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La page Essid, tournée... Que se passe-t-il après?
31/07/2016 | 15:59
6 min
La page Essid, tournée... Que se passe-t-il après?

Les élus de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) viennent de  refuser le renouvellement de la confiance réclamé par le chef du gouvernement, Habib Essid, en cette inoubliable plénière du samedi 30 juillet 2016. Une première lecture de cet événement, ou non événement pour certains, fait ressortir bon nombre de remarques et autres enseignements à tirer du déroulement et du contenu de cette plénière pas comme les autres.

 

Tout d’abord, les observateurs continuent à s’interroger sur le pourquoi d’un recours à cette séance dont l’issue était prévue à l’avance. Il n'y avait, en effet, pas le moindre risque de se tromper avec un vote en masse contre le renouvellement de la confiance et quelques « miettes » en faveur du gouvernement. Des prévisions largement confirmées avec l’annonce des résultats du vote, soit 3 Pour seulement, 118 Contre et 27 Abstentions.

Ce qui a retenu l’attention, à ce propos, a été le nombre relativement élevé des députés ayant, clairement, mentionné leur décision de ne pas voter à l’instar de ceux du Front populaire. En effet, après qu’Ahmed Seddik ait annoncé la couleur, ce fut au tour des élus d’autres petites formations, telles notamment du Tayyar démocratique et Harak al-Irada, d’annoncer qu’ils en feraient de même.

 

Mais finalement, Habib Essid a-t-il bien fait de se diriger vers l’ARP ou bien s’agissait-il d’une simple perte du temps ? Difficile de répondre d’une manière tranchante à cette question dans le sens où les défenseurs et les détracteurs de cette démarche, ont chacun une argumentation qu’ils veulent « logique ».

Les premiers estiment que la demande du chef du gouvernement est une pratique saine qui a l’avantage de faire ancrer et triompher les traditions démocratiques à l’instar de ce qui est pratiqué dans les pays ayant un fort respect pour l’Etat de droit et des institutions.

Les seconds reprochent à cette approche une sorte de volonté de M. Essid de s’accrocher au pourvoir et, surtout, de faire traîner en longueur l’évolution de l’initiative lancée par le président de la République en faveur de la formation d’un gouvernement d’union nationale, et ce depuis bientôt deux mois.

Ce point de vue pourrait être défendu même si, dans le cas d’espèce, plusieurs autres facteurs entreraient en jeu et feraient pencher  la balance en faveur de la démarche suivie par le chef du gouvernement sortant.

 

Habib Essid a tenu à prouver qu’il n’a pas de défaillances majeures à se reprocher, qu’il a essayé, tant bien que mal, à s’en sortir et à sortir le pays du marasme dans lequel il l’avait trouvé en février 2015 et que si certains objectifs n’ont pas été atteints, cela est dû à des facteurs conjoncturels.

Et même, de ce côté, il a montré que son gouvernement a commencé à réaliser des progrès dans le sens où la situation sécuritaire, souci majeur en ces temps-là, a enregistré une évolution positive, voire une réelle percée reconnue par tous.

En effet, on rappelle que le dernier revers sécuritaire majeur a été celui de l’explosion du bus des membres de la Garde présidentielle à l’Avenue Mohamed V. Depuis, il y a eu certes l’attaque de Ben Guerdène, mais elle s’est transformée en un succès retentissant contre les terroristes de Daech étant donné que  35 terroristes ont été abattus et 7 autres ont été arrêtés.

Il faut dire que l’avènement de Hédi Mejdoub à la tête du ministère de l’Intérieur et la nomination des nouveaux directeurs de la sûreté sont pour beaucoup dans la stabilisation en question. Et dire que certaines voix, notamment en provenance d’un certain clan de Nidaa Tounès, réclament leur départ !

 

Ainsi, le gros des efforts a été axé sur le volet sécuritaire sachant que la situation sociale a connu, elle aussi, une évolution positive avec une baisse notable des mouvements revendicatifs et une certaine reprise des activités des principales entreprises, sans compter l’établissement de meilleurs rapports avec la Centrale syndicale.

C’est ce qui a fait dire à certains que l’initiative présidentielle, même si elle s’imposait psychologiquement, tendait uniquement à se débarrasser de M. Essid, sachant que, situation paradoxale, ce sont les cadres d’un certain clan de Nidaa qui on pesé de tout leur poids pour faire partir le chef du gouvernement.

D’ailleurs, le porte-parole de Nidaa, Abdelaziz El Kotti a montré une grande « haine » pour Essid en lui reprochant, jusqu’à l’ultime minute, sa venue à l’ARP et son refus de démissionner.

 

Maintenant que la page de l’ère Essid est tournée, comment se présente la prochaine période avec ses divers scénarios ?

Bon à rappeler que le président de la République est tenu, selon la Constitution, de désigner un candidat pour former le nouveau gouvernement, et ce dans un délai de dix jours. La personne désignée est tenue de présenter son équipe gouvernementale, dans un délai maximum d’un mois, pour le vote de confiance à l’ARP.

En effet, selon l’article 99 de la Constitution : « le vote a lieu à la majorité absolue des membres de l’Assemblée des représentants du peuple. Si l'Assemblée ne renouvelle pas sa confiance au Gouvernement, il est réputé démissionnaire. Dans ce cas, le Président de la République charge la personnalité la mieux à même d’y parvenir de former un Gouvernement, dans un délai maximum de trente jours, conformément aux paragraphes 1er, 5 et 6 de l’article 89 ». Ce même article énonce que « si le Gouvernement n'est pas formé dans le délai prescrit ou s'il n'obtient pas la confiance de l’Assemblée des représentants du peuple, le Président de la République peut dissoudre l’Assemblée des représentants du peuple et appeler à des élections législatives anticipées, dans un délai de quarante-cinq jours au minimum et quatre-vingt-dix jours au maximum ».

 

Ainsi, on est entré dans la phase des tractations pour le poste du chef du gouvernement et des portefeuilles ministériels. Et chacun y va de ses pronostics et de ses ballons d’essai. Et d’après les analystes, ce sera, de loin, plus dur à négocier que les concertations pour l’élaboration de l’Accord de Carthage.

D’un côté, des dirigeants de Nidaa multiplient les déclarations appelant à un « chef » issu des leurs rangs. Des voix émanant d’autres sensibilités privilégient le recours à une personnalité indépendante.

 

Quant aux membres du nouveau cabinet, certains optent pour la désignation du plus grand nombre possible de compétences, d’autres assurent que la période étant politique par excellence, il serait plus adéquat que les futurs ministres soient issus des partis.

D’autres voix encore estiment qu’aucun membre de l’équipe d’Essid ne doit faire partie du prochain gouvernement. Ce serait une aberration et une honte qu’un ministre, issu d’un gouvernement accusé d’avoir échoué dans sa mission, soit reconduit au sein du futur cabinet.

Pourtant, des membres du gouvernement d’Essid ont eu l’audace de laisser entendre qu’il n’y a aucun inconvénient à ce qu’ils soient repris parmi la nouvelle équipe gouvernementale. Le proverbe dit qu’on ne change pas une équipe qui gagne et non pas une sensée avoir raté sa mission !

 

En tout état de cause et maintenant que les dés de la première manche sont jetés, il est utile pour le prochain gouvernement de tirer les leçons du passage de son prédécesseur à savoir l’obligation, pour lui, de tenir un langage franc et d’opter pour une communication transparente avouant à l’opinion publique les réalités de la situation à tous les niveaux.

Il faut dire au peuple et aux partenaires sociaux ce qu’il faut endurer comme sacrifices avec des délais réalistes pour pouvoir sortir la tête de l'eau. Il faut définir les priorités d’une manière explicite et concrète, et non pas rester dans les généralités telles qu'elles sont mentionnées dans le document de l’Accord de Carthage...

Sans oublier l’obligation pour le prochain gouvernement d’être ferme et énergique dans l’application des lois en vigueur afin d’en finir avec le laxisme et éliminer ce sentiment d’impunité qui a prévalu jusque-là.

 

Sarra HLAOUI

31/07/2016 | 15:59
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Commentaires (15)

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Citoyen de Tunisie
| 01-08-2016 14:28
Le vide intentionnel désiré par les politicards, plus de 200 députés dont les touristes agiront en ministres, en décideurs, en profiteurs au nom de la démocratie puis un relâchement administratif s'en suivra pour que les enseignants retrouvent leurs habitudes d'antan, le corps paramédical aussi etc....
Un chef de gouvernement tenu par une laisse, un président de la république fétiche, des députés touristes et d'autres absents pour tout sauf pour le salaire.
Pauvre Tunisie, pays à régime présidentiel que les commerçants de la religion le veulent sans gouvernance.

sassi
| 01-08-2016 12:28
est ce que tous ces députés de l'ARP connaissent le sens de de la démocratie?non et 1000 fois non et ce à 90% d'entre eux
la défaillance de ce gouvernement Essid n'assume pas à lui seul cette responsabilité il y a en 1er lieu le président de la republique qui ne sais pas donner des directives fermes et soutenir son 1er ministre il ne sais user comme son prédécesseur du droit d'amnestie pour les délinquants
il y a aussi l'incapacité d'une majorité de l'entourage qui sont incapables de se rehausser au niveau administratif pour imaginer des initiatives

Tunisienne
| 01-08-2016 12:10
Je sais ! Et c'est encore heureux !

Mais la déferlante (de l'islamisme d'un côté; de l'opportunisme, l'affairisme et la cupidité de l'autre côté) est trop violente !

Il nous faudra donc beaucoup de courage, de vigilance et de souffle !

Salutations

Gg
| 01-08-2016 11:51
Toutes proportions gardées, je ne peux m'empêcher de faire le rapprochement entre ce qu'il se passe en Tunisie aujourd'hui, et ce qu'il s'est passé en France à l'aube de la 2ième guerre mondiale.
C'est à dire qu'une classe politique lâche, indigente et affairiste, a rappelé au pouvoir le prestigieux héros de la guerre de 14, le Maréchal Pétain.
Pétain avait 58 ans à la fin de la guerre de 14, il en avait 85 lorsqu'il a été rappelé par le perfide Laval, collaborationniste véreux qui ne cherchait qu'à effacer le Front Populaire et faire des affaires.
N'a t-il pas donné aux Allemands les plans de l'avion de chasse Dewoitine 520, et enjoint Renault à leur faire des chars  ?
Heureusement quelques prototypes du D520 se sont envolés pour la Grande Bretagne, regardez sur le net le Dewoitine 520 et le Spitfire, vous comprendrez !
Toujours est-il que le vieux héros fatigué s'est fait dévorer tout cru par Laval et sa clique, et de compromission en compromission, il a perdu jusqu'à son honneur.
Ironie du sort, au même moment, un jeune colonel de l'Armée enseignait ce qu'il pensait être les règles de la guerre moderne. Pour résumer, il affirmait que le temps des positions et de la ligne Maginot était passé, la guerre allait être une guerre de mouvement, des divisions de blindés rapides constituant le front mobile, ces divisions étant protégées en amont par l'aviation, chasseurs et bombardiers d'attaque. Il professait cela dès 1930, et ce colonel dissident fut condamné à mort par contumace, les Allemands de leur côté ont appliqué sa doctrine sous le nom de Blitzkrieg.
Ce colonel s'appelait Charles de Gaule.
Vous avez votre Pétain, votre Laval, qui sera votre De Gaule ?

Kairouan
| 01-08-2016 11:44

Il nous restera tourjours notre refus et, arme-e-s de ca, nous ne saurons capituler. On doit veiller a ce que la chaine de resistance ne soit jamais rompue et un jour ou l'autre notre 'patient endeavour will pay off'.
Cheer up!

Tunisienne
| 01-08-2016 11:02
Après, on prend les mêmes (en plus féroce !) et on recommence. En plus féroce donc les islamistes «pieux» et les «modernistes» opportunistes. Mais la situation va devenir de plus en plus intenable et on va bientôt manger des cailloux («légitimes» et halel bien-sûr !). Et on va en avoir plein les poumons de «démocratie» !

Hamdoullah, la «Révolution» a atteint tous ses objectifs !!!

Imen Lakhdhar
| 01-08-2016 09:46
Maintenant, il faut dépasser les faits dont on a voulu faire une simple question de personnes et de jeu politicien. La véritable question aujourd'hui est OU EST LA TUNISIE DANS TOUT CELA ? sa constitution, ses lois, ses institutions la mettent-elles à l'abri des jeux et des enjeux politiques ? En d'autres termes, les outils constitutionnels, institutionnels, politiques, réglementaires de la deuxième république sont-ils garants de la Continuité d'un Etat Solide ???????? j'ai bien peur que non.

Larto
| 01-08-2016 09:39
Notre président de la république ne peut pas s'acclimater au destour de la 2éme république, c'est trop difficile et trop tard pour lui ,il a une nostalgie à l'ére de BOURGUIBA? Il a imité tant de fois ses maniéres de s'habiller, ses gestes,dans ses discours, dans ses déclarations il oublie qu'on est en 2016.Il tient à avoir un premier ministre et non un chef du gouvernement, n'importe celui qui le désignera sera traité comme tel. Tout prochain chef du gouvernement qui va accepter cette ingrate mission doit exiger et s'assurer impérativement de sa liberté de choisir ses ministres,de prendre ses décisions à l'application d'un programme réaliste bien détaillé et avec des échéances prévisionnelles bien préparées du parti victorieux des élections législatives et en accord préalable avec le président de la république et selon ce que permet notre constitution( qui doit étre revue en tenant compte de ses défaillances) et d'avoir seulement le controle de l'assemblée des représentants du peuple et de subir les conséquences dans la réussite comme dans l'échec de la totalité de son gouvernement, et que le peuple doit avoir la patience nécéssaire et s'habituer à bien choisir ses représentants et à la passation du pouvoir démocratiquement et d'une maniére civilisée

Kays
| 01-08-2016 09:35
Certains prétendent qu'Essid a été démis en raison de son inefficacité face à la dévaluation du dinar. Ceci est factuellement faux. C'est la banque centrale tunisienne qui sur recommandation du FMI a décidé de ne plus intervenir sur le taux de change à des fins de libéralisation avançant le fait qu'un dinar bas favorisera les exportations du pays. Raisonnement faux car la Tunisie n'est pas un pays exportateur et n'a pas d'industrie véritablement exportatrice. En outre beaucoup des produits fabriqués en Tunisie nécessitent des matières premières achetées à l'étranger, un dinar faible augmente le coup de nos produits finis. L'économie s'affaiblit et notre appareil de production est bradé. Une grande part de notre apport en devises vient du tourisme. Pas de tourisme sans sécurité. Essid a oeuvré pour la sécurité. Ceux qui croient que certaines puissances étrangères veulent notre développement se trompent, pour certaines nous devons rester un pays du tiers-monde c'est à dire sous tutelle. Qui sont les touristes qui continuent à venir????Algériens et Russes. Que recommandent les ministères des affaires étrangères européens ? ??Ne pas se rendre en Tunisie!!!Pourtant à la lumière des attentats en Belgique et en France peut-on dire que l'on est plus en sécurité en Europe qu'en Tunisie???? Il faut d'autant plus continuez à developper votre pays messieurs du gouvernement, sécuriser mieux que partout au monde,booster la production nationale et se fournir sur des produits ayant un meilleur rapport qualité-prix sur les marchés étrangers, il faut augmenter la production de produits à 100 pour cent tunisiens et élever la qualité pour créer une véritable réputation internationale (textile, matériaux de construction,agro-alimentaire etc).Les batailles de la qualité et de la réputation sont engagées.

Alouane
| 01-08-2016 06:50
Y a-t-il dans ce pays un seul homme capable de rétablir la crédibilité de l'état? Capable de rétablir l'ordre républicain dont le fondement est l'application juste et équitable des lois du pays. Cet homme courageux qui opposera un niet catégorique à toutes les tentatives d'intimidation des deux vieux et de leurs entourages tentaculaires. le relèvement du pays est tributaire du courage, de la volonté et de la capacité de cet homme providentiel à:
* assainir l'administration, par la révision de toutes les nominations illicites basées sur le clientélisme et ceci dans tous les secteurs.
* dénoncer publiquement les barons du commerce parallèle et de la contrebande et les traduire devant la justice
* Appliquer avec sévérité et célérité les lois du pays dans tous les domaines en commençant par le code de la route, l'obstruction au travail, la fuite des capitaux, les refractaires au payement des impôts et jusqu'aux politiciens véreux qui empoisonnent la vie politique de la nation par leurs mensonges et leurs actions déstabilistraces préméditées. Ce sont les seules conditions pour rétablir l'ordre républicain et la suprémacie de la loi. Seul un homme courageux de la trempe de Bourguiba peut y parvenir. La Tunisie est-elle dévenue stérile.Je le crains!!!