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Pour désamorcer la crise, un président tout puissant
18/04/2016 | 19:59
5 min
Pour désamorcer la crise, un président tout puissant


Faut-il ou non donner plus de prérogatives au président de la République? La question agite le débat depuis quelques semaines entre les députés des différents blocs parlementaires. Certains,qualifiant une telle requête de scandaleuse, se heurtent à ceux qui y voient une planche de salut face à la crise actuelle. La gestion gouvernementale étant fortement critiquée, on estime que certains dossiers, dont la sécurité, devraient être de nouveau l'apanage d'une présidence de la République.



"Habib Essid est un chef du gouvernement à la hauteur de ses responsabilités" a estimé Béji Caïd Essebsi. A la lumière de la crise que le pays vit actuellement, plusieurs critiques sont adressées au gouvernement de Habib Essid. On l'accuse de ne pas avoir une feuille de route claire pour diriger le pays et de manquer de la "poigne" nécessaire pour prendre les décisions qui s'imposent. Des critiques accentuées par les présumées tensions existant entre le gouvernement et la présidence de la République.


Ces allégations ont été balayées d'une main par Béji Caïd Essebsi qui a affirmé qu'il n'existe aucune crise entre les deux pouvoirs ajoutant qu'il n'a nullement l'intention de présenter une initiative servant à amender la Constitution. Mais cet avis n'est certes pas partagé par les élus des partis au pouvoir, dont Nidaa Tounes.
En effet, au Parlement, plusieurs voix émanant des blocs de Nidaa, de l'UPL et du MPT ont appelé à un amendement de la Constitution renforçant l'exécutif et assurant plus de responsabilités au chef de l'Etat dans le but de lui accorder plus de prérogatives. Ceci lui permettra, selon eux, d'agir davantage sur certains dossiers réservés au gouvernement et, ainsi, de désamorcer la crise.

Mohsen Marzouk, coordinateur général du Mouvement du Projet de la Tunisie (MPT), a affirmé que pour sortir le pays de la crise dans laquelle le gouvernement se trouve actuellement, il faudra désigner une personnalité faisant l’unanimité autour d’elle d’une manière consensuelle. « Je considère que le président de la République est la personne la mieux placée pour prendre les commandes vu qu’il est le seul à avoir été élu directement par le peuple tunisien, et résoudre, ainsi, le conflit entre les trois présidents. Ceci ne se fera qu’en attribuant plus de prérogatives au chef de l’Etat» a-t-il expliqué.
De son côté, Sofiene Toubel, député de Nidaa Tounes, a affirmé dans des propos rapportés par Shems Fm, que son bloc parlementaire est en train de préparer une initiative législative servant à modifier les lois 32 et 33 relatives aux hautes fonctions de l'Etat.  Des lois "incompatibles avec la Constitution", a-t-il expliqué ajoutant que le chef de l'Etat devrait être en charge de la sécurité de l'Etat et non seulement des affaires étrangères.  Un autre dirigeant de Nidaa, Faouzi Elloumi, a estimé que les prérogatives du président de la République ne sont pas suffisantes et qu'on devrait lui en confier d'autres, plus élargies.
Par ailleurs, Taoufik  Jemli, président du bloc parlementaire de l'UPL a affirmé qu'au sein du parlement, plusieurs parties sont en faveur d'un amendement de la Constitution pour instaurer un régime présidentiel.




De l'autre côté, cette idée fait hérisser les poils des députés dits de l'opposition. Hamma Hammami, porte-parole du Front Populaire, a estimé qu'élargir les prérogatives du chef de l’Etat, est tout simplement "scandaleux".
Le Congrès pour la République (CPR) s’est dit, de son côté, "étonné" de voir des appels à amender une Constitution "qui n'est pas encore entrée en vigueur" et a estimé que, via cette revendication, la présidence de la République tente d'opérer "un coup d'Etat constitutionnel".

Avec la Constitution de 2014, la Tunisie est dotée d'un régime parlementaire mixte. Le  président de la République dispose de certaines prérogatives telles que dissoudre l'Assemblée des représentants du peuple et définit les politiques générales dans les domaines de la défense, des relations étrangères et de la sécurité nationale, après consultation du chef du gouvernement (art. 77).  
Mais ce régime, encore récent en Tunisie, n'offre pas encore le recul nécessaire pour être évalué. "On ne peut pas évaluer et dire si l'ARP a réussi ou échoué dans sa mission (...) nous devons être réalistes et la laisser poursuivre son travail", a déclaré Taoufik Jemli.  Ceci dit, plusieurs voix ont vivement critiqué le rendement gouvernemental notamment en ce qui concerne le dossier sécuritaire et les nominations à la tête du ministère de l'Intérieur.



Le gouvernement est aujourd'hui sous le feu des critiques et le chef du gouvernement l'est encore plus. A la lumière de la crise économique et sociale ainsi que des nombreux épisodes terroristes vécus depuis 2011, le pays a besoin d’un gouvernement doté d’une feuille de route simple et concise. Chose qui est loin d'être le cas aujourd'hui et qui fait que le gouvernement de Habib Essid s'attire les foudres de ses détracteurs.

De son côté, le chef de l'Etat se retrouve affaibli par les dissidences qui secouent le parti qui a fait qu'il est là où il est aujourd'hui. Les querelles au sein de Nidaa font que le président de la République n'a plus entre les mains l’instrument politique qui lui permettait d’exercer son autorité. On estime alors qu'il faudrait élargir davantage ses prérogatives.
Pour réviser les prérogatives du président de la République, deux alternatives se présentent : soit amender la Constitution, soit modifier les lois 32 et 33 relatives aux hautes fonctions de l'Etat. La Constitution ne pouvant être amendée qu'après un délai de 5 ans de sa promulgation, c'est la deuxième option qui se présente donc.



Force est de reconnaitre que la question d'accorder plus de prérogatives au président de la République est purement politique. La question se pose plus que jamais aujourd'hui après que l'ancienne majorité ait perdu les rênes du pouvoir. La position de Béji Caïd Essebsi s'en retrouve ainsi affectée suite aux démissions en chaîne au sein de Nidaa et les scissions qui s'en sont suivies.  Pendant ce temps-là, Ennahdha, en spectateur silencieux, assiste à l'effrittement de la scène politique tout en continuant à tirer son épingle du jeu en se disant, encore, en faveur de la pérennité des institutions de l'Etat et de l'unité nationale.


18/04/2016 | 19:59
5 min
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Commentaires (10)

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v()
| 19-04-2016 13:35
Trop tard!

Un peuple qui a toujours le mot "lyoum" à la bouche (politiciens, économistes,grands stratèges...) ne peut bâtir demain...
Triste fin
pour un peuple reparti de (presque) rien...

james joe
| 19-04-2016 11:53
L'Intelligence, c'est comme les parachutes, quand on n'en a pas, on s'écrase. C'est valable pour des citoyens qui attendent qu'on les guide de gré ( les bourri...) ou de force (les esclaves) , j'espère que le Tunisien(ne) n'est ni des premiers ni des seconds, il est celui qui a pris sa destinée en main .....

Nephentes
| 19-04-2016 11:13
C'est clair : le régime parlementaire avec exécutif fort ne convient pas aux Tunisiens.

Il faut élargir les prérogatives du chef de L'État après validation du troupeau qui nous sert de peuple, par voie de référendum

Et il est plus que jamais pertinent de savoir si le tunisien lambda est apte à exercer ses responsabilités de citoyen conscient actif et responsable avec libre arbitre tant l'incivilité et les malversations font partie intégrale de la culture tunisienne.

Une fois encore la malédiction bédouine qui massacre cette Nation nous entraine vers des lendemains autocratiques incontournables si l'on veut sauver le pays.

Au détriment, encore une fois des Tunisiennes et Tunisiens éduqués, travailleurs, honnêtes et responsables éternelles victimes de cette malédiction bédouine.

G&G
| 19-04-2016 10:59
Nos commentateurs cherchent midi à 14 heures. ils tournent autour du pot. Ils tâtonnent. Ils n'osent pas regarder dans le miroir pour dire que la révolution de la brouette était un fiasco et que seul Ben Ali serait capable de stabiliser un bateau qui coule.
Tâtonnez encore. On n'est jamais pressé; non plus moi le retraité qui vend les glibettes et se régale d'un long métrage en couleur.

G&G rcdiste pour la vie

james joe
| 19-04-2016 09:44
Un président tout puissant on l'a essayé pendant un demi siècle et le résultat un vieux *** qui s'est autoproclamé Bey à vie et le second l'a suivi dans sa démarche, presque ! si ce n'est la révolution qui nous a sauvé.
A ceux qui ne sont pas réveillés, sachez que nous vivons un autre ère qui est l'ère des technologies et que la politique du gros bâton est révolue. les vagues du changement est planétaire; tous les despotes et dictateurs seront écrasés.
Pour le Tunisien : il doit prendre ses prérogatives en tant que citoyen responsable et avisé.

DHEJ
| 19-04-2016 09:23
Ben je mettrai BCE aux commandes d'un A380 c'est plus facile que commander les "autochtones par le biais de la meilleure constitution au monde"!


Et dire que BCE vient de nommer un CONSEILLER DES AFFAIRES JURIDIQUES!!!


Un conseiller qui ne sait pas calculer la

PUISSANCE CONSTITUTIONNELLE avec un POUVOIR JUDICIAIRE et non POUVOIR JURIDIQUE!!!


CHECK THE CONSTITUTION MR. PRESIDENT!

Elyes
| 19-04-2016 09:09
Pour s'en sortir il faut appliquer la loi sans exception, cela prendra du temps mais c'est la seule solution pour revenir à la normale. Quand je vois à ce jour, la contrebande de l'essence au nez des douaniers et de la garde nationale sur les routes municipales et nationales à proximité de stations d'essence, c'est honteux. du temps de Ben Ali cette pratique ne dépassait pas Zarsis, aujourd'hui, à Tunis, Hammamet, Sousse , Sfax... ces pratiques continuent à prospérer en développant d'avantage la corruption. C'est l'un des milliers d'infraction aux lois sans que le gouvernement s'en souci, alors augmenter les prérogatives du président n'avancerait à rien. Quoique Arabs agree to desagree, et un régime présidentielle temporaire serait le mieux adapter pour s'en sortir au plus vite. Rabbi Maa Tounis.

Citoyen-S
| 19-04-2016 08:36
Si le peuple tunisien en parfaite collaboration avec sa société civile et des hommes et femmes patriotes ont réussi à faire face devant ennahda et contrecarrer sa détermination instaurer la chari3a, la complémentarité de la femme et bien d'autres futilités affreuses dans notre constitution, nous sommes tout de même persuadés et convaincus aujourd'hui qu'ennahda, parti d'hypocrites et de calculateurs, a réussi à imposer le modèle de constitution incapable d'assurer une bonne fluidité et continuité des services de l'état et par conséquent la stabilité du pays.
Ils ne sont pas dupes, ils ne peuvent exister que lorsque les conditions précitées sont réunies.

Professeur de droit
| 19-04-2016 03:02
La situation actuelle du Pays est parfaitement gérable par l'actuelle constitution, laquelle a d'ailleurs, été faite pour cela.
QUE NOUS DIT-ON ?
Le premier ministre est bloqué dans ses projets et décisions par le parlement ?
Personnellement, je ne connais aucun projet du Premier ministre, et je n'ai jamais eu connaissance d'une décision bloquée par le parlement, mais passons.
Deux solutions toutes simples : Le Premier ministre remet sa démission au Chef de l'Etat, et celui-ci,
-soit l'accepte et nomme quelqu'un de mieux accepté, pour relancer le pays.
-soit la refuse et souhaite garder la meme ligne politique. Dans ce cas, il doit décider simplement de dissoudre l'assemblée.
Si ses raisons sont bonnes, les tunisiens lui redonneront une nouvelle majorité pour renommer son PM, dont il est tant convaincu.
Plutôt que d'aller aux élections et de demander au peuple une majorité, si on est sur de ses idées, des hommes "politiques" sans étoffe parlent de changer la constitution, pour maintenir des ministres sans envergure!!! C'est à ce genre des "pensées" politiques qu'on reconnait un pays sous-développé. les plus arriérés des pays d'Afrique ne feraient pas autrement. Alors les plus arriérés. Les tunisiens savent-ils que le Bénin, le Mali et le Sénégal ont connu, chacun, 3 Présidents élus successifs et 6 à 8 premiers ministres , des sit-in et des révoltes populaires, sans changer de constitution !!!
Mohsen Marzouk vient de montrer, dans ce débat, qu'il n'a pas de vision. il ne parle pas pour BCE, comme un lecteur distrait pourrait le croire, il parle pour lui-même, puisqu'il pense devenir Président. il ne voit pas loin et n'imagine pas l'usage que pourrait faire de ce pouvoir un autre Président, moins intelligent ou moins patriote que lui.
Quant aux élus du peuple qui demandent moins des pouvoirs pour le parlement, cas unique au monde. ils donnent simplement la preuve que le peuple s'est trompé dans ses choix, et qu'ils n'ont pas leur place, dans ces lieux sacrés de la République.
Au lieu d'entrer dans un débat médiocre et malvenu, le Pays doit simplement choisir entre le gouvernement Essid et la Constitution.


kameleon78
| 18-04-2016 22:56
Tout à fait d'accord avec vous Synda Tajine, je me suis longtemps exprimé sur ce sujet, je suis d'accord pour modifier les deux articles de lois 32 et 33, moi je propose une troisième solution, organiser un référendum sur le changement de régime politique avec la question : "êtes-vous pour un régime parlementaire ou bien un régime présidentiel?" Ce sera le peuple qui s'exprimera et non les députés. Vous parliez de Ghannouchi et de la Nahda qui restent silencieux sur ce blocage politique, c'est normal c'est le régime choisi par le Gourou National himself qui l'arrange puisque rien ne se décidera sans l'aval du parti islamiste.