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Une industrie plombée par des réticences héritées dâEUR(TM)un autre âge
25/09/2008 | 1
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Une industrie plombée par des réticences héritées dâEUR(TM)un autre âge
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Avec une contribution à hauteur de 0,5 % à l’investissent privé, le secteur du capital risque tarde encore à jouer pleinement son rôle dans le financement de l’économie en Tunisie. Le principal obstacle au décollage de cette industrie, aujourd’hui âgée de dix-huit ans, reste la prédominance d’habitudes héritées d’un autre âge, particulièrement la culture de l’endettement aussi bien auprès des entreprises qu’au niveau des acteurs du capital risque. Les entrepreneurs préfèrent toujours le financement bancaire dans le souci de maintenir une structure fermée de leurs entreprises, de type familial. De leur côté, les SICARS, dont beaucoup sont des filiales de banques, exigent souvent des garanties réelles et concentrent leurs activités sur des segments peu risqués. Des pratiques aux antipodes de leur mission première. Diagnostic.

La Tunisie a été le premier pays arabe et africain à avoir introduit l’industrie du capital risque dans les sources de financement de son économie en 1990. Naturellement, les débuts ont été très timides dans une économie d’endettement protégée. Il a fallu attendre la promulgation d’un cadre règlementaire du capital risque, la loi No 95-87 du 30 octobre 1995 modifiant et complétant la loi N° 88-92 du 2 août 1988 relative aux sociétés d'investissement, et l’ouverture économique amorcé au milieu des années 90 pour que les choses s’améliorent.

Au niveau macroéconomique, la signature de l’accord de libre-échange avec l’Union européenne et, corollairement, le renforcement de la concurrence, ont mis au grand jour l’importance des fonds propres dans la survie de l’entreprise tunisienne. Conséquence : les acteurs du capital risque se sont multipliés. Des mesures fiscales incitatives, en comparaison avec les normes internationales en la matière, ont largement contribué à cette multiplication. La loi régissant le secteur prévoit en effet des avantages aussi bien pour les souscripteurs (dégrèvement fiscal à hauteur de 35% à 100% des revenus) que pour les SICARS (exonération des dividendes et des plus values).

On dénombre actuellement une quarantaine de SICARS en Tunisie contre une quinzaine au Maroc et seulement cinq en Algérie. L’augmentation du nombre d’acteurs ne s’est pas toutefois traduite par un véritable décollage du secteur, dont la contribution à l’investissement privé n’a pas dépassé 0,5% au cours de l’exercice 2007. Cette contribution très marginale s’explique essentiellement par la prédominance de la culture de l’endettement auprès de toutes les parties impliquées.
Chez les entrepreneurs en quête de fonds, le premier reflexe reste d’emprunter de l’argent auprès d’une banque. Ce comportement est notamment motivé par la volonté de préserver le caractère familial de l’entreprise. Son impact sur l’industrie du capital risque est très néfaste surtout que 90% du tissu industriel tunisien est constitué d’entreprises familiales de type PME-PMI.

Du côté des SICARS, les pratiques "bancaires" restent monnaie courante. Les responsables de ces sociétés ne jouent pas vraiment le jeu de véritables financiers qui prennent des risques. Le secteur est en effet dominé par des SICARS bancaires. Celles-ci exigent de garanties réelles, faisant du capital risque un "produit de crédit" ordinaire et complémentaire à la dette. Cette situation est à mettre sur le compte des mesures fiscales généreuses qui ont incité toutes les banques de la place à créer leurs propres SICARS afin de bénéficier des avantages fiscaux y afférents.
La répugnance de la majorité des SICARS à financer la création de nouvelles entreprises ternit également l’image du secteur. L’écrasante majorité des sociétés préfèrent concentrer leurs activités sur des segments où les risques sont minimes. La ventilation des investissements révèle une forte réticence vis-à-vis du financement de nouveaux projets (17% de l’enveloppe investie en 2007), les investissements dans les segments de la mise à niveau et de la restructuration étant jugés moins risqués.

Un autre facteur d’ordre règlementaire explique aussi le piétinement de l’industrie du capital risques. Il s’agit de difficultés rencontrées au niveau de la sortie qui découragent souvent les entrées des SICARS dans le capital des sociétés ayant besoin de fonds propres. La sortie constitue en effet la hantise des capital-risqueurs obligés de restituer les liquidités aux investisseurs qui leur ont confié des fonds dans les délais règlementaires.
Dans la pratique, les SICARS optent dans75% des cas pour la rétrocession de leurs parts dans le capital au promoteur du projet, ce qui pose le problème des faibles retours sur investissement. Les sorties plus sophistiquées comme celles de type LMBO3 restent très rares puisque les banques tunisiennes rechignent à s’engager dans de tels montages compliqués. Une seule opération de type LMBO3 a été réalisée en Tunisie par Tuninvest SICAR en 2004. La sortie via la bourse reste encore marginale sur la place tunisienne en raison du cadre règlementaire du marché boursier exigeant pour toute entreprise qui souhaite rejoindre la cote du marché un capital minimum et la réalisation de bénéfices pour les années précédant l’introduction. D’ailleurs, c’est pour mieux baliser les sorties via la bourse que les autorités ont procédé à la création du marché alternatif permettant l’accès des PME au marché financier dans des conditions adaptées à leur taille
Toujours est il que les autorités et les acteurs du capital risque sont plus que jamais appelés à créer une nouvelle dynamique et à lancer des actions ciblées de vulgarisation des avantages du secteur (capitaux propres, conseils stratégiques, amélioration de la gouvernance) pour briser des habitudes surannées.


25/09/2008 | 1
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