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Tunisie - Ennahdha, de l'histoire au pouvoir, en passant par l'isoloir

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6 juin 1981 - 6 juin 2013, trente deux ans sont passés depuis que le parti, actuellement au pouvoir en Tunisie, Ennahdha, a rendu public, pour la première fois, son manifeste ou charte de fondation. Cette date est désormais célébrée comme étant la date anniversaire du lancement officiel du mouvement islamiste, bien que les prémisses du mouvement remontent à plusieurs années auparavant, à la fin des années soixante plus précisément.
Procédons à une lecture chronologique de l'histoire de ce parti qui a commencé avec une poignée de militants engagés œuvrant pour la défense de l'Islam face à l'oppression du régime avant de devenir un grand parti, le plus grand du pays, le mieux structuré et surtout le parti au pouvoir depuis les élections du 23 octobre 2011.
Ce parti appelé au départ "Al Ittijah al islami" (Mouvement de la tendance islamique - MTI) en 1981 avant de changer de nom en février 1989, existait déjà dès 1969 en tant que mouvement éducatif, intellectuel social et culturel, fondé par Rached Ghannouchi, qui était enseignant de philosophie et l'avocat Abdelfattah Mourou. Ils ont entamé leurs réunions secrètes, en avril 1972. Plusieurs autres activistes ont, par la suite, rejoint ce mouvement, à l'instar de Salah Karkar, Habib Mokni et Ali Laârayedh. Ils œuvraient, à l'époque, à organiser des réunions dans les mosquées sur l'explication et l'interprétation du Coran et se présentaient en tant qu'actifs de la société civile.
Le mouvement a eu droit à sa première revue "Al Maârifa" dès 1974. Il s'est, par la suite, acheminé vers l'activité politique à la fin des années 70. C'est en août 1979 que le premier congrès a eu lieu, pendant ce congrès, le mouvement a adopté ses statuts constitutionnels, mais c'était évidemment un congrès secret.
Les 9 et 10 avril 1981, le mouvement a organisé son deuxième congrès à Sousse, dans clandestinité également. Et c'était à l'issue de ce 2ème congrès que le mouvement a décidé de sortir de l'anonymat et de la clandestinité et de présenter, en date du 6 juin de la même année, sa demande de visa officiel auprès des autorités, une demande qui n'a obtenu aucune réponse.
En cette date du 6 juin 1981, le mouvement a également rendu public son faire-part de naissance, une sorte de charte fondatrice qui stipulait que le pays souffrait d'une crise identitaire aigüe avec "un abandon total du rayonnement de l’Islam en faveur tantôt d’un Occident occupant, tantôt en faveur d'une minorité qui s'est détachée de ses racines…
Toutefois, le mouvement islamiste ne se prétend pas porte-parole de l'Islam en Tunisie et n'ambitionne jamais de l'être. Car tous les Tunisiens ont le droit de traiter d'une manière sincère et responsable avec leur religion. Le mouvement croit en son droit de disposer de sa propre vision de l'islam qui soit globale… Les islamistes devraient de ce fait entamer une nouvelle étape de travail et d'organisation qui leur permettrait de rassembler les énergies, de les sensibiliser, de les éduquer et de les employer en faveur des causes du peuple et de la "Oumma". Ce travail doit donc avoir des objectifs élaborés, des moyens prédéfinis, des structures claires et des leaderships représentatifs".
Cependant, le 18 juillet 1981, les autorités ont arrêté les dirigeants du mouvement pour appartenance à un mouvement illicite et ils ont été traduits en justice. Rached Ghannouchi et Abdelfattah Mourou ont été condamnés à 10 ans de prison chacun. Le premier a été relâché en août 1984, le deuxième l'a été en 1983.
En 1987, Rached Ghannouchi a été condamné aux travaux forcés à perpétuité, accusé d'être derrière les explosions terroristes dans quatre hôtels au Sahel. D'autres condamnations à mort pour les mêmes faits, ont été prononcées contre Mehrez Boudagga, Ali Laârayedh, Hamadi Jebali, Salah Karkar et Fethi Maâtoug … Ces quatre derniers avaient réussi à prendre la fuite.
A la fin de la même année, les islamistes ont été soupçonnés de préparer un complot contre l'Etat, un complot qui a été déjoué in extremis.
Lors de la déposition de Bourguiba, officiellement pour raisons de santé, et l'ascension au pouvoir de Zine El Abidine Ben Ali en novembre 87, le mouvement a bien accueilli le nouveau président, notamment avec la libération par ce dernier de la majorité des détenus islamistes. Le 7 novembre 1988, le mouvement islamiste était parmi les signataires du pacte national élaboré par Ben Ali.
Ensuite, en 1989 le mouvement a changé sa dénomination pour prendre l'actuelle appellation : "Mouvement Ennahdha" (mouvement de la renaissance), afin de se conformer à la loi des partis politiques qui interdit l'aspect religieux à tout parti politique. Ayant pris part aux élections de la même année sur des listes indépendantes, les islamistes ont obtenu 13 % des voix. En mai 1989, Rached Ghannouchi a quitté le pays pour l'Algérie, cédant la présidence du bureau politique à Sadok Chourou.
A partir de 1990, une vague de répression et d'arrestations menée par les autorités, a secoué les islamistes d'Ennahdha. Le nombre des détenus parmi eux a même atteint les 8000 personnes. Les rapports avec les autorités sont devenus alors des plus tendus.
Le 17 février 1991, ont eu lieu les événements de Bab Souika et au cours desquels des éléments du mouvement islamiste se sont attaqués à une cellule du parti RCD au pouvoir à l'époque, y ont ligoté les deux gardiens et ont mis le feu. Cette attaque a coûté la vie à un des gardiens, le second avait été grièvement blessé. Ces incidents ont poussé Abdelfattah Mourou à se retirer du parti.
En date du 22 mai 1991, une conférence de presse a annoncé que les forces de l’ordre avaient déjoué une tentative de coup d’Etat par un groupe de militaires appartenant au mouvement islamiste Ennahdha. Les rapports d’investigation et d’inculpation établis par les autorités à l’époque, stipulaient qu’environ 70 cadres militaires se seraient réunis le 6 janvier 1991 à Barraket Essahel, à la périphérie de la ville d’Hammamet, en vue de comploter contre le régime, de s’emparer du pouvoir en Tunisie et d’imposer un Etat théocratique et religieux.
Plusieurs militaires ont été, de ce fait, arrêtés et traduits en justice. En août 1992, le tribunal militaire a condamné 256 cadres militaires à des peines lourdes atteignant la perpétuité. Plusieurs membres et activistes du parti se sont réfugiés en Europe et y ont pu bénéficier de l'asile politique, dont Rached Ghannouchi qui a vécu de longues années à Londres.
En 1994, M. Ghannouchi a commenté la tentative de coup d'État (de Barraket Essahel) en affirmant "qu'elle n'était qu'une initiative pour faire face à un régime qui avait déclaré qu'il voulait éradiquer le mouvement".
Ensuite la révolution du 14 janvier 2011 a été, également, un tournant décisif dans l'histoire d'Ennahdha. Dès les premiers jours qui ont suivi la révolution et la chute du régime de Ben Ali, le leader d'Ennahdha Rached Ghannouchi est revenu au pays après 21 ans d'exil. De même, tous les islamistes réfugiés partout dans le monde sont rentrés au pays.
Ennahdha, a alors renforcé sa structure et a réorganisé ses bases populaires, avant de prendre part aux élections du 23 octobre 2011. Ennahdha est sorti vainqueur de cette première expérience électorale avec 89 sièges sur les 217 siège de l'Assemblée nationale constituante.
Majoritaire à l'ANC, Ennahdha a été propulsé au pouvoir et a fait appel à ses "dauphins", le CPR et Ettakatol, pour former la coalition au pouvoir, la fameuse "Troïka".
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