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SUR LE FIL
Il s’appelle Hattab Slama, et il est comme nous tous
Achouri Marouen
05/03/2025 | 1
min
Il s’appelle Hattab Slama, et il est comme nous tous
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L’ouverture du procès de la fameuse affaire de complot contre la sûreté de l’État n’aura échappé à personne hier, 4 mars. Journalistes, avocats, activistes et familles des détenus étaient présents dans la salle d’audience du palais de justice de Tunis pour assister au début du procès d’une affaire qui a fait couler beaucoup d’encre et qui a été instrumentalisée, des mois durant, par le pouvoir en place pour donner du crédit à la théorie conspirationniste du complot permanent. Députés, soutiens du pouvoir et propagandistes s’en sont donné à cœur joie, l’un d’eux osant même déclarer qu’il avait vu le complot dans les regards des accusés.

 

Hattab Slama, l’inconnu du complot

Bien moins drôle, en revanche, est le sort subi par l’un des accusés dans cette affaire. Hattab Slama ne bénéficie pas de la même attention médiatique que les autres accusés, et son nom est inconnu du grand public. Les porte-voix du pouvoir n’ont jamais évoqué son nom et préfèrent se concentrer sur les figures connues de la scène politique nationale. Pourtant, son histoire illustre à elle seule tant d’errements.

Hattab Slama a eu la grande malchance de garer sa voiture près du domicile de Khayam Turki, autre accusé dans l’affaire de complot. Il y avait également des voitures de diplomates au même endroit. Et c’est tout. N’allez pas chercher plus loin une implication plus directe dans un complot censé renverser le pouvoir, le procès-verbal de fin d’instruction n’en fait aucune mention.

 

Un coup du sort absurde

Hattab Slama est un courtier en voitures qui se retrouve en prison depuis près de deux ans parce qu’il a garé une voiture au mauvais endroit. C’est tout ce qui le « lie » à cette affaire. Cet homme n’a rien demandé à personne, il n’a pas fait de politique, il est éloigné de ces cercles, il n’a jamais été ministre ni même responsable au sein de l’État, à quelque niveau que ce soit. Pourtant, le juge a estimé pertinent de l’emprisonner, et l’autre juge qui lui a succédé n’a pas estimé nécessaire de le libérer. Jusqu’à hier, les avocats Samir Dilou et Sami Ben Ghazi ont évoqué la situation de Hattab Slama et déposé une demande de libération, refusée par le juge. Comme l’a dit Hichem Ajbouni dans une publication Facebook, il aurait suffi que le « changuel » de Sidi Bou Saïd emporte la voiture de Hattab Slama pour qu’il soit libre aujourd’hui et probablement jamais inquiété dans cette affaire.

Quelle ironie de tenter de se mettre un instant à la place de Hattab Slama. Comme une grande majorité du peuple, voilà un homme qui ne s’intéresse pas à la politique et qui essaye de gagner son pain en faisant l’intermédiaire dans la vente de voitures. Il s’est retrouvé injustement arrêté et emprisonné à la suite des activités politiques de certains activistes, à l’instar de Khayam Turki. Et cette décision a été prise par les autorités du régime du 25-Juillet. Hattab Slama s’est retrouvé au beau milieu du clair-obscur d’Antonio Gramsci, et les monstres du destin et de l’arbitraire l’ont écrasé.

 

Pris dans l’engrenage

Finalement, dans une lecture au premier degré, Hattab Slama est la victime de deux régimes aux prises, de deux visions politiques différentes. Le régime précédent le coup de force de Kaïs Saïed est accusé d’organiser des réunions, ce qui est tout à fait leur droit, soit dit en passant. C’est dans ce cadre que Hattab Slama a été mis en cause. Et c’est le régime d’après le coup de force qui a procédé à l’arrestation et à l’emprisonnement sans aucun discernement d’un homme innocent. À l’instar du peuple tunisien, il aura souffert des deux régimes et de l’arbitraire des décisions de justice qui voient en lui un tel danger qu’il ne peut être jugé en étant libre. Sur une photo publiée par l’avocat Samir Dilou, on voit Hattab Slama à l’écran au tribunal, assis seul, désemparé et parfois même sans surveillance particulière. Il est laissé à son propre sort entre les tribulations de la politique et l’impitoyable machine judiciaire, un peu comme la majorité du peuple tunisien. Personne ne se soucie de sa famille, de son état propre, des séquelles que tout cela laissera, un peu comme la majorité du peuple tunisien en somme.

 

Un système qui broie les innocents

Nous avons eu des preuves, tout récemment encore, de cet arbitraire judiciaire. L’ancien ministre de l’Industrie, Lamine Chakhari, a bénéficié d’un non-lieu après avoir passé plus d’un an en prison dans une affaire liée à la société El Fouledh. Un an durant lequel il a été privé de sa liberté, son nom traîné dans la boue et sa famille privée de sa présence. Au final, la justice lui a dit : au revoir et merci. La même chose s’est passée avec deux anciens ministres de l’Environnement, Chokri Belhassen et Mustapha Aroui. Après des mois de prison et de polémique autour de la célèbre affaire des déchets italiens, les deux anciens ministres ont été relaxés. Ils font tous les frais de la fièvre vengeresse mise en place et entretenue par le pouvoir en place. Il y a une foule de gens qui s’égayent de voir des personnes jetées en prison et poursuivies, et le régime s’oblige à contenter cette foule, étant donné qu’il n’avance sur pratiquement aucun autre plan. Dans cette logique destructrice, des innocents sont broyés par le système, comme Hattab Slama et d’autres encore. Nous en sommes réduits à souhaiter à Hattab Slama le même sort que Lamine Chakhari : il pourra au moins rentrer chez lui et revoir sa famille.

Achouri Marouen
05/03/2025 | 1
min
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Commentaires
Chokri
Free Hattab
a posté le 10-03-2025 à 11:39
Je connais Hattab et je connais sa famille, ils n'ont jamais eu de penchant politique. Une famille modeste, hattab a créé son petit business de courtier ... La justice devra le libérer ou de le laisser en liberté conditionnelle car il n'a aucun lien dans cette affaire surtout que c'est lui assure les besoins familiaux.
#Free_Hattab
Nephentes
Pourquoi le juge d'instruction initial est en fuite ?
a posté le 06-03-2025 à 20:21
L'histoire de ce citoyen semble beaucoup trop absurde pour être réelle; et pourtant....

Il n'existe plus de Justice en Tunisie ; jamais depuis l'indépendance elle n'est tombée aussi bas

Le seul cas de la fuite du juge d'instruction désigné initialement resume la forfaiture

Il n'y en a qu'un seul qui doit rigoler c'est Bernard Henri Levy protagonistes improbable de ce grand guignol

Des accusations délirantes des enquêtes et des preuves fabriquées de toute pièces et surtout des centaines de citoyens engagés dans l'intérêt général en arrestation en fuite en précarité des femmes maris enfants traumatisés des haines inexpiables qui se cristallisent par effet boule de neige

Et ces IMMENSES dégâts pour quoi au juste ?

Sommes nous un pays ou bien une mauvaise blague ?
Bacchus
Puzzle
a posté le 06-03-2025 à 17:38
« Vous pouvez garder le silence, à partir de cet instant tous ce que vous direz pourrait être retenus contre vous. ». Nous avons l'impression que depuis hier, chacune de son coté, les familles des mis en examen dans l'affaire du « complot » (j'ai mis les guillemets, car tout prévenu est présumé innocent jusqu'à sa condamnation définitive par les tribunaux) est entrain de nous fournir un élément du puzzle. Donc je me permets en tant que citoyen (et en France et aux USA, un citoyen peut être un juré) de me poser des questions et d'imaginer des scénarios probables. Pourquoi le premier juge qui fut remplacé est aujourd'hui en fuite ? Le pouvoir a-t-il cherché à lui imposé des choses ? C'est une éventualité, mais il y a bien une autre éventualité qui consiste à aider les prévenus, en inculpant en parallèle des innocents et en remplissant le dossier de flagrantes inepties exemple : les faits reprochés à M.K.Nabli ou Ridha Charfeddine. Hattab Slama est il un innocent comme tout le reste des inculpés ? Est-il un dommage collatéral ? Ou est-il un membre de la logistique ? Car un courtier en voiture d'occasions pourrait fournir des cartes grise de voitures qui passent facilement à travers les mailles des barrages sécuritaires (quand vous vendez votre voiture, êtes vous sûr que le « gachar a changé la carte grise en son nom ? Khayam Turki, innocent jusqu'à preuve de contraire, mais il y avait bien des réunions avec des diplomates étrangers chez lui, c'est spécifié dans cette article. Kamel Letaef, il a bien rencontré l'ambassadeur d'Italie Fabrizo Sagio une semaine avant son arrestation, il a rencontré aussi les 2 anciens ambassadeurs ; il se vantait d'avoir participé au coup d'Etat du 7/11/1987 et l'ancien chef des services secrets italiens à reconnu publiquement qu'il est l'instigateur de ce coup d'Etat. Jaouhar Ben Mbarek a rencontré Heather Kalmbach responsable des relations politiques à l'ambassade des USA et est en contact ainsi que Issam Chebbi avec John Thorne. Ce dernier John Thorne est venu en Tunisie en 2006, date à partir de laquelle Hammadi Jebali débuta ses va et vient à l'ambassade des USA pour préparer l'instauration de l'islam politique en Tunisie. En 2025 avec Google et Wikipédia, rien ne se cache et qui cherche trouve !
Dynosys
Chacun peut rencontrer qui il veut
a posté le à 19:50
Un ramassis de conneries. Ils auraient dû vous recruter à ettasia3 au lieu du *** riad jrrath. Wikipedia, sérieux? Une douche s'impose, allez-y. Attention au retour du javlo, on ne vous rattera pas.
Larry
Comme ce gamin de 16 ans...
a posté le 06-03-2025 à 14:40
Embarqué par la police alors qu'il attendait un louage....
Mais au mauvais moment et au mauvais endroit.... car entouré de petits dealers lors des arrestations....
(et ils l'ont gardé 48 h pour rien)
Tunisien libre
Kafkaïen
a posté le 06-03-2025 à 14:25
'?a devient vraiment Kafkaïen
Décidément, la réalité tunisienne va dépasser tout ce qu'a imaginé et raconté Franz Kafka dans ses chef-d'?uvres "Le procès" et "la métamorphose".
Ghandi
La métamorphose
a posté le à 22:01
L'histoire d'un citoyen honnête qui s'est réveillé le matin dans le corps d'une vermine. Un roman qui est tellement véridique et n'est point surréaliste.
riri
indignité totale
a posté le 06-03-2025 à 11:55
Qu'avons nous fait de notre systeme judiciare..
une honte absolue. Indigne pour notre peuple.

elfribo
qu'avez vous fait?
a posté le à 18:07
Tu te demandes qu'avez vous fait?
La reponse est simple , vous avez ramassè un serpent qui mourait de froid, vous l'avez rechauffè sur votre sein, une fois rechuffè il vous mordu, vous etes mort.
Il fallait penser 3 fois avant d'elire le squatteur du Palais de Carthage.
A1
L'affaire Dreyfus
a posté le 06-03-2025 à 11:38
Bravo BN, il faut transformer cette absurdité kafkaienne en affaire Dreyfus nationale. Si les forces vives du pays laissent passer de telles absurdités... Adieu l'Etat de droit, adieu le droit et adieu l'Etat chez nous.
Nephentes
Kafka en Tunisie
a posté le 06-03-2025 à 01:40
L'appareil dit judiciaire est devenu tellement indigent
Qu'il n'a même plus conscience de son indigence
Vladimir Guez
Brazil
a posté le à 08:29
La réalité à dépassé la fiction du film de Terry Gilliam.

Un chef d'?uvre qui vous rappelera en tout point la Tunisied'aujourd'hui.
Brazil (1985)

L'intrigue prend forme sur un effet papillon : un insecte tombe dans l'imprimante de l'ordinateur central du Service des recoupements au moment où doit être imprimé le nom d'Archibald Tuttle (le plombier dissident joué par De Niro), le T devenant un B. C'est un Archibald Buttle parfaitement innocent qui fait l'objet d'une brutale arrestation à son domicile. Sam Lowry doit alors traiter cette erreur administrative.
Chelbi
La theorie de bouss 5ouk ne marche pas tout le temps
a posté le 05-03-2025 à 22:34
Pour détruire une société, il suffit juste de frapper sa justice. Chose a laquelle la merdocrature a bien réussi.

Je ne peux meme pas m'imaginer une minute a la place de Hattab ni de ses proches. C'est cruel et insupportable!

Un jour, il faut pas oublier ces victimes (dont beaucoup on ne connaît pas leurs noms) et insister au fait que chaque personne qui leur a infligé une injustice doit être poursuivie. Assez de 'bous 5ouk'?'. On en a cru naïvement en 2011, mais il paraît que c'était un demon qui a pris une pause.
Lotfi
D'accord à 100%
a posté le à 10:22
Et ce n'est pas par vengeance, mais toutes les personnes qui sont entrain de jouer avec la justice et les libertés individuelles doivent être jugées publiquement pour dissuader tous ceux qui penseraient prendre les institutions de l'Etat comme une propriété privée. Ce qui se passe en Tunisie ces jours ci ne doit plus jamais se reproduire.
Adel
Indifférence
a posté le 05-03-2025 à 20:05
Tant que des tunisiens restent indifférents à l'injustice, le pays ne pourra qu'aller de mal en pire. J'espère que ceux qui se réjouissent d'autant d'injustice reviendront à la raison. Demain, ce sera peut-être le tour de leurs propres enfants de subir l'injustice.