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Youssef Chahed : comment abattre un homme politique en plein décollage ?
02/08/2017 | 19:59
6 min
Youssef Chahed : comment abattre un homme politique en plein décollage ?

Avec 80% de satisfaction dans les sondages, une équipe qui frappe dans la fourmilière, des succès sur le plan international, une image fort positive dans les médias, le chef du gouvernement Youssef Chahed commence sérieusement à inquiéter ses « amis » et « adversaires » politiques. De Carthage à Montplaisir, on regarde avec méfiance l’ambitieux. Pour calmer ses ardeurs, Carthage a envoyé le fils et Montplaisir a envoyé le père…

 

Dans une guerre, la communication est un élément fondamental de la machine. Et en la matière, Youssef Chahed a bien su utiliser cette arme pour arriver à ses fins. Quelques arrestations dans le cadre de simples affaires judiciaires ont été transformées, sur le plan de la com, en guerre contre la corruption.

Il n’est pas le seul à user du stratagème, plusieurs membres du gouvernement et hauts cadres de l’Etat font pareil. Cela va de Fadhel Abdelkefi et sa salve spectaculaire contre Samia Abbou sous la coupole de l’ARP à Mehdi Ben Gharbia en passant par le gouverneur de Tunis, Omar Mansour, qui ne fait plus fermer un commerce informel sans être accompagné de caméras.

Et ça marche ! Quelle que soit l’action entreprise par un dirigeant de l’Etat, les dividendes sont versés directement dans le compte personnel de Youssef Chahed. On est carrément dans le petit détail, comme par exemple ce reportage de TF1 au cœur des forces spéciales antiterroristes tunisiennes. L’équipe de la télévision française a diffusé un reportage jugé excellent, mais il ne l’aurait pas été sans l’aide directe de la Kasbah. Comprenez « le service de communication » de la Kasbah, derrière qui se trouve un certain Mofdi Mseddi, l’homme qui a catapulté Mehdi Jomâa et a, longtemps, protégé Mustapha Ben Jaâfar du temps de l’ANC. Ce pur produit de l’ancien ministre et actuel patron de Stafim-Peugeot  Abderrahim Zouari est celui qui dicte le « comportement public » de Youssef Chahed.

 

Grâce à lui, Youssef Chahed dégage l’image à la fois du chef de l’anti-corruption, chef de l’anti-terrorisme, diplomate en chef, chef des relations publiques, pompier, facilitateur d’affaires auprès des investisseurs et des chefs d’entreprises. Est-ce vrai pour autant ? Peu importe si c’est une réalité ou si c’est du virtuel, si on est face à Chahed en personne ou à son hologramme, le fait est que Youssef Chahed bénéficie de sondages exceptionnels dépassant toutes les personnalités politiques avec un très confortable 80% attribué par Sigma. Un pareil taux fait jalouser les uns et inquiète les autres !

En Tunisie, on n’aime pas les supercheries, mais on n’aime pas non plus ceux qui réussissent véritablement. A la limite, on préfère les premiers car on sait d’avance qu’ils n’iront pas loin et peu importe l’intérêt supérieur du pays.

 

Comment arrêter cette ascension qui bouscule les projets de plusieurs prétendants ? A Carthage, on a cru mettre un docile « soldat » pour exécuter sans broncher les plans du vrai chef Béji Caïd Essebsi. On a cru la même chose en plaçant au même poste son prédécesseur Habib Essid.

Il se trouve cependant que les soldats ont de l’ambition. Quand bien même ils n’en auraient pas, l’opinion publique leur en accorde. Vu que le temps joue en la faveur des soldats appelés à devenir généraux et non en faveur des généraux appelés à passer à la retraite, il est impératif de rappeler à ces soldats leur véritable poids et qui les a nommés à ce poste.

 

Les premiers à frapper Youssef Chahed sont les députés de Nidaa Tounes, via leur chef de bloc Sofiène Toubel. Un autre soldat docile mais sans compétences particulières pour pouvoir être réellement efficace sur terrain. Sa capacité de nuisance a vite montré ses limites. Pendant longtemps, plusieurs projets de loi soumis par le gouvernement ont dormi dans les couloirs des commissions parlementaires. Youssef Chahed a beau demander l’accélération de tel ou autre projet, les députés de Nidaa (avec la complicité de ceux d’Ennahdha) n’avaient fait qu’à leur tête. Ceci n’a pas empêché pour autant le chef du gouvernement d’avancer, après bien avoir pris soin de prendre à témoin l’opinion publique sur les raisons du blocage. La technique « ce n’est pas moi, c’est eux et voici les preuves » a bien fonctionné, ce sont les députés de Nidaa qui ont dû essuyer les tirs nourris de l’opinion ! Résultat, le bloc a éclaté en mille morceaux car plusieurs députés ont refusé d’être de simples soldats exécutants !

Changement de stratégie, Hafedh Caïd Essebsi, fils de son père et ambitieux-héritier non déclaré, a pris les choses en main pour s’occuper du « désobéissant » Youssef Chahed. Pour ce faire, il a fait appel à Samir Laâbidi (ancien ministre de la communication de Ben Ali) et Borhen Bsaïes (grande figure médiatique) et quelques personnalités censées être influentes. On reproche essentiellement à Youssef Chahed de ne pas « exécuter » les décisions du parti et de ne pas nommer les « fils du parti » à certains postes (parfois des postes-clés) dans l’administration et dans l’appareil de l’Etat. On lui reproche surtout d’avoir choisi des hommes politiques controversés et jugés personæ non gratæ chez Nidaa, à l’instar de Iyed Dahmani et Mehdi Ben Gharbia.

Les attaques ont beau avoir été violentes, Youssef Chahed a continué à foncer droit devant. Ses ministres épinglés ont su affronter les orages et renverser carrément la vapeur. Plutôt que d’être affaiblis, Youssef Chahed and co ont été renforcés pour récupérer les dividendes d’une guerre qu’ils n’ont pas déclarée et durant laquelle ils n’ont fait que se défendre. Cela commence à en faire trop !

 

Dernière bataille en date, celle lancée hier par Rached Ghannouchi qui a invité Youssef Chahed à cesser d’avoir de l’ambition. Le chef du gouvernement est appelé à s’engager publiquement de ne pas se présenter en 2019 ! De quel droit lui demande-t-on cela ? Quid de la constitution et de la démocratie ? Qui leur a dit qu’il a cette ambition ? Réussir sa mission voudrait-il pour autant chercher à briguer la présidence de la République en 2019 ? Et où est le mal finalement ?

De tout cela, le chef d’Ennahdha n’en a cure ! L’essentiel est d’éloigner celui qui dérange Béji Caïd Essebsi et sa famille (personnelle et politique). C’est le comble en cette année 2017 de voir le chef des islamistes se liguer avec le chef des laïcs pour contrer un jeune dont le seul tort est de commencer à réussir quelques chantiers (et il s’agit bien de quelques) et de dégager une bonne image auprès de l’opinion.

Plutôt que de capitaliser sur ces succès et de l’encourager à aller de l’avant, on demande au chef de se suffire de son salaire et de son poste et de cesser de rêver et d’ambitionner, en supposant déjà qu’il a un rêve et de l’ambition !

 

L’essai, pour le moment, n’a pas fonctionné et la proposition de Rached Ghannouchi a été comme un coup d’épée dans l’eau. « Qu’il porte une cravate ou un string, il ne sera jamais crédible auprès des laïcs », commente-t-on ce mercredi 2 août 2017 sur les réseaux sociaux. La sortie du chef islamiste a même servi davantage l’image de Youssef Chahed qui n’a certainement pas demandé tant de « soutien »… Aux prochains sondages, parions que Youssef Chahed va grignoter encore quelques points au détriment de Béji Caïd Essebsi et Rached Ghannouchi réunis !

 

Nizar Bahloul

02/08/2017 | 19:59
6 min
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Commentaires (38)

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lario
| 06-08-2017 17:10
BAJBOUJ peut tout faire,le président de la 2éme république tunisienne a tous les pouvoirs, il peut facilement et pour un oui ou un non changer le chef du gouvernement, il peut le remercier de ce poste à chaque moment et l'ARP n'a qu'à cautionner, actuellement l'ARP EST SOUS LE JOUG DE NIDA ET DE NAHDHA? YOUSSEF CHAHED est à leur merci, si gannouchi ou hafedh convaincrait le vieux bajbouj de se débarasser de ce chahed qui est d'après eux "un ingrat, un adolescent en politique et méme un traitre" il pourra lui trouver une solution en bonne et due forme, on est tributaire de l'organisation et du systéme politique français depuis la colonisation jusqu'à ce jour .Qui peut hausser le ton ou contrarier MACRON de SES partisans de son parti ou de ses députés ou des partis satellites? La tunisie est expressement demandé à revoir sa constitution et ajuster ce qui assure plus d'éfficacité et plus de positivité à sa gouvernance et à sa démocratie en tenant compte de cette expérience de ces presque dix dernières années

LAZARD
| 04-08-2017 03:47
Je me demande depuis 2011 ce que le peuple Tunisien a fait de mal pour être puni de la sorte en mettant à sa tète cet individu néfaste. moi je n'ai rien contre la personne mais il a largement contribue à détruire le pays avec sa horde de chacals assoiffée de sang alors qu'il aille en paix et qu'il nous laissent soigner nos blessures

kameleon78
| 03-08-2017 19:34
Je n'ai pas dit que vous aviez tort dans le cas général, nous sommes dans un régime parlementaire donc c'est le chef de gouvernement qui importe, mais pour le cas de Youssef Chaed, c'est sa stature de présidentiable qui lui permettra de gagner les législatives avec son nouveau parti (comme Macron) et donc c'est la voie royale vers Carthage. J'ai dit aussi qu'il doit rester le plus longtemps possible chef de gouvernement afin de donner un sentiment de travailleur, de sérieux, quant à chouchouter BCE il n'en a pas besoin, puisque c'est au peuple qu'il s'adresse. Vous connaissez bien le proverbe, il vaut s'adresser à Dieu (le peuple) qu'à ses saints (BCE, Ghannouchi). Lisez mon commentaire précédent sur le projet de Youssef Chaed pour 2019, cela explique qu'il peut gagner en étant hors du parti (Nidaa Tounès).

veritas
| 03-08-2017 19:24
http://tuniscope.com/article/125298/actualites/tunisie/30ans-222409

kameleon78
| 03-08-2017 19:19
Comment Youssef Chaed doit-il préparer son coup pour 2019?

En introduction, il faut que Youssef Chaed reste le plus longtemps possible à son poste de Chef de Gouvernement (6 mois avant l'élection) ainsi il donnera une bonne impression de sérieux et non de faire de la politique pour la politique. YC bénéficie de cette image de sérieux qui va bien avec ses ambitions.

On va procéder dans l'ordre :

1. Les législatives
2. La présidentielle

Comme vous le saviez, les législatives sont organisées avant la présidentielle, ce qui complique un peu la tâche de Youssef Chaed, alors que l'inverse aurait été plus facile à réaliser.(comme en France par exemple).

1. Pour gagner les législatives il faut que cela soit sous un nom, il n'est pas nécessaire d'avoir un grand parti comme l'avait démontré Macron avec la République en Marche (parti créé pour l'occasion), il a attiré sur son nom des personnalités politiques d'envergure et il a gagné les élections législatives avec une majorité confortable à l'assemblée nationale.(je vous rappelle que cela a été réalisé en quelques mois.) Les grands partis le PS et les LR étaient hors jeu.

Donc ramenons cela à nos "moutons", Youssef Chaed peut attirer sous son nom, une majorité présidentielle (le Parti de YC) qui réunira les "dissidents" de Nidaa Tounès et d'autres démocrates laïcs heureux de rejoindre son mouvement.(je pense qu'ils feront la queue devant sa porte).

2. La présidentielle : le plus dur c'est les législatives, la présidentielle ce sera plus qu'une simple formalité puisque cela sera basé uniquement sur le nom de Youssef Chaed comme BCE en 2014.

Tout cela prouve que Youssef Chaed n'a pas besoin de Nidaa Tounès avec ses problèmes internes (Toubel, HCE, BCE ou autres) pour se porter candidat. Il peut créer son mouvement en attirant le maximum de personnalités démocrates et laïques, les autres nidaÏstes dissidents (Marzouk...), , les autres partis comme celui de Abir Moussi etc...

7ay
| 03-08-2017 15:49
Faisons le constat objectif de l'islam politique que tous ces islamistes nous vantent depuis 1400 ANS.
La lecture bornée du coran et la confusion entre ce que le prophète a fait pour gérer la société durant son règne et les vrais concepts de la religion islamique, nous ont condamnés à ne jamais évoluer et à ne jamais faire aimer l'islam au reste du monde.
Avec la vision figée de l'islam nous ne récoltons que l'obscurantisme, la misère et la destruction , sans parler du rejet de notre religion
Les hyènes de Nahdha n'arrêtent pas de nous usurper avec l'hypocrisie qui les rend complètement en contradiction avec leurs références et leur idéologie islamistes. A tel, point point qu'ils prétendent être plus démocratiques que les partis de gauche.
Si l'islam est pour tous les pays et tous les temps, il doit être impérativement exempt de toutes tendance politique.
ENFIN VIVENT LES MODERNISMES VIVE LA JEUNESSE VIVE LES AMBITIEUX VIVENT LES CIVIQUES DONC VIVE CHAHED LE LEADERSHIP et bon repos au vieux renards et gourous qui nous empoisonnent la vie

abou
| 03-08-2017 14:50
Je continue à penser que le poste le plus important dans la constitution tunisienne est celui de chef de gouvernement. C'est le vrai chef de l'administration qui nomme aux différents postes ministériels. Le poste de président est recherché pour son prestige plus que pour son pouvoir réel. Même s'il a certains pouvoirs notamment au niveau de la défense. Le vrai pouvoir réside dans la capacité à créer des gouvernements, à faire passer les lois et les budgets : c'est la majorité parlementaire. Attention, je ne dis pas que YC ne doit pas penser à la présidence de la république. Mais je crois qu'il a d'abord comme priorité de conserver son poste. Je suis convaincu qu'une stratégie selon laquelle il faut démissionner pour constituer sa petite boutique est une imbécilité. La seule possibilité pour lui c'est de continuer le travail et d'avoir des résultats. En même temps il faut faire comprendre aux méfiants, aux jaloux, aux ambitieux, qu'ils vont avoir des bénéfices en cas de réussite. Pas qu'ils vont tout perdre. À mon avis, il est dans son intérêt aujourd'hui de chouchouter BCE. Quitte à le poignarder plus tard.

Laraf
| 03-08-2017 13:34
A mon avis le jeu de BCE et plus malin que vous le croyez. il sait très bien que son fils ne peut aller loin et pour donner plus d'appui à YC il a piégé le gourou, soi-disant YC prend l'avance il faut le stoper( w si khouna masadak sma3 halkelma= ya dhba3 med yedek nhanilek) il s'est lancé pour arréter les ambitions de YC.bien sur ça va tourner mal contre lui. qui lui a donner le pour de dire à quiconque de s'arreter ou d'avancer.et on verra ça ds les prochains sondage.
On ce qui est pour Mr YC: primo il faut continuer les chantiers entamés. en ce qui concerne soi-disant ses alliers il faut suivre la politique de ZBA, siyasset farek tassod),

kameelon78
| 03-08-2017 12:53
Vous vous trompez complètement, vous n'avez aucune notion de politique, sinon une vision parcellaire.

La présidence de la république c'est très important, c'est elle qui dirige la politique étrangère de la Tunisie, le président dirige également les forces armées, et il a la possibilité de dissoudre l'assemblée nationale. (si elle lui est hostile ou par coup politique).

Par ailleurs, pour gagner les législatives il faut que cela soit sous un nom, il n'est pas nécessaire d'avoir un grand parti comme l'avait fait Macron avec la République en Marche, il a attiré sur son nom des personnalités politiques d'envergure et il a gagné les élections législatives avec une majorité confortable à l'assemblée nationale.(je vous rappelle que cela a été réalisé en quelques mois.)

Donc ramenons cela à nos "moutons", Youssef Chaed peut attirer sous son nom, une majorité présidentielle qui réunira les "dissidents" de Nidaa Tounès et d'autres démocrates heureux de rejoindre son mouvement.(je pense qu'ils feront la queue devant sa porte).

Je connais assez bien la politique comment ça marche, l'essentiel c'est d'avoir l'appui populaire, le reste c'est secondaire.

Autre remarque importante, je pense que vous y avez pensé, les élections législatives se déroulent avant la présidentielle, donc je pense que 6 mois avant les élections (ou avant), Youssef Chaed doit penser à créer son parti, une sorte de Rassemblement Démocratique qui préparera les législatives (cela vous rappelle le LREM de Macron), il n'aura pas de mal à attirer des grosses pointures laïques appréciées du camp moderniste. Comme cela on laissera les Toubel et HCE au parti moribond Nidaa Tounès.

Rachid Barnat
| 03-08-2017 12:45
Et si finalement la solution pour les tunisiens progressistes était ce premier ministre !
Les attaques de Nidaa et celles des Frères musulmans ne vont que le conforter.
Entre le premier qui a trahi ses engagements électoraux en faisant alliance avec les obscurantistes, et les seconds que rejette une majorité de tunisiens, il y a peut être cette voie !

https://latroisiemerepubliquetunisienne.blogspot.fr/2016/01/lutter-contre-lalliance-scelerate.html