
L’Association des magistrats tunisiens (AMT) a publié dans la nuit de dimanche à lundi 26 décembre 2022 la motion de son assemblée générale ordinaire, dénonçant la dégradation de la situation politique, de celle du pouvoir judiciaire et des libertés et droits sous le régime Kaïs Saïed.
Rappelant l’accumulation des pouvoirs, y compris judiciaire, par le président de la République depuis le 25 juillet 2021, l’AMT a relevé les nombreux ratages du pouvoir exécutif dus à son approche autoritaire, notamment dans le traitement du dossier judiciaire, ce qui a, selon l’AMT, conduit à une multiplication des violations des droits et libertés, en particulier la liberté d'expression et de la presse.
L’organisation a évoqué, dans ce sens, le décret n° 54 et a noté le faible taux de participation aux législatives anticipées organisées le 17 décembre le considérant un indicateur de la réticence des Tunisiens aux choix du pouvoir en place.
Soulignant que la lutte contre la corruption ne pourrait se faire en dehors du cadre d’un État de droit et d’une société démocratique, et avec les garanties nécessaires, l’AMT a déploré le non-respect de la décision du Tribunal administratif au sujet des juges révoqués.
En août, le Tribunal administratif a, rappelons-le, tranché en faveur de certains des juges révoqués en suspendant la décision de leur révocation leur autorisant, ainsi, de réintégrer leurs postes. Au total, 54 des 57 magistrats révoqués sur décision du président de la République en juin, avaient déposé des recours pour abus de pouvoir.
L’Association des magistrats a ajouté, à ce sujet, que la ministre de la Justice, Leïla Jaffel, avait profité de la vacance des postes des juges révoqués pour faire pression sur les magistrats et mettre la main sur le ministère Public et la gestion des tribunaux portant ainsi atteinte aux droits et libertés et au principe d’un procès équitable.
L’organisation est, également, revenue sur la non-publication du mouvement dans le corps des magistrats à temps précisant que cela a perturbé le fonctionnement du pouvoir judiciaire. Elle a appelé à publier le mouvement dans le corps des magistrats dans les plus brefs délais en y intégrant les juges révoqués sur décision de Kaïs Saïed.
Le mouvement dans le corps des magistrats – publié d’habitude en août – n’a toujours pas eu lieu. Le président de la République serait derrière ce blocage d’après plusieurs personnalités publiques.
L’Association a appelé les magistrats à respecter leur indépendance, à éviter de succomber à la pression, à serrer davantage les rangs et se mobiliser face à ce qu’elle a qualifié d’ « attaque féroce contre le pouvoir judiciaire ». Elle a noté, dans ce sens, que son bureau exécutif prendrait toutes les mesures nécessaires en fonction de l’évolution de la situation générale du pays.
N.J.

