alexametrics
mardi 21 janvier 2025
Heure de Tunis : 05:52
A la Une
L'huile d'olive : un secteur qui part en vrac !
05/12/2024 | 12:56
7 min
L'huile d'olive : un secteur qui part en vrac !

 

Il y a quelques semaines, alors que la saison de récolte des olives battait son plein, un cri d'alarme a retenti à travers la Tunisie. L'huile d'olive, un pilier économique du pays depuis des siècles, se retrouvait en crise. Le secteur, qui a traversé des turbulences dans les dernières années, était à nouveau confronté à des défis colossaux.

 

Dans un contexte de production en plein essor et d'une exportation qui ne cesse de croître, l'avenir de ce trésor national semblait, pourtant, incertain. Les chiffres étaient là pour témoigner de la solidité de la Tunisie en tant que leader mondial de l'huile d'olive, mais les réalités du terrain dessinaient une autre histoire.

 

Une filière en crise malgré des records de production

Au fil des années, la Tunisie s'est imposée comme un acteur majeur dans la production et l'exportation d'huile d'olive. De 2014 à 2024, l’histoire de cette huile se raconte à travers des records et des défis. En 2024, la production d’huile d’olive en Tunisie a atteint un sommet historique, estimée à 340.000 tonnes pour la saison 2024-2025. Cette performance est le fruit d’une conjoncture climatique plus favorable, mais aussi d’un investissement considérable dans l’amélioration des techniques agricoles et la modernisation des oliveraies des acteurs privés du secteurs. Une croissance qui ne se limite pas à l’aspect quantitatif, mais s’accompagne aussi d’une montée en gamme du produit tunisien, dont la renommée dépasse les frontières. L’huile d’olive tunisienne est désormais exportée aux quatre coins du monde, devenant un véritable ambassadeur de la qualité et du savoir-faire tunisien.

En 2023-2024, les exportations ont atteint 190.122 tonnes d'huile d'olive, générant un revenu record de 5162 millions de dinars (soit environ 1,65 milliard USD).

 

Des marges réduites et une économie fragilisée

Cependant, dès le début de cette saison, la réalité s’est avérée bien plus complexe. Les premiers signes de perturbations sont apparus avec l’énoncé de plusieurs déclarations notamment celle de Dhaoui Midani, le président du Syndicat des agriculteurs de Tunisie, le 23 octobre 2024. Lors d’une intervention sur les ondes de Jawhara FM, il a plaidé pour que le prix de l’huile d’olive soit fixé à dix dinars le litre pour les Tunisiens alors que la saison n’a même commencé. Ce prix symbolique, si attrayant qu’il puisse paraître pour le consommateur local, n’est malheureusement pas viable pour les producteurs. Selon les experts, ce montant ne couvre même pas les coûts de production des agriculteurs, laissant un grand nombre d’entre eux dans une impasse financière.

Cette situation est d’autant plus préoccupante que le secteur oléicole tunisien, comme beaucoup d’autres secteurs agricoles, souffre d’une crise économique profonde. La Tunisie, déjà frappée par une inflation galopante et une dévaluation de sa monnaie, fait face à des pressions internes qui compliquent la gestion de sa production agricole. L’huile d’olive, qui représente environ 40 % des exportations agricoles du pays, est une source essentielle de devises, mais elle se trouve au cœur d’une bataille économique de plus en plus intense. Les agriculteurs tunisiens, qui ont vu leurs coûts de production augmenter, se retrouvent dans une situation où leurs marges sont minimes, voire inexistantes.

 

Déséquilibres dans la chaîne de production

Le secteur de l’huile d’olive en Tunisie repose sur trois acteurs principaux : les agriculteurs, les huileries et les exportateurs. Chacun de ces acteurs joue un rôle crucial dans la chaîne de production et de distribution de l’huile d’olive, mais cette relation est souvent marquée par des déséquilibres et des tensions. Le groupe CHO, acteur majeur dans le domaine de la production et de l’exportation de l’huile d’olive en Tunisie, a particulièrement fait parler de lui cette année, notamment en raison des ennuis judiciaires de son PDG Abdelaziz Makhloufi, arrêté pour des infractions douanières et fiscales selon des sources proche du dossier. D’autres sources évoquent que le groupe CHO achète entre 40 et 60 % de la production nationale d’olives, ce qui lui confère une position dominante, mais aussi une grande responsabilité dans la régulation des prix et la gestion des exportations.

 

En dépit des espoirs suscités par la récolte de 2024, les prix de l’huile d’olive ont commencé à fléchir, et la situation s’est rapidement détériorée. Au fur et à mesure que la récolte avançait, les prix ont chuté jusqu’à atteindre des niveaux préoccupants, descendant même au seuil des dix dinars évoqués par Dhaoui Midani. Cette chute a eu pour effet de désorganiser et déséquilibrer le marché, d’instaurer une incertitude totale et de mettre en péril la viabilité de nombreuses exploitations agricoles. Selon plusieurs experts, un agriculteur ne pourra réellement couvrir ses coûts et réaliser un bénéfice raisonnable que si le prix des olives atteint au moins quatorze dinars le litre, bien loin du prix actuel. Le constat est donc alarmant : les producteurs sont piégés entre un coût de production qui ne cesse d’augmenter et un prix de vente qui ne leur permet même pas de survivre, les huileries qui ne trouvent pas d’olive à presser et les exportateurs qui ne se sont pas manifestés pour l’instant en vue du climat politique tendu et les séries d’arrestations d’homme d’affaires ainsi que l’enjeu international du marché d’huile d’olive. Donc, entre enjeu interne, et externe, le secteur se trouve en total déséquilibre.

 

La suspension de la récolte : une décision catastrophique

Le 3 décembre 2024, un autre coup de tonnerre a secoué la filière oléicole : la récolte d’huile d’olive a été suspendue sur l’ensemble du territoire tunisien en raison de la chute des prix. Cette interruption en pleine saison est une catastrophe pour les producteurs, car elle entraîne des pertes considérables, non seulement en termes de volume, mais aussi de qualité de l’huile produite. Le ralentissement ou l’arrêt de la récolte en période critique compromet la qualité de l’huile, ce qui peut entraîner des conséquences sur les exportations futures. Si cette situation perdure, elle risque de provoquer une perte de confiance dans la filière et d’aggraver la crise dans laquelle elle se trouve.

 

Des mesures gouvernementales jugées insuffisantes

Face à cette situation désastreuse, le gouvernement tunisien a tenté de répondre en multipliant les mesures. Les ministères de l’Agriculture, du Commerce et du Développement des Exportations ont annoncé, le 2 décembre 2024, la mise en place d’une cellule de suivi pour coordonner les efforts des différents acteurs du secteur. Cette cellule regroupe des représentants des exportateurs, des huileries, des agriculteurs, des banques et de l’administration, dans le but de trouver des solutions immédiates à la crise. Cependant, ces mesures restent encore trop timides pour répondre aux besoins urgents du secteur. Le même jour, le gouvernement a également annoncé l’ouverture du marché aux exportateurs privés pour l’exportation d’huile d’olive en vrac, une décision qui entre en vigueur dès janvier 2025. Si cette mesure vise à faciliter l’exportation, elle soulève également des inquiétudes : elle pourrait permettre à des pays comme l’Espagne ou l’Italie de prendre le relais de la production tunisienne, en faisant importer de l’huile d’olive sans en conserver la valeur ajoutée. Cette huile d’olive qui sera exportée en vrac, sera vendue après comme étant une huile espagnole où bien italienne, selon l’acquéreur.

Les tensions se sont intensifiées davantage avec l’attitude de l’Office national de l’huile (ONH), qui, malgré les promesses du gouvernement de soutenir les agriculteurs en achetant leur production, ne s’est pas encore montré à la hauteur des attentes.

Le 5 décembre 2024, Anouar Harathi, dans une interview accordée à Hatem Ben Amara, a critiqué ouvertement l’ONH pour son manque de réactivité face aux recommandations présidentielles.

Alors que le 27 novembre 2024, le président de la République Kaïs Saïed annonçait un programme national pour soutenir la récolte des olives, où il engage l’ONH a intervenir et récupérer la production d’huile d’olive, ce dernier se trouve jusqu’à maintenant incapable de concrétiser la volonté présidentielle surtout qu’il ne dispose pas des moyens pour réaliser cette mission au niveau du stockage ou au niveau du volet financier créant ainsi un vide dans le dernier maillons de la chaine de production d’huile d’olive.

 

La crise de l’huile d’olive tunisienne illustre bien les défis auxquels le pays est confronté dans la gestion de ses ressources naturelles et surtout les conséquences des décision démagogiques qui ne tiennent pas en compte la valeur des richesses du pays, mais aussi dans sa capacité à relever les défis économiques internes. Alors que la Tunisie avait réussi à s’imposer sur le marché international ces dernières années, le retour à la vente en vrac et l’inefficacité des politiques actuelles risquent de faire perdre au pays une grande partie de sa position stratégique. L’enjeu est crucial, non seulement pour les producteurs, mais pour l’économie tunisienne tout entière. Le temps presse, et le secteur oléicole a besoin d’une vision à long terme.

 

Hassen Khemakhem 

05/12/2024 | 12:56
7 min
Suivez-nous
Commentaires
riri
la situation est devenu à pleurer. On voir un pays se suicider pas à pas méthodiquement, secteur par secteur décision après décision. On a jamais vu ça...
a posté le 06-12-2024 à 13:18
La Tunisie aujourd'hui c'est un peu comme un malade qui a besoin d'un médecins pour soigner des problèmes chroniques. Et le médecin qu'elle consulte a été diplômé au Moyen Age et lui propose saigné après saigné et blâme la faute à la météo s'il tue son patient.
Rationnel
Une vision a long terme et un système antifragile
a posté le 05-12-2024 à 15:19
Comme l'olivier tunisien surtout les variétés robustes et antifragile: le Chemlali et Chetoui, on a besoin d'un système antifragile pour l'industrie de l'huile d'olives. L'antifragilité est une propriété des systèmes dans laquelle leur capacité à prospérer augmente en raison de facteurs de stress, de chocs, de volatilité, de bruit, d'erreurs, de défauts, d'attaques ou de défaillances.
On voit qu'un système dominé par une seule société n'est pas antifragile, CHO group a 50 a 60% des exportations a haute valeur ajoutée d'après l'auteur, une attaque contre cette société et tout l'édifice s'écroule. CHO group a subit plusieurs attaques synchronisées au Canada, aux USA et en Tunisie, c'est une campagne internationale bien organisée par des rivaux puissants (l'AgroMafia). Nos journalistes n'ont pas enquêté sur le groupuscule qui a soulevé l'affaire en Tunisie et qui a pu attirer l'attention du Président sur ce sujet en ce moment crucial. L'AgroMafia a des relais dans les plus hauts niveaux, qui sont ils?
On a des milliers de sociétés dans ce secteur, pourquoi est ce que seule CHO group a pu réussir?
On doit aider d'autres sociétés dans ce secteur a réussir et a pénétrer le marché nord américain, le marche européenne est saturée et la réglementation est suffocante. Le marché nord américain est le plus grand marché avec un potentiel de croissance. Sa croissance peut être accélérée avec une stratégie qui peut s'appuyer sur le programme de Make America Healthy Again pour créer plus de demande pour les huiles d'olives et convertir les consommateurs d'huile de graines en consommateurs de l'huile d'olives.
La productivité du secteur est encore faible, une moyenne de 150 kg / hectare ne peut pas offrir un revenu suffisant pour l'agriculteur moyen. La culture d'oliveraies a très haute densité n'est pas appropriée pour la majorité de territoire, on a besoin de plus d'innovation dans le secteur et de plus de robotisation pour réduire les coûts.
Le secteur va survivre et prospérer, l'antifragilité aidera a dépasser cette période temporaire de folie, d'autodestruction et d'adversité.



bbaya
tu croix en division la force que tu vas vaincre les leaders
a posté le à 19:52
Dsl, ton français est parfait mais ta vision des rivalités internationaux est à côté la plaque, et il paraît que t'es déjà manipulé par ces mafias européens comme les décideurs de notre pays.

Le seul gagnant de ce faux problème c'est la mafia européenne! Elle a voulu cassé un arabe qui réussit, leurs objectifs est à 100% atteint!
Ton raisonnement comme demander au gvt allemand d'affaiblir le groupe Volkswagen pour laisser la place à Tesla! C'est con!
DHEJ
le groupuscule qui a soulevé l'affaire en Tunisie 
a posté le à 16:01
Un diplômé en philosophie supposé être du PIOCT et sui était autrefois un indicateur de la police...


Bouba
Fausse alerte
a posté le 05-12-2024 à 15:19
Mr Khemakhem ,dès le début de votre article ,on devine une analyse partisane et défendant plutôt les exportateurs aux dépends des autres intervenants du secteur , ce problème de production record on l'a déjà traversé en 2006 2007 , les prix ont augmentés à des records pour ensuite tomber très bas et une conséquence désastreuse pour les exportateurs et surtout l'ONH qui depuis cette date tout a été fait pour le détruire , cette année et depuis Août plusieurs articles en Europe ont prédits la chute des prix allant jusqu'à 50% , donc le problème n'est pas tuniso-tunisien bien au delà de nos frontières pour ce qui est des coûts de production les 1 et responsables sont bien les exportateurs et en second lieu les producteurs (agriculteurs) sachant que Si les OTD n'ont pas été aussi laminés au profit des prédateurs nous aurions eu à chaque année des productions stables nonobstant des conditions climatiques qui ont été toujours bien gérées par les agriculteurs eux mêmes ,maintenant vient la position du consommateur
tunisien qui subit les aléas des prix sans pouvoir intervenir,pour qui l'huile d'olive est essentielle (sauf pour un ancien ministre) poursui doit il payer plus que 10 dinars le litre ,là intervient le rôle de l'Etat qui devrait se reprendre avec une gestion rigoureuse des OTD et renforcer le rôle de l'ONH et écouler l'essentiel de la production sur ke marché local et d'arrêter d'importer l'huile subventionnée
DHEJ
Donc défaillance de l'état et ses responsables...
a posté le à 20:31
" l'Etat qui devrait se reprendre avec une gestion rigoureuse des OTD et renforcer le rôle de l'ONH "


Un '?tat dirigé par ROBOCOP depuis 2019...
Rationnel
Les prix n'ont pas chute en Europe ou le reste du monde
a posté le à 16:10
Consulter les sites fiables pour les prix de l'huile d'olives tel que: International Olive Oil Council . Le prix international de l'huile d'olives est 734 euros/100 kg ( ~ 24 TND/litre) d'après. Ces prix sont confirmés par un autre site: oleista point com.
DHEJ
Kaies SAIED a malmené la BARAKA de dieu...
a posté le 05-12-2024 à 13:35
Qu'un déluge de châtiment s'abat sur Kaies SAIED.

Oh ALLAH maitre de l'autorité absolue arrache l'autorité à Kaies SAIED et inflige lui une humiliation Amen ALLAH l'omnipotent.


Allah Free Abdelaziz MAKHLOUFI
Abir
Un pays qui part en miette
a posté le 05-12-2024 à 13:27
Toute les ressources vitales agricoles, en dégringolade, un pays qui a attrapé un cancer dans tout les domaines et ce cancer le détruise silencieusement , faute de qui? Faute de l'incompétence d'un bon"médecin"voir, des bons "médecins" Ya Rabi farej 3la bladna !Hsbouna Allah wa na3ma Elwakil fi qui nous a conduit à cette situation
ANTIRELIGION
ALLAH, RABI y'en à marre
a posté le à 17:54
Bande de clowns larmoyeurs vous avez trouvé votre punching-ball et vous prenez un malin plaisir de lui taper dessus, mais ça ne vous emmène à rien parce que la grande majorité du peuple sait ce qui se passe dans le bled et surtout ceux qui ne font que saboter et empêcher de tourner en rond puis arrêter cette hypocrisie latente ALLAH ,ALLAH ,RABI ,RABI y'en a marre ...