
L’instance Vérité et Dignité ne cesse d’essuyer de nombreuses critiques depuis sa création. Toutes, ou presque, sont dirigées contre sa présidente Sihem Ben Sedrine. Malgré son passé de militante droit-de-l’hommiste, pourtant très respectée des instances internationales, Sihem Ben Sedrine est un personnage controversé. Avec des soupçons de mensonges et de mauvaise gestion, la présidente de l’IVD est accusée par ses détracteurs de vouloir faire d’un outil de justice une arme de vengeance.
Opposante à Ben Ali, Sihem Ben Sedrine est un personnage très respecté sur la scène internationale. La journaliste et militante des droits de l’Homme avait tout pour plaire : femme de courage et de poigne, active et cultivée, elle était connue pour avoir été une farouche opposante à l’ancien régime dictatorial. De quoi lui avoir, confortablement, garanti l’élection à la tête de l’instance de la justice transitionnelle. Mais c’est au sein même de cette instance qu’elle est impopulaire aujourd’hui. Accusée de pratiques dictatoriales, de favoriser un climat non propice à l’activité de ses collègues, on pointe du doigt des mensonges qui auraient pour but de faire dévier l’instance qu’elle dirige de ses fins initiales. Favoriser des victimes au détriment d’autres, se venger de ses anciens bourreaux et mener une véritable croisade contre ceux dont elle ne partage pas les idées. Les exemples se multiplient pour accabler la militante d’hier et les faits sont visiblement contre elle.
Une vague de démissions s’est emparée de l’instance depuis sa création. Quatre, jusqu’hier soir. Après Noura Borsali, Azouz Chaouali et Khemaïes Chammari, c’est au tour de Mohamed Ayadi de quitter le navire, pas plus tard qu’hier, mercredi 26 août 2015. Il n’est, d’ailleurs pas exclu qu’une cinquième démission vienne s’ajouter dans les jours à venir. Celle de Zouhair Makhlouf, vice-président de l’IVD qui n’a pas manqué de tirer à boulets rouges sur la présidente.
Dans une lettre, censée être secrète, mais rendue publique hier par le journal Akher Khabar, Zouhair Makhlouf s’adresse à Mohamed Ennaceur, président du Parlement, l’alertant sur « la mauvaise gestion qui règne au sein de l’instance ». Selon le texte de cette correspondance, Sihem Ben Sedrine se serait distinguée par ses décisions unilatérales, prises sans concertation avec le conseil de l’instance, tel que l’exige en réalité la réglementation. Des accusations qui rejoignent celles de Noura Borsali qui, dans sa lettre de démission, a protesté contre les pratiquées « dictatoriales » de Sihem Ben Sedrine appelant, par la même, à revoir la composition de l’instance ainsi que sa présidence.
Mais en plus de sa mainmise sur l’instance, on accuse également la présidente de l’IVD de mensonges. Zouhair Makhlouf avait en effet, toujours dans cette même correspondance, pointé du doigt les déclarations mensongères de la présidente qui aurait affirmé avoir reçu près de 250 dossiers d’hommes d’affaires alors, qu’en réalité, elle n’en aurait reçu que deux selon ses dires. Une manière selon lui, de gonfler le rôle de l’instance dans le processus de réconciliation économique et de « prouver » la confiance que des hommes d’affaires ont placé en elle. En grand nombre. De quoi faire croire, selon de nombreux observateurs, que l’instance pourrait pleinement assurer cette fonction et qu’elle est très sollicitée dans ce sens.
Derrière cette manœuvre, la raison est simple. Dans les faits, la gestion des « violations économiques » est un dossier que se dispute l’instance avec la présidence de la République. Car en plus de traiter les atteintes aux droits de l’Homme, un dossier qu'elle semble négliger pour l’instant, l’instance est également chargée de la lourde tâche de se pencher sur les violations économiques commises. Une deuxième mission qui se heurte au projet de loi initié par Béji Caïd Essebsi et approuvé en conseil des ministres le 14 juillet dernier.
Alors que le projet présidentiel reprend, dans de nombreux points, les propositions de l’instance, cette dernière estime pourtant qu’il « portera atteinte à l'ensemble du projet démocratique auquel aspire la Tunisie », selon les dires de sa présidente. Ben Sedrine regrette, à ce niveau, de ne pas avoir été consultée et se dit avoir été « totalement marginalisée » dans l’élaboration de ce projet. Dans une volonté de s’accaparer ce dossier, elle mène une « véritable croisade » contre le projet présidentiel, selon les termes mêmes du vice-président de l’instance.
On tente, en effet, de faire croire auprès de l’opinion publique que le projet présidentiel servira à amnistier les tortionnaires de l’ancien régime en taisant, sciemment, le fait que cette loi de réconciliation économique et financière ne touche, comme son nom l’indique, que les malversations financières.
Force est de constater que les récentes allégations portées contre Sihem Ben Sedrine n’ont été démenties ni par la principale intéressée ni par l’instance. Alors qu’une campagne acharnée est menée depuis hier contre Zouheïr Makhlouf par des partisans, dont notamment des membres du CPR, aucune réaction n’est venue confirmer ou démentir l’objet de sa lettre. Une lettre dans laquelle il dit ouvertement que Ben Sedrine tente d’approcher l’ambassadeur de France pour obtenir son soutien et contrer le projet de loi de réconciliation nationale.
Dans sa croisade, Sihem Ben Sedrine est aussi accusée de négliger complètement le premier volet de son instance, à savoir les atteintes aux droits de l'Homme, et de se concentrer uniquement sur « les dossiers qui lui plaisent ». D'ailleurs, Violette Dagher, présidente de la Ligue arabe des droits de l’Homme, n'a pas manqué de souligner, dans un article publié le 10 août sur Al Chourouk, qu'au lieu d'allouer des fonds au bénéfice des victimes qui se sont trouvés ignorées, Sihem Ben Sedrine préfère gaspiller les fonds publics, en voitures, voyages et cérémonies. Elle précise aussi que les dossiers déposés par les victimes n’ont pas été pris en compte, et que la présidente de l’IVD évitait de rencontrer la plupart des plaignants, sauf ceux qui peuvent servir son intérêt.
Défendue, contre vents et marées par ses partisans, Sihem Ben Sedrine semble pourtant causer plus de tort que de bien à cette instance de la justice transitionnelle. Alors qu’on présente l’IVD comme un outil au profit du consensus et de la réconciliation, sa présidente fausse cette image en essayant, par des moyens discutables, d’imposer ses choix en privilégiant l’affrontement, plutôt que la coopération. « Nous avons tous été témoins de ses confrontations avec les institutions de l’Etat, loin de l’esprit de réconciliation qui devait primer », note Violette Dagher.
Avec 11 membres sur les 15 initiaux, il est fort à parier que cette instance ne fera pas long feu et que son futur est plus que jamais compromis. Une unique responsable est pour l'instant pointée du doigt…

Commentaires (34)
CommenterQui es tu et que veux tu
pauvre tunisie
Imaginez !
Voyez, il y a pire qu'une certaine Leila....
@ Alouane
Vérité et dignité
Adieu
JE NE L'ESPÉRE PAS BIEN SUR !!!!!!!!!!!!
@Alouane EXCELLENT MERCI
Je suis rassuré de savoir que je ne suis plus seul à rappeler que ce sont les yousséfistes revanchards et les islamistes qui sont derrière l'IVD qui est une imposture comme l'est la "révolution" de 2011. Il y a un complot contre le Bourguibisme et le nationalisme.
Après Marzougui, une compagne bien orchestrée contre Ben Sedrine
La faillite de la Vérité et de la Dignité
Participent à ce naufrage les idées et principes directeurs de Justice de Dignité et demain de Liberté
L'Impunité, tel un démon ricanant , se rend maître des lieux, par la volonté irresponsable et criminelle de cette oligarchie mafieuse qui n'a cessé de prospérer depuis la fin du règne Bourguiba.
La mixture nauséabonde des milieux affairistes, de la haute administration de pseudo-intellectuels, de vrais délinquants de droit commun fait merveille en Tunisie
Cette "tradition", ce pilier du fonctionnement de notre société remonte peut-être à Barberousse et ses corsaires, le courage et le code d'honneur en moins.
La société tunisienne est un espace clos,carcéral et archaïque où Vérité et Liberté n'ont jamais existé, et où les populations défavorisées n'ont jamais pu accéder à la Dignité
le cas SBS est donc emblématique : a priori compétente, cette militante a sombré dans l'amateurisme et la démagogie, éludant sa responsabilité historique, beaucoup trop écrasante pour elle.