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Tunisie, vers un scénario à la zimbabwéenne
12/02/2024 | 20:40
6 min
Tunisie, vers un scénario à la zimbabwéenne


Par Ghazi Ben Ahmed

 

Lors de la réunion du conseil des ministres du 25 janvier 2024, présidée par le chef du gouvernement, un projet de loi a été examiné et adopté, permettant à la Banque centrale de Tunisie d'octroyer des facilités de trésorerie à l'État tunisien. Cette décision marque une étape significative dans la stratégie du gouvernement tunisien, potentiellement autodestructrice pour le pays. En abolissant la loi organique n° 2016-35 du 25 avril 2016, qui garantissait l'indépendance de la BCT et interdisait le financement direct de l'État par la Banque centrale, la Tunisie s’expose à un risque d'hyperinflation, rappelant le scénario catastrophique vécu par le Zimbabwe au début des années 2000, où l'émission excessive de monnaie a entraîné une dévaluation monétaire dramatique.

Cette manœuvre risquée pourrait entraîner une augmentation incontrôlable de la masse monétaire sans correspondance avec la croissance de la production économique, menaçant ainsi la stabilité financière de la Tunisie. Face à ces développements, la population tunisienne, partagée entre résignation et réprobation, pourrait se retrouver à payer le prix fort de cette indifférence politique et économique, mettant en lumière les conséquences potentiellement désastreuses d'une gouvernance isolée des réalités économiques mondiales.

 

Selon les données préliminaires relatives à l'exécution du budget de l'État jusqu'à la fin novembre 2023, les fonds levés par emprunts, tant sur le marché intérieur qu'international, ont totalisé 14.812 millions de dinars. Ce montant représente 67,5% des prévisions inscrites dans la loi de finances rectificative pour l'année 2023, fixées à 21.932 millions de dinars. Pour réaliser l'intégralité de son programme de dépenses pour 2023, l'État doit trouver 7.121 millions de dinars supplémentaires. L'expert financier Ezzeddine Saidane a détaillé dans un post Facebook du vendredi 2 février 2024 que « sept milliards de dinars seraient émis en une seule tranche sur dix ans, avec un différé de paiement de trois ans et sans intérêts, s'ajoutant aux quinze milliards de dinars déjà générés par la planche à billets (8,8 milliards via l'open market, 2,8 milliards de prêt direct en 2020 et 3,4 milliards par d'autres formes de création monétaire), portant le total à 22 milliards de dinars issus de la planche à billets ».

L'usage excessif de la planche à billets, sans une augmentation correspondante de la production de biens et services, conduit à un déséquilibre entre la demande et l'offre, provoquant une inflation. Cette situation déclenche une spirale inflationniste, où l'augmentation des coûts de la vie pousse les salariés à demander des hausses de salaires, forçant les entreprises à augmenter leurs prix, ce qui diminue le pouvoir d'achat et peut miner la confiance dans la monnaie nationale. En conséquence, les gens sont incités à dépenser rapidement ou à investir dans des actifs stables, exacerbant l'inflation. De plus, le financement de l'État par impression monétaire peut entraîner une dévaluation de la monnaie, rendre les importations plus coûteuses, et aggraver le déficit commercial. Une monnaie affaiblie complique la gestion de la dette extérieure et peut réduire les investissements directs étrangers, limitant les réserves en devises. Globalement, le recours à la planche à billets sans soutien de croissance économique réelle présente des risques significatifs, incluant l'inflation, la réduction des réserves en devises, et la dévaluation monétaire, soulignant la nécessité d'une gestion prudente de la politique monétaire pour éviter de compromettre la stabilité financière et économique.

 

 

Perte d’indépendance de la BCT, une victoire à la Pyrrhus ?

Contrairement à certains commentaires qu’on a pu lire dans les médias visant à dédramatiser le financement du budget tunisien par la BCT, ceci crée un grave précédent qui risque de plonger la Tunisie dans une crise économique profonde, marquée par une hyperinflation et une dévaluation drastique de sa monnaie.

Il est paradoxal de constater que le président Saïed ait choisi de ne pas signer le programme proposé par le FMI (et élaboré par son gouvernement), motivé par la crainte que les mesures recommandées nuisent aux franges les plus vulnérables de la société tunisienne, risquant ainsi de déclencher des mouvements sociaux. Cette décision soulève des interrogations, particulièrement lorsque l'on considère que le recours à la planche à billets, envisagé comme seule alternative restante de financement du budget de l’État, porte en lui des menaces similaires, voire supérieures, pour ces mêmes populations vulnérables en Tunisie. En effet, alors que le programme du FMI cherche à imposer des réformes structurelles difficiles mais potentiellement bénéfiques à long terme, l'expansion monétaire incontrôlée risque d'accélérer l'inflation dans une spirale infernale et incontrôlable, érodant davantage le pouvoir d'achat des Tunisiens et menaçant de plonger les plus démunis dans une précarité encore plus profonde.

 

Le paradoxe souligné précédemment justifié par une posture délibérément souverainiste, et visant à afficher une résistance face aux directives (perçues comme telles) du FMI et à l'influence occidentale, semble être la stratégie retenue par l’entourage du président Saïed pour renforcer l’image de leader indépendant aux yeux de l'électorat tunisien en prévision des prochaines élections. C’est un choix risqué qui hypothèque l'avenir des générations futures. Ces dernières se verront contraintes de supporter les conséquences d'une telle orientation économique et financière, marquée par l'irresponsabilité et les coûts potentiels d'une détérioration encore plus rapide de l’économie nationale.

James Freeman Clarke, l'auteur américain, observait : « Un politicien pense à la prochaine élection. L'homme d'État, à la prochaine génération. » Dans ce cadre, la décision de refuser les propositions du FMI, tout en étant présentée comme un geste de souveraineté, semble davantage relever d'une stratégie électoraliste. Ce choix vise à préserver la popularité du président face à la prochaine élection présidentielle dans un contexte socio-économique alarmant, caractérisé par l’absence de « décollage économique » et une dégradation drastique du pouvoir d’achat des tunisiens.

 

Ainsi, dans un climat marqué par une austérité budgétaire, des pénuries et une stagnation économique, cette posture électoraliste risque de pousser l'État à financer de nouveau son budget via la Banque centrale de Tunisie en 2025 et au-delà, ouvrant ainsi la boîte de Pandore. C'est une trajectoire diamétralement opposée à celle prônée par un programme conjoint FMI/UE, un scenario à la grecque, pénible mais vital pour relancer l’économie lourdement pénalisée par des années de stagnation, de désinvestissement et de fuite des capitaux et des cerveaux.

Alors scénario à la grecque ou à la zimbabwéenne ?


*Président fondateur du Mediterranean Development Initiative (MDI)

12/02/2024 | 20:40
6 min
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Commentaires
*******
Le monde est dans la tourmente
a posté le 22-02-2024 à 11:34
Venez voir la France, elle est vers tous les scénarios.

Le monde entier est dans la tourmente (ala haft afrit)
*********
Oh
a posté le 16-02-2024 à 19:47
Cela fait 10 ans, la Tunisie vers scénario libanais, ils avaient juré ciel et terre que la Tunisie suivrai le scénario libanais.
la Tunisie vers amar bou zouir, la Tunisie, la Tunisie.....

La foutaise, il arrivera ce qu'il arrivera
Rationnel
La situation au Zimbabwe s'ameliore
a posté le 15-02-2024 à 16:37
L'économie en Tunisie est très différente de celle du Zimbabwe et les deux pays ne sont pas comparables.
La situation du Zimbabwe s'est améliorée durant la période 2021-2024: le budget est équilibré, le PIB a progresse de 8,5% en 2021, 6,5% en 2022, et 4,5% en 2023 ce qui est bcp mieux que le cas Tunisien, l'inflation a baisse de 170% a 30% (source BAD et Banque Mondiale).
La majorité des banques centrales au monde détiennent des bons de trésors de leurs gouvernements et ceci n'a pas créer de l'inflation.
La dette détenue par la Banque fédérale américaine, (la Fed), la banque du Japon (BoJ), la banque d'Angleterre (BoE), la banque centrale européenne dépasse les 20 trillion de dollars ~ 20 mille milliards de dollars soit plus de 21% du PIB mondial, (voir article de du Financial Times: Central banks' trillion-dollar problem).
Les 7 milliards de dinars de dette que va acheter la BCT ne représente que 0,03% de ce montant et aux moins de 5,8% du total de la dette du pays (estimée a 120 milliards DT selon un rapport du ministere des finance Septembre 2023), la BoJ au Japon détient 53% de la dette publique (voir BOJ Now Holds Record 53% of Japan's Government Bonds sur nippon point com). La BCT peut détenir 50% de la dette sans conséquences néfastes tant que les prêts sont orientés vers l'investissement et non la consommation.
NAIF
Tout peut arriver....
a posté le 14-02-2024 à 07:51
Erreur de jugement....
Le Zimbawe n'a pas les atouts de la Tunisie....
Les USA ont inond'? le monde de dollars, tout va bien.....
Lecteur
Propagande
a posté le 13-02-2024 à 17:37
On croyait que l'appareil de propagande a disparu. Apparemment, il est toujours présent. Il a même proliféré!
Abidi
Zimbabwe
a posté le 13-02-2024 à 15:25
Non Mr le scénario Zimbabwéen est loin de nous atteindre et vous savez sûrement pourquoi,au Zimbabwe ils ne vous en pas vous alors que nous si
Hammadi
Aux soit disant experts
a posté le 13-02-2024 à 14:14
Sous Bourguiba et benali ,la BCt etait sous le contrôle de gouvernement et roen de mal ne s est passe.
Calmez vous messieurs les experts economique.
Bakri
Non
a posté le 13-02-2024 à 13:05
C est comme les chroniqueurs sportifs qui deviennent entraîneur
Monsieur l expert Zimbabwe ou Liban on ne va pas faire appel à vous pour sauver le pays
Ali.
Scénario à la zambabweeenne.
a posté le 13-02-2024 à 10:53
Que d'oiseaux de mauvais augure!
Bouba
Qoui Encore
a posté le 13-02-2024 à 08:30
Le verre a moitié plein ,cela dépend des fenêtres d'analyse et cher Monsieur pourq6ne pas évoquer l'exemple Libanais où la BC indépendante a donné les résultats qu'on connaît, vous êtes entrain de faire peur aux tunisiens et pourtant les exemples de la planche à billets n'ont pas tous débouchés sur des catastrophes
Un peu plus de lucidité et il suffit pour nous que le phosphate revient rien qu'à 70% de son niveau de 2010 et nos
problèmes seront derrière nous
Tounsi Tounsi
Inévitablement.. vive Kaïs Mugabe !
a posté le 13-02-2024 à 08:29
Chaque peuple a les dirigeants qu'il mérite.

On doit passer par une phase terrible d'égoïsme, de prédation et d'injustice sociale pour que le peuple se réveille avec l'envie de travailler à un avenir meilleur pour sa progéniture. Sinon, on va se complaire dans la médiocrité et le provisoire qui dure, tant que chacun y trouve son intérêt.

J'espère qu'à défaut d'être efficace, les futurs présidents seront aussi drôles que feu Robert Mugabe du Zimbabwe.
Léon
Pour être honnête, KS n'y peut rien!
a posté le 13-02-2024 à 08:27
La déroute actuelle ne date pas de l'investiture de KS mais des décisions de merdolutionnaires nommés par les atlantistes suite au 14 janvier 2011. Ces incompétents, dénués de savoir-faire et de programmes efficients, ont emprunté au FMI à tire-larigot, obtempérant de la sorte aux décisions des atlantistes qui n'avaient qu'un seul objectif: Faire en sorte que le peuple ne regrette pas trop tôt la période Ben Ali et fasse marche-arrière sur ses choix "révolutionnaires".
Il s'agit-là d'un crime en termes de souveraineté, ce qui n'est pas étonnant lorsque les dirigeants sont nommés (parfois à leur propre insu) par des forces étrangères qui dirigent de facto le pays.
Le crime consiste à ne pas mettre au courant le peuple des conséquences de ses propres choix, évitant ainsi de le mettre devant ses responsabilité. En effet, le peuple est souverain et a le droit de virer un dirigeant, sauf qu'il ne faut pas le tromper en lui cachent les conséquences de ses choix. C'était aux premiers Gvnts merdolutionnaires de le faire et d'expliquer pourquoi la situation économique de ces années-là menait au dilemme évident: Ou bien les emprunts avec l'ébranlement de la souveraineté de décision menant à une situation à la "Argentine des années 90"; ou bien la planche à billet avec un cercle inflationniste à la Zimbabwe. Le peuple de perroquets à diplômes doit assumer la gravité de ses choix.
La trahison collective de 2011 a un prix et vous êtes en train de le payer. Il va de soi que je ne cesserai de vous rappeler ce qui a motivé vos choix: La haine et le régionalisme. Ce sont quasiment les seuls Leitmotiv de votre révolution qui, comme le prédisait Bourguiba, fit de vous un peuple qui mena son Pays à la re-colonisation.
Quant à KS, avait-il vraiment le choix? Tuer le "pauvre" en suivant les recommandations d'un FMI qui a tué tous les pauvres d'Argentine, ou bien tuer le "pauvre" (mais aussi le riche) en adoptant la planche à billet.
Et donc tuer le "pauvre" dans les deux cas; car les bonnes intentions et les beaux discours ne donnent pas à manger. Je n'aimerai pas être à la place de KS, ni d'ailleurs à celle de Ben Ali, car je ne connais que trop bien le peuple ingrat et sa capacité à trahir.
KS avait pourtant la possibilité d'éviter tout cela et de s'entourer des quelques rares "gros calibres" en stratégie (je pense en particulier à A. Friaa), ces Patriotes, ces authentiques, ceux qui avaient contribué à faire de la Tunisie un Pays rayonnant. Ceux qui ont suscité la crainte et la jalousie d'une Cabale mondiale qui vous a caressé dans le sens du poil et vous a utilisé pour vous détruire, dans une fable digne du corbeau et du renard.
De la même manière qu'ils firent toutes les révolutions contre tout pays qui les dérangeait, dont celle de Maidan en Ukraine. Vous savez comment s'appelle la révolution de Maidan? ils ont eu le culot de l'appeler "révolution de la Dignité" (exactement comme chez vous), alors qu'ils l'ont faite pour utiliser la jeunesse ukrainienne en l'envoyant à la mort, et ce, dans le seul but de détruire la Russie.
Peuple ingrat de Tunisie, vous avez été utilisés pour détruire votre propre pays, et n'eut été vos haines viscérales régionalistes, ceci n'aurait jamais eu lieu. Vous l'avez fait, car en dépit de vos diplômes, vous êtes des incultes. Vos analystes de plateaux télévisés sont passés du statut d'Analyste de matchs de foot, à celui d'Analystes politiques. Il va de soi que l'une des rares personnes qui pouvait analyser ce qui se passait en Tunisie est Léon le Patriote.
Treize années plus tard, vous vous rendez compte de l'évidence à laquelle vous aviez tourné le dos alors que Léon n'a eu de cesse de vous prévenir depuis 2011, recevant vos insultes de parvenus ingrats.
A la décharge de KS, sachez qu'il ne pouvait pas faire grand chose de la ruine dont il a hérité en 2019. Contrairement à vous, qui avez hérité en 2011 du pays rayonnant qu'avait laissé Ben Ali aux merdolutionnaires.
D'ailleurs, je ne comprends pas pourquoi KS détient en prison Abir Moussi, cette Dame Souverainiste, comme lui. Une Dame qui a compris d'où venait le danger (apparemment KS ne l'a toujours pas compris) et qui essaie d'expliquer aux tunisiens ce qui s'est passé et ce qui se passe.
D'une part, et avant toute autre considération, c'est injuste (attention à l'injustice!!!) et d'autre part, c'est contraire à ses propres convictions souverainistes. Allez comprendre pourquoi il laisse faire ce genre d'injustice sous son toit, injustice qui ne peut pas lui rendre service! Peut-être veulent-ils le compromettre ("ils", c'est la Cabale mondiale qui joue discrètement derrière le dos de tous les dirigeants). Ils n'auront pas gain de cause, Parole de Léon!
Vive la Tunisie, et vive Abir!

Léon, Min Joundi Tounis Al Awfiya,
Résistant contre la Cabale depuis 2011,

VERSET 112 de la SOURATE des ABEILLES (qui a piqué les révolutionnaires et démasqué leurs haines et leurs plans)
Bechir
Beaucoup de vrais
a posté le à 17:31
Je vous lis depuis quelques temps déjà comme vous l'avez bien dit depuis déjà 13 ans
Et vous vous avez toujours dit haut ce qu'on pensait, vous êtes bien brave. Et le verset dont vous avez toujours fait référence, il est presque sur-mesure sur la situation. Vous allez me dire l'histoire se répète un peu partout.
Bon courage, j'espère vous voir un jour dans des jours meilleurs
nsh Allha.
Mohamed Salah Bourras
Votre article
a posté le 13-02-2024 à 07:29
Je n'ai pas compris pourquoi nos "experts économiques" ont un grand plaisir à prédire des catastrophes et à ternir l'image de la Tunisie. Puisque ils se considèrent comme de grands experts, pourquoi ne proposent ils pas des solutions ?
Abidi
Don
a posté le à 15:27
Mr prédire les catastrophes c'est un don typique des pseudo experts toutes catégories confondues apparus après la déchéance de Ben Ali
Bdouz
LA GUILLOTINE
a posté le 12-02-2024 à 22:28
Le recours à la planche à billets nous conduit à la guillotine, c'est à dire à la mort sous anesthésie.
Le gouverneur de la BCT se trouve sous l'épée de Damocless, d'ailleurs nous avons l'impression qu'il est aux abonnés absents.
Le pays tout entier à besoin d'une réforme de font en comble et dans tous les domaines, sans ça c'est la faillite.
Nous ne pouvons plus dire c'est la faute de.....c'est maintenant où jamais.....