
Une récente analyse basée sur un rapport de la Banque mondiale (BM) et concluant à un échec des politiques monétaires de la Banque centrale de Tunisie et l’inaccessibilité au financement a fait l’objet d’une mise au point de la part de l’institution financière internationale qui estime que l’analyse fait dire au rapport plus que sa teneur.
Le bailleur de fonds explique ainsi que le rapport de 12 pages publié en anglais et conduit par le Groupe de la Banque mondiale, la BERD et la BEI, ne présente aucune analyse ou jugement de la politique monétaire des pays alors que le papier en question «exprime une opinion de la politique monétaire». Pour la BM, l’article comprend plusieurs «éléments trompeurs» et «ne fait aucune référence au soi-disant "dégâts économiques occasionnés par la politique de la BCT"». Et de souligner que «l’accès au financement comme contrainte du secteur privé n’est pas liée uniquement au financement bancaire au sens strict».
La Banque mondiale a tenu aussi à mettre en avant certains faits intéressants qui ressortent de l’étude :
- La part du financement bancaire des actifs immobiliers a connu une très forte croissance (plus de 50%) en Tunisie comparé à sa dernière enquête (2013) ; cette part est aussi de 50% supérieure en Tunisie que dans les autres pays de la région Mena. Des faits en total contradiction avec la thèse de l’article selon laquelle la politique monétaire de la Banque centrale donnerait lieu à des effets d’évictions sur le financement bancaire des investissements des entreprises.
- Le pourcentage d'entreprises utilisant le financement bancaire pour financer leur fonds de roulement est nettement plus élevé en Tunisie (42%) que dans la région Mena (27%) ou dans le monde (30%).
- Le pourcentage d'entreprises disposant d'un compte bancaire est considérablement plus élevé en Tunisie (97,5%) que dans la région Mena (79,5%) ou dans tous les pays disposant de données ES (88,6%)
- Le pourcentage d'entreprises dont la demande de prêt a été rejetée est plus faible en Tunisie (6,8%) que dans les pays de la région Mena (12,2%).
- L’incidence de la corruption (pourcentage d'entreprises faisant l'objet d'au moins une demande de paiement informel) est plus faible en Tunisie (11,9%) que dans la région Mena (16,5%) ou dans tous les pays du monde couverts par l’enquête (16,3%)
- La mesure de la profondeur de la corruption (% des transactions publiques où un cadeau ou un paiement informel a été demandé) est plus faible en Tunisie (10,4%), que dans la région Mena (14,4%) ou dans les tous les pays du monde couverts par l’enquête (12,7%)


Dans ce rapport de la banque mondiale on lit:
"Ce rapport conclut que la prospérité en Tunisie est freinée par des politiques qui ont réduit la performance économique. Cette faible performance est le résultat de divers obstacles...d'un secteur financier entravé par les défaillances de gouvernance.."
"Le secteur bancaire constitue un exemple des effets que le manque de concurrence peut avoir. Les défaillances au niveau de la gouvernance touchant les grandes banques étatiques entravent la concurrence dans le système bancaire et résultent en une performance faible et très peu d'efficacité dans la transmission de l'épargne vers les entreprises et les projets. Les banques tunisiennes ont financé des projets appartenant à la famille du président déchu Ben Ali à hauteur de 2.5 pourcent du PIB, c.-à-d. l'équivalent de 5 pourcent de tous les financements accordés par le secteur bancaire tunisien.
En outre, près de 30 pourcent du financement a été accordé sans garanties de remboursement. De telles défaillances de gouvernance sont à la base du grand pourcentage de créances accrochées
présentes dans les bilans des banques et tranchent avec le fait que les entreprises tunisiennes déclarent avoir des difficultés pour accéder aux crédits auprès des banques; ce point est même jugé
comme étant une contrainte majeure par 34 pourcent des entreprises."
Un chapitre entier explique l'obstacle que représente les banques au développement du pays:
"Le chapitre 6 traite de l'incapacité du secteur financier à orienter les ressources en direction des projets les plus productifs"