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Chroniques
Face à des problèmes réels, la banalisation n’est pas la tactique appropriée
25/11/2018 | 17:59
3 min

 

Par Sofiene Ben Hamida

 

En politique, parfois, pas toujours, la banalisation de certains sujets, dossiers ou affaires peut s’avérer une tactique gagnante, efficace et intelligente pour ne pas prêter le flanc aux polémiques ou surenchères, ou encore pour ne pas perdre du temps et se concentrer sur l’essentiel. Seulement dans d’autres cas, quand les sujets sont importants, les dossiers épineux, les questions dérangeantes et les plaies béantes, la banalisation peut aussi trahir, une insouciance, une incompétence à gérer les affaires ou carrément un jusqu’auboutisme dangereux.

 

En préambule de sa présentation du projet de budget de l’Etat devant le parlement, le chef du gouvernement a balayé d’une main la plainte déposée contre lui et quatre autres personnalités pour tentative de coup d’Etat, la qualifiant de mascarade. Un gouvernement légitime dans un régime parlementaire démocratique n’a pas besoin de fomenter un putsch pour continuer à gouverner. Il est déjà au pouvoir et détient les pleins pouvoirs dit-il. Vue sous cet angle, cette logique est implacable. D’ailleurs, les alliés du gouvernement ont tous abondé dans le sens de la banalisation de cette plainte, s’appuyant sur ces mêmes arguments.

 

Il est vrai que le plaignant manque affreusement de crédibilité, que sa présence sur la scène politique depuis la révolution est entachée de beaucoup de zones d’ombres et que son positionnement, immanquablement éphémère et volatile, donne le tournis. Mais, il est vrai aussi que c’est un individu qui a réussi à nager dans les méandres opaques de la finance internationale et qu’il s’est imposé, quoiqu’on dise, comme un acteur important de la scène politique. C’est dire combien il serait irréaliste et improductif de le prendre à la légère ou de banaliser sa démarche.

 

Envisageons donc, dans une démarche purement pédagogique, en attendant que la justice donne sa décision, que le plaignant avait réellement assisté à cette discussion portant sur un éventuel coup d’Etat. Il y aurait deux cas de figure. Le premier c’est qu’à la fin d’une soirée détendue entre amis, par un excès de langage, des propos de ce genre ont été dits sans les penser sérieusement, dans un simple esprit de raillerie. Nonobstant son côté ludique, ce comportement est suffisamment grave car des responsables de l’Etat se doivent dans toutes les circonstances de ne pas porter atteinte à l’Etat et à ses institutions. Le second cas de figure est encore plus grave parce qu’il suppose que le discours traduit une intention réelle. C’est pourquoi, au lieu de banaliser cette affaire, il aurait fallu que tous s’accordent, avec le même engagement, sur la gravité de ces allégations et demandent en chœur que toute la vérité soit faite dans les plus brefs délais. Il y va de la stabilité de notre système politique et de la crédibilité du plaignant et des autres.

 

La banalisation, c’est aussi ce qui a marqué l’attitude du gouvernement et de ses alliés envers la grève de la fonction publique. Pourtant, cette grève qui a pris l’allure d’un plébiscite est la preuve cinglante de l’échec de la politique sociale. C’est la première du genre depuis environ soixante ans. L’unanimité de la décision de reconduction de cette grève et son élargissement au secteur public est une autre preuve de la gravité de la situation et de l’échec de la démarche gouvernementale. Mais, au lieu de nous pencher sur la gravité de la situation, nous avons essayé de focaliser l’attention sur une carte postale qui maquille mal la triste réalité. Dire que la grève est un droit, qu’elle a été observée dans le calme en présence de belles agents de l’ordre est trop peu pour expliquer la situation et ne lui apporte surtout aucune réponse.

 

La banalisation, qui frise le déni, c’est encore ce qui caractérise l’attitude du gouvernement face à la fronde qui s’organise du côté des entreprises et leur refus légitime de se soumettre à des augmentations ridicules de la facture de l’électricité. Nulle part ailleurs, nous n’avons vu des augmentations à deux chiffres dans le secteur public. Face à des problèmes urgents et réels, la banalisation n’est pas la tactique appropriée.

25/11/2018 | 17:59
3 min
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Commentaires (4)

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mansour
| 26-11-2018 10:19
Youssef Chahed+le bloc coalition nationale qui accepte de laisser l'islam politique des freres musulmans salafistes d'Ennahdha s'emparer du pays pour faire avancer leurs intérêts sur l'intérêt du pays et quelles qu'en soient les conséquences sur le tissu social et la classe moyenne détruite

Mohamed Obey
| 26-11-2018 09:04
L'article de M. Sofiène B Hamida ajoute, en très peu de mots, une plus-value à mon café matinal de par sa subtilité d'analyse équivalant à une empreinte génétique qui est sienne exclusivement et le différenciant de tous les autres.

Tunisien Libre
| 25-11-2018 20:30
Cette médiocre image, qui malheureusement est réelle, est principalement due au niveau intellectuel quasi nul des partis politiques au pouvoir; et aussi des médias qui contribuent à ce vide absolu de diffusion des principes nobles de l'Humanité...
En effet le role d'un journaliste est de maîtriser les principes de la Langue et le vrai sens des termes, car de nos jour les termes ont perdu leurs vrai sens...
par ce que aucun journaliste n'a tenu bon à mettre chaque politicien à son niveau durant n'importe quel discours ou sujet...
Il faut onviter les politiciens pour tester leur niveau culturel, intellectuel,.. pour qu'ils sachent leur vrai niveau.
Voilà une parmis mille et une façons d' élever le niveau de civisme et culturel d'abord de la classe politique, des journalistes et parconséquent des citoyens....
Merci Professeur Sifien.

TATA
| 25-11-2018 20:09
Youssef Chehed ne banalise pas mais il ignore les provocations dont le seul but est de le faire sortir de son calme habituel.

il ne faut pas que YC tombe dans le même piège que Zinedine Zidane avec Marco Materazzi!