets de loi et des motions très difficiles à assumer. Une motion demandant des excuses à la France pour la période coloniale, proposée par Al Karama, fait suite à une déclaration du Parlement tunisien refusant toute ingérence étrangère en Libye, proposée par le bloc parlementaire du Parti destourien libre (PDL). Deux blocs qui s’affrontent et font du Parlement un véritable terrain de jeu.

 

Comme un enfant auquel on aurait donné un jouet beaucoup trop sophistiqué pour lui, les élus du peuple ne savent quoi faire du pouvoir qu’on leur a conféré par les urnes. Et ils font tout pour le faire savoir. Le 25 juin courant, une plénière sera consacrée au dialogue avec le gouvernement sur le bilan des 100 premiers jours notamment à la lumière de la crise économique actuelle et de la pandémie Covid-19. Les débats s’annoncent rocambolesques. Pour ne rien arranger, Al Karama propose aujourd’hui une initiative législative visant à criminaliser toutes les formes de prostitution et de proxénétisme. Pour les Tunisiens, ce mandat parlementaire s’annonce pénible…

 

Synda Tajine 

 

19/06/2020 | 20:59
6 min
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Commentaires
WAS
Le Fascisme passe lo bonjour!
a posté le 21-06-2020 à 12:40
Vous vous souvenez quand Mussolini est devenu dictateur de l'Italie en 1922 ? Il disait toujours : "Rendez l'Italie grande à nouveau avec le parti fasciste !" et il a échoué.
Trump dit encore : "Rendre l'Amérique à nouveau géniale et grande !" La seule différence est que Trump ne peut pas parler italien.
Welles
Non et non
a posté le 21-06-2020 à 08:58
Ceux qui mettent le PDL et ElKarama dans le même sac se trompent complètement
Mme Tajine ne mélangez pas les serviettes et les torchons
choko
Un cirque à l'APR
a posté le 20-06-2020 à 21:17
Le peuple Tunisien en à raz le bol de ces mercenaires élus par le peuple, payer par le peuple qui ce comporte comme des clowns ou des voyous. Ennahdha, Al Karam, galb Tounes, Le PDL, tous en prisons, des bandits qui règles leurs comptes au lieu de débattre des projets pour améliorer la vie des Tunisiens. Le peuple en à marre et la deuxième révolution commence germer mais cette fois le peuple fera sa révolution au BARDO, sortir ces voyous et les pendre sur la place publiques comme la Révolution Française pendre le Roi responsables des malheure du peuple
retraité
parlement ou assemblée des adversaires
a posté le 20-06-2020 à 19:02
le parlement tunisien est une assemblée des gens qui se chamaillent ,se disputent avec parfois de violence verbale et physique payés par le contribuable pour faire ce cirque jusqu'à quand on assiste à cette mascarade d'ARP qui ne fait rien de bon pour les électeurs ? on doit attendre cinq anq ans pour changer ce parlement alors que le peuple souffre depuis 10 ans .
Zohra
@Dr. Jamel Tazarki
a posté le 20-06-2020 à 16:12
Bonjour Jamel,

Malheureusement et tristement, la Tunisie devient de plus en plus une mascarade. En attendant les problèmes socio-économiques sont à la pelle, même dans les pays riche que dire d'une pays déjà ruiné.

Salutations
Dr. Jamel Tazarki
Nous pourrions faire beaucoup mieux!
a posté le 20-06-2020 à 13:30
1) l'absurdité du consensus à la tunisienne
Par le consensus nous sacrifions un meilleur possible pour notre peuple au profit d'une démocratie du moindre mal. En Tunisie, les décisions socio-économiques succombent aujourd'hui au chant du consensus. Il y a souvent beaucoup plus du possibles dans un conflit que dans un consensus.

Le consensus cherche des solutions inadéquates dans une société tunisiennes en crise socio-économique sans précédent. Imaginez, que vous avez besoin d'un smartphone et que votre partenaire a besoin d'un micro-ordinateur et vous faites un consensus d'achat d'une chèvre:) Oui, c'est presque ça le consensus à la Tunisienne: Depuis 2011 on gaspille des milliards d'euros au non de consensus inintelligent alors qu'il aurait fallu investir en logistique, en infrastructure et en particulier dans le domaine agricole...

Le consensus à la tunisienne substitue le poison au remède. Le consensus à la tunisienne tend à rechercher l'exclusion du risque en augmentant le risque. Le consensus à la tunisienne refuse toute logique intelligente possible contraire au nom d'une pseudo majorité parlementaire à moitié non légitime (18 sièges gagnés grâce aux tunisiens à l'étranger avec une participation inférieure à 6%).

Notre démocratie est en danger car notre consensus n'envisage pas des solutions socio-économiques intelligentes du possible: certains de nos politiciens nous parlent de fabrication de satellites, d'autres de drones équipés de hauts-parleurs, et le plus ridicule et la distribution des terres agricoles étatiques en miettes sur des chômeurs qui n'ont jamais cultivé une tomate dans pot sur leur balcon.

En voulant se débarrasser de la différence et en la diabolisant comme un danger socio-économique, notre démocratie est tombée dans l'inachèvement en fabriquant une pseudo-sympathie mutuelle artificielle.


Fazit intermédiaire: la recherche à la tunisienne du consensus à tout prix est une démarche totalitaire au profit d'une minorité n'ayant aucune solution intelligente/efficace au désastre socio-économique de notre pays ---> LA Tunisie a plutôt besoin du conflit constructif respectant les valeurs sociales et de communications. Le conflit intelligent est nécessaire pour le développement socio-économique de notre Tunisie.


2) La compétition et la coopération intergroupe, d'après la théorie des conflits réels de Sherif:
Des relations entre deux groupes deviennent conflictuelles lorsque leurs désirs d'obtenir certains avantages concrets deviennent incompatibles, de telle sorte que les intérêts de l'un ne peuvent être atteints qu'au détriment de ceux de l'autre.

Par contre le conflit s'atténue, si les deux groupes sont amenés à coopérer pour atteindre un but commun (but supra-ordonné) qui ne peut être réussi qu'à travers le soutien réciproque actif.

Ainsi, le conflit intergroupe dépend de la structure objective des relations qu'ils ont entre eux: si ces relations sont purement compétitives, le conflit est alors inévitable, c'est par la création d'une structure de relations coopératives que le conflit est évité ou résolu.

Des faits: Une perception défavorable s'est développée entre nos groupes parlementaires car ils ont des projets totalement incompatibles. Et de ce fait, les membres d'un groupe parlementaire tunisien n'envisagent et ne réalisent que des contacts hostiles avec ceux de l'autre groupe. Ils élaborent des images négatives les uns des autres.

Oui, la réalisation de projets supra-ordonné, nécessitant un effort commun et créant ainsi une interdépendance positive, pourrait changer ces images et réduire l'hostilité entre les membres de nos groupes parlementaires et les différentes couches sociales.

Pour Sherif, compétition et conflit déclenchent des préjugés et des biais pro-endogroupes. Alors que la coopération en vue d'un objectif commun provoque une diminution du préjugé dans le contact intergroupe.


Fazit: La Tunisie doit arrêter avec ces consensus à la con. La Tunisie a besoin plutôt d'un but/projet supra-ordonné commun pour tous nos différents groupes parlementaires et pour tous les Tunisiens indépendamment de leurs classes sociales.

Et comme l'a dit si Houcine Ben Achour: "N'est pas Churchill qui veut"
https://www.businessnews.com.tn/390.000-pauvres-de-plus-en-2020,523,99628,3

MASSOLIT: Prejudice ' Sherif's Robber's Cave Experiment
https://www.youtube.com/watch?v=7CWZ7LJAmmg

Dr. Jamel Tazarki, Mathématicien

PS: j'ai enseigné à l'école et l'université allemande les mathématiques et j'ai dû suivre ainsi des cours de pédagogie et de psychologie, c'est un très grand enrichissement intellectuel pour moi. ça m'a aussi beaucoup aidé à mieux préparer et diriger mes cours en classe.
Alya
.cette CATA
a posté le 20-06-2020 à 13:08
Malheureusement je viens de relire un article de Nizar Bahloul où il explique qu il est impossible de dissoudre le parlement!!J espere avoir mal compris.
St Just!
Une comparaison malvenue !!!!
a posté le 20-06-2020 à 12:55
Que des députés tunisiens affichent la photo de Bourguiba ou la photo de Ben Youssef ou toute autre personnalité nationale est un sujet que nous pouvons discuter, critique voire condamner.
Mais que des députés affichent une personnalité étrangère qui certainement mettra en difficulté notre diplomatie extérieure et nos relations fraternelles avec l'Egypte..... Une démarche fermement condamnable et certainement incomparable avec la position du PDL. Rien n'empêche un illuminé aujourd'hui de s'attaquer à nos compatrIotes croyant défendre sa cause juste!!
L'attitude des députés d'El Karama est exactement l'attitude d'un gamin américain capricieux à qui le papa vient tout juste d'acheter une mitraillette......
A vous madame d'imaginer la suite.