La Ligue tunisienne des droits de l’Homme, connue sous le sigle LTDH, est la première organisation indépendante de défense des droits humains dans le monde arabe et en Afrique. Elle a été créée en mai 1976 par un groupe d’intellectuels, d’avocats, de médecins, de syndicalistes et de professeurs universitaires. Elle a été reconnue officiellement par les autorités tunisiennes en mai 1977.
Dès sa création, la LTDH s’est donnée pour mission de promouvoir les droits de l’homme en Tunisie, de dénoncer les abus et de défendre les victimes de violations. Dans un contexte politique dominé par le régime autoritaire de Habib Bourguiba, la Ligue a rapidement gagné en importance et en visibilité. Malgré les pressions du pouvoir, elle a pris position contre la torture, les arrestations arbitraires et les restrictions aux libertés individuelles et collectives.
Dans les années 1980, la LTDH est devenue un espace de débat et de critique du régime. Elle a été à plusieurs reprises menacée de dissolution, et ses membres ont été surveillés, intimidés ou poursuivis en justice. L’arrivée au pouvoir de Zine El Abidine Ben Ali en 1987 a suscité un espoir de démocratisation. Mais très vite, la Ligue a repris son rôle de contre-pouvoir en dénonçant la répression, la censure, les procès politiques et les atteintes à la liberté d’expression.
À partir des années 1990, la LTDH a subi une forte répression de la part du régime de Ben Ali. L’État a tenté de restreindre son activité en l’empêchant de tenir ses congrès, en gelant certains de ses comités régionaux et en orchestrant des campagnes hostiles dans les médias officiels. Malgré cela, la Ligue a poursuivi son travail sur le terrain, documentant les violations et apportant un soutien juridique et moral aux victimes.
Après la révolution de janvier 2011, la LTDH a retrouvé une liberté d’action totale. Elle a participé activement à la transition démocratique et au processus de rédaction de la nouvelle Constitution. En 2013, alors que la Tunisie traversait une grave crise politique, la LTDH a fait partie du "Quartette du dialogue national", aux côtés de l’UGTT, de l’UTICA et de l’Ordre national des avocats. Cette initiative a permis de sauver le processus démocratique en encourageant le dialogue entre les partis politiques. Pour cette contribution décisive à la paix civile, le Quartette, dont la LTDH faisait partie, a reçu le Prix Nobel de la Paix en 2015.
Aujourd’hui, la Ligue tunisienne des droits de l’Homme reste un acteur incontournable de la société civile tunisienne. Elle intervient dans plusieurs domaines, notamment la justice transitionnelle, les droits économiques et sociaux, la liberté d’expression, la lutte contre la torture et la surveillance des procès. Elle continue de dénoncer les dérives autoritaires, les arrestations arbitraires et les violences policières, tout en participant activement au renforcement de la démocratie et de l’État de droit en Tunisie.
