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Kaïs Saïed à la recherche du pain perdu
15/03/2022 | 14:25
5 min
Kaïs Saïed à la recherche du pain perdu

 

Le président de la République a lancé, depuis quelques jours, ce qu’il a appelé une guerre sans merci contre le monopole et la spéculation pour faire face au manque de plusieurs produits de base dont la farine, la semoule, le pain et l’huile subventionnée. Le dernier épisode de cette guerre s’est déroulé hier à Bab El Khadhra, quand le chef de l’Etat s’est rendu dans une boulangerie où il avait ses habitudes il y a quelques années.

 

Kaïs Saïed, qui pourtant prône un nouveau mode de gouvernance et la rupture avec ce qui se faisait dans le passé, a choisi un format traditionnel pour mettre en scène son intervention : la visite inopinée. De mémoire d’observateur, pas un problème dans ce pays n’a été résolu grâce à une visite inopinée, exercice par lequel tous les présidents sont passés. Le chef de l’Etat a choisi de se rendre en personne dans une boulangerie pour s’enquérir de sa fourniture en farine et donc de l’existence de pain à vendre. Au-delà de la forme, cette visite a eu un effet inattendu pour les services de la présidence et pour Kaïs Saïed lui-même : il a démontré qu’il ne maitrisait pas le circuit par lequel les boulangeries sont approvisionnées et il a donné matière de moquerie et de « memes » à l’infini pour les internautes tunisiens.

A plusieurs reprises, le président de la République a questionné le propriétaire des lieux sur l’approvisionnement en farine. Il reçut la même réponse à chaque fois : « ce n’est pas suffisant monsieur le président ». Cette réponse a profondément dérangé le président qui s’attendait à autre chose. C’est ce qui explique, d’ailleurs, le fait qu’il ait posé la même question à plusieurs reprises. Puis, il s’est trahi en posant, encore une fois, la même question d’une manière différente : « Malgré ce qui s’est passé ces trois derniers jours, ce n’est toujours pas suffisant ? ».

 

En fait, le président de la République pensait que les quantités saisies dernièrement par les services de la police et du contrôle économique, notamment en farine, étaient suffisantes pour renflouer le marché et subvenir aux besoins de tous les Tunisiens. C’est là que le président démontre, sans l’ombre d’un doute, sa méconnaissance aussi bien des circuits que de l’ordre de grandeur entre les besoins d’un pays et les quantités saisies chez quelques spéculateurs. A aucun moment le chef de l’Etat n’envisage le problème de l’approvisionnement en produits de base, viscéralement lié à celui de la subvention, dans sa dimension systémique et structurelle. Kaïs Saïed, épaulé par son ministre de l’Intérieur Taoufik Charfeddine, ne prend le problème que par l’ornière sécuritaire en mobilisant les forces de l’ordre. D’ailleurs, le fait même qu’il ait annoncé sa guerre contre la spéculation depuis le ministère de l’Intérieur en dit long sur son appréhension du problème. Il est également évident que tout cela est sous-tendu par sa théorie du complot selon laquelle des forces obscures font tout ce qu’elles peuvent pour lui mettre les bâtons dans les roues et sont prêtes à affamer le peuple pour y parvenir. D’ailleurs, lors de cette visite de la boulangerie, le président s’est trouvé dans l’incapacité de répondre concrètement au boulanger qui se tenait devant lui. Il s’est donc réfugié dans sa zone de confort faite d’ennemis du peuple, de suprématie de la loi et de décret magique qui réglera la question dès qu’il l’aura signé. Comme ce fut le cas par exemple pour la décharge de Agareb, Kaïs Saïed perd ses moyens dès qu’il est confronté à un problème concret et réel. Pire encore, il ne peut y opposer que les deux seuls types de réponse qu’il peut formuler : la matraque des policiers comme ce fut le cas à Agareb, ou la réponse législative selon laquelle il suffit de changer la loi ou de durcir les peines encourues pour mettre un terme au problème.

 

Un autre moment de cette visite mérite que l’on s’y arrête, celui où le chef de l’Etat évoque le bulletin d’informations de 20h. Il a dit : « Il ne faut pas qu’elles [les quantités fournies en farine, ndlr] soient complètes dans le bulletin d’informations et manquantes en réalité ». C’est un autre spectre qui surgit au détour de cette phrase, qui est celui de l’information du président. Comme ce fut le cas en d’autres occasions, on découvre un président de la République qui est mal informé et qui se heurte à des réalités qu’il ne soupçonnait pas. Le chef de l’Etat pensait réellement que les choses s’amélioraient et que les informations qui lui sont remontées, y compris à travers le journal télévisé, sont toutes vraies et ne souffrent d’aucune mise en cause. La question de l’isolement du président et sa probable désinformation par son entourage refait ainsi surface au détour d’une boulangerie du centre-ville.

 

Le président de la République, Kaïs Saïed, est sans nul doute sincère dans ses intentions. Il est également certain qu’il confère la plus grande importance à l’approvisionnement alimentaire des Tunisiens ne serait-ce que par la valeur symbolique du pain qu’il a d’ailleurs souligné lors de sa visite. Toutefois, le chef de l’Etat, par méconnaissance et précipitation, s’y prend mal. La campagne nationale de lutte contre la spéculation et le monopole n’aura pour effet que de tendre encore plus le marché en plus de tous les dégâts collatéraux qu’elle va avoir. Cela rappelle les prémices de cette guerre quand Kaïs Saïed avait fait irruption dans une usine de fer ce qui avait chamboulé le marché. Décidément, nous n’apprenons pas des erreurs du passé.

 

Marouen Achouri

15/03/2022 | 14:25
5 min
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Commentaires
Abidi
Sincérité
a posté le 17-03-2022 à 13:39
Ya mr Marouen si vous aussi vous êtes aussi sincère que vous prétendez, veuillez aider les autorités concernées avec vos compétences et savoir faire et comme cela la sincérité combiné au patriotisme on sortira vainqueur
Un lecteur
BN à la recherche du scoop perdu
a posté le 17-03-2022 à 09:27
Hadsine
Mr marwen tjr un plaisir à lire vos aricles
a posté le 15-03-2022 à 17:13
"" D'?SARROI "'
LE BOULANGER FIT SU'IL EST A MOITIE APPROVIDIONNE
LE PR'?SIDENT LUI REPOND PATIENCE LA GUERRE CONTRE LES SP'?CULATEURS AVEC DECRETS VA RESOUDRE VOTREE PROBL'?ME N'AYAIT CRAINTE
Mozart
Du bon emplacement de l'accent circonflexe
a posté le 15-03-2022 à 16:24
M. Achouri,
Il fut, mais nous fûmes, vous fûtes, au passé simple.
Il fût, mais nous fussions, vous fussiez, à l'imparfait du subjonctif.


BN : Merci d'avoir attiré notre attention
TABARKA
CARTHAGE GRENIER DE ROME
a posté le 15-03-2022 à 16:20
Le populisme primaire de K. SAIED prend petit à petit des allures parfois théâtrales. Ses sorties inopinées ne font plus recette. Le sujet concernant le pain est un sujet sérieux et grave, le regard du monde entier est tourné vers la guerre Ucraino/ Russe grenier d'Europe pour essayer de se solutionner le problème de la substitution du blé vendu par les deux belligérants. Comme le chef de l'état est détenteur de tout les pouvoirs, en cas de famine, la responsabilité l'incombe au plus haut lieu. La Tunisie importe ne l'oublions pas la grande majorité de son blé à l'Ukraine elle serait si on ne fait rien l'une des premières victimes de cette guerre . Le gouvernement de Bouden est enlisé dans des dialogues de sourds avec l'ugtt, tout le monde semble mésestimer les retombées désastreuses de cette catastrophe alimentaire . K. SAIED risque par son insouciance et légèreté politique de le payer très cher. L'Europe s'est attelée à faire face, elle a changé le fusil d'épaule en se penchant ( actuellement) sur l'exploitation des terrains jachères pour mieux garantir son indépendance agricole, et ne plus être à la merci des autres. Tunis pourrait faire de même en engageant le pays dans une politique agricole à grande échèle et arrêter la bétonisation à outrance mais pour cela il faudrait une maturité politique conséquente .
Aghir
Oui!
a posté le à 11:13
Analyse parfaite!
VR
C´est la tradition en Tunise!
a posté le 15-03-2022 à 15:42
N'importe qui peut venir à un étal et commencer à enquêter en touchant la nourriture à mains nues : les mots gant et hygiènes est une notion étrangere en Tunisie !

Tbarkallah 3lè Benou Hilèl!
OUI
Oui, tout est possible!
a posté le à 18:30
On peut se gratter le cul ou se moucher et immediatement tripoter le pain par exemple ou servir la salade avec le cassecroute, après au café le serviteur prend des morceaux de sucre avec ses doigts et trempe les dans la tasse de thé .
C´est tout à fait normal dans mon pays!
Alya
Kais Said
a posté le 15-03-2022 à 15:41
Ks oui, est un homme très courageux. En plus de 20 ans, nous n avons jamais vu feu Benali, descendre dans la rue. Ks est un homme foncièrement bon. Sa générosité n a été reconnue que par une population jeune qui l a amené au z ème tour des élections. L autre jour, écoutant le frère de Chokri Belaid suite a sa rencontré avec notre président.. KS lui avait dit" mon sang ne vaut pas pas plus que le sang de ton frere" a mediter....
MH
@Alya
a posté le à 21:54
Bonjour,
KS est certainement un homme bon, gentil et honnête. Je suis convaincu. Mais, on ne demande pas à un président d'être bon et gentil !! Un président doit être efficace, rassembleur et doté d'un minimum d'intelligence et de clairvoyance. Il doit être guide et leader d'un peuple et surtout savoir choisir son équipe. Malheureusement, être droit et généreux ne suffit pas pour gouverner un '?tat.
Aghir
''
a posté le à 11:15
Tout à fait d'accord avec vous!
nazou de la chameliere
Alya
a posté le à 16:32
Vous êtes toubib ?
Savez-vous au moins, que votre idole n'a pas à rentrer chez un commerçant ?
De quel droit ?
Il n'est pas le service des répressions des fraudes .
Il n'est pas le ministre du commerce.
Ni le service de défense des consommateurs.
Ni un service d'hygiène de l'état !!!
Pas de masque !!
Pas de gants.
Il tripote du pain !!
Et il se balade dans un commerce PRIV'? !!!
Non mais allo !!!
Aghir
''
a posté le à 11:18
Vous avez totalement raison! D'autant que ça ressemble serieusement à du populisme....
Alya
Reponse Nazou
a posté le à 20:25
Je ne suis pas formatée comme l a dit un autre intervenant du forum et honnêtement, j ai toujours survole les années Benali et jamais mis le pied dans une chaaba même en tant que cadre. Et ça il fallait le faire quand on est fonctionnaire . Dans mon intervention, je me suis simplement permise une réflexion sur KS. Oui l homme est foncièrement bon et courageux
TAR
@nazou de la chameliere: vous avez raison!
a posté le à 18:12
Lorsqu´on est formaté et formé (meme comme médecin) dans une dictature, on n´apprend que la civilisation des Benou Hilèl !

Héthèkè ichjèb rabbi, Mme nazou de la chameliere!
Alya
Reponse a TAR
a posté le à 20:52
Aie, les benihilal sont des tunisiens comme vous et moi, non? Et je les respecte sinon je ne suis originaire de benihilal et pas formatée du tout.
URMAX
... "non mais allo (quoi) ... ?
a posté le à 18:05
... ah bon ?
Vous etes du genre de cette Nabila, peut etre ?
Ben dites donc ...
Maintenant, nous pouvons voir d'ou vous prenez vos exemples, vous ...
nazou de la chameliere
Le patron de la boulangerie
a posté le 15-03-2022 à 15:22
N'a pas l'air content que le facho tripatouille son pain !!!

C'est vraiment un plouc !!
Normalement on ne touche pas un pain ,qui doit être vendu à une autre personne !!!
Ancien '?lu de la république française
Marouen Kaïs Saïed est un homme courageux et humble
a posté le 15-03-2022 à 14:32
Mr Marouen Achouri est la recherche des islamistes, Mr il faut aller sur le terrain pour montrer la misère chez ahlou iRRiF, vous êtes toujours sur le dos à Kaïs Saïed