alexametrics
mardi 06 mai 2025
Heure de Tunis : 07:45
A la Une
La Tunisie sur les pas de la Corée du Sud pour sortir le pays de la corruption
05/09/2016 | 19:59
5 min
La Tunisie sur les pas de la Corée du Sud pour sortir le pays de la corruption

Clientélisme, pots-de-vin, favoritisme, appât du gain, subornation des autorités…la Tunisie ne s’oriente plus vers l’appellation d’«Etat mafieux » mais l’est déjà. Le gouvernement de Youssef Chahed validé et composé, voici venir l’étape décisive et historique de l’application des priorités de Carthage et plus précisément dans son point numéro 2 appelant à lutter contre le fléau endémique de la corruption, priorité que le chef du gouvernement appelle grandement de ses vœux. .

 

Il ne s’agit donc plus d’une simple déclaration d’intention mais du commencement d’un combat qui s’annonce rude, austère, acharné mais indispensable. Il sera mené en collaboration avec le Programme des nations-unies pour le développement (PNUD) et le Réseau arabe pour la promotion de l’intégrité et de la lutte contre la corruption (ACINET). L’instance nationale tunisienne de lutte contre la corruption (INLUCC) présidée par Chawki Tabib se trouvera ainsi mieux équipée pour y faire face.

C’est à cet effet qu’un atelier d’experts provenant de 20 pays a été organisé ce lundi 5 septembre 2016 à l’hôtel Mouradi Gammarth à Tunis. Des délégations provenant du ministère de la Fonction publique, de la Bonne Gouvernance et de la Lutte contre la Corruption, des juges, des diplomates, des professeurs universitaires et des membres de l’INLUCC mais aussi d’autres délégations venant des 4 coins du monde venues partager leurs expériences et leurs connaissances sur ce sujet épineux. Ainsi, la Palestine, les Etats-Unis, le Liban, l’Arabie Saoudite, le Maroc, le Yémen, la France mais aussi et surtout la Corée du Sud qui détient un fort potentiel en matière de lutte effective contre la corruption. Les instances telles que (entre autres)  l’UNESCO, le Haut-commissariatdes droits de l’homme et l'Agence de Coopération Internationale Allemande pour le Développement (GIZ) étaient également représentées. Tour à tour, ces experts ont pris la parole pour donner leurs visions sur la meilleure stratégie à mettre en place pour lutter efficacement contre la gangrène de la corruption. Avec des traducteurs à l’arrière de l’assemblée et des écrans géants juste en face, les concepts suggéréspour lutter contre la corruption ont été mis en lumière. Les représentants d’Etat ont évoqué les méthodologies des stratégies nationales de leurs pays, les plans de communication à élaborer, les outils adéquats, la nécessité d’un nouveau pacte social et l’importance des budgets à allouer.

 

Souheil Kaddour, enseignant chercheur en droit et membre du Centre Tunisien de Gouvernance d’Entreprise (CTGE), qui a tenu le rôle de modérateur durant l’assemblée des experts, a mis l’accent sur l’importance primordiale de l’implication de la société civile en matière de lutte contre la corruption. Repris par le représentant de la délégation américaine, ce point essentiel a été longuement discuté. Le modérateur a déclaré : « Le réel impact de l’exercice de lutte contre la corruption est possible mais difficile à atteindre, pour changer le comportement des citoyens il faut d’abord changer la culture du service public. La petite corruption de certains fonctionnaires est différente de la grande corruption qui, elle, est endémique. Pour obtenir un réel changement, il faut que toutes les couches de la société soient impliquées ».

L’apport de la Corée du Sud sur ce sujet a été longuement débattu. Le pays inspirait déjà, Kamel Ayadi, ministre sortant de la Fonction publique, de la gouvernance et de la lutte contre la corruption qui avait rencontré, le 27 mai dernier, le ministre sud-coréen de la gestion des ressources humaines, Lee Joon Yoon pour s’inspirer de l’expérience sud-coréenne en matière de bonne gouvernance de la fonction publique.

A noter que le ARCACT ou Anti-corruption and Civil Rights Commission est un système de protection des dénonciateurs mise en place en Corée du Sud pour encourager la dénonciation des actes de corruption et leurs transmissions à une instance chargée d’incriminer les personnes en question sans crainte de représailles pour ceux qui les divulguent. Par cette stratégie, la Corée du Sud entend inciter sa société civile à participer le plus possible à sa politique de lutte contre la corruption. Durant l’atelier d’experts, cette méthode a été décortiquée sur écran géant. Comme l’a déclaré l’intervenant sud-coréen : « Nous entendons par cette méthode, motiver les individus sous un aspect de volontariat en faveur de l’intérêt supérieur de leur pays ».

La méthode qui s’applique sur l’ensemble du territoire de la Corée du Sud s’applique dans les provinces du pays, dans les hôpitaux mais aussi dans les universités. En tout, 266 agences servant de relai de l’Etat et chargée de réguler la stratégie de lutte contre la corruption.

 

Cette méthode sous-entend que des rapports détaillés sur l’avancement de cette politique soient mis à la disposition du public. L’idée pourrait s’appliquer en Tunisie et implique qu’un budget suffisant soit alloué en sa faveur pour qu’elle soit effective.

En Tunisie, pour le moment, ce qui est mis à la disposition du public c’est ce numéro vert : le 80 10 22 22 destiné au public pour dénoncer les actes de corruption au quotidien. A travers cette initiative, l’instance tunisienne tente de sensibiliser les citoyens sur l’impact négatif de la corruption. Le chef du gouvernement, Youssef Chahed, a de son côté indiqué que 10 instances régionales devraient voir le jour d’ici fin 2016. Lors de son discours à l’ARP, ce dernier, avait annoncé que le rôle de l’INLUCC devait être renforcé sur plan humain et matériel.

 

Autres aspects discutés durant le panel des experts, sont la sensibilisation des hommes d’affaires et des entrepreneurs pour contrer la corruption rampante mais aussi et surtout le respect de la primauté de la loi. Cette primauté nécessite une réactualisation des textes de lois qui doivent mis en conformité avec les Conventions signées par la Tunisie comme la Convention des Nations-Unies contre la corruption par exemple.

Lutter contre l’impunité est donc avant tout une affaire de mentalité et le citoyen tunisien est placé au centre des méthodologies discutées pour les intervenants sud-coréens comme pour les intervenants américains, marocains et francais. C’est avant tout l’intelligence et le choix de l’honnêteté du citoyen qui permettront de faire reculer la corruption et de panser les séquelles que ce fléau cause à la Tunisie.

Comme l’a déclaré Souhei lKaddour, reprenant les propos de l’écrivain américain Francis Scott Fitzgerald : « Le propre de l’intelligence, c'est de pouvoir poursuivre deux raisonnements à la fois : comprendre que les choses sont désespérées et vouloir les changer quand même."


Khawla Hamed

 

 

05/09/2016 | 19:59
5 min
Suivez-nous

Commentaires (28)

Commenter

hakim
| 10-09-2016 23:26
Primo au niveau du diagnostic, le fait de dire"La petite corruption de certains fonctionnaires est différente de la grande corruption qui, elle, est endémique." et de s'accorder sur cette realité permettra de soutirer le tapis de sous certains réseaux mafieux appuyés par des média pour focaliser la problématique autour de certaines pratiques à dénoncer certes mais qui ne représenteraient plutôt des signes d'un manque de savoir vivre ou de faiblesse mentale et pschychique( demander 2dt, demander le prix d'un kg de Zlabia, utiliser le véhicule admin pour transporter son couffin de pastheque ....).
Le plus grave c'est les tricheries copieusement ficelées à 2 niveaux:
1-au niveau des textes, des documents, des procédures, des modalités de réalisation des achats, des lobbying et le jeu virtuel de respect de la concurrence.....
2-au niveau des nominations et des positionnements des acolytes du systeme mafieux dans des postes nevralgiques travaillant en réseau . Un systeme qui sait placer ses avant-centres et ses distributeurs de jeu au niveau de postes clés: juridique, audit, achat, missions à l 'étranger, tresorerie, comptabilité, finance,postes de grands travaux techniques,....
Comment frapper le système avec le plus de celerité avec le moindre cout et avec garantie de plus de perennité?
tout simplement â travers l'implication des hauts cades( à élire democratiquement par leurs collégues sur la base de criteres d'integrité et de connaissance operationnelle et strategique des rouages de leur entreprise ou admin) une implication dans le systeme de gouvernance( les conseils d'admin, les directoires....)
avec pour mission:
-veiller sur la mise en place effective de systeme de bonne gouv
-Assurer le niveau adequat de diffusion de l'information et de transparence.l'ére du big data doit sonner toutes les cloches.
_Demander les operations d'audit quant necessaire
-Suivre la mise sur intranet à la portée de tout le personnel des documents relatifs à toutes les commandes.
Il faut bien noter que cette disposition d'implication de salariés est bien prévue par la loi et est en application dans bcp d'organisations qui se respectent.

Tunisien
| 06-09-2016 19:38
Sur les pas de la Corée du Nord w chouf w chouf... :)

Citoyen_H
| 06-09-2016 19:07

Avant qu'on prenne exemple sur la Corée du sud, il serait plus judicieux qu'on commence par copier les Coréens du nord.

Il faudrait déjà commencer par apprendre à marcher, avant de se mettre à courir.
Salutations.


observator
| 06-09-2016 18:38
Quand je dis Bourguiba je veux dire son système mis en place sous sa direction donc je ne pense pas être hors sujet.
Le résultat aujourd'hui est un pays sous-développé et corrompu. Bref.

Himar
| 06-09-2016 18:00
« A la télé ils disent tous les jours: 'Y a trois millions de personnes qui veulent du travail.' C'est pas vrai: de l'argent leur suffirait. »
Coluche

HatemC
| 06-09-2016 16:50
La Valeur Travail n'a plus aucun sens en Tunisie malheureusement ...

Je ne comprends pas non plus autant que vous cet acharnement pour salir la mémoire de Bourguiba ... mais ces gens sont connus ... soit Islamiste soit du CpR ...
Alors que Bourguiba a hérité d'un pays sans institutions et avec un peuple sous éduqué et arriéré ...

Il a posé les bases d'un pays moderne @ générations futurs de capitaliser et améliorer ...
Un pays ne se développent qu'avec un apport additionnel des générations sans dénigrer ... ce que semble oublier ces sociopathes ... Bourguiba ne pouvait pas non plus arrimer tout le pays ... en si peu de temps ... c'est sur des années qu'un pays se construit ... il a fait des erreurs ... qui n'en fait pas ... mais notons que cet observator devrait remercier la génération de Bourguiba autrement il serait sous une tente ... Bourguiba s'est entouré de grand homme et femme ... pour ne citer que Hedi Nouira ... HC

Himar
| 06-09-2016 16:45
les arabes veulent lutter contre la corruption ! ça passe pas même pour Himar. L'Arabie Saoudite, le Liban, le Maroc, des pays où la corruption commence en se levant tôt le matin et continue jusqu'au lendemain matin. Qui va croire ?

mounir
| 06-09-2016 15:37
Pourquoi aller jusqu'en Corée. Nous avons notre expérience Tunisienne . Après 13 ans de pouvoir, Ben Ali a pu faire de la Tunisie pratiquement le pays le moins corrompu du tiers monde selon le classement de Transparency international http://www.transparency.org/research/cpi/cpi_2000/0/. Il a même voulu pousser les choses plus loin en s'attaquant à l'institution la plus corrompue à savoir la police ( souvenez-vous des mots qu'il a prononcé: Khammous et Achour faisant allusion aux billets de 5 et 10 dinars que les agents demandent aux automobilistes ). Après cela, il a laché et... keskeslou yarjaa laslou la corruption a repris de plus belle et depuis 2000 la Tunisie ne cesse de dégringoler dans le classement de Transparency international. Le classement de 2016 va sortir dans quelques semaines et c'est certain, nous allons perdre quelques places. Alors arrêtons de diaboliser, regardons comment Ben Ali a pu arriver à un tel résultat et faisons la même chose

pit
| 06-09-2016 15:35
...et agissons peu (ou pas)...nous avons foutu en l'air 6 ans sans avancer d'un poil...ah oui! nous avons gagné la liberté...d'être cons!!!

why
| 06-09-2016 15:02
@observator: Votre haine viscérale de Bourguiba est incompréhensible et Hors Sujet. On parle ici du cas Coréen. Quand je dis que la Corée en 53 était un des pays les plus pauvres, ceci veut dire implicitement qu'ils étaient plus pauvre que nous. Leur "chance"ou pour plutôt leur moteur était bel et bien de reconstruire après la guerre. Pour tout reconstruire, il fallait repartir de 0 mais aussi bosser comme des fous.
Là où j'admets que mon premier commentaire omettait (sciemment ou pas), c'est que la pensée confusionniste faite de respect des ordres, de respect de l'ancien et de la hiérarchie a bien aidé à industrialiser le pays à marche forcée.

@HatemC: oui, j'ai oublié de le noter. Mais bon, en un commentaire difficile de résumer l'histoire moder ne de tout un pays... Mais je suis d'accord de l'effet de la dictature éclairée mais je suis aussi conscient qu'avec une remise à plat complète, un cassage du rôle omnipotent de l'UGTT et la remise au goût du jour de la valeur travail et du dhra3ek ya 3allef, on pourra s'en sortir tout en restant dans le même régime démocratique. Mais bon, vu les reculades qui se suivent, vu les incompétents au pouvoir (de tous les bords), la sortie de crise: existentielle, morale, économique etc. n'est pas pour demain...