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Assassinat de Mohamed Zouari : Un scénario digne d'un roman d'espionnage !
19/12/2016 | 20:57
10 min
Assassinat de Mohamed Zouari : Un scénario digne d'un roman d'espionnage !

L’assassinat de l’ingénieur tunisien, Mohamed Zouari, survenu le 15 décembre devant son domicile à Sfax, a vite fait de susciter une vive polémique dans le pays. Polémique alimentée par l’opacité des autorités tunisiennes, qui ont finalement décidé de tenir dans la soirée de ce lundi 19 décembre 2016, une conférence de presse afin de fournir aux médias et à l’opinion publique, quelques éléments de l’enquête.

 

Ce que l’on sait de la victime 

Dans un communiqué paru samedi 17 décembre 2016 sur son site internet, la brigade Izz al-Din al-Qassam, branche armée du Hamas, a reconnu l’ingénieur Mohamed Zouari, comme étant dirigeant et martyr de la Brigade.

Al-Qassam explique que pendant plus de 10 ans, l’ingénieur tunisien a travaillé pour le développement de drones qui auraient plus tard servi durant le conflit de 2014.

 

Mohamed Zouari est présenté, comme un ingénieur de 49 ans qui a été contraint, sous le régime de Ben Ali de fuir la Tunisie vers le Soudan, puis vers la Syrie avant de revenir en Tunisie après la révolution.

Spécialisé dans la construction de petits avions téléguidés, il a entamé son doctorat et présidé une association dédiée à son activité aéronautique à Sfax en parallèle avec son travail dans une entreprise turque spécialisée dans l’entretien de matériel industriel et qui opère, entre autres, au Liban.

 

On sait aussi que Mohamed Zouari était en Turquie récemment. Un pays qu'il a fui sous le coup de menaces. Il effectuait des déplacements réguliers entre la Turquie et la Syrie avant de rentrer en Tunisie.

Selon les services de sécurité tunisiens, la victime est binationale : tunisienne et belge et est marié à une syrienne.

 

La polémique autour de l’affaire

L’un des premiers à réagir à l’affaire de l’assassinat de Mohamed Zouari, a été Borhène Bsaies qui a évoqué dans un post publié sur les réseaux sociaux, la piste du Mossad. Par la suite, ses propos ont  été repris par des médias israéliens.

Le président du Mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi a affirmé, pour sa part, au lendemain de l’évènement, dans une déclaration accordée à Mosaïque Fm, qu’il s’agit d’une opération terroriste, derrière laquelle se cachent « des forces internationales machiavéliques ».

Les choses se sont encore plus envenimées lorsqu’un journaliste de la Chaîne 10 israélienne, pourtant autorisée à exercer en Tunisie,  a couvert l’affaire, d’abord depuis Sfax puis de Tunis.

 

Des députés d’Ennahdha se sont indignés de la présence du reporter israélien sur le sol tunisien qu’ils considèrent comme de l’ingérence et une atteinte à l’intégrité du territoire.  

L’UGTT a également condamné la présence du journaliste comme une violation du tissu sécuritaire tunisien appelant à poursuivre les parties qui ont autorisé son entrée en Tunisie et la HAICA ainsi que les parties sécuritaires à prendre les mesures nécessaires visant à limiter et à réglementer la présence des médias et de déterminer leurs relations et leurs activités afin d'éviter leur instrumentalisation pour d’autres activités suspectes.

Il en a été de même pour les partis Afek Tounes, Nidaa Tounes, le Front Populaire, pour l’Ordre des avocats, le Syndicat des journalistes tunisiens et nombreux autres organismes qui ont vivement contesté l’ingérence de parties « sionistes » sur le sol tunisien, d’autant plus qu’il ne s’agit pas de la première fois que l’implication du Mossad est soupçonnée dans des assassinats perpétrés en Tunisie.

 

L’ambassadeur de la Palestine en Tunisie, a condamné dans une déclaration accordée à la TAP ce lundi 19 décembre, l’implication de parties israéliennes dans nombreux assassinats politiques de dirigeants palestiniens ajoutant que l’ambassade palestinienne attend le rapport officiel des investigations pour publier un communiqué sur le sujet.

 

Qu’en est-t-il de l’enquête ?

Une source sécuritaire bien informée avait affirmé, le 16 décembre,  à Business News, que Mohamed Zouari a été assassiné par des Tunisiens mandatés par des parties étrangères opérant en Turquie. La même source a précisé que la thèse du crime terroriste est à écarter et qu’il s’agit, vraisemblablement, d’un règlement de comptes lié à des affaires financières et sécuritaires très complexes.

Les premières arrestations, ainsi que la nature des armes utilisées dans l’assassinat et les derniers mouvements de la victime établissent un lien avec des parties étrangères opérant en Turquie.

 

Le substitut du procureur général près de la cour d'appel de Sfax Mourad Turki, s'est exprimé à la même date,  sur l’affaire, précisant qu’« il a été décidé de déférer le dossier devant la brigade criminelle de Tunis »

« Actuellement, les résultats des recherches faites, est positif. Pour le moment cette affaire est considérée comme criminelle, dire qu’il s’agit d’une affaire de terrorisme serait hâtif » a-t-il souligné.

Selon le substitut du procureur, les résultats des premières recherches indiquent que la victime a été assassinée par des tirs d’arme à feu à bout portant. « Lors de l’autopsie, 8 balles ont été retrouvées sur le corps ». Il a indiqué, en outre, que quatre voitures ont été saisies, « deux d’entre elles ont été utilisées pour le crime ».

On a également appris que quatre individus ont été placés en garde à vue. « Deux armes à feu ont été retrouvées et les personnes en état d’arrestation, sont au nombre de quatre. Une autre personne se trouvant à l’étranger devra être auditionnée dès que possible ». M. Turki a conclu ajoutant que des enregistrements vidéo de plusieurs caméras de surveillance sont également en train d’être analysés.

 

Selon un communiqué rendu public par le ministère de l’Intérieur, le 16 décembre, la direction des  Affaires criminelles relevant de la police judiciaire a décidé l’arrestation de 5 personnes soupçonnées d’être impliquées dans l’assassinat de Mohamed Zouari.

Le communiqué a précisé que c’est en coopération avec les unités sécuritaires du district de Sfax que ces arrestations ont eu lieu, ajoutant que les suspects en question proviennent des villes de Tunis, de Sfax et de Djerba.

Il a été également précisé que les 4 voitures qui ont servi à commettre le meurtre, dont la plupart sont des voitures de location, ont été saisies en plus de 2 pistolets silencieux, de téléphones portables ainsi que d’autres objets en lien avec le meurtre.

 

Au fur et à mesure de l’avancement de l’enquête, les unités sécuritaires ont réussi à faire un portrait-robot de l’un des suspects. L’enquête sur les personnes impliquées, le motif et les circonstances du meurtre suit son cours.  

 

Le 17 décembre le ministère de l’Intérieur a annoncé qu’une citoyenne tunisienne soupçonné d’être impliquée dans ce crime, a été interpelée à l’Aéroport Tunis-Carthage.

Cette interpellation survient après que la brigade criminelle en charge de l’affaire l’a contactée afin de la persuader de revenir en Tunisie, et ce pour les besoins de l’enquête,  la concernée se trouvait dans une ville européenne.

 

Le chef du gouvernement, Youssef Chahed a assuré, le 18 décembre, que le gouvernement œuvre à la protection de la sûreté du pays et de sa souveraineté.

Il a indiqué dans une déclaration accordée à Shems Fm, que la position officielle par rapport à cette affaire est claire et que les enquêtes se poursuivent encore. Et d’ajouter que seul le ministère de l’Intérieur est habilité à se prononcer concernant les résultats des investigations.

Dans un communiqué rendu public, plus tard dans la soirée, à l’issue de la réunion, la présidence du gouvernement a assuré qu’elle est en train de suivre l’avancement de l’enquête et qui a prouvé, d’ores et déjà, l’implication de certains éléments étrangers.

La présidence du gouvernement a réaffirmé l’engagement de l’Etat tunisien à poursuivre les criminels là où ils se trouvent, à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, et ce en recourant à toutes les dispositions réglementaires conformément aux conventions internationales.

Le communiqué a, enfin, rapporté que le ministère de l’Intérieur se chargera d’informer l’opinion publique en temps opportun des différentes péripéties de ce dossier, afin de préserver le secret de l’enquête et garantir l’efficacité maximum des investigations en cours.

 

Le procureur de la république près du Tribunal de première instance de Sfax 2, Faouzi Masmoudi, a indiqué, ce lundi 19 décembre 2016, dans une déclaration rapportée par Mosaïque Fm, qu’il n’est pas exclu que l'assassinat de Mohamed Zouari soit une opération terroriste.

Il a ajouté que le juge d'instruction chargé de l’affaire, décidera ou non de conserver le dossier ou de le transférer au pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme à Tunis.

 

Hédi Majdoub n'exclut pas l’implication d’un service secret étranger et donne les détails de l’enquête

Le ministre de l’Intérieur a expliqué, lors d’une conférence de presse tenue dans la soirée de lundi 19 décembre, que les services de sécurité tunisiens n’ont aucune donnée liant Mohamed Zouari à une quelconque activité politique auprès d’organismes étrangers.

Il a ajouté que l’assassinat de l’ingénieur tunisien, originaire de Sfax, a été planifié depuis un certain temps, plus précisément le mois de juin plus précisément, et que tout porte à croire qu’il n’est pas exclu qu’un service secret étranger ait commandité l’exécution de la victime, par deux personnes qui semblent, d’après les premières données de l’enquête, être elles aussi étrangères.

 

Toutefois, la logistique de l’assassinat a été déléguée à des Tunisiens, qui ont, à priori sans le savoir, fait partie d’un plan bien ficelé qui a été d’ailleurs divisé sur deux équipes qui agissaient en pensant travailler pour une boite de production pour l’une et pour une société étrangère qui souhaite lancer des projets en Tunisie pour la seconde, sans jamais être au courant l’une de l’existence de l’autre ou se croiser.

Le ministre a déclaré que 10 individus ont été interpelés lors de l’enquête, que 4 véhicules ont été saisis, ainsi que deux armes à feu équipées de silencieux et des portables avec des puces tunisiennes.

 

Hédi Majdoub est aussi revenu sur l’affaire du journaliste israélien, précisant que ce dernier s’est présenté en tant qu’écrivain de nationalité allemande et qu’il n’est nullement accrédité pour exercer en Tunisie. Il a ajouté que l’enquête suit son cours pour voir s’il y a eu une défaillance des services de sécurité tunisiens quant à la présence dudit journaliste en Tunisie.

 

L’affaire de l’assassinat de Mohamed Zouari est complexe et très délicate. C’est d’ailleurs ce qui a expliqué, selon Hédi Majdoub, le silence jusqu’ici des autorités tunisiennes. Le ministre a confié que la tenue même de la conférence de presse est une prise de risque en soi puisque l’enquête est en cours et que tout doit être fait pour que rien ne vienne la compromettre.

 

 

Myriam Ben Zineb

19/12/2016 | 20:57
10 min
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Commentaires (16)

Commenter

Ek
| 20-12-2016 21:32
Chahid en islam c'est en premier lieu et avant tout,tout musulman qui meurt pour défendre l'islam (dans son pays où autre)Dieu et le prophète ne parlent pas de pays mais de omma.omma islamiyya.

Mansour Lahyani
| 20-12-2016 16:02
Parfois, vous en avez de bonnes !
Mais C'EST un roman d'espionnage : que vous faut-il de plus ? Tous les ingrédients sont bien là...

NOOMEN
| 20-12-2016 15:33
Un ingénieur inconnu "Zouari" qui, de son propre gré, va aux "pays des guerres", travaille pour des forces armées, sans aucun intérêt pour sa famille ou son pays , se fait tirer dessus.
Ce même "Zouari" fait bouger tout le gouvernement tunisiens, depuis le président jusqu'aux "Sogegats" des hôpitaux.
Combien de milliers de dinars a-t-on dépensé jusqu'à maintenant dans cet affaire et combien va couter cet investigation pour le contribuable tunisien simple, humble et surtout "silencieux"?

tunisien
| 20-12-2016 14:06
binationale : tunisienne et soudanaise et est marié à une syrienne.

Tunisienne
| 20-12-2016 13:26


En effet, le monde bouge, les comptes se refont, les alliances se renégocient, les cartes se redistribuent, les règlements de comptes sont à leur comble, certaines preuves vivantes et gênantes (recruteurs, passeurs, trafiquants d'armes, blanchisseurs de terrorisme, terroristes particulièrement sanguinaires...) doivent disparaître, la susceptibilité de certains pays «frères et amis» souteneurs et bailleurs de fonds de l'islamoterrorisme doit être ménagée...


Et comme à leur habitude, les Frères de la section tunisienne de la Confrérie doivent faire payer au peuple tunisien leur débandade et leur déconfiture, détourner l'attention du pire qui reste caché derrière tout ça et même tourner les choses à leur avantage («martyrisation» des leurs, regain de popularité...).





sss
| 20-12-2016 12:38
Tout à fait d'accord, un martyr à ma connaissance est celui qui meurt pour défendre son pays,moi si simple d'esprit

zohra
| 20-12-2016 11:51
Alors KGB ou Mossad ? ce Monsieur a l'air de tromper dans plusieurs affaires.

Martyrs ???????????????????????????????

truc
| 20-12-2016 11:32
mossad juifs trahison mensonge , et mort de musulmans partout dans le monde

observator
| 20-12-2016 11:10
Vous écrivez : "Mohamed Zouari est présenté, comme un ingénieur de 49 ans.....".

Pourquoi vous utilisez l'expression "est présenté". Avez-vous un doute, alors informez-nous. C'est votre rôle de journaliste. Non ?
C'est très facile de chercher un peu plus pour savoir s'il est vraiment ingénieur ou non.
Vous aurez pu vous renseigner au prés de l'école de Sfax ou le ministère de l'enseignement supérieur.
Dites-nous clairement le fond de votre pensée.

tounsia2
| 20-12-2016 10:36

Toute cette agitation de la part du parti Nahdha est destinée à transformer une affaire CRIMINELLE en une affaire terroriste; Les premières déclarations du substitut du procureur de Sfax et la lenteur de réaction du gouvernement le prouvent, puisqu' on ne fait pas une histoire pour une affaire criminelle ! Par la suite, Ghannouchi est monté au créneau pour décider à la place des autorités compétentes, et seulement 24 H après l'assassinat, qu'il s'agit d'une affaire terroriste, ce qui résout tous les problèmes du parti Ennahda au quel le défunt appartient.
Un autre problème, c'est que le défunt n'était pas seulement un cadre du parti Ennahda, mais aussi un haut cadre de la branche armée AL-QASSAM de Hamas, classée comme organisme terroriste par les instances internationales. Le plus étrange, c'est que les autorités locales ne semblent pas particulièrement gênées par ce détail qui a pourtant toute son importance.
Espérons que les députés seront plus vigilants lors de la plénière consacrée à cette affaire criminelle ( !) et surtout qu'ils fassent attention pour qu'on ne parle plus de martyr, puisque le défunt a mis ses compétences au service d'un organisme terroriste étranger, transgressant ainsi les lois nationales et internationales.