
Pour la réforme des retraites, Elisabeth Borne, Première ministre française, a eu recours encore une fois au fameux 49-3 de la constitution. Minoritaire au parlement, sous la pression de son Président pour qui la réforme est indispensable, elle opte, pour la 11ème fois de son mandat, pour un passage en force. Elle se met à dos les groupes d'opposition et la rue, ce qui plonge le pays dans une situation de grande tension.
Il est à rappeler que le 49-3 est un mécanisme constitutionnel français, qui permet au gouvernement, en cas d'absence de majorité, d'engager sa responsabilité devant le parlement, et de faire passer une loi sans recours au vote. Donnant en retour à l'opposition le droit de déposer une motion de censure contre ce gouvernement, qui une fois passée, le fait tomber et la loi en question avec. Dans l'histoire de la cinquième république française, le 49-3 a été utilisé une centaines de fois, et jamais l'opposition n'a pu faire passer de motion de censure en contrepartie. Il n'est donc pas étranger à la France, que le gouvernement passe en force et enjambe le parlement, sans qu'il ait à en subir les conséquences.
Si la démarche en soi est tout à fait légale et constitutionnelle, cette gestion de la démocratie au fil du rasoir semble ne plus passer aux yeux de l'opinion publique. L'arrogance de l'exécutif désormais irrite, agace et gène. Abstraction faite de la pertinence de la réforme en question, la méthode "gros bras" ne fait plus l'unanimité. Elle renvoie même un message assez dangereux, que jouer avec les limites est le fait essentiel de la pratique politique et de la démocratie. Et avec la montée des extrêmes et des populistes, il se pourrait que cela ait un revers, et décrédibilise la démocratie représentative, qui est de plus en plus fragilisée de nos jour.
La Tunisie en a été le parfait exemple. Loin de faire le parallèle exact entre une démocratie vieille de plus de deux siècles et une transition démocratique tunisienne d'à peine une décennie, mais il se pourrait qu'on puisse tirer des enseignements de notre petite expérience accélérée.
Chez nous, les passages en force étaient la norme. Dans un paysage politique morcelé, où personne n'avait réellement le pouvoir, la démocratie ne pouvait s'exercer qu'au fil du rasoir. Tous sans exception, députés, ministres, partis, médias, administration, instances constitutionnelles, avons joué sur les détails, les failles et les flous pour essayer d'exister et de se frayer un chemin vers les réalisations. Des réalisations, que chacun de son angle de vue, pensait légitimes, cela n'est pas la question.
Le réel problème c'est qu'en face, le peuple observait minutieusement, d'un œil attentiste et critique. Il voyait ces manouvres se dessiner devant lui sans filtre, et pouvait par conséquent en conclure que jouer avec les lignes rouges était chose tout à fait acceptable. Il pouvait même en déduire que la politique n'est autre que l'art de la fourberie.
Les politiques oublient toujours qu'en démocratie, le peuple est très bon élève, il apprend vite, s'approprie facilement les pratiques de son élite et les reproduit. Ils oublient aussi, que galvauder la démocratie est dangereux et qu'à force de jouer trop prêt des lignes rouges, elles peuvent être facilement transgressées. D'ailleurs, lorsqu'elles l'ont été et que le populisme a pris les pleins pouvoirs en Tunisie, le peuple n'a pas réagi. Il a même applaudi, rétorquant que de toute façon, c'était la pratique, et que si pour une fois, les dépassements se font dans son intérêt, il n'en serait pas plus mal.
Nous nous retrouvons aujourd'hui dans une impasse, dans un modèle illusoirement démocrate, puisqu'il puise sa légitimité dans les mouvements de foule, avec un peuple qui n'a plus aucun sens de la mesure. Un peuple qui ne juge les transgressions commises, en son nom bien sûr, que par le prisme de son intérêt personnel et de ses instincts primaires, et non celui de la loi, des valeurs et de la logique.
Alors ici viennent se poser les challenges auxquels sont confrontés les élites modernes partout dans le monde. Avant internet, il y avait cette distance entre les élites et les peuples qui leur conférait une certaine sacralité, leur permettant de dicter son rythme au monde sans réellement avoir à rendre des comptes immédiatement. On ne connaissait de ces gens là, qui avaient le pouvoir de décider des vies de millions de gens, que leurs légendes, et des apparitions médiatiques au compte goutte, véhiculant des idées soigneusement triées. Les fourberies, les manœuvres, les manipulations n'arrivaient aux oreilles du commun des mortels que longtemps après que les changements ont été initiés, laissant le temps faire effet et peu de place à la réaction.
Cela a changé, une fois cette distance raccourcie grâce aux réseaux sociaux. Les peuples ont vu leurs élites telles qu'elles étaient, humaines, imparfaites, arrogantes, condescendantes, manquant parfois d'éloquence et surtout de bienveillance. Contrairement aux populistes, qui eux surfent sur l'émotionnel et qui font tout pour ressembler au peuple, pour comprendre son langage, ses réactions, ses reflexes, ses craintes. Et qui surtout savent exprimer ses aspirations et ses désirs les plus simples.
Il y'a bien sûr des pays qui ont choisi tout simplement la dictature, coupant court à cette problématique de devoir gérer le peuple et ses états d'âmes : "Faisons taire tout le monde et tout ira pour le mieux". Pour les démocraties par contre, le 21ème siècle impose de nouvelles méthodes. Gérer la communauté devra se faire loin des limites, dans la modération et le consensus. Persuader au lieu d'imposer. Et ce afin que l'intérêt commun soit préservé au mieux.
Et l'intérêt commun ne réside pas seulement dans les équilibres budgétaires, la souveraineté ou la soutenabilité d'une dette, mais aussi dans la prise en compte de l'évolution concomitante de l'ensemble des consciences qui constituent une société. La politique n'est plus l'affaire que des politiques, mais de nous tous. Tous les citoyens ont le droit de comprendre, de savoir et d'être convaincus. Car c'est cela le problème majeur des démocraties modernes, les peuples n'ont jamais été préparés à comprendre la complexité, jamais éduqués pour analyser, ils ont été conditionnés pour exécuter sans se poser réellement de questions. Sauf qu'avec l'abondance de l'information, ils s'en posent de plus en plus, n'y trouvent pas de réponses convaincantes et font des choix en conséquence qui pourraient condamner définitivement la démocratie comme modèle de gouvernance.



certains pays démocratiques n'osent mème pas s'appeler république. eg. UK, Japon ...
d'autres dictatures en rajoutent. eg. la très grande jamahiriya, république ... démocratique et populaire !!
go back to school.
Il va quand même falloir trouver un moyen de changer les choses ici parce que l'inaction est pire que l'erreur.
La France a bougé sans attendre 10 dégradation de la note de la dette souveraine comme chez nous.
Ca renvoie aux principes des droits de l'hommes à savoir la méconnaissance de la constitution ainsi que des lois engendre l'anarchie...
A qui la faute?
Pour moi je t'offre le code pénal de la république Tunisienne!

