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Chroniques
L'Etat recule jusqu'à tomber à la mer
18/04/2016 | 15:59
6 min

 

Il a vécu comme un grand, il est mort comme un grand et il a laissé des grands derrière lui. Repose en paix Ahmed Brahim ! Azraël, serre à droite !

A l’actualité cette semaine, la décision de l’UGTT d’une grève du secteur de la Santé le 28 avril courant, les grabuges à Kerkennah et les nouvelles révélations d’Inkyfada dans l’affaire des Panama Papers.

 

Il s’appelle Adel Zouaghi, il est secrétaire général adjoint de la Fédération régionale de la Santé de Sfax et ne cesse de faire parler de lui ces derniers mois. Depuis la nomination d’un nouveau directeur général au CHU Habib Bourguiba de Sfax. Les syndicalistes ne veulent pas de lui au prétexte qu’il est originaire de l’Hôpital militaire. Quelle est la différence entre un cadre médical provenant du civil et un autre issu de l’armée ? Aucune, a priori. La rigueur, peut-être ? La rigueur justement ! Les syndicats de Sfax ne veulent pas d’un médecin rigoureux qui ferait marcher l’hôpital comme un militaire. Alors, ils rouspètent, ils protestent, ils manifestent. C’est de la bonne santé démocratique, diriez-vous ? Le slogan est pompeux, mais il est valable pour des personnes civilisées et bien éduquées.

Au syndicat de la santé de Sfax, tout le monde n’a pas bénéficié d’une bonne éduction. Et lorsqu’on est mal éduqué, on ne proteste pas, on insulte ! La défunte mère du ministre a eu son lot d’insultes de la part de certains membres de ce syndicat. Et lorsqu’on est mal éduqué et que, malgré les insultes, on n’obtient pas gain de cause, on passe à la menace. Étape qui précède généralement l’agression physique.

Le nouveau mot à la mode en Tunisie est le djihad. Va pour le djihad, dira ce Adel Zouaghi en s’adressant à des journalistes de la chaîne Al Hiwar, après les avoir empêché de faire leur travail. Il n’avait pas le droit de les empêcher et encore moins de les menacer, mais Sfax est devenue une zone de non-droit. Les cadres et les médecins ont beau appeler au respect de la loi, rien n’y fait.

Interrogé sur la menace proférée, l’intéressé rassemble tout son courage et botte en touche ! Quand on est mal éduqué, on ment. Farhat Hached se retourne dans sa tombe.

L’UGTT, co-récipiendaire du Prix Nobel de la Paix, s’est-elle élevée contre les insultes visant le ministre et les menaces de djihad ciblant les journalistes ? A-t-elle appelé au respect de la loi et la primauté de la loi ? A l’UGTT, on préfère cautionner. Farhat Hached se retourne dans sa tombe.

Mais pourquoi donc l’UGTT cautionnerait-elle des syndicalistes mal élevées qui salissent la corporation, le syndicat et le pays ? En prévision du congrès qui devrait se tenir vers le mois de décembre, certains dirigeants de fédérations ont besoin de voix pour se faire élire et le sieur impoli cité plus haut a la réputation de pouvoir rameuter les foules et remplir les urnes. A moins que l’on ait besoin de gros bras et de djihadistes pour tenir ce congrès, ce qui n’est pas à exclure, du reste. Allez Farhat Hached, retourne-toi encore une fois ! Certains de tes enfants ne veulent pas que tu reposes en paix ! 

 

Pas loin de Sfax, à quelques encablures, il y a Kerkennah. Une île havre de paix qui a enfanté plusieurs grands de ce pays. Farhat Hached fait partie de ceux qui sont nés ici. Le pauvre, il n’a pas encore fini avec ses enfants, voilà que ses « neveux » s’y mettent à leur tour !

Petrofac, une société pétrolière exerçant dans la région a eu la mauvaise idée, en pleine révolution, d’accorder des primes à des diplômés de l’enseignement supérieur. Question de les aider à affronter le quotidien en attendant des lendemains meilleurs. Le mot à la mode à l’époque était « C’est la révolution de la dignité !».

En toute « dignité », quelques centaines de Kerkenniens ont alors bénéficié de cette prime. En contrepartie, ils devaient s’occuper de l’écologie de l’île. Ils n’en feront rien ! Leur « dignité » de diplômés de l’enseignement supérieur les empêche de s’occuper de ramasser les saletés jonchant ce coin, jadis paradisiaque. Et pourquoi travailler d’ailleurs quand on a une société pétrolière qui vous sauve votre dignité en vous octroyant une prime provenant de « leurs propres richesses naturelles ». Le fait est que la rente a fait lécher les babines d’autres diplômés d’autres régions. En toute dignité, ils ont fait le chemin pour aller sur l’île et bénéficier de la « rente » de Petrofac. De quelques centaines de « dignitaires », on est passé à quelques milliers. Petrofac apprendra ainsi à mieux jouer aux affaires sociales et aux sauveurs de dignité. N’en pouvant plus, elle délègue la distribution de la prime aux autorités de la région, lesquelles savent qui est « dignitaire » et qui ne l’est pas. On met alors un peu de rigueur dans tout ce manège. Mal leur en a pris, car ici aussi on n’aime pas la rigueur. Alors, on rouspète, on proteste et on manifeste. C’est de la bonne santé démocratique, diriez-vous ? Le slogan est pompeux, mais il est valable pour des personnes civilisées et bien éduquées.

A Kerkennah, tout le monde n’a pas bénéficié d’une bonne éduction, surtout avec tous ces intrus opportunistes venus de toutes parts. Et lorsqu’on est mal éduqué, on ne proteste pas, on insulte, on bloque les routes, on incendie les véhicules des représentants des forces de l’ordre et on les jette carrément à la mer. Après Sfax, c’est Kerkennah qui est devenue une zone de non-droit.

Les syndicats de la région surfent sur la vague et soutiennent les manifestants. Rapidement soutenus par des anarchistes du Front populaire et des barbares du parti Ettahrir. Lequel parti est fervent partisan du djihadisme comme l’énonce leur chariâa.

Quand on devient une zone de non-droit, on ne parle plus de loi. Ici, on interdit aux caméras de filmer et on parle djihad. Là, on interdit aux camions de circuler et on rêve du djihad.

Voilà ce qui arrive quand l’Etat recule ! Et l’Etat ne cesse de reculer, en dépit de la résistance de certains ministres et gouverneurs. A Kerkennah, on vient de libérer les suspects impliqués dans les grabuges. A Sfax les syndicalistes continuent à bénéficier de l’impunité.

Ce n’est certainement pas avec un Etat qui régresse et des zones de non-droit qu’on va pouvoir ramener des investisseurs, obtenir de la croissance et employer des chômeurs. On le sait tous ! S’il continue encore à reculer, l’Etat ne peut que chuter.

A titre de rappel, pour ceux qui l’ont oublié, l’objectif final du parti Ettahrir and co, c’est de faire chuter l’Etat. Ils ont entamé la démarche en 2011 et ils continuent encore en 2016.

 

Pendant que les uns font le djihad, les autres sont encore occupés par les Panama Papers. La dernière révélation d’Inkyfada a un grand mérite : non pas le fait de dévoiler la participation d’islamistes d’Ennahdha dans des entreprises médiatiques à travers des sociétés écran, ça on le sait déjà. La révélation d’Inkyfada est d’avoir mis à nu plein d’hypocrites qui, du jour au lendemain, ont fait un virage de 180° dans leurs positions vis-à-vis du site.

Quand c’était Mohsen Marzouk le concerné, ils ont crié au scandale, ils ont saisi la justice (Attayar), ils ont multiplié les communiqués (Irada, CPR, Jomhouri, Wafa) et refusaient d’émettre le moindre doute quant au contenu des révélations. Mais quand c’est des dirigeants d’Ennahdha qui ont été cités, tout ce beau monde d’autoproclamés intègres et propres s’est muré dans le silence. Il y en a même qui se sont mis à insulter Inkyfada et ses journalistes, en les accusant de tous les torts, alors qu’ils les encensaient il y a à peine quelques jours.

A défaut de véritable révélation sur quoi que ce soit, Inkyfada a eu néanmoins le mérite de mettre à nu les hypocrites. C’est déjà cela de gagné ! 

18/04/2016 | 15:59
6 min
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Commentaires (32)

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Observateur
| 27-04-2016 03:00
A bon entendeur ...

S.citoyen
| 25-04-2016 10:49
Où est l'état , vous voyez qq chose qui ressemble à un état , rien de tout ça .Il n' y a rien qui a changé depuis 1987 date du prise du pouvoir par ben Ali jusqu'à ce jour. Les mm pratiques , la mm administration avec son comportement rétrograde .Prenons par exemple le ministère du domaine de l'état et des affaires foncières , il a en charge tous les dossiers des maisons des étrangers qui tombent en ruine et l'état a besoin d'argent , et ils n'arrive pas à céder ces maisons aux gens qui les habitaient depuis des dizaines d'années , et l'état s'endette chaque jour de l'étranger

URMAX
| 21-04-2016 13:15
Mon cher NIZAR, nous sommes tombés à la mer, le jour où N.T. a fait alliance avec Ghannouchi.
Aujourd'hui, la Tunisie coule !

Nephentes
| 19-04-2016 15:08
Vous mentionnez "mauvaise éducation" si Nizar.

C'est peut être le terme approprié pour s'éloigner des amalgames et raccourcis blessants.

Mais la lucidité est blessure.

Ce qu'il faut employer c'est le terme de "culture bédouine".

C'est cette sous-culture avatar calamiteux de l'acculturation des néo-urbains et de la rurbanité qui s'est constituée au cours des trente dernières années sur le littoral du pays qui est directement à l'origine de cette hallucinnate dérive de notre société.

Illustrations significatives : Pétrofac et le refus du nouveau responsable du CHU de Sfax.

Les Kerkenniens, de père en fils, sont des gens paisibles, travailleurs et droits .

Idem pour leurs cousins Sfaxiens.

Comment les mentalités locales ont elles pu se déformer de manière aussi catastrophiques pour arriver à de véritables dénis de l'Ordre, de la Loi et de la véritable Dignité ?

XM
| 19-04-2016 13:47
Le rencontre diabolique de deux veuillards à Paris éxplique qu'ils ont partager le pays l'un occupe Cartage,l'autre (Sonplaisir)la différence ce que Gannouchi son stratégie et de changer le mode de vie pour les tunisiens(nes) à long terme, et Beji observe passer le cinq ans et son honneur, mourir président;

Bab ezzira
| 19-04-2016 11:04
Très beau article qui résume le calvaire du pays mais ne pointe pas le mal :
L'Etat est tiraillé entre l'aile extrémiste d'El Jebha et l'autre aile extrémiste des islamistes.qui se font un plaisir extrême à pousser l'Etat vers la Dérive la déconfiture et la banqueroute.
La mainmise de l'UGTT sur la chaine nationale 1 et 2 a fait de cet organisme national un outil de propagande contre le gouvernement et un outil pour soutenir appuyer, blanchir et justifier au nom de la démocratie le comportement des émeutiers.
Ainsi la chaine nationale appelle à respecter las particularité de l'ile, à ne pas envoyer des renforts pour respecter des lois et le maintien de l'ordre.
Ainsi, une première dans les annales internationales, une organisation syndicale défend les intérêts des émeutiers aux défend des intérêts DES TRAVAILLEURS QU'ELLE EST CENS2 REPRESENTES.
Une question qu'on pose à tout Tunisien honnete, à tout responsable qui aime son pays, à tout journaliste qui respecte son noble travail, QUELLE EST LA DIFFERENCE ENTRE LES EXTREMISTES MUSULMANS QUI BLANCHISSENT ET ADHERENT AU TERRORISMES ET LES EXTREMISTES DE LA GAUCHE QUI BLANCHISSENT ET ADHERENT AUSSI AUX EMEUTIERS QUI METTENT EN DANGER LA VIE DES MEMBRES DES FORCES DE L'ORDRE ? QUI DETRUISENT ET INCENDIENT NOS BIENS PUVLICS , QUI EMPECHENT DES TRAVAILLEURS D'ALLER TRAVAILLER
Ceci nous rappellent la mentalité de certains mômes dans nos quartiers populaires lorsqu'ils arrivent en retard à la Batha et découvre un match de football qui a déjà commencé : « NAL3AB WALLA NHARREM » Ou je joue ou j'arrête le jeux, c'est la devise qu'adopte les syndicats pour défendre les intérêts des émeutiers contre les intérêts des travailleurs.
El jebha Chaabia, qui n'arrive pas à avoir 3 % des voix des Tunisien prétend pouvoir mobiliser la Rue .Elle excele dans L'ART DE LA PECHE EN EAUX TROUBLES, et notre Etat est d tombé dans les eaux troubles dans les filets d'El Jebba et leurs alliés Hizb Ettahrir qui n'ont qu'un seul objectif : FAIRE TOMBER L'ETAT
Personnellement je ne me sens plus représenté par cette bande de mafieux qui a mis la main sur mon syndicat, et dès aujourd'hui je vais sommer mon employeur pour arrêter de verser mes contributions en faveur de la central syndical, de même je vais 'uvrer pour la suppression de la taxe sur la facture de l'électricité prélevé en faveur de l'El Watania.

Grammaire
| 19-04-2016 10:47
on dit: tomber DANS la mer, pas tomber a la mer.

why
| 19-04-2016 09:53
J'ai mal à mon pays. Tant de bêtises, tant de convoitises, tant d'avidité, de tkarkir, d'incompétences... J'ai mal à mon pays. Au début, je me disais que c'est limité à quelques domaines. Mais finalement, plus le temps passe, plus je me rends compte que c'est un état d'esprit généralisé. C'est le moment où jamais d'avoir un état fort, bien structuré et surtout avec assez de volonté pour justement tout faire bouger et réformer en profondeur ce pays. Au lieu de ça, nous n'avons que les grandes gueules, et un air malsain où la cupidité le dispute à l'avidité. Spectacle triste et assommant...

Bargou
| 19-04-2016 09:52
Au lieu d'être sur les sites de production, les forces vives de la nations sont sur les places publiques en train de manifester, de faire de la politique politicienne et de servir de décor à des partis en divorce avec les réalités du pays tant le mensonge de la révolution était gros.
Et pendant tout ce temps, notre nouvelle classe politique, composée d'amateurs dépourvus de tout sens de l'État, de tout sens de responsabilité politique, se chamaille, s'adonne à des querelles de clans, se dispute des portefeuilles ministériels, exerce les pires des pressions pour se positionner en perspective des batailles à venir, sans rapport aucun avec les aspirations de leur peuple.
Y a-t-il aujourd'hui un homme, un force , un phènomène qui pourrait ramener les gens à se remettre au travail?
Il y a tout lieu d'en douter.

Ben
| 19-04-2016 09:41
Les composantes d'un État, sans lesquels il ne pourrait être défini comme tel, se résument en un territoire, la consécration de la souveraineté nationale sur ce territoire et un peuple à gouverner.
Qu'avons-nous réalisé depuis « la révolution du jasmin » pour préserver l'État ?
-La perte d'une partie de notre territoire, notamment certaines zones frontalières, conquises, depuis, par des hordes terroristes donnant la mort à des dizaines parmi nos vaillants soldats et à des civils, sans défense, livrés à eux-mêmes,
-La perte de la souveraineté sur ce territoire, devenu véritable passoire où fleurissent des commerces de tous genres dont le commerce illégal d'armes de guerre, de drogue et jusqu'à la traite des êtres humains,
-La perte de tout contrôle sur le peule, devenu ingouvernable à force d'utilisation des populations dans les querelles politiques, chacun appelant l'une de ses franges à sortir dans la rue sans mesurer , à long terme, la gravité de telles pratiques sur la conduite des affaires économiques du pays, avec pour résultat la paralysie de toute action des autorités d'application de la loi et la perte de toute autorité de l'État auquel s'etait substitué des corporations, des lobbies de tous genres et une dictature syndicale qui feint à franchir le dernier pas d'un putsch syndical à la manière de « Lech walesa ».