alexametrics
vendredi 19 avril 2024
Heure de Tunis : 17:19
Chroniques
En 2018, le système bancaire a évité le pire
Par Houcine Ben Achour
30/01/2020 | 22:57
5 min
En 2018, le système bancaire a évité le pire

 

La publication du 8e Rapport annuel sur la supervision bancaire traitant de l’année 2018, il y a deux semaines, est passée quasiment inaperçue. Pourtant, à sa lecture, on comprend aisément les raisons qui ont poussé la Banque centrale de Tunisie (BCT) à décider d’une batterie de mesures, dès la fin de 2018 et au début de l’année 2019. A l’époque, pratiquement tous les responsables politiques et les opérateurs économiques s’en sont offusqués, pour ne pas dire scandalisés. Quand bien même en saisissaient-ils la logique, ils refusaient d’en admettre l’impérieuse nécessité. Ils mettaient en avant les freins à la croissance et à l’investissement dont résulteraient de telles mesures, occultant, ou plutôt n’ayant pas vu, que la détérioration de la situation économique du pays et la dégradation des finances publiques ne pouvaient  être jugulées plus longtemps par une politique monétaire expansionniste de l’institut d’émission sans mettre en péril les équilibres financiers des banques et la stabilité du système bancaire dans son ensemble.

 

Même si on peut légitimement s’interroger, par esprit pernicieux sans doute, sur la publication aussi tardive de ce rapport, il n’en demeure pas moins précieux dans la mesure où il révèle que le pays a évité la catastrophe de justesse, celle d’un effondrement de son système financier et partant, la faillite économique et financière du pays.

Le rapport fait le bilan de la situation des banques et des établissements financiers (BEF) durant l’année 2018. Et comme tout rapport, il est souhaitable, comme le suggère les bons professeurs d’économie, de le lire « à partir de la fin et de remonter jusqu’au début, car, le plus « croustillant » se trouve souvent, sinon toujours à la fin ». Dans notre cas de figure, c’est le dernier chapitre du rapport traitant de « l’activité et de la situation financière des banques et des établissements financiers » qui dévoile l’ampleur du risque pris par les banques et les établissements financiers au cours de la dernière période.

 

C’est à la faveur de l’évolution haussière du TMM (Taux moyen du marché monétaire) que le secteur bancaire a dégagé des bénéfices nets d’impôts exceptionnels en 2017 (plus de 1,1 milliard de dinars), après une année faste 2017, même s’il ne faut pas oublier que deux banques de la place ont enregistré un résultat déficitaire en 2018. Il ne faut pas être devin pour savoir lesquelles. Cependant, cet arbre du profit ne peut nullement cacher la forêt de fragilité du secteur bancaire du pays.

A la fin de 2018, une  banque résidente sur trois ne respectait pas la norme de division des risques pour les personnes ayant des liens avec la banque. Comprendre, la banque s’est engagé au-delà de ce qui lui est permis en faveur d’un ou plusieurs de ses actionnaires. Sur les 23 banques résidentes de la place 7 d’entre elles ne respectaient pas le ratio de liquidité et 9 d’entre elles ne respectaient pas le ratio crédits/dépôts (Loan to deposit ratio). Certes, on peut toujours observer que le ratio de solvabilité a été maintenu à un niveau satisfaisant de 11,8% pour une norme exigée de 10%. Toutefois, cela ne peut occulter une dégradation « cachée ».

 

Ainsi, « 15 banques accaparant 50,7% des actifs du secteur affichent à fin 2018 un ratio de solvabilité supérieur à 11% contre 17 banques détenant 62,7% des actifs du secteur en 2017 », indique le rapport annuel de la supervision bancaire. A la fin de cette même année, deux banques détenant près de 1,5% du total des actifs du secteur affichaient un ratio inférieur à 10% et une troisième affichait un ratio Tier 1 inférieur à 7%, autant dire qu’elle risquait à tout moment l’effondrement. Il convient de préciser ici que la BFT (Banque Franco-Tunisienne) ne fait pas partie de ce périmètre d’analyse de la situation financière des banques.

Et ce n’est pas tout. L’encours des créances classées a enregistré en 2018 « un volume de risque additionnel en augmentation de 455 MD par rapport à son niveau de l’année 2017 pour s’élever à près de 1 996 MD ». Plus encore, 84% de l’encours des créances classées, soit près de 1,5 milliards de dinars, sont pratiquement irrécouvrables, faisant partie de la classe 4 qui nécessite donc une provision à 100%. 

 

Le rapport tente d’atténuer l’effet d’un tel constat en mettant l’accent sur la poursuite de l’amélioration de la part des créances classées dans la classe 4 par rapport au total des engagements de 14% en 2015 à 11,2% en 2018. Il n’en demeure pas moins que « cette amélioration de la part des créances classées ne doit pas dissimuler, d’une part l’acuité de la problématique des créances classées pour certaines banques, et d’autre part l’étendue des risques latents auxquels sont exposées les banques », indique le document qui souligne qu’à la fin de 2018, « 10 banques affichent une part des créances classées supérieure à 15% alors qu’elles détiennent 39,2 % du total des actifs du secteur ». En tout cas, la BCT n’a pas hésité à sanctionner. Le total des amendes infligées dépasse 5,3 MD.

 

La réforme du cadre prudentiel régissant l’activité était d’une impérieuse nécessité. La BCT s’y est engagée résolument à partir de la fin 2018 et durant l’année 2019. On verra bien ce que cela donnera. Ce faisant, la volonté de réforme du système est là, à la faveur de l’indépendance acquise par la BCT. Pourtant, des voix s’élèvent depuis quelques temps pour la lui contester. Quelle folie !

 

Par Houcine Ben Achour
30/01/2020 | 22:57
5 min
Suivez-nous
Commentaires
Rationnel
Quantitative easing
a posté le 01-02-2020 à 15:10
La banque centrale américaine (la Fed) a injecté plus de 4300 milliards de dollars à travers le quantitative easing (terme utilisé en Français aussi), la Banque Centrale Européenne, la Banque centrale japonaise, la banque populaire centrale de chine a chacune injecte plus de 5000 milliards de dollars dans des opérations de QE. Le QE se fait quand la banque centrale achète des bon de trésors à l'état. Les banques centrales remettent les intérêts sur les bon de trésors à l'état donc les gouvernement empruntent à 0%. La dette tunisienne n'est que 25 milliards de dollars, une goutte dans cet océan de QE.
La banque centrale de Tunisie peut et doit faire des opérations de quantitative easing, sa politique actuelle est stupide et suicidaire. On emprunte en dollars pour payer des salaires en dinars ce qui le sommet de la stupidité. Nos banques sont immobilisés par 1 996 MD de créances classées, la BCT doit acheter ces dettes et les frigorifier comme a fait la Fed avec plus de 1000 fois de dettes des organismes financiers qui étaient à l'épicentre de la crise financière de 2007-2008. Une société d'assurance: AIG a elle seule a eu un bail-out de plus de 182 mille milliards de dollars soit 8 fois la dette de la Tunisie.
Il n y a rien qui empêche la BCT de faire des opérations de QE.
Si nos banquiers ne maîtrisent pas ce sujet, ils peuvent solliciter des économistes comme Ben Bernanke pour leur expliquer ces concepts.
houssem
En 2018, le système bancaire a évité le pire
a posté le 31-01-2020 à 17:03
le marche financier tunisien est compose de 23 banques 11 institutions de leasing et 3 banque off shore sans oublier les sicar les fonds de gestion ainsi que le entreprises de factoring.
en se penchant sur les indicateurs financiers de l'ensemble de ces institution le total bilan consolide net est celui d'une seule banque au Maroc,Egypte ou Afrique du sud.
actuellement partout dans le monde des opérations de fusion acquisition entre les banques est en train de se faire afin de donner plus de sûreté et consolider leur situation finaciere ainsi que leurs adequation au normes prudentielle baloise à ceci s'ajoiute la mise en place d'un mode de gouvernace plus fiable
actuellement l'état possédé directement ou indirectement une quinzaine d'institution toutes catégories confondus
n'est il pas judicieux de les concentre dans un seule entité géantes et saine pouvant rivaliser avec les meilleurs banque internationales et par la suite lui donnant le moyens d'accompagnés mieux les opérateurs economiques nationaux mémés hors frontières
A méditer

Zba
Les banques peuvent ruiner le pays
a posté le 31-01-2020 à 07:29
Aussi les banques publiques que privées qui ont le pouvoir de création monétaire finiront par ruiner le pays par les mauvais credits.
Il y a trop de créances calcinées à cause des mauvais crédits octroyés.
Pourquoi les banques ont fait et font toujours de tres mauvais crédits?
Certainement pas pour soutenir l'économie mais pour faire des benefices fictifs et ruiner l'économie