Hajer Aloui, mère de Rayan Khalfi, jeune détenu incarcéré à la prison civile de Bizerte et présumé victime d’actes de torture, s’est vue refuser l’accès à son fils à l’hôpital Razi, où il est actuellement pris en charge, et ce malgré une autorisation officielle de visite.
Contactée par l’équipe de Business News, ce lundi 5 mai 2025, la mère du détenu a expliqué avoir été jointe par le directeur de la prison. Ce dernier l’a reçue et lui a remis un document l’autorisant à rendre visite à son fils, hospitalisé à Razi.
Alors qu’elle se rendait dans le Grand Tunis, elle a reçu un second appel du directeur, l’informant qu’un rendez-vous avait été fixé avec le procureur de la République.
« Il m’a expliqué que je n’avais pas à voir mon fils aujourd’hui, car le procureur voulait me parler... J’ai choisi de ne pas en tenir compte. Je veux voir mon fils. Il m’a rappelée encore une fois pour me dire qu’on m’attendait au bureau du procureur...
Je lui ai répondu que j’étais déjà en route pour voir mon fils et que je rencontrerais le procureur ensuite. Il m’a appelée à plusieurs reprises pour savoir si j’avais pu voir Rayan...
À mon arrivée à l’hôpital Razi, vers 16 heures, on m’a dit que les visites étaient terminées, alors qu’il y avait encore des personnes à l’intérieur. J’ai présenté le document remis par le directeur de la prison. L’agent de sécurité et le surveillant sont revenus me dire que le médecin avait interdit les visites. J’ai alors contacté le directeur de la prison pour l’en informer. Il a passé quelques appels et m’a rappelée : selon lui, le médecin avait donné des instructions formelles.
Comment va mon fils ? Comment peut-on me demander de rester calme ? Tout cela me laisse penser qu’il va mal ! Si on m’empêche de le voir, c’est qu’il y a un problème. J’ai fait le trajet de Béja à Bizerte, puis à l’hôpital Razi. Je ne pense même plus au fait qu’il a été tabassé… Je veux juste le voir, le prendre dans mes bras… Pourquoi me faire subir ça ? », a-t-elle déploré.
Rayan Khalfi a été transféré, selon son avocate Rihab Ben Abda Smaali, à l’hôpital Razi suite à une grave dégradation de son état de santé en détention. Dans l’émission Studio Wataniya animée par Zina Zidi sur la Radio nationale, l’avocate a précisé que, lors d'un entretien, son client lui a directement montré des traces de violence sur son corps : « Il a enlevé son pull et m’a montré les bleus sur son dos, son corps et sa main... Il a une brûlure au niveau de la paume de la main gauche... Il a des cicatrices sur son épaule droite... J’ai vu cela de mes propres yeux... Il m’a fait part de son envie de mourir ».
Depuis plusieurs jours, des ONG - dont l’Organisation contre la torture en Tunisie (OCTT) - et des avocats dénoncent des actes de torture subis en prison et réclament l’ouverture d’une enquête indépendante.
De son côté, le ministère de la Justice a formellement démenti, dimanche 4 mai, les accusations visant l'administration pénitentiaire de Bizerte. Il affirme qu’aucune trace de violence n’a été constatée lors des inspections menées par le parquet, l’inspection des prisons et un juge d’instruction. Le ministère dénonce une manipulation, notamment à travers l’utilisation d’une photo ancienne, et annonce des poursuites contre les auteurs des allégations.
S.G
