Par Synda Tajine
Le pays ne respecte pas ses réussites. Ceci est un fait. Les larmes de Azza Besbès ont de quoi filer la honte à tout Tunisien qui se vante des grands succès réalisés par la Tunisie. La vice-championne du monde d’escrime dit ne pas être capable d’honorer ses dettes, ne pas avoir été payée pour son prix décroché depuis juillet 2017, et avoir été superbement ignorée par le ministère de la Jeunesse et des Sports.
« La société tunisienne a fait ses preuves. Celui qui réussit, qui brille et qui porte haut le drapeau tunisien est ignoré, oublié et même puni, et ce dans tous les secteurs. Il faudra revoir notre copie, nous sommes complètement à côté, pas seulement en sport mais en tout. Une décision devra être prise avant la fin de l’émission que nous sachions si nous avons des responsables ou non ! », a commenté hier soir le patron des patrons.
Les ressources humaines sont en effet la plus grande ressource du pays. « Une énergie renouvelable et infinie ». Ce n’est, en effet, ni sur ses ressources naturelles, ni sur ses richesses que le pays peut compter mais bien sur ses hommes et femmes. Et pourtant, nos compétences sont exportées, arrachées et honorées à l’étranger, tellement elles sont dénigrées, ignorées et non respectées chez elles.
Parmi les ressources humaines du pays, son élite, et parmi son élite, ses médecins. Les jeunes médecins sont en colère aujourd’hui et ils ont bien raison. Internes et résidents travaillent en l’absence totale d’un statut légal régissant leur activité et les protégeant. La solution qu’on leur offre, depuis des années ? « Fermez vos gueules ou allez voir ailleurs ! ». Aller voir ailleurs c’est ce que nombre d’entre eux font depuis des années, là où leurs diplômes sont reconnus et leurs compétences aussi. Ils ont bien raison.
Cela fait des années que les médecins tiennent les mêmes revendications. Vous n’en avez sans doute pas entendu parler avant ces derniers jours ? Vous avez bien raison. C’est sans aucun doute « à cause » des moyens beaucoup trop civilisés utilisés par les médecins. Les médecins n’ont pas choisi de déserter leurs postes, de faire grève dans le vrai sens du terme et de mettre en péril la vie des gens. Ils ont porté un brassard rouge et ont tenu des manifestations pacifiques, aux slogans clairs et audibles et chronométrés comme du papier à musique. Ils défendent des intérêts qui parfois ne sont pas les leurs comme ceux des jeunes internes et résidents étrangers, qui n’ont pas accès à un salaire décent.
Au lieu de les reconnaitre, de les respecter, de les protéger par la loi, on les fait otages de leurs propres diplômes. Les internes et résidents, placés en bas de la chaîne alimentaire médicale, sont la « cheville ouvrière » des hôpitaux. Ils travaillent, pourtant, dans des conditions parfois inhumaines, sans sécurité, sans cadre légal, ils sont mal payés et ne sont reconnus ni par leurs supérieurs ni par l’Etat tunisien. Pourquoi voulez-vous qu’ils restent dans leur pays ? Ailleurs, ils sont convoités respectés et choyés et ont donc toutes les raisons de déserter la base. Les meilleurs partent et ceux qui restent sont soit ceux qui n’ont pas eu « la chance » de partir soit ceux qui ont encore foi en un système qui ne leur veut, pourtant, pas que du bien. Ceux-là finissent par être dégoûtés et plus assez motivés pour bien faire leur travail.
Si les médecins ont la côte à l’étranger, il est très mal vu de faire médecine aujourd’hui en Tunisie. A l’âge de 30 ans, beaucoup ne peuvent ni fonder une famille, ni faire carrière ni même devenir financièrement indépendants. Mais ceci ne concerne pas seulement les médecins. S’ils font partie de l’élite, ils ne sont certes –et malheureusement – pas les seuls.
Mais Azza Besbès a de la chance de ne pas être médecin. L’appel lancé par les médias et la pique de Samir Majoul au gouvernement ne seront pas lettre morte. L’escrimeuse ne sera pas ignorée longtemps. Le gouvernement n’est pas en mesure aujourd’hui d’ignorer l’appel du patron des patrons. Trop d’enjeux sont en jeu et le président de l’UTICA n’est pas homme à parler dans le vent.
Aujourd’hui, le patron de l’UTICA défend les ressources humaines et le patron du syndicat aussi. Chacun le fait à sa manière, l’une étant plus discutable que l’autre. En revanche, ceux qui ne le font pas ce sont les autorités. La tête dans le guidon, elles sont trop occupées à voir ailleurs et à se sortir des nombreux pétrins dans lesquels elles se sont mises ou on les a mises.
Qu’en sera-t-il des jeunes médecins ? Ils continuent de manifester pacifiquement, respectueusement et peut être même un peu trop silencieusement pour être écoutés. Peut-être ne devraient-ils pas être aussi civilisés dans un pays qui n’a que faire de la civilité de ses hommes....
Commentaires (5)
CommenterET L'APC?
Faux débat !
Elle habite et salarié en France depuis une décennie.
Si son salaire et l'assurance santé ne lui permet pas de bien vivre, elle n'a qu'à se plaindre contre la France, faut maintenant aider les salariés en France et ceux qui sont couvert pour l'assurance santé française... La blague du jour!
La CHANCE sourit à ceux qui prennent le large!
J'ai la chance de l'avoir compris depuis les années 70!
Et que fait le vieux BCE???
Des micmacs en devenant URGENTISTE!