
Le professeur de droit et ancien président de l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE), Chafik Sarsar, a considéré qu’il n’y a pas de rupture avec l’avant 25 juillet 2021.
Invité par la radio Express FM, le 17 septembre 2021, Chafik Sarsar a argumenté cette hypothèse par l’intention du président de la République d’amender la Constitution et non pas de la suspendre. « Il s’agit d’une étape de réforme et non pas de constitution », a-t-il déclaré.
Il a expliqué qu’il n’y aura pas d’assemblée constituante qui devra élaborer une nouvelle constitution. « Nous devons nous poser les bonnes questions. La révision de la Constitution résoudra-t-elle la crise ? Peut-être qu’on devrait, plutôt, se pencher sur d’autres questions telles que la loi électorale ? », s’est-il interrogé.
A ce sujet, Chafik Sarsar a rappelé que le réseau Mourakiboun avait élaboré une analyse montrant les défaillances de la loi électorale. « Il doit être révisé. Il s’agit d’une urgence », a-t-il affirmé. Ces défaillances peuvent, aussi, être détectées au niveau de la législation relative aux partis politiques et de leur financement, d’après l’invité.
« La scène politique, après la révolution de 2011, a également témoigné de plusieurs défaillances telles que le tourisme partisan. Certains politiciens ont été membre de 5 partis durant ces dernières années. Tout cela ne peut conduire qu’à un échec », a-t-il déclaré.
« Si nous allons vers la révision de la Constitution, nous devons, aussi, nous interroger sur le comment », a-t-il continué. Il a pointé du doigt l’absence de Cour Constitutionnelle et de l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) qui doivent se pencher sur la chose. Le professeur de droit a, par la suite, considéré que la révision de la Constitution n’aura pas d’effet tant que la crise politique persiste. « Nous n’avons pas mis en place les instances constitutionnelles », a-t-il déploré.
De plus, Chafik Sarsar a rappelé que le président de la République avait affirmé que la Constitution comporte plusieurs failles. Il a estimé que la défaillance du texte résulte du fait qu’il soit le fruit de consensus.
« La Constitution ne fournit pas de solutions mais ces dispositions satisfont les acteurs politiques. La méthode d’élaboration de la Constitution traduit la peur de l’autre qui a conduit à des accords entre les membres de l’ANC, d’une peur du retour de la dictature et de l’utilisation de termes flous en raison de la crise de 2013 », a-t-il déploré.
Ainsi, le professeur de droit a considéré que la révision de la Constitution doit être méticuleuse et efficace. Il a affirmé que le chapitre concernant les droits et libertés ne doit pas être modifié. Par contre, l’amendement doit se faire au niveau des articles relatifs aux collectivités locales.
Quant au régime politique, Chafik Sarsar a critiqué l’utilisation de termes et expressions flous et imprécis. « Prenons l’exemple des termes concertation et consultation. Les deux figurent dans la constitution. Mais, il ne s’agit pas de synonymes. Les débats et travaux préparatoires de la Constitution ne répondent pas à ces défaillances », a-t-il critiqué.
Chafik Sarsar a affirmé que, dans l’ensemble des régimes politiques, le président de la République a la possibilité de dissoudre le parlement. Ceci n’a pas été concrétisé en Tunisie. « Il faut garantir la séparation et l’équilibre des pouvoirs, tout en évitant le blocage », a-t-il dit.
« En 2011, nous nous sommes rués vers la mise en place d’une assemblée constituante. Nous ne devons pas commettre les mêmes erreurs. Le 25 juillet représente une occasion de corriger le tir… Cette crise a, aussi, sensibilisé les Tunisie quant à l’absence de la Cour Constitutionnelle », a-t-il insisté.
« Nous avons incorporé à la Constitution un système de décentralisation comprenant des communes, des districts et des régions. Or, après près de dix ans de l’adoption du texte, personne n’a abordé la question des régions. Le chapitre "Pouvoir local" doit être révisé afin de répondre aux besoins de la Tunisie », a-t-il avancé.
Chafik Sarsar a affirmé que la Tunisie doit se doter d’une stratégie incluant la formation d’un gouvernement. Celui-ci doit se focaliser, durant les six premiers mois suivant sa création, sur la situation des Tunisiens et l’économie. « Un pays ne peut pas déclarer faillite à l’échelle nationale. Il suffit de faire travailler les planches à billets. Bien évidemment, ceci conduira à une hausse de l’inflation », a-t-il expliqué.
Par ailleurs, Chafik Sarsar a, également, souligné l’importance de l’adoption d’une Loi de finances complémentaire pour l’année 2021, ainsi que de la Loi de finances pour l’année 2022.
S.G
Yassine Manai
Mais une phrase m'inquiète venant d'un professeur : « Un pays ne peut pas déclarer faillite à l'échelle nationale. Il suffit de faire travailler la planche à billets. Bien évidemment, ceci conduira à une hausse de l'inflation ». Nuance: à l'echelle nationale soit, si le pays est quasiment auto-suffisant en énergie (pétrole), matières premières pour l'industrie, équipements et pièces de rechange dont les importations doivent évidemment être payées en devises ..... Dans le pire des cas, le pays pourra toujours réduire ses importations même si cela aboutira à des pénuries.
Mais ce n'est pas vrai pas à l'échelle internationale pour un pays dont les échéances de dette sont libellées et payables en devises ! La planche à billet tunisienne ne peut pas imprimer des dollars ou euros !!
A moins de compter encore sur les pays "frères et amis" qui se font rares ces derniers temps pour accorder des prêts à la Tunisie, ou alors à des taux d'intérêt élevés .....
walking on its head .....
Et, relevant des failles, des approximations voulues pour arranger tout le monde ou certains, il voit qu'on a fabriqué une machinerie diabolique.
Surtout, il note que l'organisation choisie et la distribution des pouvoirs qui en a résulté sont au fondement des blocages pour ne pas dire rendent le pouvoir inexercable.
Je note que ceux qui évoquent "l'équilibre des pouvoirs" ne mesurent pas ce que cela induit.
C'est un peu comme ceux qui évoquent "la séparation des pouvoirs" attribuée à Montesquieu confondant "disposition" ou "distribution" réellement présents dans le texte avec le fruit de leur invention projective.
Montesquieu cherchait à montrer non point le fameux équilibre parfait et introuvable, mais que la disposition des institutions doit telle qu'un pouvoir doit en mesure d'arrêter l'autre. Prévenir contre l'hégémonie de l'un sur le ou les autres.
Des lors, quiconque se réclame de la démocratie ne peut sue révoquer en suspicion légitime le mode, la distribution du pouvoir tels que nous les avons connus depuis des années.
Inutile d'en rappeler les dérivés, les excès, les méfaits et turpitudes nés du fait hégémonique et de l'appropriation des pouvoirs au bénéfice d'une mouvance aux attributs totalitaires puisque de proche en proche elle fit prise dans sa folie de tendre à tout régenter.