
La crise du coronavirus comporte plusieurs dimensions pour lesquelles des groupes de travail doivent être formés afin d’engager des réflexions profondes sur notre présent et notre proche avenir.
A l’heure actuelle, nous observons une focalisation majeure sur les aspects sanitaires ainsi qu’une communication réelle mais déprimante du nombre de personnes Covid-19 positives et du nombre de décès sur le territoire national et à l’échelle planétaire. Cette information, ajoutée au confinement, crée un désarroi terrible et pourrait avoir des conséquences terribles sur les plans psychologique et comportemental. Notre population, quelle que soit la tranche d’âge considérée, perd ses repères et son cadre de défoulement et/ou d’épanouissement. Le travail et les loisirs qui remplissaient ces fonctions ont disparu provoquant dépression et désarroi. Le suicide du ministre Allemand des finances (Région de Hesse) à l’âge de 54 ans, marié et père de deux enfants, doit nous inciter à prendre en considération ces phénomènes.
Que faire ? Voila une question que ne cessent de se poser les uns et les autres depuis des lustres. Devons nous faire part de perspectives à nos citoyens afin qu’ils puissent s’y préparer, en discuter et accepter les consensus sociétaux ? Pour l’anticipation sur les situations futures représente une obligation pour nos élites et nos penseurs. Notre population a le droit d’espérer et d’avoir une visibilité sur son avenir proche afin de s’y adapter et de s’impliquer. Oui nous avons le devoir pour chaque situation d’anticiper pour le bien de tous. Dans ce but quelques réflexions me viennent à l’esprit :
1- Centraliser les décisions : L’initiative du Gouvernement d’obtenir les pouvoirs pour gérer la présente situation est à saluer. Avec tous mes respects pour le pouvoir législatif, il ne constitue pas un cadre de décisions car trop divisé et il ne peut assumer des responsabilités dont il n’est pas redevable. Pour une fois qu’une instance assume ses prérogatives laissons lui le champ nécessaire et nous pourrons par la suite lui demander des comptes. Nous avons tous convenu qu’il s’agit d’une guerre. Donc acceptons la stratégie liée à cette déclaration qui nécessite un Général entouré de collaborateurs disciplinés. Ne pas accorder cette prérogative au gouvernement hypothèquera lourdement nos chances de succès.
2- Créer des cadres de réflexion : La Tunisie regorge de compétences à tous les niveaux et il est nécessaire de les impliquer sans tenir compte de leurs idéologies ou de leur appartenance politique. Dans ce cadre il est important que nos décideurs s’entourent de groupes de réflexions spécialisés parmi lesquels nous pouvons citer :
- Un groupe de travail qui étudie les impacts sociaux et économiques des décisions touchant l’ensemble de la population. A titre d’exemple, nous pouvons citer la décision de confinement de la population. La durée de cette période est importante à prendre en considération. En effet le citoyen acceptera une période qui se compte en jours ou en semaines mais, en aucune manière, à celle qui se compte en mois. Le travail constitue une source de revenu mais aussi un cadre d’épanouissement dont la valeur est immense. D’autre part, la Tunisie est basée sur la classe moyenne et sur un commerce informel important dans certaines régions. De nombreuses familles vivent au jour le jour et ne peuvent assumer une longue période d’inactivité. Certaines personnes commencent à dire qu’elles ont « moins de chance de mourir du corona que de mourir de faim ». Notre tissu économique dont la survie est liée à la durée du confinement agira, à juste titre, de concert avec ces mouvements populaires en voyant les entreprises tomber une à une. Ce cri de révolte risque d’emporter les bénéfices des sacrifices que nous faisons aujourd’hui. Imaginer des scénarii qui tiennent compte du contexte sociodémographique et économique de la Tunisie avec des réponses claires et précises sera un des outputs majeurs de cette commission. Le soutien social aux franges les plus exposées de notre population devra être mis en œuvre (un plan Marshall local) ou encore un confinement uniquement pour les personnes à risque…
- Une commission de réflexion sur l’après confinement : Il est certain qu’il y’aura un après Covid-19 où notre quotidien et nos relations seront différents de notre vécu avant cette crise. Rappelez vous les conséquences de l’après Septembre 2001 et ce n’est absolument rien à côté de ce qui nous attends demain. La mondialisation continuera-t-elle à être la règle dans le système international. Toutes les instances internationales sont impliquées d’une manière ou d’une autre dans cette crise à l’exception de l’OMC, pourquoi ? Le poids de la dette et la création d’un front pour éviter que les Etats ne tombent en faillite, devra faire l’objet d’initiatives (non conflictuelles) auprès des instances donatrice nationales, régionales ou internationales. D’autre part le rôle de l’Etat et des secteurs stratégiques doit être repensé pour que notre futur économique et social repose sur des fondements beaucoup plus solides conférant aux structures publiques un rôle qui leur permet d’accompagner les besoins de la population. Sur un autre plan, une fois qu’on atteindra l’étape des cas sporadiques de Covid19, comment réagirons-nous face à quelqu’un qui tousse dans un avion ou dans un transport en commun? Aurons-nous peur des milieux confinés (théâtres, cinémas) et des lieux de regroupements (stades, discothèques…). Vous pouvez laisser cavaler votre imaginaire et vous verrez que les situations sont multiples et fort préoccupantes.
- Une commission d’accompagnement des stratégies et des besoins sanitaires: Si les décisions dans ce secteur doivent émaner du ministère de la santé, il est important de créer un groupe de travail formé de personnalités indépendantes et scientifiquement reconnues pour donner un point de vue sur les grandes décisions mais également anticiper sur les autres problèmes sanitaires et de disponibilité des produits de santé qui risquent de surgir pendant cette période. Ce groupe de travail ne doit en aucun cas avoir une visibilité publique ni faire valoir ses positions par rapport aux décideurs. Il doit être ouvert à des compétences nationales en matière d’éthique et de logistique. C’est une guerre sectorielle, qui est menée par le ministère de la santé, et il ne doit y avoir qu’un seul décideur: le Ministre sous l’autorité et le contrôle du Président du Gouvernement.
3- Développer une communication adaptée: Les médias ont un rôle essentiel à jouer durant cette période. Ils doivent positiver leurs approches et éviter d’ajouter de l’angoisse au vécu du citoyen. Durant cette période le discours des intervenants doit adopter un ton serein et tout autre attitude sera suivi par une déprime aussi contagieuse que le Covid-19. Le risque de panique est réel si on ne se rappelle pas que la population est confinée et n’a d’autre choix que de regarder la télévision ou surfer sur les réseaux sociaux. Les programmes doivent tenir compte du fait qu’à toute heure toutes les tranches d’âge regardent les mêmes programmes et que les sensibilités sont variables. A ce niveau le professionnalisme doit être de rigueur et si tout va bien, nous aurons le temps de faire le buzz après la guerre.
Cette modeste contribution est partagée en vue d’être enrichie par le génie créateur des Tunisiens afin d’en faire un cadre de soutien à nos décideurs.
Pr Amor Toumi
Cadre de la Santé à la retraite et
Ancien Haut Fonctionnaire de l’OMS

Gérer l'humain complexe de notre quotidien de confinés sans panique mais sans désinvolture. Avons nous pensé aux ouvriers du bâtiment originaires de pays d'Afrique Subsaharienne? Comment gérons nous les réfugiés ?
Le monde après la pandémie sera certainement différent de celui que nous avons connu ... d'autres valeurs réapparaîtront ? Quel sens donnerons nous à la solidarité ?
La nouvelle place de l'Etat après la pandémie ? Fini le temps de l'Etat steward et réapparition de l'Etat opérateur à travers ses structures publiques, tant décriées chez nous.
L'anticipation nous permettra d'être proactifs.
MERCI en espérant que votre essai soit enrichi par diverses compétences et qu'il éclaire nos gouvernants.
Il aurait dû anticipé depuis l'apparition de la BACT'?RIE EN CHINE..
Mais il a fait les yeux doux à Xi Jinping...