La relation entre Donald Trump, l'ancien président des États-Unis (et actuel président), et Elon Musk, le PDG de Tesla, SpaceX et X (anciennement Twitter), est loin d'être simple. Marquée par des alliances stratégiques, des désaccords publics et un respect mutuel ponctuel, elle reflète deux personnalités puissantes mais imprévisibles, souvent en désaccord sur la forme mais parfois alignées sur le fond. Récemment, leur "bromance" a connu un revirement spectaculaire, illustrant la volatilité de leurs interactions.
Les débuts : une collaboration prudente et de courte durée
En 2016, après l'élection de Donald Trump à la présidence, Elon Musk a rejoint deux comités de conseil présidentiel, notamment le Forum stratégique et politique. Ce rapprochement semblait davantage motivé par un souci d'influence que par une adhésion idéologique, Musk cherchant à peser sur des sujets cruciaux comme le climat, l'innovation et les technologies.
Cependant, ce mariage de raison n'a pas duré. En 2017, Musk a quitté les comités suite à la décision de Trump de se retirer de l'Accord de Paris sur le climat. Cette rupture a marqué un premier tournant, soulignant les limites de leur entente.
La distance et les critiques mutuelles
Au fil du premier mandat de Trump, Musk a maintenu une certaine distance, tout en évitant de devenir un critique frontal du président. Il l'a critiqué ponctuellement, comme lorsqu'il a désapprouvé la réponse fédérale à la pandémie de COVID-19, tout en se rapprochant de certaines positions républicaines, notamment sur la liberté d'expression ou les impôts.
De son côté, Trump a souvent vanté le succès des entreprises américaines, incluant Tesla, mais sans faire de Musk un allié régulier. À certains moments, il a semblé ignorer l'importance de Musk dans l'industrie automobile ou spatiale, préférant mettre en avant d'autres figures plus alignées politiquement.
Le revirement post-présidence et l'apogée de leur "bromance"
Après la fin de son premier mandat, Trump a commencé à parler de Musk avec plus d'estime, le qualifiant de "génie" et saluant ses réussites avec SpaceX et Tesla.
C'est en juillet 2024, après une tentative d'assassinat subie par Donald Trump lors d'un rassemblement de campagne en Pennsylvanie, que la relation a connu un tournant majeur. Elon Musk a alors publiquement affiché son soutien total à Trump, déclarant sur X : "Je soutiens pleinement le président Trump et espère son rétablissement rapide."
Cette déclaration a marqué le début d'une "bromance" intense. Musk a rejoint Trump sur les sentiers de campagne, portant même une casquette "Make America Great Again" personnalisée. Il est devenu le principal donateur républicain en 2024, versant près de 300 millions de dollars pour soutenir Trump et d'autres candidats républicains, principalement via son super PAC "America PAC". Il a également organisé des interviews avec Trump sur X et a participé à des rassemblements, se décrivant comme "dark MAGA" et allant jusqu'à suggérer que ce serait la "dernière élection" si Trump ne gagnait pas.
Après la victoire de Trump à l'élection présidentielle de novembre 2024, Musk a été nommé conseiller présidentiel non rémunéré, sous la catégorie "employé spécial du gouvernement". Il a même dirigé le nouveau "Department of Government Efficiency" (DOGE), une agence créée pour réduire les dépenses fédérales. En février 2025, Musk a publiquement déclaré sur X : "J'aime @realDonaldTrump autant qu'un homme hétéro peut aimer un autre homme."
L'effondrement récent : une rupture publique et amère
Cependant, cette alliance a volé en éclats de manière spectaculaire début juin 2025. Le désaccord s'est cristallisé autour d'un projet de loi budgétaire majeur de l'administration Trump, que Musk a vivement critiqué, le qualifiant de "disgusting abomination" et affirmant qu'il allait provoquer une récession avec ses tarifs douaniers.
Trump, en réponse, a publiquement exprimé sa "déception" envers Musk, déclarant depuis le Bureau Ovale : "Elon et moi avions une excellente relation. Je ne sais pas si ce sera toujours le cas." Il a accusé Musk de tenter de saboter le projet de loi en raison de la suppression de crédits d'impôt pour les véhicules électriques, une mesure qui aurait impacté Tesla. Trump a également affirmé avoir "demandé à Musk de partir" de son administration, ajoutant : "Il est juste devenu FOU!"
Musk, de son côté, a riposté en ligne, soulignant l'importance de son soutien financier et médiatique à la victoire de Trump en 2024, et allant même jusqu'à suggérer, sans preuve, que des informations sur l'association de Trump avec Jeffrey Epstein étaient dissimulées par le gouvernement. Il a même soutenu l'idée d'une destitution de Trump et a suggéré que JD Vance pourrait le remplacer.
Trump a alors menacé de mettre fin aux subventions et contrats gouvernementaux pour les entreprises de Musk, notamment SpaceX et Starlink, déclarant : "Le moyen le plus simple d'économiser des milliards et des milliards de dollars dans notre budget est de mettre fin aux subventions et aux contrats gouvernementaux d'Elon."
La relation entre Donald Trump et Elon Musk est un jeu d'équilibre périlleux entre intérêts, divergences et stratégie. Ce ne sont pas des alliés naturels, mais ils ont partagé une influence immense sur leurs sphères respectives. La rupture récente, publique et acerbe, souligne la volatilité de leurs personnalités et de leurs relations. Alors que la politique américaine entre dans une nouvelle phase, l'interaction entre ces deux figures continuera de refléter une Amérique fracturée, où politique, technologie et pouvoir médiatique s'entrelacent de façon inédite, mais non sans heurts spectaculaires.
