
Par Amor Toumi *
A l’heure actuelle, le monde est pris dans la tourmente d’une pandémie pour laquelle toutes les autorités, y compris les scientifiques, se sentent démunies. Seules les mesures d’hygiène et de coercition semblent faire l’objet d’un consensus accepté, en raison d’une peur communicative à l’échelle planétaire. Cette contribution vise à passer en revue les quelques pistes thérapeutiques, actuellement mises en œuvre ou envisagées.
La Chloroquine et l’Hydroxychloroquine :
L’histoire de ces produits date du 17ème siècle lorsque les Européens ont découvert l’utilisation, par les habitants de la Cordillère des Andes et de l’Amérique Centrale, d’une plante (Le Quinquina) pour lutter contre la fièvre et les frissons. Les propriétés antipaludéennes de cette plante furent mises en évidence et son utilisation dans les conquêtes et guerres par les armées, françaises, allemandes et anglaises notamment, a donné lieu à des découvertes de produits de synthèse où la Tunisie a joué un rôle crucial au cours de la seconde guerre mondiale.
Pour revenir à l’actualité de ce jour et à l’utilisation de ces produits, il faudrait se rappeler que de nombreux essais ont eu lieu lors des précédentes épidémies virales telles que le Syndrome respiratoire aigu SRAS (Asie), la même pathologie similaire, le MERS (Moyen Orient) ou le ZIKA dans les Antilles.
Dès 1996, une publication a mis en évidence le pouvoir anti-inflammatoire et antiviral de l’hydroxychloroquine. Tous les essais dans les laboratoires étaient porteurs d’espoir mais dès qu’on passe à l’homme, c’est le désespoir. Cela permet de comprendre la raison pour laquelle les Chinois ont utilisé ce produit dès l’apparition du Covid-19. Cette première étude fut tout de suite relayée par le Dr Raoult d’abord sur le plan médiatique puis sur le plan clinique.
Les travaux scientifiques de l’équipe de Marseille ont été critiqués, à juste raison, par les scientifiques en France et à l’étranger. Les travaux du Dr Raoult ont pu résister à cette fronde, car il n’y avait aucune autre alternative aussi accessible de par le monde. Cette situation est mal vécue, d’autant plus que les méthodes utilisées par le Dr Raoult sont à la limite de l’éthique et de ce que permet la Science. Il semble pris dans un engrenage et qu’il procède à une fuite en avant sur laquelle, il surfe à travers une pression médiatique hors norme. L’observation des essais menés actuellement, permet de constater une différence notable entre les approches Européennes et Américaines. En effet, ces derniers font une supplémentation en Zinc (Zn), alors que les Européens n’adoptent pas cette approche. Il s’agit très probablement d’une hypothèse basée sur la capacité de la Chloroquine et l’hydroxychloroquine à fixer et à introduire les ions Zn++ dans la cellule, sachant que ce dernier présente aussi un rôle antiviral certain et un effet neurotoxique. En plus, l’augmentation du pH intracellulaire est défavorable à la pénétration du virus dans la cellule et de la « colonisation » de son génome. Quant à l’utilisation de l’Azithromycine, les hypothèses sont multiples et le plus plausible serait une protection des surinfections bactériennes ainsi qu’une interaction pour empêcher la multiplication du virus.
A l’heure actuelle nous sommes tous pris dans l’engrenage de cette approche, en attendant les résultats des essais nationaux et internationaux. L’INEA Santé (Tunisie) préconise d’ailleurs un protocole basé sur ces molécules et ce à l’instar des agences Américaines et Européennes. Ces produits doivent être utilisés dans les phases précoces et avant l’apparition de signes graves où ils deviennent inutiles sinon dangereux. Il y a lieu de signaler que ce médicament ne doit en aucun cas faire l’objet d’une automédication ni d’une utilisation sans contrôle hospitalier. L’électrocardiogramme avant et durant le traitement constitue une nécessité absolue. Il faut garder à l’esprit que la Chloroquine et ses dérivés interagissent avec les fonctions cardiaques. La Quinidine, autre parent de la même famille, a été utilisée pendant très longtemps comme anti-arythmique. Le 30 Mars, l’ANSM a déclaré qu’elle investiguait le décès de trois personnes en raison d’une suspicion d’effet indésirable cardiaque de l’Hydroxychloroquine ou de Kaletra. Des décès ont été également déplorés dans d’autres pays. En conclusion de cette approche et faute de mieux, ces produits devront être utilisés sous un contrôle hospitalier strict, en attendant les confirmations scientifiques.
Les antiviraux :
Le premier sélectionné fût le Remdesivir qui a été utilisé pour le traitement de l’Ebola sans beaucoup de succès puis testé contre d’autres coronavirus impliqués dans le SRAS et le MERS. C’est un produit qui nécessite de subir des transformations dans l’organisme pour développer son action (prodrug). Sa structure fait qu’il est confondu avec les produits nécessaires à la réplication du virus empêchant ainsi sa multiplication. Utilisé dans certaines formes graves de la présente pandémie il a donné certains résultats. D’autres experts, notamment Américains, le contestent. Sur le plan accessibilité, il est impératif que le laboratoire Gilead abandonne ses droits sur ce produit. L’implication de l’OMS dans l’essai clinique constitue un premier pas, dans ce sens.
L’association Lopinavir/Ritonavir commercialisée sous le nom de marque Kaletra utilisée dans te traitement du SIDA. Cette association montre une activité non encore confirmée sur le virus. L’association avec l’interféron béta semble donner de meilleurs résultats. Il est à noter que le Laboratoire Abbvie qui détient le brevet du Lopinavir/Ritonavir vient de l’abandonner permettant une mise en œuvre plus facile de la recherche et éventuellement une meilleure accessibilité si les résultats s’avèrent probants. D’ailleurs je ne pense pas que les pays respecteront cette clause si demain un nouveau médicament est découvert.
D’autres antiviraux sont à l’heure actuelle testés par des laboratoires de par le monde ainsi que par des start-up. Pour ces futurs produits le chemin est encore long et se compte en années et non en mois
En matière d’essais clinique pour ces deux catégories de produis (Hydroxychloroquine et antiviraux), deux études de confirmation sont actuellement menées. « Discovery » pour les Européens (essai ouvert sur 3200 malades) et Solidarity, pilotée par l’OMS (Plusieurs milliers de malades). Les produits testés sont les mêmes à savoir le Remdesivir, le Lopinavir associé au Ritonavir seuls dans un groupe et associés à l’interféron Béta dans un autre groupe et l’Hydroxychloroquine/ Azithromycine. Les résultats seront disponibles dès la mi-avril.
La Colchicine :
C’est également un médicament d’origine naturelle utilisé dans certaines pathologies, notamment la goutte ainsi que dans les inflammations articulaires et cardiovasculaires. L’hypothèse de base de cette étude repose sur l’observation du passage à la phase grave de l’atteinte. En effet, lorsque la situation s’aggrave, il a été constaté un emballement du processus inflammatoire au niveau pulmonaire qui précipite le patient dans une situation non maitrisable et souvent fatale (Cytokine storm).
Par ailleurs, ils ont jugé que les enfants sont moins vulnérables que les adultes car ils peuvent développer des mécanismes qui leur permettent de freiner cette réponse inflammatoire. Le choix de ces chercheurs s’est alors porté sur la colchicine pour son pouvoir anti-inflammatoire puissant. De plus, elle inhibe la formation du squelette de la cellule, empêchant ainsi la multiplication du virus. Cette étude (COLCORONA), fort sérieuse, a débuté le 23 Mars 2020 sous la direction du Pr Jean Claude Tardif. Elle bénéficiera d’un financement du gouvernement Canadien et sera réalisée en double aveugle sur des malades ambulatoires (ni le malade ni l’expérimentateur ne savent qui prend la colchicine ou qui prend un produit sans effet/ placébo). L’étude portera sur 6000 patients Covid+ âgés de plus de 40 ans, avec des critères d’inclusion stricts. Les résultats sont attendus pour fin avril.
Consolidation et sollicitation du système immunitaire :
La thérapeutique à ce niveau repose sur deux phénomènes : soit on donne des anticorps au patient pour lutter contre l’intrus viral, soit on permet au corps lui-même de fabriquer des anticorps en lui administrant des antigènes capables de faire faire fabriquer des anticorps par l’organisme et neutraliser ainsi le virus. Des fois, ces deux approches sont jugées complémentaires : donner des anticorps pour une protection immédiate, le temps que le corps soit capable de fabriquer ses propres anticorps à la suite de l’administration du vaccin.
A ce jour, et en matière d’utilisation de sérum, seuls les Chinois et les Américains ont concrétisé cette approche que les Belges avaient évoqué, mais sans suite publique. Les Chinois ont procédé à cette expérimentation sur 13 patients à un stade très avancé de la maladie. L’amélioration a été spectaculaire au départ, mais l’état des sujets s’est détérioré par la suite. Les scientifiques pensent que cette utilisation, par les Chinois, fût tardive et à un stade trop avancé de la maladie. Au cours de la semaine du 22 Mars, la FDA américaine a autorisé l’utilisation de sérums de malades convalescents dans le cadre des essais cliniques sur différents groupes de sujets (stade avancé et stade précoce). Par ailleurs, des chercheurs Chinois viennent de déclarer qu’ils sont en voie d’isoler des anticorps capables de s’opposer à l’entrée du virus dans la cellule et l’empêcher de l’infester.
La vaccination porte les plus grands espoirs de l’humanité. Tous les grands laboratoires spécialisés dans le domaine sont dans la course. Personnellement, je ne partage pas l’avis de la majorité des scientifiques. Je suis persuadé qu’un produit sera disponible à l’automne prochain. Certains laboratoires, de grand renom, ont déclaré qu’ils allaient entamer des essais cliniques et ont sélectionné les structures hospitalières pour mener ces premiers essais dans les prochains jours. Ceci permet d’être optimiste sur la disponibilité future de ces produits.
Conclusion
Cette revue ne peut se prévaloir de son exhaustivité et ne présente que les principales pistes à suivre. D’autres voies apparaissent tous les jours comme l’utilisation de l’hémoglobine de vers marins pour améliorer l’oxygénation des patients. Ce document est destiné à présenter le cadre de base pour les prochains résultats qui seront diffusés au cours des prochaines semaines. Il faudrait que nos autorités, ainsi que nos opérateurs tels que nos fabricants locaux de médicaments et la Pharmacie Centrale de Tunisie fassent, dès maintenant, des réserves en ces produits ou leurs intrants pour éviter d’être pris de court lors de la ruée qui ne manquera pas de se produire à l’annonce des résultats préliminaires. A ma connaissance, notre approche sur l’hydroxychloroquine est bonne et permettra de faire face à tout résultat. Se positionner et prendre ses précautions sur les autres produits disponibles est impératif. Dans ces situations une perte d’argent est insignifiante face au risque de pénurie.
Sur un autre plan, il est impératif que la communauté internationale pèse de son poids pour éviter les prix excessifs ainsi que les monopoles conférés par les brevets sur les médicaments futurs contre le Covid-19 ainsi que les réactifs de diagnostic de cette pathologie.
* Pr Amor Toumi :
Professeur de Pharmacologie
Membre correspondant de l’Académie Française de Pharmacie
Président de la Société des Sciences Pharmaceutiques de Tunisie

C'est l'une des pistes les plus importantes qui doit se dérouler en dehors de la pandémie. D'ailleurs il est dit dans le texte que dans l'hypothèse la plus optimiste les vaccins ne seront sur le marché qu'en automne
Pour ce qui concerne la Colchicine il serait rébarbatif pour les lecteurs de rentrer dans ces explications, toutefois pour les personnes intéressées la recherche sur internet leur donnera des explications (mots clefs: microtubule, colchicine, mitose et squelette cellulaire)
"lorsqu'on donne un vaccin à un personne dont le corps est déjà affaibli par la MALADIE. . ."
Merci
Dans le cas de la pandémie par le covid 19, la traitement par l'hydroxychloroquine semble le plus efficace dans le traitement du virus,de plus nous avons suffisamment de recul pour optimiser son utilisation et éviter autant que possible les effets secondaires. j'ajouterai que nous n'avons pas le temps d'essayer de nouvelles molécules, il y a déjà une qui soigne, qui est utilisé dans la plus part des pays du monde et il faut s'en servir !
En téléconsultation, à distance :
'?' Signes de détresse respiratoire :
'?' Demander à voir le patient torse nu, et regarder la manière de respirer,
'?' Recherche de signes de cyanose des extrémités (visualisation des mains),
'?' Recherche de signes de polypnée / dyspnée d'effort : signes respiratoires pendant la
discussion (essoufflement, difficulté à finir ses phrases sans pause),
'?' Si la téléconsultation est accompagnée (EHPAD, IDE à domicile, pharmacie et sous
condition de mesures de protection adéquate de l'accompagnant) il peut être
demandé :
- La fréquence respiratoire : signe de gravité si >22/min
- Si on dispose d'un saturomètre digital : une OXYMETRE de pouls (SpO2) : signe
de gravité si < 90% en air ambiant
'?' Une pression artérielle systolique : si le patient dispose d'un brassard, demander la tension
Mes lectures indiquent que c'est un suivi post diagnostic
Prière consulter Le protocole INEAS et le document de la France sur la prise en charge des patients Covid 19 en ville
Toutefois mes lectures indiquent que les mesures relatives à l'oxygène sont post diagnostic
Vous pouvez consulter à cet effet le protocole de l'INEAS et celui du Ministère Français de la solidarité (Prise en charge des patients Covid-19 en ville)
Je ne suis pas clinicien toutefois mes lectures indiquent que cette approche est post diagnostic
Je vous joins un lien qui vous confirme cela
A l'instant vient de tomber une dépêche annonçant le début d'un essai avec le BCG le 6 Avril en Australie et qui va durer plusieurs mois. L'OMS aurait encouragé cette initiative. Pour ceux qui veulent approfondir la question voici le lien:
https://www.biospace.com/article/-can-an-old-tuberculosis-vaccine-work-against-covid-19-/?utm_campaign=GenePool&utm_source=hs_email&utm_medium=email&utm_content=85597300&_hsenc=p2ANqtz-8bhIgW0rIKFr-mOPB0d5fDelxgb1JNRa5wtrLiakKHGdzyXo_3_RD462e_kRMqdAGmtjOfSSu_BYQyiSwtmmgPYVQkEw&_hsmi=85597300
Merci de la réponse.
Toutefois, le mot OXYG'?NATION dans la conclusion pour solliciter votre gentillesse pour me dire s'il est possible devant l'absence d'un dépistage généralisé, est-il possible de faire usage d'un oxymetre comme moyen de dépistage rapide:
Confrontation du tau d'oxygène dans le sang avfv la température et le rythme cardiaque.
Merci encore une fois.
J'avais entendue cette histoire de sang du vers marin !
Maaaazeette ,j'ai pas du tout envie de tomber malade !
Bonne chance les chercheurs
Les praticiens qui ont l'habitude de prescrire ces médicaments prennent des précautions particulières et pratiquent un électrocardiogramme avant et pendant le traitement
Ce produit donne d'autres effets indésirables (comme tout médicament ) mais qui apparaissent lors des traitements au long cours
D'ailleurs le Dr Raoult ainsi que les autres expérimentateurs pratiquent un ECG avant la mise en '?uvre du traitement (J0) et deux jours après (J2)
Alors pourquoi on l'exige aux personnes atteintes de la Covid-19 ?
Merci d'expliquer !

